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Cet entretien est disponible en anglais sur le site du Groupe d’études géopolitiques.
Assiste-t-on à la naissance de « l’écologie de guerre » ? L’utilisation par le Kremlin du gaz comme arme aura-elle un effet sur la perception de la transition et plus largement de l’action européenne ?
Nous devons nous rendre compte que l’Europe a besoin d’être souveraine dans le domaine de l’énergie et que notre souveraineté ne peut se construire que sur l’énergie renouvelable. Nous n’avons pas de pétrole, nous avons très peu de gaz, très peu de charbon et nous devons faire face à des enjeux climatiques très sérieux. C’est donc à travers le vent, le soleil, la géothermie, que nous allons pouvoir construire notre souveraineté, sans être dépendants ni du gaz russe, ni d’autres exportateurs d’hydrocarbures. Le marché de l’hydrogène vert sera un marché mondial par exemple, mais il s’agira d’un marché très diversifié, qui ne donnera pas à certains pays la possibilité de chanter d’autres.
Le gaz est-il encore une énergie de transition viable, comme un certain nombre des pays européens, y compris l’Allemagne, le soutiennent ?
Oui, bien sûr, à la Commission nous avons toujours assumé que le gaz naturel serait une énergie de transition parce que les émissions du gaz naturel sont beaucoup plus faibles que celles du charbon par exemple. Pour certains pays, qui doivent se débarrasser du charbon, le gaz est une énergie de transition clef. Ce qui change, c’est qu’aujourd’hui ce gaz ne peut plus venir de la Russie, ce qui, pour l’Europe, signifie trouver d’autres sources d’approvisionnements, pour des prix qui seront certainement plus élevés.
Ces derniers mois ont aussi montré que la transition vers les énergies renouvelables va encore beaucoup plus vite qu’avant. Il y un scénario dans lequel certains pays vont peut-être continuer un peu plus longtemps avec le charbon pour ensuite immédiatement aller vers les renouvelables au lieu d’utiliser le gaz naturel comme source de transition.
D’ailleurs, le gaz ne jouera pas ce rôle uniquement en Europe, mais aussi en Afrique.
Que pensez-vous de l’opposition au nucléaire qui semblait faire consensus en Allemagne dans l’ère Merkel ? S’agissait-il d’une erreur stratégique ?
Je comprends très bien le raisonnement du gouvernement allemand que présidait Merkel, ainsi la position du gouvernement français – ce n’est pas à la Commission de dicter le mix énergétique des États-membres. Notre devoir est d’imposer la réduction de 55 % des émissions d’ici 2030 mais c’est aux États membres de décider comment le faire. Cela dit, nous voyons clairement que, dans le contexte de la guerre et alors que le gaz naturel est devenu une arme pour Vladimir Poutine, le gouvernement allemand revient sur certaines positions — c’est également le cas avec le nucléaire.
L’Europe pourrait-elle se passer du gaz russe cet hiver et avec quelle stratégie ?
Oui, nous allons pouvoir nous passer du gaz russe. Nous avons réussi à organiser notre approvisionnement, nos réserves sont remplies à 82,5 % ce qui est une sorte d’exploit.
Quels sont les pays les plus vulnérables ?
Les pays plus vulnérables sont ceux qui sont très dépendants du gaz russe : les pays d’Europe centrale notamment, mais aussi l’Allemagne. En même temps, la solidarité européenne telle que nous l’avons organisée sera en mesure d’éviter les pires scénarios. À moins que nous ne devions faire face à un hiver exceptionnellement froid, je crois que nous sommes préparés. L’enjeu, en réalité, sera surtout de s’organiser pour l’année prochaine puisque nous avons encore eu du gaz russe cette année. Il nous faut nous préparer et assumer que, l’année prochaine, les livraisons depuis la Russie n’existeront tout simplement plus.
