• Néanmoins, la Hongrie n’a pas apporté un soutien total à l’Ukraine puisque Budapest a refusé le transit sur le territoire hongrois des armes à destination de l’Ukraine, et s’est opposé à la fourniture d’armes offensives à l’armée ukrainienne1. La Hongrie s’est ensuite opposée, avec la Slovaquie et la République tchèque, à un embargo total sur le pétrole russe — les trois pays importent respectivement 75 %, 100 % et 50 % de leur pétrole par oléoduc depuis la Russie. Ils ont obtenu finalement une exemption pour l’oléoduc Druzba lors de l’adoption début juin du sixième paquet de sanctions européennes
  • La visite du ministre des Affaires étrangères hongrois en Russie signale encore plus fortement la position ambiguë de la Hongrie vis-à-vis du conflit russo-ukrainien2. Elle est la première d’un responsable politique européen depuis que la Russie a envahi l’Ukraine le 24 février dernier3. Péter Szijjártó a rencontré le ministre russes des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov et a négocié une augmentation des livraisons de gaz russe de 700 millions de mètres cubes à destination de la Hongrie — volume représentant 6,7 % de la consommation de gaz de la Hongrie en 20204.
  • Depuis plusieurs jours, la Hongrie négocie en effet avec la Russie une redirection de son approvisionnement gazier par le gazoduc Turkstream afin de se prémunir d’un arrêt total des livraisons de gaz russe. Le gazoduc Turkstream, mis en service en 2020, relie la Russie à la Turquie mais son prolongement, Tesla Pipeline, arrive jusqu’en Autriche en passant par la Grèce, la Bulgarie, la Serbie et la Hongrie5. Depuis le début de la guerre en Ukraine, Turkstream n’a subi aucune baisse sur les 31 milliards de mètres cubes de gaz qui y transitent par an — la moitié à destination de la Turquie et l’autre moitié à destination des Balkans et de l’Europe centrale6 —, contrairement aux autres gazoducs reliant la Russie à l’Europe.
  • Le 13 juillet, la Hongrie a déclaré un « état d’urgence énergétique », mettant fin aux exportations de gaz à d’autres pays européens. Faisant face à un taux d’inflation annuel de 12,6 %, Viktor Orbàn blâme les sanctions européennes à l’encontre de la Russie, déclarant que l’Union européenne s’était « tirée une balle dans le pied »7. Sergueï Lavrov a déclaré à l’issue de la rencontre avec son homologue hongrois que la Russie examinera avec attention la demande hongroise, sans toutefois assurer — pour le moment — que Moscou y accèdera8.
Sources
  1.  « Hungary will not allow lethal weapons for Ukraine to transit its territory – FM » Reuters, 28 février 2022.
  2. Marton Dunai et Polina Ivanova, « Hungary sends foreign minister to Moscow to ask Russia for more gas », The Financial Times, 21 juillet 2022.
  3. À l’exception de la visite du chancelier autrichien Karl Nehammer en avril dernier.
  4. « Hungary FM in Russia to Discuss Buying More Gas », The Moscow Times, 21 juillet 2022.
  5. En 2014, la Russie avait abandonné le projet South Stream qui effectuait le même parcours. Viktor Orban avait accusé à l’époque. l’Union européenne d’avoir fait échouer le projet.
  6. Bien que la Russie ait coupé son approvisionnement à la Bulgarie le 27 avril dernier.
  7. « EU ‘shot itself in the lungs’ with sanctions against Russia, says Orban », Euronews, 15 juillet 2022.
  8. Riya Baibhawi, « Hungary urges Russia for additional gas supply, Lavrov says ‘will consider the request’ », RepublicWorld, 22 juillet 2022.