Xi Zhongxun : « Le peuple devrait être autorisé à parler ! »
Ce qui se passe en Chine aujourd’hui est inédit depuis Tiananmen. En plusieurs endroits du pays, une population excédée désobéit, résiste à la politique zéro Covid de Xi. Au milieu de cet embrasement, un article de son père refait surface, partagé en masse par les utilisateurs de WeChat — avant d'être retiré du réseau en seulement quelques minutes.
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- Le Grand Continent •
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Xi Zhongxun (习仲勋,1913-2002), père de Xi Jinpijng, était un membre éminent du Parti communiste chinois. Il a été l’un des principaux fondateurs et dirigeants de la base révolutionnaire du PCC dans le Shaanxi, et a longtemps participé au gouvernement depuis la fondation de la RPC en 1949.
En avril 1959, il devient vice-Premier ministre et secrétaire général du Conseil d’État et est chargé du travail exécutif du Conseil d’État. Il a été secrétaire du 11e comité central du Parti communiste chinois, membre du bureau politique et secrétaire du 12e comité central, et vice-président du comité permanent des 5e et 7e congrès nationaux du peuple.
Sur la question de la démocratie et de la voix du peuple, Xi Zhongxun avait une position un peu différente des autres cadres du Parti, qui fait écho au changement de paradigme qui est peut-être en train de se produire en Chine.
Depuis quelques semaines, les protestations publiques à l’encontre de la politique zéro Covid de la Chine témoignent d’un épuisement des populations qui s’est transformé en véritable embrasement. Des protestations des employés de Foxconn à Zhengzhou, aux cris de colère des étudiants dans de nombreuses villes de Chine après l’incendie à Urumqi jeudi dernier, les images de ces incidents perturbent profondément la route tracée par Xi Jinping depuis la clôture du 20e Congrès du Parti.
La colère des Chinois passe aussi par les caisses de résonance que sont les réseaux sociaux. Weibo et WeChat sont devenus les canaux privilégiés des utilisateurs chinois, jeunes, qui ne se cachent pas pour partager ouvertement leur exaspération contre la politique de santé du pays. En réponse, le PCC supprime frénétiquement tout article ou vidéo qui viendrait remettre en question la fréquence des tests PCR ou encore les confinements à répétitions que doivent subir les populations depuis des mois.
Pour autant, la population ne se décourage pas. Toutes les opportunités sont bonnes pour tourner en satire, par le biais de vidéos ou articles humoristiques, les aspects les plus absurdes de la politique zéro Covid du pays.
Forme de pied de nez ultime contre la politique sanitaire de Xi Jinping, un article de la vie de son père refait surface et est partagé en masse par les utilisateurs de WeChat, avant d’être retiré en seulement quelques minutes des réseaux pour « non-respect des conditions d’utilisation de la plate-forme ».
Dans ce rapport de 1979, Xi Zhongxun revient sur l’affaire Li Yizhe (李一哲). Li Yizhe est le pseudonyme de trois jeunes révolutionnaires chinois qui, à la fin de l’année 1974, placardèrent sur les murs de Canton un manifeste politique, qui fut reproduit avant même que les autorités chinoises aient pu le faire disparaître. Ce manifeste intitulé À propos de la démocratie et de la légalité sous le socialisme défiait ouvertement le gouvernement chinois en dénonçant l’autoritarisme de Mao Zedong. Dans une posture relativement modérée pour un cadre du Parti, Xi Zhongxun commente le contrat passé entre le Parti communiste chinois et sa population. Un texte aujourd’hui partagé, diffusé quelques instants sur les smartphones des Chinois révoltés contre la politique menée par son fils, Xi Jinping.
Nous devons encourager les gens à libérer leur esprit, à donner toute sa place à la démocratie, à insister sur la recherche de la vérité à partir des faits et à partir de la réalité.
Le principe du centralisme démocratique doit être maintenu et, à l’heure actuelle, il est particulièrement nécessaire de mettre l’accent sur la démocratie socialiste. La cause de notre Parti est la cause de millions de personnes, et le peuple doit être autorisé à s’exprimer et encouragé à s’intéresser aux affaires nationales.
Peu importe ce que les gens disent, qu’ils aient tort ou raison, pourvu qu’ils soient favorables à la cause socialiste, ils doivent écouter tout ce qui est agréable et dur à entendre, c’est seulement de cette façon qu’ils peuvent mettre en commun leur sagesse, être vifs et enthousiastes. Un parti révolutionnaire a peur de ne pas entendre la voix du peuple, et le plus terrible est que la corneille est silencieuse.
Avoir peur de la démocratie est un signe de dépression nerveuse. Sur cette question, il faut croire que la majorité des masses chériront leurs droits démocratiques.
Les contradictions internes au sein du peuple doivent être gérées correctement et le peuple ne doit pas être traité comme un ennemi de classe.
Parmi les problèmes sociaux en Chine, la question du système juridique est très importante. Tant de lois ont été promulguées, sont-elles vraiment appliquées ? Un mot du secrétaire du Parti du comté ou du secrétaire du Parti de la province peut remplacer les lois du pays, sans parler des dirigeants du Parti et de l’État. Ce phénomène est très anormal. Par conséquent, si le pays veut bénéficier d’une stabilité à long terme, il doit s’appuyer sur le développement de la démocratie et le perfectionnement du système juridique.
Nous ne devons jamais monter sur la tête du peuple. Il serait très mauvais que nos cadres appellent les gens à les considérer comme des « fonctionnaires » et des « seigneurs ».
Empêcher les gens d’être au contact de leurs dirigeants locaux, c’est couper le lien entre les masses et les organes du Parti et du gouvernement, et c’est faire un mauvais coup en bloquant le gouvernement central.
Comment les organes et les cadres du Parti communiste peuvent-ils avoir peur du peuple et ne pas avoir de sentiments pour lui ? Peut-on les appeler des cadres communistes ? De tels cadres ne seraient même pas considérés comme de bons fonctionnaires dans une société féodale !
Quelle que soit l’importance de votre fonction, n’oubliez pas de servir le peuple avec diligence et sincérité, de penser vraiment au peuple, d’aller vers les masses et d’être accessible.
Les faits des temps anciens et modernes montrent qu’il est difficile pour une nation fermée de se développer et de progresser.
Mille mots ne servent à rien, la seule façon d’améliorer le niveau de vie des gens est de les élever. Sinon, les gens ne feront que voter avec leurs pieds.
Le pays est le peuple, et le peuple est le pays !