Mary Beard, Twelve Caesars. Images of Power from the Ancient World to the Modern, Princeton UP
« À quoi ressemble le visage du pouvoir ? Qui est commémoré dans l’art et pourquoi ? Et comment réagissons-nous face aux statues d’hommes politiques que nous désapprouvons ? Dans ce livre écrit sur fond de « guerre des sculptures », Mary Beard raconte comment, pendant plus de deux millénaires, les portraits des riches, des puissants et des célèbres du monde occidental ont été façonnés par l’image des empereurs romains, en particulier les « douze Césars », de l’impitoyable Jules César à Domitien, qui torturait les mouches. Elle s’interroge sur les raisons pour lesquelles ces autocrates meurtriers ont occupé une place si importante dans l’art depuis l’Antiquité et la Renaissance jusqu’à aujourd’hui, alors que les dirigeants infortunés sont encore caricaturés comme des Nérons s’amusant pendant que Rome brûle.
Partant de l’importance des portraits impériaux dans la politique romaine, ce livre richement illustré propose un voyage à travers 2 000 ans d’histoire de l’art et de la culture, en présentant un regard neuf sur les œuvres d’artistes tels que Memling et Mantegna ou la sculptrice américaine du XIXe siècle Edmonia Lewis, ainsi que sur celles de générations de tisserands, d’ébénistes, d’orfèvres, d’imprimeurs et de céramistes. Plutôt que l’histoire d’une simple répétition d’images stables et fadement conservatrices d’hommes et de femmes impériaux, il offre est un récit inattendu d’identités changeantes, d’erreurs d’identification inconscientes ou délibérées, de faux et de représentations souvent ambivalentes de l’autorité. »
Parution le 28 septembre
Adam Tooze, Shutdown. How Covid Shook the World’s Economy, Viking
« Lorsque les premières informations ont commencé à circuler en Chine au sujet d’un nouveau virus en décembre 2019, les marchés financiers ont été alertés par son potentiel de perturbation. Pourtant, ils n’auraient jamais pu prédire l’effondrement économique total qui suivrait, alors que les marchés boursiers chutaient plus rapidement et plus durement qu’à n’importe quel moment depuis 1929, que les devises du monde entier plongeaient, que les investisseurs paniquaient et que même l’or était vendu.
En l’espace de quelques semaines, l’économie mondiale a été stoppée net par les gouvernements qui tentaient de contenir une catastrophe de santé publique en pleine expansion. Les vols ont été cloués au sol, les chaînes d’approvisionnement brisées, les industries du tourisme, du pétrole et de l’hôtellerie se sont effondrées du jour au lendemain, laissant des centaines de millions de personnes sans emploi. Les banques centrales ont réagi par des interventions sans précédent pour maintenir leurs économies en vie. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, l’ensemble du système économique mondial s’est contracté.
Ce livre raconte l’histoire de cette contraction. Nous ne savons pas encore comment cette histoire se termine, ni quel nouveau monde nous trouverons de l’autre côté. »
Parution le 2 septembre
Bertrand Badie, Les puissances mondialisées. Repenser la sécurité internationale, Odile Jacob
« Quels sont les États qui protègent le mieux leurs citoyens dans le contexte international actuel ? Face à des menaces devenues globales, telles les pandémies, les crises environnementales, économiques, migratoires ou alimentaires, quelles puissances ont su rompre avec un passé révolu et développer des stratégies adaptées ?
Les États-nations se sont construits, il y a quelques siècles, sur la gestion des peurs ancestrales (peur de mourir et de souffrir, peur de perdre sa liberté) et des risques nationaux. Ils se sont arrogé le monopole de la sécurité pour en faire un enjeu territorial et militaire, étroitement lié à la souveraineté nationale.
Mais lorsque les risques changent de nature et de périmètre, qu’en est-il de l’ancien ordre international ? Le succès amorcé des puissances les plus agiles, qui – à l’instar de la Corée du Sud, de l’Allemagne et de quelques pays nordiques – savent tirer profit de la mondialisation tout en se protégeant de ses méfaits, ne nous invite-t-il pas à repenser la sacro-sainte sécurité internationale pour l’élargir à ses dimensions humaines ? Et, dès lors, n’est-ce pas tout l’ordre mondial qui est à revoir et à refonder ?