Les premières semaines de la guerre, plusieurs analystes soutenaient que si l’Europe avait réussi à adopter un embargo sur les hydrocarbures russes, la guerre aurait pris fin, tant les bases du régime de Poutine auraient été bousculées. Aujourd’hui, c’est la Russie elle-même qui arrête les exportations de gaz. Qu’est-ce que nous n’avons pas compris ?
Il ne faut pas commettre l’erreur de croire que les sanctions européennes n’ont pas eu et n’ont pas d’effet. Elles sont en train de transformer en profondeur la société et l’économie russe. J’ai habité en Russie, je connais assez bien le pays. L’avantage d’une autocratie qui contrôle aussi fortement l’information c’est que vous pouvez manipuler la vérité et c’est ce qui fait tout le jeu de Poutine : il veut créer l’impression que nous serions terriblement affaiblis par l’utilisation des hydrocarbures comme arme, qu’il serait en train de gagner la guerre écologique.
Au-delà des manipulations, le contexte pourtant est clair : la Russie est isolée et vraiment affaiblie mais en même temps, elle a des revenus gigantesques grâce aux marchés des hydrocarbures. Je n’ai jamais cru qu’un embargo sur le gaz russe mettrait Poutine à genoux, ni qu’au terme de quelques semaines la guerre s’arrêterait. La guerre va durer et une autocratie est capable de cacher des choses et de mettre des pressions incroyables sur les citoyens, qui n’osent plus rien dire. La plupart des Russes, après vingt ans de mensonges, ne savent plus quoi croire. Et puis, il y a la peur, les opposants sont arrêtés, enfermés.
Les gouvernements européens ont jusqu’à maintenant opté pour des mesures limitées et nationales pour faire face à la hausse des prix de l’énergie. Quelles sont aujourd’hui les possibilités pour se coordonner au niveau européen, surtout à court terme pour faire face à la hausse des prix ?
Il existe déjà des mesures à l’échelle nationale, prises par certains États membres. À court terme, il faut maintenant organiser la solidarité européenne. Nous voyons clairement que la hausse des prix de l’énergie pèse plus lourdement sur ceux qui n’ont que très peu à dépenser. D’autres sont capables de payer, de porter ce fardeau : il s’agit de redistribuer. Nous allons faire des propositions dans ce sens, pour voir comment alléger la pression sur les couches les plus vulnérables de la société. Une proposition — aussi soutenue par les gouvernements allemand et français — serait de faire en sorte que les profits excessifs du secteur énergétique soient redistribués vers les entreprises et les citoyens.
La révision de l’architecture du marché de l’électricité est-elle à l’ordre du jour ? L’accumulation des interventions politiques sur les marchés de l’énergie pousse à ses limites l’idée que l’énergie peut circuler via les marchés. Pensez-vous qu’il faudrait réaliser que l’énergie n’est pas une marchandise comme les autres ?
Il faut être très prudent.
Nous avons eu besoin de trente ans pour bâtir le marché de l’électricité, dans la structure que nous connaissons aujourd’hui. À la Commission, nous sommes convaincus qu’il y a des raisons pour revoir cette architecture parce que le marché a changé, avec notamment l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Cela nous pousse à revoir l’équilibre entre les différentes sources d’énergie et cela pourrait mener à des propositions pour créer un nouvel équilibre entre la partie du prix issue des renouvelables et celle qui vient des sources d’énergies carbonées. Le point essentiel c’est que le prix de l’électricité ne devrait plus être couplé au prix du gaz naturel de même manière.
Le lien entre les dépenses engagées pour protéger les consommateurs de la hausse de prix de l’énergie et les règles budgétaires européennes est désormais évident. Le programme de travail de la Commission intègre-t-il la révision du Pacte de stabilité et de croissance ?
