Le 5 mai, le Tribunal constitutionnel fédéral (TCF) allemand publiait une décision relative à la constitutionnalité des mesures de rachat de dettes souveraines des États-membres de l’Union européenne décidées par la Banque centrale européenne à la suite de la crise financière. Cette décision apparaît comme le dernier coup en date dans une partie de billard à bande qui se joue depuis 2011 – et la première décision du TCF sur l’aide à la Grèce – entre le Tribunal, la Banque centrale européenne (BCE), la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) et les gouvernements des États membres représentés notamment par le Conseil des ministres de l’Eurozone. Hasard des circonstances ou plutôt effet fortuit de la tactique fréquemment utilisée par le Tribunal de retardement des jugements, la conclusion de cette procédure ouverte depuis 2017 intervient au moment où s’ouvre à nouveau la discussion entre les chefs d’États et de gouvernements sur les mesures de solidarité et de mutualisation des dettes à prendre entre les États de l’UE pour faire face aux conséquences économiques et financières du coronavirus.

On ne s’étonnera pas de voir cette décision qualifiée d’« ultimatum à l’Europe »1 ou encore, selon un cliché désormais bien usité, de « bombe à retardement »2 : depuis sa décision rendue sur le Traité de Maastricht en 1993, le TCF se voit doté par les commentateurs de l’actualité européenne d’un statut d’oracle et du pouvoir quasi-magique d’influer sur le futur de la construction européenne. Cette croyance, entretenue par plusieurs décisions qui figurent dans les lectures obligatoires de tout spécialiste du droit européen, est avant tout révélatrice de la forme singulière prises par les luttes politiques au sein du « champ du pouvoir européen »3. Davantage qu’un langage commun aux professionnels de l’Europe que sont les fonctionnaires de la Commission et du Conseil, le droit est en effet pour les institutions européennes un moyen d’objectiver leur pouvoir d’agir sur la politique tout en restant au-delà de la politique comprise comme expression d’une volonté démocratique potentiellement irrationnelle. Rien d’étonnant, donc, à ce que des institutions construites contre les modèles traditionnels de la légitimité démocratique et sur la revendication d’une indépendance (qu’il s’agisse de la BCE, de la Commission, de la CJUE ou du TCF lui-même) s’affrontent sur le terrain du droit ou, pour le dire autrement, pour ce « droit de dire le droit »4 qui détermine en retour leur propre légitimité à intervenir dans le champ politique. Dans ces luttes, cependant, le TCF dispose d’un avantage majeur et paradoxal sur les autres « indépendantes »5 : celui de pouvoir se poser en champion de la démocratie et de la participation des citoyens à l’élaboration des décisions européennes. La décision du 5 mai ne fait pas exception, en affirmant le droit des citoyens allemands à décider, via l’élection de leurs représentants au Bundestag, du contenu des politiques budgétaires de la BCE. L’argument central qui permet aux juges de mettre en doute la compétence de la BCE à effectuer des rachats de dette étant que cette politique outrepasse le mandat défini par le Bundestag au moment où celui-ci a autorisé, via la ratification des Traités européens, la création de la Banque centrale.

Davantage qu’un langage commun aux professionnels de l’Europe que sont les fonctionnaires de la Commission et du Conseil, le droit est en effet pour les institutions européennes un moyen d’objectiver leur pouvoir d’agir sur la politique tout en restant au-delà de la politique comprise comme expression d’une volonté démocratique potentiellement irrationnelle.