Loin des discours souverainistes et des postures démagogiques, Bertrand Badie nous propose une réflexion profonde et sociale sur le thème si fondamental de la sécurité. »
Parution le 8 septembre
Martine Leibovici et Aurore Mréjen (ed.), Cahier Hannah Arendt, L’Herne
« Longtemps tenue à l’écart du monde académique, l’œuvre de Hannah Arendt – désormais largement publiée et traduite – suscite aujourd’hui l’intérêt d’un nombre considérable de travaux, colloques et publications dans le monde entier. En revenant sur les principaux événements de sa vie, ce Cahier dresse le portrait de cette « théoricienne de la politique » sans pour autant négliger les vives polémiques qui ont marqué sa carrière. Le volume rassemble des contributions qui évoquent notamment son travail majeur sur le totalitarisme, les catégories de sa pensée politique et la centralité de l’action, son insistance sur la responsabilité et le jugement ainsi que son analyse du monde moderne. Il revient sur son expérience historique et personnelle, les moments forts de sa vie et la réflexion qu’ils ont suscités en elle, en particulier sa judéité. Des extraits de correspondance (avec Judah Magnes, David Riesman, Hermann Broch, Hilde Frankel, Kurt et Helen Wolff) dévoilent par ailleurs des facettes moins connues de sa personnalité et de nombreux inédits, extraits de cours ou de conférences issus des archives de la bibliothèque du Congrès à Washington, viennent compléter l’ensemble. »
Parution le 29 septembre
Alexandre Bande, Pierre-Jérôme Biscarat et Olivier Lalieu (dir.), Nouvelle histoire de la Shoah, Passés composés
« Les questions soulevées par l’histoire de la Shoah méritent des réponses claires. Or depuis trente ans l’historiographie sur le nazisme et la Shoah a profondément évolué, et nombre d’interrogations ont trouvé leur réponse grâce aux travaux d’une nouvelle génération de chercheuses et chercheurs.
C’est pourquoi, sans délaisser les questions cruciales des origines, du déroulement et de la géographie de la Shoah, les auteurs fournissent ici des éléments clés pour comprendre des sujets essentiels : le rôle des ghettos, les centres de mises à mort, Vichy et la Shoah, les résistances juives face à la répression et aux déportations, le sort des Roms et des Sinti, ce que savaient les Alliés, mais aussi les défis de l’enseignement de la Shoah, les enjeux des voyages sur les lieux de mémoire, ou encore le négationnisme et le lien entre complotisme et antisémitisme…
Tous ont accepté de se prêter à l’exercice délicat de la synthèse, leurs chapitres répondant à une volonté assumée de proposer aux lecteurs une approche précise, actualisée, accessible et concise de l’histoire de la Shoah. »
Parution le 31 août
Camille Froidevaux-Metterie, Un corps à soi, Seuil
« Longtemps, les femmes n’ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternelle. La révolution féministe les a délivrées de ce carcan, mais elle a aussi dévalorisé le corps féminin. N’est-il pas pourtant le nœud singulier de notre rapport à nous-même et au monde ?
À partir d’une relecture de Simone de Beauvoir, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie propose de le saisir sous ses deux aspects : lieu de la domination masculine et vecteur d’une pleine émancipation. Sa pensée progresse au fil d’une exploration de ces événements corporels qui scandent la vie des femmes, de l’enfance empêtrée à la ménopause invisibilisée, de la honte adolescente à la découverte de la jouissance, de l’épreuve du réel maternel aux ravages de la violence sexuelle. Au fil de ces étapes, où l’écriture en première personne résonne avec les voix plurielles des femmes, l’autrice pose les jalons qui leur permettront de reprendre possession de leurs corps, jusqu’au plus intime d’elles-mêmes. Son féminisme incarné s’attaque au socle même du patriarcat et renouvelle, à l’écoute des luttes les plus contemporaines, les fondements théoriques du féminisme. »
Parution le 2 septembre
Bruno Maçães, Geopolitics for the End Time. From the Pandemic to the Climate Crisis, Hurst
« À l’approche d’une catastrophe, tout change. Quelles sont les leçons à tirer de la pandémie ? Dans quelle mesure les différentes cultures et sociétés y ont-elles réagi et cela pourrait-il devenir un tournant dans le cours de l’histoire ?
