• Signe de l’isolement historique de la Russie sur la scène internationale, quatre pays ont rejoint Moscou et ont voté contre : la Corée du Nord, l’Erythrée, la Syrie et la Biélorussie. Parmi les trente-cinq abstentionnistes, on retrouve la Chine, l’Inde, la Mongolie, l’Algérie, le Mali, Cuba, l’Arménie et le Kazakhstan. 
  • Certains votes sont en contradiction avec les positions exprimées par certains pays avant le vote de cette résolution. L’Afghanistan a voté pour la résolution de l’assemblée générale de l’ONU, alors que le porte-parole du ministère des affaires étrangères des Talibans avait publié un communiqué qui appelait à la fin des combats et à un rapide cessez-le-feu. La position de l’Afghanistan à l’ONU peut s’expliquer par le fait que la représentation permanente du pays à l’ONU n’est pas liée aux Talibans qui ont pris le pouvoir en août 2021, sans être reconnus par la communauté internationale. 
  • La Birmanie a également voté en faveur, alors que la junte militaire a apporté son soutien à la Russie. Comme dans le cas afghan, la représentation permanente de la Birmanie à l’ONU n’est plus en phase avec la junte au pouvoir depuis le coup d’État de février 2021. 
  • La position du Brésil est particulière. Lors d’un mardi du Grand Continent, Gaspard Estrada a expliqué comment Bolsonaro adoptait une position neutre en contradiction avec les votes du pays aux Nations Unies. 
  • La Serbie, bien qu’allié de la Russie, a choisi de voter en faveur de la résolution. Le pays avait décidé de ne pas condamner la reconnaissance des républiques séparatistes de Donetsk et de Lougansk, pour dénoncer implicitement la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo par la majorité des pays occidentaux après 2008. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le président serbe, Aleksandar Vucic, a appelé à la préservation de « l’intégrité territoriale » de l’Ukraine, mais a déclaré qu’il ne sanctionnerait pas la Russie. Le vote d’une résolution non-contraignante à l’ONU permet de condamner l’action de la Russie sans pour autant s’opposer frontalement à Moscou. Il faut aussi noter que la Serbie aspire à intégrer l’Union européenne, ce qui la contraint à se rapprocher de la position des pays membres de l’Union. 
  • Les Émirats arabes unis et Israël, deux partenaires clé des États-Unis, avaient créé la surprise par leur refus de s’exprimer contre l’agression de la Russie, mais ont également choisi de voter pour la résolution.
  • L’Inde, qui entretient des relations militaires de longue date avec la Russie, s’est abstenue, ce qui pourrait à moyen et long terme poser problème à la volonté de Washington de créer une large alliance pour contrer l’influence chinoise dans l’Indo-pacifique. Le Pakistan, qui a annoncé qu’il allait augmenter ses achats de gaz en provenance de Russie s’est aussi abstenu. L’Afrique du Sud s’est également abstenue alors que le pays avait été l’un des premiers en Afrique à condamner les opérations militaires russes en Ukraine.
  • Les pays d’Asie centrale (Kazakhstan, Turkménistan, Tadjikistan, Ouzbékistan, Kirghizistan) se sont abstenus ou n’ont pas pris part au vote. Faisant partie de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), ils adoptent une position neutre dans le conflit. Début janvier, le président du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokaïev, avait eu besoin de l’intervention des forces militaires russes dans le cadre de l’OTSC pour réprimer des manifestations contre son action. L’Arménie s’est également abstenue. On peut supposer que les dirigeants arméniens ne veulent pas s’opposer frontalement à la Russie car ce sont des forces russes d’interposition qui ont permis de stabiliser la ligne de front au Haut-Karabagh lors de la guerre de 2020.
  • Le Soudan, le Mali, la République centrafricaine, l’Algérie et le Vietnam, pays qui ont des relations militaires importantes avec la Russie, se sont abstenus. La société privée russe Wagner est présente au Soudan, en République centrafricaine et au Mali. Après l’indépendance de l’Algérie en 1962, les élites militaires algériennes ont noué de fortes relations avec l’URSS, partenariat qui a continué avec la Russie après 1991. Le chef d’État major algérien, Saïd Chengriha, a ainsi été formé à l’Académie militaire russe de Stavropol. Enfin, le Vietnam a conservé des relations stratégiques avec la Russie dans le domaine de l’armement. 
  • Cuba, le Nicaragua, la Bolivie et l’Iran se sont abstenus en raison de leur tradition anti-impérialiste principalement dirigée contre les États-Unis qui sont considérés comme les responsables de la guerre en Ukraine du fait de l’extension de l’OTAN en Europe de l’Est. Le Guide suprême iranien, l’ayatollah Khamenei, a déclaré que l’Ukraine était une « victime » de la politique étrangère des États-Unis.