Le président de Chypre est élu au suffrage universel selon un système à deux tours, similaire au modèle français ; si aucun candidat ne recueille plus de 50 % des voix au premier tour, un second tour est organisé entre les deux premiers candidats. Cette élection marque la fin des deux mandats du président conservateur sortant, Níkos Anastasiádis (DISY, centre-droit).

  • Tensions Nord-Sud. La campagne électorale a été dominée par des questions de corruption, l’inflation (7,9 % en décembre 2022 en glissement annuel), l’immigration irrégulière et l’impasse du processus de paix avec la partie Nord de l’île. Les négociations de paix entre les deux communautés sont au point mort depuis l’échec du plan de paix Annan, rejeté en 2004 à 76 % par la communauté grecque de Chypre. La victoire d’Ersin Tatar, personnalité turque en faveur de la partition de l’île, au poste de président dans l’entité séparatiste en 2022, porte un coup supplémentaire aux efforts de réunification.
  • La surperformance dAndréas Mavroyiánnis, soutenu par le parti de gauche AKEL (gauche radicale, the Left). Mavroyiánnis était considéré comme un outsider par les sondages d’opinion, crédité de seulement 20 % à 25 % des suffrages. Il se trouvait ainsi en troisième position derrière Avérof Neofýtou, le candidat officiel du parti de centre-droit DISY. Il a finalement réussi à se hisser au second tour en recueillant 29,6 % des suffrages, contre 26,1 % pour Neofytou. 
  • Le pari réussi de Khristodoulídis. Le candidat indépendant de centre-droit a été en tête des sondages tout au long de la campagne (crédité de plus de 30 % des voix), bien que sur une tendance à la baisse dans les dernières semaines. Il aura ainsi réussi à se présenter comme le candidat capable de dépasser le clivage politique pour se poser comme garant de l’unité de la Nation en réunissant plus de 32 % des voix au premier tour. Les sondages d’opinion de second tour donnent une large avance à Khristodoulídis, crédité de près de 70 % des intentions de vote. Ce dernier a réussi sa campagne en adoptant une ligne dure concernant la division du pays et en s’opposant à l’idée d’une Chypre réunifiée binationale.
  • L’échec d’Avérof Neofýtou. Avec seulement 26 % des voix, le candidat officiel du centre-droit n’a pas réussi à se qualifier au second tour. Les sondages d’opinion ont pourtant placé Khristodoulídis au second tour tout au long de la campagne. Ce dernier, qui bénéficiait du soutien de son parti, avait été publiquement soutenu par le président sortant Níkos Anastasiádis. Sa candidature a toutefois été éclipsée par celle de Khristodoulídis, qui a constamment maintenu une avance de près de 10 points dans les sondages.
  • Une poussée de l’extrême-droite ultra-nationaliste avec la surperformance de Christos Christou (ELAM). Avec 6,1 % des suffrages, le candidat d’ELAM a sur-performé par rapport aux sondages (qui le créditaient de moins de 5 %), arrivant en quatrième position. L’extrême-droite a également gagné en fréquentabilité : le candidat favori, Khristodoulídis, a refusé lors d’un débat la veille des élections d’exclure la possibilité d’unir ses forces avec n’importe quel parti — y compris avec Elam.
  • Une participation stable. Sur les 561 000 Chypriotes appelés aux urnes, plus de 400 000 se sont déplacés pour voter, soit un taux de participation de 72,05 %. La participation est stable par rapport à l’élection présidentielle de janvier 2018, où la participation avait atteint 71,88 % au premier tour et 74 % au second.