Avant le Covid, une nouvelle compétition se dessinait déjà entre des modèles géopolitiques alternatifs – mais le contexte de cet affrontement n’était pas encore clair. Et si elle se déroulait en terrain neutre ? Dans un état de nature, avec peu ou pas de règles politiques, au milieu d’un chaos qui évolue rapidement ? Lorsque la plus grande menace pour la sécurité nationale n’est plus les autres États, mais l’environnement lui-même, quels pays pourraient prendre le dessus ?
Ce livre explore comment le Covid-19 a déjà transformé le système mondial, et comment il sert de prélude à une planète affligée par le changement climatique. Bruno Maçães envisage la pandémie comme l’aube d’une nouvelle ère stratégique, annonçant un paysage politique mondial profondément modifié. »
Parution le 2 septembre
Philippe Descola, Les formes du visible, Seuil
« La figuration n’est pas tout entière livrée à la fantaisie expressive de ceux qui font des images. On ne figure que ce que l’on perçoit ou imagine, et l’on n’imagine et ne perçoit que ce que l’habitude nous a enseigné à discerner. Le chemin visuel que nous traçons spontanément dans les plis du monde dépend de notre appartenance à l’une des quatre régions de l’archipel ontologique : animisme, naturalisme, totémisme ou analogisme. Chacune de ces régions correspond à une façon de concevoir l’ossature et le mobilier du monde, d’en percevoir les continuités et les discontinuités, notamment les diverses lignes de partage entre humains et non-humains.
Masque yup’ik d’Alaska, peinture sur écorce aborigène, paysage miniature de la dynastie des Song, tableau d’intérieur hollandais du XVIIe siècle : par ce qu’elle montre ou omet de montrer, une image révèle un schème figuratif particulier, repérable par les moyens formels dont elle use, et par le dispositif grâce auquel elle pourra libérer sa puissance d’agir. Elle nous permet d’accéder, parfois mieux que par des mots, à ce qui distingue les manières contrastées de vivre la condition humaine. En comparant avec rigueur des images d’une étourdissante diversité, Philippe Descola pose magistralement les bases théoriques d’une anthropologie de la figuration. »
Parution le 2 septembre
Chris Pearson, Dogopolis. How Dogs and Humans Made Modern New York, London, and Paris, University of Chicago Press
« Promenez-vous dans n’importe quelle ville américaine ou européenne aujourd’hui et vous n’irez probablement pas loin avant de voir un chien se faire promener. On s’attend à ce que ces animaux domestiqués puissent facilement se déplacer sur les trottoirs, dans les rues et dans d’autres éléments fondamentaux de notre environnement bâti. Mais si nos villes étaient en fait façonnées en fonction des chiens, plus que nous ne l’imaginons ?