Pas pour le moment, mais nous devrons évidemment faire face, comme ce fut le cas pendant la pandémie, à une situation particulièrement difficile. Les règles sont les règles — mais les circonstances sont fondamentalement différentes. Récemment, je me suis entretenu avec la directrice du FMI, elle m’a réitéré que nous aurons besoin d’investir de manière massive à l’échelle mondiale pour redresser l’économie. Il faut donc repenser certaines règles sans pour autant prétendre que désormais l’argent ne coûterait rien et que nous aurions un accès illimité à des nouveaux moyens. Tout ce que nous dépensons, il nous faudra le rembourser. Mais si nous n’investissons pas dans un changement productif, nous placerons un fardeau insupportable sur les épaules de nos enfants.
Est-il possible d’envisager un nouveau plan de relance d’après-guerre ?
Oui. Nous allons connaître une période très difficile et je crains que nous ne comprenions pas tout à fait les difficultés auxquelles il faudra faire face. Je pense toutefois qu’elle sera suivie d’une période de relance remarquable. Si nous regardons le potentiel d’un pays comme l’Ukraine, le potentiel des énergies renouvelables, la vitesse avec laquelle, par exemple, l’industrie s’adapte, qu’il s’agisse de l’automobile, de l’acier de l’informatique, je reste quand même optimiste.
Certains États membres engagent des investissements importants dans les infrastructures fossiles. Est-ce que c’est un danger pour les objectifs climatiques ?
Nous allons utiliser le charbon un peu plus longtemps que prévu, même si à l’heure actuelle il est très cher et il y en a pas trop. Concernant les infrastructures fossiles, si nous bâtissons des infrastructures pour le gaz naturel et que nous les préparons pour être accessibles à l’hydrogène vert plus tard, c’est un investissement que je peux totalement comprendre. Nous allons essayer de pousser ceux qui doivent investir encore dans des infrastructures pour le gaz naturel, pour assurer la chaleur dans les foyers et le fonctionnement de l’industrie, de préparer cette infrastructure au transport de l’hydrogène vert.
L’Union européenne s’était donnée un cadre pour agir : le Pacte vert. Est-elle en train de répondre aux mutations géopolitiques – qu’il s’agisse de la guerre en Ukraine ou de la rivalité États-Unis-Chine – en suivant ce chemin qu’elle s’était tracée, d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 ?
Quand nous avons élaboré et présenté le Pacte vert en 2019, avant donc la pandémie et avant la Guerre en Ukraine, nous avons dû essuyer les critiques de ceux qui nous accusaient en disant en substance : “C’est bien le Pacte vert, mais revenez dans dix ans et on verra”. Au fil des crises, nous avons pu prouver que le Pacte vert était aussi une réponse à la pandémie, parce qu’il fallait reconstruire notre société, il fallait reconstruire notre économie, transformer notre industrie. Nous avons pu prouver que la transition énergétique, que l’économie circulaire, étaient créatrices d’emploi, qu’elles redonnent de l’énergie à notre économie, tout en remettant l’Europe dans la première place mondiale du développement industriel. Avec la guerre Russe en Ukraine, l’élément du Pacte vert qui est devenu encore plus important, c’est la transition vers les énergies renouvelables. Le Pacte vert, au-délà de son objectif de réduction des émissions, est devenu l’instrument pour créer une vraie souveraineté énergétique européenne.
La crise énergétique affaiblit-elle la position européenne de leader climatique ?
Je reviens d’une rencontre du G20, à Bali et je n’ai pas du tout l’impression que nous ayons perdu notre position de leadership. Nous l’avons affirmé lors de la COP 26, à Glasgow, et nous sommes en train de bâtir des ponts entre les diverses positions, par exemple sur la nécessité d’augmenter les dépenses pour l’adaptation, pour pallier les pertes. Notre position est à mi-chemin entre la position américaine et la position des pays en voie de développement et je crois que nous avons une certaine crédibilité, mais j’espère qu’on pourrait encore l’augmenter. Plus de la moitié de nos dépenses pour la politique du climat va vers l’adaptation. Les États membres doivent être prêts à dépenser un peu plus aussi pour les pertes et préjudices causées par le changement climatique, car c’est ce que demandent les pays en voie de développement. Ce qui est tragique c’est que ceux qui souffrent le plus des effets du changement climatique ne font pas partie de ceux qui l’ont créé. L’Afrique n’est responsable que de 3 % des émissions globales. Il y a donc une responsabilité des certains pays développés, qui sont responsables de 30 % ou 20 % des émissions, ou comme l’Union européenne pour 8 % des émissions globales. C’est nous qui avons profité pendant deux cents ans du charbon, puis du pétrole et puis du gaz pour créer nos richesses.