En cela, les juges donnent en partie raison aux plaignants qui les ont saisis et qui, pour la plupart, représentent une frange populiste de la droite allemande qui va de la CSU à l’AFD. Les arguments des plaignants, mainte fois relayés dans la presse allemande au cours de la crise grecque, mobilisent tout un stock d’images faisant appel au pathos de l’histoire (de la perte de souveraineté subie par les États allemands après la fondation du Reich à la prise de pouvoir par les nazis à travers le vote de la « loi des pleins pouvoirs » par le Reichstag en 19336) ou à la figure morale du « bon épargnant »7. À côté de cette rhétorique populiste, les plaignants disposent également de ce qu’on pourrait appeler un « capital expert » en s’appuyant, pour construire leur argumentation devant le Tribunal, sur des professeurs de droit, bien souvent sympathisants à leur cause. En mettant l’Europe en procès, ces arguments contribuent ainsi à alimenter une discussion inséparablement académique et politique, où les juges, eux-mêmes en majorité des professeurs de droit, interviennent au double titre de leurs fonctions judiciaires et de leur statut d’experts du droit public.

S’il est incontestable que la décision du TCF revêt une dimension politique, répondre à la question de quelle politique mènent les juges à travers elle exige de prendre en compte les contraintes propres qui pèsent sur la construction de cette position paradoxale : celle d’un Tribunal doté d’une autorité légitime en raison de son expertise tout en se positionnant en défenseur du droit à la participation démocratique – position également défendue dans le champ politique allemand par les populistes de droite. Il faut ainsi se demander quel « coup » a été joué par le TCF à travers la critique sévère à laquelle elle soumet les institutions européennes – CJUE et BCE au premier chef – sous les dehors d’une expertise juridique. Les juges de Karlsruhe œuvrent-ils, comme on a pu le croire, à rendre une autre Europe possible en pointant le déficit démocratique inhérent à la construction européenne sous sa forme actuelle ? Ou consolident-ils au contraire les options politiques majoritaires suivies par les chefs d’État et de gouvernement depuis plusieurs années ?

Les juges de Karlsruhe œuvrent-ils, comme on a pu le croire, à rendre une autre Europe possible en pointant le déficit démocratique inhérent à la construction européenne sous sa forme actuelle ? Ou consolident-ils au contraire les options politiques majoritaires suivies par les chefs d’État et de gouvernement depuis plusieurs années ?

Il s’agit donc de s’interroger sur les options politiques que le TCF contribue à renforcer ou au contraire à écarter en arrimant, comme il le fait dans sa décision, l’exercice de la volonté démocratique au cadre national allemand. En premier lieu, nous nous demanderons dans quelle mesure le concept juridique d’« identité constitutionnelle », qui constitue le prisme privilégié utilisé par le Tribunal pour penser les relations horizontales entre le droit européen et le droit national peut réellement constituer un outil de démocratisation des institutions européennes (I). Ensuite, on reviendra sur les modes de « mise en controverses » utilisées par le Tribunal pour contester à la BCE le monopole de l’expertise sur la politique monétaire et budgétaire de la zone euro (II). Enfin, la conclusion reviendra sur les relations entre le discours expert des juges et les rapports de forces internes qui se dessinent dans le champ politique allemand entre les forces progressistes et la droite réactionnaire.

I. L’« identité constitutionnelle » : l’illusion d’un fondement démocratique à la construction européenne.

Le caractère paradoxal de la stratégie poursuivie par les juges de Karlsruhe dans le combat symbolique qu’ils engagent, avec la BCE d’un côté et la CJUE de l’autre, s’exprime tout entier dans les conclusions du jugement qui reprochent à ces deux institutions indépendantes le « manque de légitimation démocratique » de leurs décisions. S’agissant de la BCE, les juges rappellent que la répartition des compétences entre cette dernière et les États-membres pèse « d’un poids considérable sur le principe démocratique et les fondements de la souveraineté populaire ». Le jugement de la CJUE portant sur la conformité du programme de la BCE avec les traités européens, quant à lui, « manque de légitimation démocratique ». Il s’agirait donc, dans les deux cas, de s’opposer à ce que des institutions indépendantes composées de membre non-élus s’affranchissent de ce qui constitue, aux yeux des juges, le fondement de leur légitimité.