Dogopolis affirme de manière audacieuse et convaincante que les relations entre l’homme et le chien ont été un facteur crucial dans la formation de la vie urbaine moderne. En se concentrant sur New York, Londres et Paris du début du XIXe siècle jusqu’aux années 1930, Pearson montre que les réactions humaines aux chiens ont considérablement remodelé ces villes et d’autres villes occidentales contemporaines. C’est un fait inaltérable que les chiens – souvent sales, belliqueux et parfois rebutants – s’enfuient, propagent la rage, défèquent et se reproduisent où bon leur semble. Ainsi, alors que les chiens devenaient de plus en plus courants dans la vie de la classe moyenne du XIXe siècle, les villes ont dû répondre à la peur qu’ils inspiraient aux gens et à leur dégoût pour leurs traits les moins désirables. L’intégration progressive des chiens dans la vie urbaine était axée sur le dégoût de la saleté, la peur du crime et du vagabondage, et la promotion de sentiments humanitaires. D’un autre côté, les chiens sont les compagnons animaux les plus appréciés de certaines personnes, et la compassion et l’affection de l’homme pour les animaux de compagnie et les animaux errants ont été des forces tout aussi puissantes dans le façonnement de la modernité urbaine. Dogopolis détaille les interrelations complexes entre les émotions, les sentiments et la façon dont nous manifestons nos sentiments envers ce que nous aimons, et montre qu’ensemble, ils peuvent réellement remodeler la société. »
Parution le 31 août
Sanjay Subrahmanyam, Empires entre Islam et Chrétienté (1500-1800), Buchet Chastel
« Et si, entre le XVIe et le XVIIIe siècles, les empires portugais, espagnol, ottoman, moghol et britannique s’étaient nourris les uns des autres ? Et si leur histoire avait bien plus en commun que nous ne pouvons l’imaginer ?
À partir d’archives et de textes rarement exploités auparavant, Sanjay Subrahmanyam propose une analyse neuve et fructueuse de l’empire, cette forme politique trop souvent négligée ou réduite à ses expressions les plus contemporaines, de Napoléon au modèle colonial.
Superbe exemple d’histoire connectée, porté par une écriture limpide, Empires entre Islam et Chrétienté renouvelle notre regard sur les phénomènes historiques en nous faisant découvrir des univers méconnus tout en mêlant avec bonheur les approches politique, économique, intellectuelle et culturelle.
Des rives de la Méditerranée au continent indien en passant par les Amériques, surgit un monde « divers, varié et invariablement multipolaire » d’une surprenante modernité. »
Parution le 26 août
Ada Ferrer, Cuba. An American History, Simon and Schuster
« En 1961, au plus fort de la guerre froide, les États-Unis ont rompu leurs relations diplomatiques avec Cuba, où une révolution avait pris le pouvoir trois ans plus tôt. Pendant plus d’un demi-siècle, le bras de fer s’est poursuivi – sous le mandat de dix présidents américains et les cinquante ans de règne de Fidel Castro. Sa mort en 2016, et le départ à la retraite de son frère et successeur Raúl Castro en 2021, ont suscité des questions sur l’avenir du pays. Pendant ce temps, la politique à Washington – l’ouverture par Barack Obama, le revirement de cette politique par Donald Trump et l’élection de Joe Biden – a fait de la relation entre les deux nations un nouveau sujet de débat.
Aujourd’hui, l’historienne Ada Ferrer nous livre une chronique ambitieuse et émouvante écrite pour un moment qui exige une nouvelle prise en compte du passé de l’île et de sa relation avec les États-Unis. Couvrant plus de cinq siècles, Cuba : An American History nous permet d’assister aux premières loges à l’évolution de la nation moderne, avec son histoire dramatique de conquête et de colonisation, d’esclavage et de liberté, d’indépendance et de révolutions faites et défaites.
En cours de route, Ferrer explore l’intimité parfois surprenante, souvent troublée, entre les deux pays, documentant non seulement l’influence des États-Unis sur Cuba, mais aussi les nombreuses façons dont l’île a été une présence récurrente dans les affaires américaines. Il s’agit donc d’un récit qui donnera aux lecteurs américains un aperçu inattendu de l’histoire de leur propre nation et, ce faisant, les aidera à imaginer une nouvelle relation avec Cuba. »
Parution le 7 septembre
Richard Overy, Blood and Ruins. The Great Imperial War, Allen Lane
« Dans Blood and Ruins, Richard Overy entreprend de revoir la façon dont nous considérons la Seconde Guerre mondiale, ses origines et ses conséquences. Il affirme qu’il s’agissait d’une « grande guerre impériale », épilogue violent de près d’un siècle d’expansion impériale mondiale qui a atteint son apogée dans les ambitions de l’Italie, de l’Allemagne et du Japon dans les années 1930 et au début des années 1940, avant de se transformer en la guerre la plus importante et la plus coûteuse de l’histoire de l’humanité et la fin, après 1945, de tous les empires territoriaux.