La COP 27 de novembre aura mis au premier plan la question du financement de l’action climatique dans les pays en voie de développement. Comment se positionnera l’Union ?
Encore une fois, je le répète, il faut prendre notre responsabilité. Je crois que l’Union européenne prend sa responsabilité, nous sommes déjà responsables pour un tiers de tout le financement pour l’adaptation et climat, mais il faut faire plus. Il faut aussi assurer des investissements dans ces pays, qui seront rendus plus faciles si nous sommes aussi capables d’investir dans l’adaptation. En même temps, si nous ne réduisons pas nos émissions — et c’est la responsabilité du G20, parce que 80 % des émissions mondiales viennent des 20 pays du G20 — alors n’importe quel montant qu’on dépensera sera insuffisant pour faire face à la crise climatique. Si nous dépassons les 2° C et si nous nous dirigeons plutôt vers 3, 4° C alors la crise sera tellement grave que nous ne pourrons pas y faire face. Il y a toujours cette relation entre mitigation et adaptation. Les pays développés ont une responsabilité supplémentaire pour faire ce que nous avons promis, et en plus répondre de façon constructive aux exigences des pays en voie de développement pour les pertes et préjudices causés par le changement climatique.
Pourquoi les partenaires africains ne sont pas alignés avec l’Union européenne ? Quelle est la stratégie de la Commission pour contrer cela, et dans quelle mesure la lutte contre le changement climatique et l’accès à l’énergie ont-ils un rôle à jouer ?
J’ai parlé récemment avec quatre présidents africains et en effet, vous avez raison, ils ne sont pas alignés avec nous à 100 % sur la guerre russe en Ukraine. Pourquoi ? Parce qu’ils ont des craintes pour l’apprivoisement de céréales, pour la politique énergétique, mais aussi pour la politique de sécurité parce les Russes sont particulièrement actifs en Afrique à l’heure actuelle.
Je crois que la chose la plus importante, à court terme, est de montrer notre solidarité surtout en ce qui concerne les denrées alimentaires. Mais ce qui est encore beaucoup plus important, c’est de faciliter les investissements dans les pays africains, pour les aider à augmenter la production énergétique. Six cent millions d’Africains n’ont aujourd’hui pas accès à l’électricité, et ce serait une révolution d’être enfin capable de leur donner accès à travers le photovoltaïque et les éoliennes. Deuxièmement, il faut aider les pays africains à faire cette transition énergétique, y compris en utilisant le gaz naturel. Il ne devrait pas y avoir de tabou entre l’Europe et l’Afrique là-dessus.
La Communauté politique européenne est-elle un cadre utile pour organiser le continent ? Quel pourrait être son apport dans le volet climatique ?
Oui je crois qu’il faut créer un forum, un lieu, une agora, où tous les pays européens se rencontrent pour parler des sujets communs. Je vois très mal comment on peut par exemple créer un espace d’énergie renouvelable en Europe sans les Britanniques ou sans les Norvégiens. Cela dépasse bien sûr les limites de l’Union européenne. Je vois aussi très mal comment nous pouvons parler de la sécurité en Europe sans avoir de discussions avec les Ukrainiens ou les pays du Caucase et surtout avec les pays des Balkans qui sont candidats à l’adhésion. Je crois que l’initiative du président Macron a une utilité pour la sécurité en Europe et aussi pour la transition écologique et énergétique.
Que signifie la conversion géopolitique de l’Union ? Quelle est sa logique et quel est son horizon ?