On peut considérer qu’il y a bien, de la part des juges, une stratégie visant à mettre en cause, en mobilisant un arsenal de concepts juridiques qui reste à détailler, les défauts inhérents à une construction européenne dont l’objet est précisément d’isoler des secteurs entiers de l’action publique des aléas de l’expression de la volonté populaire. Cette stratégie, en réalité, n’est pas nouvelle. On peut même dire que le TCF a, au moins depuis sa décision sur le Traité de Maastricht du 12 septembre 1993, largement participé à la discussion académique sur le « déficit démocratique » de la construction européenne. Dans ce jugement dit « Maastricht », cité à huit reprises par le jugement du 5 mai, les juges de Karlsruhe définissaient les limites au-delà desquelles les transferts de compétence à l’Union européenne ne seraient plus autorisés par la Loi fondamentale – la Constitution de la République fédérale allemande. Intervenant peu de temps après la réunification des deux Allemagnes, ce jugement à forte portée symbolique affirmait que l’Union européenne constituait une « association d’États » (Staatenverbund) au sein de laquelle le seul principe démocratique valide est celui de la souveraineté de chaque peuple national pris individuellement8. Une volonté populaire européenne, qui s’exprimerait par exemple à travers le Parlement européen, y était décrite comme simplement impensable, étant donné qu’il n’existe pas de « peuple européen ».

On peut considérer qu’il y a bien, de la part des juges, une stratégie visant à mettre en cause, en mobilisant un arsenal de concepts juridiques qui reste à détailler, les défauts inhérents à une construction européenne dont l’objet est précisément d’isoler des secteurs entiers de l’action publique des aléas de l’expression de la volonté populaire

L’interprétation donnée par les juges de la Loi fondamentale a donc des conséquences non seulement en vertu de ce qu’elle prescrit – par exemple, une plus grande association des représentants élus du Bundestag aux décisions gouvernementales concernant l’UE –, mais aussi et avant tout par les stratégies de démocratisation qu’elle écarte en les rendant « non-conformes » au droit. Si elle se présente comme relativement indépendante des contraintes du contexte politique et en particulier de l’« actualité », cette dernière n’est pour autant pas figée dans le marbre. Soumise avant tout à l’opinion dominante dans l’univers de la doctrine, elle reflète les affrontements académiques qui opposent entre eux les interprètes autorisés de la Constitution que sont les professeurs de droit public. À cet égard, le jugement du 5 mai permet de relever plusieurs évolutions dans le vocabulaire mobilisé par le TCF depuis sa décision sur le Traité de Maastricht. Alors que cette dernière faisait un usage extensif de la notion d’État en insistant sur la nécessité de préserver le caractère « étatique » de la République fédérale allemande, c’est désormais « l’identité constitutionnelle » de la Loi fondamentale qu’il s’agirait de protéger. L’abandon de l’« étaticité » comme catégorie conceptuelle – qui faisait l’objet de long développements dans le jugement portant sur le Traité de Lisbonne en 2011 – se marque d’autant plus qu’il s’accompagne, dans la dernière décision en date, d’usages euphémisés aux rares endroits où elle subsiste : ainsi, le Tribunal parle-t-il des « frontières d’une étaticité ouverte »9 que l’Union européenne ne saurait dépasser ou du risque d’une « érosion continue des responsabilités des États-membres »10.

Quels sont, dès lors, les ressorts de cette « identité constitutionnelle » des États-membres promue par le Tribunal et quelles sont les voies ouvertes – ou au contraire, les sens interdits posés – pour une Union européenne vue à travers ce prisme ? En premier lieu, on peut souligner que la substitution de la référence à l’État par la référence à la Constitution comme fondement des limites posées à la construction européenne permet au Tribunal de se débarrasser d’un vocabulaire aux connotations largement conservatrices. La Constitution, au sens que lui donne la doctrine juridique allemande, constitue en effet un processus lié à un mouvement ascendant de formation de la communauté politique. La référence au respect des identités nationales des États-membres contenue dans le Traité de Lisbonne a largement été interprété par les juristes allemands comme une obligation de préserver cette forme d’auto-organisation politique propre à chacun des États-membres, à l’inverse de l’UE dont les Traités ne constituent qu’un droit dérivé de cette source originelle. Théorisée notamment au moment de Maastricht par le juriste Dieter Grimm, ancien juge constitutionnel nommé par le Parti social-démocrate allemand, la primauté de la Constitution sur l’État s’inscrivait alors dans un pôle « de gauche » au sein de la doctrine, opposée à l’opinion dominante des juristes de droite qui faisaient de l’étaticité allemande le cœur d’une souveraineté à préserver11.