La manière dont une guerre à grande échelle a été menée, approvisionnée, payée, soutenue par une mobilisation de masse et moralement justifiée est au cœur de ce nouveau récit. Surtout, Overy explique le coût amer pour ceux qui ont participé aux combats, ainsi que le niveau exceptionnel de criminalité et d’atrocité qui a marqué ces projets impériaux, la guerre et ses suites. Cette guerre a été aussi meurtrière pour les civils que pour les militaires, une guerre à mort pour l’avenir de l’ordre mondial.
Provoquant la réflexion, Blood and Ruins vise à comprendre la guerre d’une manière nouvelle. »
Paru le 26 août
Herfried Münkler, Marx, Wagner, Nietzsche, Rowohlt
« Marx, Wagner, Nietzsche – ces trois penseurs ont eu une profonde influence sur les XIXe et XXe siècles. Contemporains qui se sont tour à tour affrontés avec vénération, rejet ou ignorance, ils ont façonné une époque marquée par une énorme diversité scientifique et un grand dynamisme social. Leurs antagonismes et leurs contradictions mènent au cœur du développement allemand. Herfried Münkler suit ces trois personnages fascinants, évoquant toute une époque. Il décrit les étonnants parallèles entre les vies de Marx et de Wagner : participation à la révolution de 1848, fuite, expulsion et exil, toutes sortes de troubles et pourtant la création d’une œuvre exceptionnelle, la formation d’un large public et la difficile responsabilité de ce que ce public a fait des brouillons. Nietzsche, légèrement plus jeune, est alors un événement philosophique, comme Marx il façonne les générations. Tous trois font exploser les conventions du monde bourgeois, créent quelque chose de nouveau – mais qui devient ensuite une réalité différente, inattendue. Le XIXe siècle allemand, riche et prometteur, se transforme en une ère d’extrêmes, de catastrophes politiques. »
Paru le 14 août
Jean-Pierre Cabestan, Demain la Chine : guerre ou paix ?, Gallimard
« Développement économique vertigineux, montée en puissance impressionnante, modernisation militaire sans précédent, passions nationalistes souvent incandescentes, confrontation de plus en plus intense avec les États-Unis, tous ces ingrédients connus semblent conduire immanquablement la Chine à la guerre.
Les causes immédiates d’un conflit armé ne manquent pas : les prétentions de Pékin en mer de Chine du Sud, le conflit territorial sinojaponais autour des Senkaku (Diaoyu) et surtout la volonté farouche de Xi Jinping de réunifier Taiwan à la République populaire constituent les principaux barils de poudre qui peuvent à tout moment exploser. De fait, les prédictions d’un affrontement militaire dans le détroit de Formose d’où la Chine sortirait vainqueur se multiplient.
Pour l’heure, ce que l’on observe avant tout est une utilisation de plus en plus fréquente par le gouvernement chinois de ce qu’on appelle les « zones grises » entre la paix et la guerre. Cette stratégie s’est étendue, en 2020, à la longue frontière sino-indienne. Ce nouveau modus operandi permet aussi à l’Armée populaire de libération (APL) et aux autres agences de sécurité chinoises d’améliorer leur capacité de projection de forces et leur préparation au combat. Mais les enjeux d’une guerre ouverte, et pas uniquement avec les États-Unis, restent énormes, incitant l’APL à d’abord envisager des « opérations extérieures » plus limitées et moins dangereuses.