Je crois qu’en tant qu’hommes et femmes politiques, nous sommes responsables de la sécurité et de la prospérité de nos citoyens. Pourquoi une politique de sécurité ? Pour éviter la guerre, pour créer des relations internationales stables, pour donner la possibilité d’un développement économique stable. Pour assurer la paix sociale et pour assurer que tous nos citoyens aient accès au développement et accès à la croissance économique. C’est le but de notre politique et si nous voulons y arriver, il faut affronter la crise climatique.
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Partagez-vous l’idée de plus en plus présente à Washington d’une « nouvelle guerre froide » avec la Chine ?
Non, je ne partage pas cette idée. Nos systèmes sont différents, notre vision de la société, de la démocratie est différente de celle portée par le Parti communiste en Chine. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes dans une situation de confrontation ou de Guerre froide. Je vois toujours des possibilités de coopération avec Pékin, il ne faut pas être excessif, ni naïf. Je crois que l’Europe a besoin de déterminer exactement sa propre position, d’éviter qu’on entre dans une situation de dépendance vis-à-vis de la Chine, comme nous l’avons fait avec la Russie. La Chine peut être un partenaire dans le domaine du climat, mais aussi dans le domaine du développement économique et du commerce international, qui pour nous est très important.
Y a-t-il un risque de devenir dépendant des autres régions du monde pour les métaux rares ?
Il y a toujours ce risque mais cela dépend aussi de notre capacité de développer de nouveaux produits, qui dépendent moins des métaux rares, d’avoir une diversification de nos relations commerciales. Je crois que l’expérience de la guerre de Poutine nous a appris à éviter des dépendances unilatérales, qui nous affaiblissent. Je crois que l’un des atouts les plus incroyables de notre continent est la capacité de se réinventer et d’inventer de nouvelles technologies, d’inventer de nouveaux produits et je vois déjà, par exemple, que dans le domaine des batteries, nous sommes en train d’aller très vite et de développer des batteries recyclables produites en Europe. Nous ferons la même chose avec les panneaux solaires, je n’ai aucun doute là dessus.
Exercice difficile alors que la guerre ravage l’Ukraine : comment pensez-vous que devrait s’installer la relation de l’Union avec la Russie ?
Cela va durer très longtemps jusqu’à ce que la Russie trouve une réponse elle-même : où est ce qu’elle veut aller ? Quels seront ses amis ? Quelles seront ses alliances ?
Je crois que nous pouvons aider ce processus en montrant de quelle manière la Russie peut faire partie de la famille européenne, c’est-à-dire en respectant l’état de droit, en respectant la démocratie. À l’heure actuelle, nous en sommes très loin, mais le pays ne va pas disparaître, il continuera à faire partie du continent européen. Il nous faut donc aussi faire un effort d’imagination, un effort intellectuel, un effort aussi, je dirais, politique : imaginer une relation constructive entre l’Union et la Russie. Pour le moment, la ligne choisie par le président Poutine exclut un tel développement.
Faut-il réserver une place à la Russie dans la construction de l’architecture de sécurité en Europe – à quelles conditions ?
La Russie a déjà une place dans une construction qu’on a établie dans les années ‘70 sur la base de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, qui s’est développée dans une organisation, l’OSCE, mais la Russie a préféré s’en isoler.
La tragédie de la Russie est là : elle s’isole elle-même. Les propositions de coopération de la part des pays européens ont été maintes et abondantes. Il faut maintenant attendre que la Russie revienne elle-même vers une attitude de coopération et sorte de cette posture de domination. Il y a une différence philosophique entre nous et les Russes sur ce qu’est la sécurité et la coopération. Pour la Russie, la sécurité se trouve dans l’exportation d’instabilité vers les régions en dehors de la Russie — on domine son voisinage en créant de l’instabilité aux frontières. La vision européenne est exactement l’opposé : on crée de la stabilité en exportant notre stabilité et notre croissance. C’est comme cela que nous avons fait après la chute du mur de Berlin, c’est comme cela que nous avons changé l’Europe centrale et orientale. Et c’est comme cela que nous devons continuer.