La substitution de la référence à l’État par la référence à la Constitution comme fondement des limites posées à la construction européenne permet au Tribunal de se débarrasser d’un vocabulaire aux connotations largement conservatrices.

Rappeler ces débats qui forment l’arrière-fond de la dernière décision en date est d’autant plus important que l’on sait aujourd’hui que la voie dessinée pour l’Union européenne à partir de l’idée d’une préservation d’une forme de solidarité nationale incarnée par la Constitution – qu’on appellera faute de mieux « sociale-démocrate » – s’est avéré être une impasse. L’impossibilité d’imposer cette voie sociale-démocrate ne saurait être attribuée à un quelconque défaut originel : sous ses différents avatars, notamment la tentative du gouvernement grec d’Alexis Tsipras de renégocier les conditions de remboursement de la dette public grec, cette dernière s’est avant tout heurtée aux rapports de force prévalant au sein du Conseil et de la Commission de l’UE entre les gouvernements nationaux des États-membres. On peut donc entièrement partager les valeurs au nom desquelles s’élève cette critique de la construction européenne telle qu’elle s’est faite – préservation de formes de redistribution incarnées par l’État social d’après-guerre – de même que le diagnostic très général d’une tendance des bureaucraties internationales comme la Commission ou la CJUE à favoriser le libre jeu des forces du marché, tout en interrogeant l’adéquation de la stratégie intellectuelle – et ici plus particulièrement juridique – à son but. Pour Grimm, l’impossibilité pratique de contester en dehors du cadre national les tendances favorables à la marchandisation des services publics vient, comme il l’a récemment exposé, d’une « sur-constitutionnalisation » au niveau européen de certains principes de droit qui, via la jurisprudence de la CJUE, acquièrent un caractère intangible et s’imposent comme cadre indépassable à tous les acteurs européens12. Dans ce cadre, la seule contre-stratégie envisageable passe par les cours suprêmes nationales. Elle impose à celles-ci le devoir de poser des limites à la constitutionnalisation rampante du droit européen sous l’égide de la CJUE en interprétant ce droit à la lumière de ses propres pratiques et de ses propres principes d’interprétation nationaux.

Manifestement, le jugement du 5 mai s’inscrit dans le cadre d’une telle stratégie. Déjà, en adressant une question préjudicielle à la CJUE dans son jugement « OMT III », le TCF se posait en « contrôleur du contrôleur » : c’est-à-dire que ses juges demandaient à la CJUE de clarifier les modes de contrôle qu’elle exerçait sur le mandat de la BCE en se réservant, en dernier recours, le droit de juger si ce contrôle était conforme aux missions attribuées à la CJUE par les Traités européens. C’est donc à un rappel aux principes du droit – plus précisément aux principes d’interprétation des Traités européens – que s’est livré le TCF dans sa décision du 5 mai en déclarant que la CJUE avait agi ultra vires, par force plutôt que par mandat, en consacrant de fait la politique menée par la BCE de rachat des dettes publiques. Dans le même temps, les « contre-limites »13 – pour reprendre un terme emprunté à la jurisprudence italienne – posées à la constitutionnalisation des politiques publiques européennes par les juges ressortent de l’« identité constitutionnelle ». Ainsi, si les juges concluent que la politique de rachat de dette publique menée par la BCE n’outrepasse pas ces limites, ils préviennent que « la légitimation par le peuple de la puissance publique s’exerçant en Allemagne […] appartient à l’identité constitutionnelle intouchable de la Loi fondamentale (integrationsfesten Verfassungsidentität des Grundgesetzes) »14. Dès lors, « la Loi fondamentale n’autorise pas les organes gouvernementaux à procéder à des transferts de souveraineté dont l’exercice entraînerait la fondation de nouvelles compétences autonomes pour l’Union européenne »15.