Pour ces raisons, bien que nul ne puisse contrôler les passions humaines, et sans pour autant exclure l’irruption de crises militaires, la Chine et les États-Unis s’orientent plus vers une guerre froide d’un nouveau type que vers une guerre chaude qui pourrait rapidement se nucléariser. »
Parution le 2 septembre
Guido Vitiello, Il lettore sul lettino, Einaudi
« Pourquoi tant de lecteurs soulignent-ils les livres, gribouillent-ils dessus, cornent-ils des pages, alors que d’autres regardent avec horreur le moindre mauvais traitement ? Et quels secrets recèlent les étagères des bibliothèques nationales ? Si les volumes sont disposés en double rangée, qu’est-ce qui est caché à l’arrière ? Une enquête riche et troublante sur les perversions qui rendent notre relation aux livres à la fois érotique et névrotique. Comme dans les meilleures familles, les amoureux des livres comptent aussi quelques oncles fous, dont le portrait est prudemment conservé au grenier : le collectionneur multirécidiviste, le kleptomane impénitent, le mangeur de papier. Mais ce livre ne parle pas d’eux. Plutôt qu’aux lecteurs psychotiques, il est consacré aux troubles du lecteur névrosé, qui n’est autre que le lecteur ordinaire. Il y a ceux qui sont saisis d’angoisse s’ils doivent prêter un livre ; ceux qui se forcent à ne pas bâiller en lisant ; il y a le lecteur polyamoureux qui lit plusieurs livres en même temps ou, au contraire, le monogame en série qui ne touche pas à un roman avant d’en avoir terminé un autre ; ceux qui ont honte de dire qu’ils n’ont pas lu un classique et qu’ils l’ont donc toujours, par définition, « relu » et ceux qui annotent les livres selon leur propre code idiosyncratique… S’il est vrai que la lecture est un « vice impuni » qui nous amène à considérer comme normaux des comportements qui, dans tout autre contexte, nous sembleraient pervers – pensons au geste de renifler voluptueusement le papier -, alors nous ne devrions pas être surpris par les milliers de bizarreries du lecteur commun, qui, vu de près, nous paraîtra beaucoup moins commun qu’il ne semble. Un échantillon cultivé et amusant des habitudes qui entourent l’utilisation des livres et des mécanismes profonds qui régissent les plaisirs et les peines de la lecture. »
Parution le 28 septembre
Heinrich August Winkler, Deutungskämpfe. Der Streit um die deutsche Geschichte, Beck
« Aujourd’hui encore, l’histoire allemande est un terrain sur lequel se jouent souvent des conflits politiques. Y a-t-il un « chemin spécial » (Sonderweg) allemand ? L’Allemagne porte-t-elle une plus grande responsabilité que les autres nations dans le déclenchement de la Première Guerre mondiale ? Comment l’ascension d’Hitler, la prise de pouvoir par les nationaux-socialistes et l’Holocauste se sont-ils produits ? Ce ne sont là que quelques-unes des questions sur lesquelles Heinrich August Winkler a également pris publiquement position à plusieurs reprises. Ses essais dont une sélection est rassemblée ici ont eu une influence décisive sur ces « batailles d’interprétation » pendant cinq décennies.
Une Allemagne qui s’ouvre sans réserve à la culture politique de l’Ouest et qui développe en même temps un rapport critique à son propre passé – une telle Allemagne a dû être conquise contre de nombreux obstacles après 1945. Le nouveau livre de Heinrich August Winkler raconte cette dispute souvent âpre sur l’histoire allemande. Que les tentatives d’instrumentalisation de l’histoire viennent de la gauche ou de la droite, les interventions de Winkler ont toujours poursuivi un double objectif : corriger les légendes et soutenir la culture du pluralisme démocratique – en toute connaissance de cause, avec perspicacité et, si nécessaire, avec une forte dose de polémique. »
Paru le 26 août
Jonathan Holslag, World Politics since 1989, Polity
« 1989 a marqué le début d’un nouvel âge de liberté et de prospérité. Trente ans plus tard, l’âge d’or est terminé. Qu’est-ce qui a mal tourné ? Comment l’ère de la mondialisation – de la connectivité, de la richesse et de la croissance – a-t-elle cédé la place ?