Politique du droit et politique par le droit

Sous les dehors techniques de l’usage imposé par la doctrine de la notion d’identité constitutionnelle se joue en réalité une double politique. Politique du droit, tout d’abord, si l’on considère le rôle que s’attribuent les juges de gardien de l’identité constitutionnelle et la critique qu’ils adressent au jugement de la CJUE. Si l’examen par les juges du TCF de la conformité des actions de la BCE au droit européen, il s’inscrit néanmoins dans une mise en cause plus générale du monopole de l’interprétation du droit européen revendiqué par la CJUE16. Le modèle sous-jacent d’organisation du système juridique européen prôné par le TCF, où chaque juridiction suprême est à la fois gardienne de sa propre identité constitutionnelle nationale et du respect des principes généraux d’interprétation du droit européen, rencontre une adhésion au-delà des frontières allemandes17. En prenant la politique de la BCE comme une occasion d’affirmer ce modèle, les juges du TCF poursuivent en fait une politique d’internationalisation dont le futur ex-président du Tribunal, Andreas Voßkuhle a été, depuis 2011, le principal porte-parole18. Le passage de la notion très idiosyncratique d’« étaticité » à celle d’identité constitutionnelle correspond ainsi à une volonté d’afficher l’inscription du TCF dans un réseau internationalisé composé par les relations horizontales de coopération – s’opposant à l’autorité hiérarchique de la CJUE – entre les différentes juridictions suprêmes et traditions juridiques nationales. Cette politique connaît toutefois un revers : c’est par un étrange retour des choses que la juridiction suprême allemande, dont le modèle a été largement exporté dans les ex-pays soviétiques pour former la pierre angulaire des institutions de l’état de droit, se trouve par enrôlée par les gouvernements des pays où l’état de droit est aujourd’hui le plus attaqué.19

Le modèle sous-jacent d’organisation du système juridique européen prôné par le TCF, où chaque juridiction suprême est à la fois gardienne de sa propre identité constitutionnelle nationale et du respect des principes généraux d’interprétation du droit européen, rencontre une adhésion au-delà des frontières allemandes.

Les luttes qui mettent aux prises les différentes juridictions européennes – cours suprêmes des États-membres et CJUE en têtes – pour la primauté de leur interprétation du droit européen ne sauraient, cependant, expliquer à elles seuls les motivations d’un jugement qui doit tout autant aux équilibres internes au champ du pouvoir allemand et au tribunal lui-même. La position d’arbitre du jeu politique dans laquelle se retrouve placés les juges ne leur interdit pas, bien au contraire, de mener également une politique par le droit, c’est-à-dire de modifier par l’exercice même de leur impartialité les conditions de la compétition politique à proprement parler.

Ce qui vaut dans le cas où les juges se prononcent sur l’interdiction d’un parti politique l’est tout autant quand il s’agit d’envisager la compatibilité des politiques de la BCE à la Constitution allemande. Dans ce dernier cas, comme dans le jugement du 5 mai, les juges font davantage qu’indiquer une feuille de route au gouvernement allemand pour qu’il exerce correctement son rôle de surveillance et fasse respecter le mandat de la BCE. Leur décision a également une influence sur l’éventail des options politiques disponibles aux acteurs dans le cadre européen. D’un côté, en effet, ils se situent à l’extérieur de ce jeu politique en s’en tenant à la définition – nécessairement nationale – de la légitimation démocratique donnée par la Loi fondamentale. En d’autres termes, en rappelant que seules les institutions nationales (parlement, médias, etc.) appuyées sur un peuple peuvent être le lieu de formation d’une volonté collective, les juges ne prennent pas parti sur le contenu des politiques produites par cette volonté. La neutralité de cette définition a donc pour conséquence qu’elle peut faire l’objet aussi bien d’une acception « sociale-démocrate », dans le sens détaillé plus haut, que d’une acception plus « ordo-libérale » où prévaut l’interdiction de mener au niveau européen une politique qui influerait sur la répartition des risques et des primes entre les acteurs du marché. Une telle neutralité s’impose avec d’autant plus de force que les juges, nommés sur proposition d’un des grands groupes politiques représentés au parlement se voient attribués de fait une affiliation partisane et qu’il est par conséquent nécessaire de neutraliser ces divisions politiques par la recherche d’un consensus « en droit ».

D’un autre côté, certains des juges qui siègent au tribunal prennent à leur compte une fonction de porte-parole de leur institution dans lequel ils se font les interprètes de leur propre jugement et contribuent à faire advenir les « effets » qui y sont prophétisés. Dans sa fonction de président du second Sénat puis de président du Tribunal, Andreas Voßkuhle a ainsi maintes fois indiqué par voie de presse les recommandations du Tribunal pour l’Union européenne pendant la crise de l’euro, tout en jouant un rôle actif, à travers des entretiens accordés à des médias étrangers ou l’organisation de conférences, dans la stratégie déjà évoquée d’internationalisation du Tribunal. Nommé par le Parti Social-Démocrate à la suite du retrait du candidat favori Horst Dreier, Voßkuhle s’est présenté en digne successeur de D. Grimm en cumulant une brillante carrière universitaire avec un rôle d’intellectuel public. Une autre figure importante du Tribunal est, depuis Maastricht, le juge chargé des affaires européennes – fonction qui échoit en règle générale à un juge nommé par la CDU/CSU. Le détenteur actuel de ce poste stratégique, Peter Huber, dont le mandat arrive à échéance en même temps que celui du président Voßkuhle, présente comme certains de ces prédécesseurs (Paul Kirchhof, Udo Di Fabio) une carrière caractéristique du monde universitaire allemand, qui cumule les attributs de l’excellence académique avec des fonctions d’expertise politique. Professeur de droit public, Huber est un spécialiste de longue date du droit de l’UE et par ailleurs co-responsable de l’édition d’un manuel de référence en allemand abondamment cité par le jugement – le Ius Publicum Europaeum. Avant sa nomination au Tribunal, il a brièvement occupé un poste de ministre dans l’État fédéré de Thuringe. Cette double qualité de théoricien et de praticien de la politique permet d’expliquer pourquoi les prises de position publiques de tel juge prennent une valeur particulière dans le jeu politique allemand et européen. Lors de ses prises de fonctions, Huber a ainsi pu expliquer que la Loi fondamentale excluait, de son point de vue, qu’un « gouvernement économique » européen puisse voir le jour20. Il s’agit de faire valoir que la responsabilité budgétaire de chaque État-membre doit être préservée au nom du « principe démocratique » et qu’une mutualisation des dettes aurait pour effet de laisser les mauvais élèves échapper aux conséquences de leurs choix économiques.

Il s’agit de faire valoir que la responsabilité budgétaire de chaque État-membre doit être préservée au nom du « principe démocratique » et qu’une mutualisation des dettes aurait pour effet de laisser les mauvais élèves échapper aux conséquences de leurs choix économiques.