Jonathan Holslag navigue à travers les mers calmes et les marées déchaînées de la politique mondiale, de la guerre froide à nos jours. Il raconte l’histoire d’un élan qui s’essouffle et d’opportunités gâchées, expliquant comment les atouts de l’Occident ont été dilapidés au profit d’un consumérisme croissant, d’un commerce déséquilibré et d’un engagement diplomatique peu enthousiaste. Pendant ce temps, d’autres puissances, comme la Chine et la Russie, se sont renforcées. Holslag démêle les fils de cette histoire pour révéler que ce n’est pas tant l’ambition de la Chine, la ruse de Poutine ou la cupidité des hommes forts africains qui ont conduit le monde à cette situation ; c’est l’incapacité de l’Occident à écouter son peuple, à faire preuve d’un leadership clair et à se réinventer, malgré les nombreuses preuves que les choses allaient mal. »
Parution le 3 septembre
Geneviève Pruvost, Quotidien politique. Féminisme, écologie, subsistance, La Découverte
« Fin des sociétés paysannes, cuisines équipées, bétonisation des terres arables, effacement des savoir-faire et cosmogonies autochtones, ignorance des rythmes du monde vivant… Ces phénomènes divers que l’on apprend aujourd’hui à déplorer sont bel et bien liés, nous disent depuis un demi-siècle des théoriciennes écoféministes, critiques de la modernité industrielle. C’est à leurs pensées, méconnues en France, ainsi qu’aux leçons existentielles et politiques qu’il convient d’en tirer, qu’est consacré cet ouvrage. L’auteure explore les alternatives écologiques et anticapitalistes contemporaines pour démontrer que la vie quotidienne est un terrain politique fondateur.
Sans politique du quotidien, sans reconstruction collective et radicale de notre subsistance, il n’y aura pas de société égalitaire ni écologique. Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas la généralisation du salariat qui a permis d’accéder à la société de consommation et au confort appareillé, mais le colonialisme et le travail domestique féminin. Une autre organisation politique de la vie et des rapports à la nature est possible. À condition d’être redistribué, ancré dans une communauté en prise avec un biotope et des usages, le travail de subsistance ainsi repensé devient un facteur d’émancipation. La fabrique du quotidien apparaît alors pour ce qu’elle est : un enjeu révolutionnaire. »
Parution le 9 septembre
Ralf Konersmann, Welt ohne Maß, Fischer
« Dans l’histoire européenne, la mesure et le mesurage, l’éthique et la technologie, la morale et la connaissance étaient les deux faces d’une même pièce. Il était important de s’en tenir à la modération, pas seulement ici ou là, mais en général – à ce qui est requis à la fois factuellement et moralement. Ralf Konersmann retrace la grande histoire des idées sur la mesure : comment cette relation de confirmation réciproque de la mesure et de la modération a été conçue et assurée, dans quelles circonstances elle s’est néanmoins rompue et quelles ont été les conséquences de l’éloignement des mondes conceptuels autrefois reliés. Konersmann place l’omniprésence actuelle de la mesure, du comptage et du calcul dans une perspective généalogique qui nous permet de la comprendre réellement et de mieux appréhender notre présent. »
Parution le 29 août
Francesca Izzo, Il moderno Principe di Gramsci. Cosmopolitismo e Stato nazionale nei Quaderni del carcere, Carocci
« Gramsci est le penseur qui a le plus renouvelé la conception marxiste de l’État. Conscient du déclin imparable du pouvoir de l’État, généré par le contraste entre le « cosmopolitisme de l’économie et le nationalisme de la politique », il oriente sa pensée vers la recherche de nouvelles formes politiques capables de transférer le noyau démocratique de la nation moderne au niveau de la souveraineté supranationale. Ce livre se consacre à l’exploration de la catégorie du cosmopolitisme, en suivant, dans l’atelier complexe des Quaderni, les évolutions sémantiques et conceptuelles qui conduisent au remplacement du terme « internationalisme » par « cosmopolitisme d’un nouveau genre ». Afin de bien comprendre les raisons qui ont conduit Gramsci à ce choix, on réexamine le réseau de concepts – de la philosophie de la praxis à la révolution passive, de l’hégémonie au prince moderne – qui animent sa révision du marxisme, culminant dans un profil sans précédent du sujet historique. »
Parution le 9 septembre