La théorisation des « limites » de l’identité constitutionnelle a donc pour corollaire la consécration d’une séparation infranchissable entre la sphère de la destinée collective – à laquelle est associé la faculté de faire des choix, par exemple d’endettement, qui engagent le futur – et la sphère des institutions indépendantes – responsables du strict respect des « règles du jeu », notamment de la gestion des principes monétaires en ce qui concerne la BCE. La stratégie juridique du TCF se heurte dès lors frontalement – comme le montrent notamment les propos de Huber – à une stratégie de démocratisation des institutions européennes. Les principes édictés par la « doctrine », c’est-à-dire la communauté savante à laquelle appartiennent les juges, restent au contraire structurellement liés au respect de dichotomies (entre « politique monétaire » et « politique économique », entre sphère de la souveraineté démocratique et règles techniques du marché) qui interdisent de faire de l’Europe le lieu d’exercice d’une solidarité démocratique. C’est seulement à la lumière de ces principes que l’on comprend l’accent mis par les juges, dans leur décision du 5 mai, sur la neutralité des « règles du jeu » monétaires comme garantie de l’action autonome des acteurs économiques – y compris des États. Les remèdes prescrits au « manque de légitimation démocratique » des décisions prises par les institutions qui sont en principe les garantes de cette neutralité (CJUE et BCE) ne peuvent, dès lors, qu’apparaître relativement banals au regard du diagnostic. Le contrôle de ces règles ne peut être exercé, en effet, que par des institutions démocratiquement légitimées : gouvernement et parlement allemand en tête, qui sont explicitement visées dans le jugement du 5 mai.

II. Une mise en transparence en trompe-l’œil : politique de l’expertise et controverses autour de la BCE

Le jugement du 5 mai a donc ceci de remarquable qu’il constitue une tentative assez inédite de résoudre l’écart, ou plutôt la contradiction, entre les formes instituées de la démocratie parlementaire fondée sur la souveraineté du peuple et la montée en puissance, dont la construction européenne est un avatar, d’institutions « indépendantes » qui tirent leur légitimité de la conformité de leur action à des objectifs d’ordre technique – tel par exemple les objectifs de stabilité monétaire définis dans le mandat de la BCE. Comment assurer la légitimation démocratique d’institutions qui ont été créées pour isoler une partie de la décision publique des aléas de la compétition politique ? La question apparaît relativement ancienne : la nature relativement inédite de ces institutions a d’ailleurs fait l’objet, depuis les années 1930, d’une série de débats théoriques portant sur leur catégorisation juridique et les modalités de leur contrôle, y compris juridictionnel. Dans le cadre de la construction européenne, le juriste Hans Peter Ipsen a par exemple proposé dès les années 1950 de conceptualiser les institutions communautaires comme relevant d’une « association ayant pour finalité l’intégration », arguant que la nature fonctionnelle des institutions européennes appelait à développer des critères de légitimité différents de ceux qui s’appliquent traditionnellement aux institutions étatiques. Elle présente, du point de vue du TCF, un double enjeu. D’un côté, il s’agit de jouer dans la configuration transnationale des institutions indépendantes, formée par les institutions comme la BCE, la CJUE ou les banques nationales qui tirent leur pouvoir de leur capacité à « ne pas faire de politique ». De l’autre, la position des juges les oblige à reproduire le fondement symbolique de leur propre action, c’est-à-dire leur capacité à parler en lieu et place d’un sujet démocratique abstrait – le « peuple ».21

Comment assurer la légitimation démocratique d’institutions qui ont été créées pour isoler une partie de la décision publique des aléas de la compétition politique ?

La longue série de procédures engagées depuis 2011 devant le TCF – à la suite des propos du président de la BCE d’alors, Mario Draghi, selon qui son institution sauverait la monnaie unique « whatever it takes  » – a donc également pour enjeu de déterminer la valeur relative de l’expertise au nom de laquelle des institutions indépendantes peuvent décider de mesures qui auront nécessairement des effets « politiques ». La stratégie adoptée par les juges tout au long de ces procédures de mener des audiences publiques convoquant des « experts » des marchés financiers et des politiques économiques doit sans doute beaucoup à la transformation majeure qui s’est accomplie depuis 2010 et la signature du Traité de Lisbonne du « champ du pouvoir européen ». Alors que la configuration de cet espace favorisait depuis Maastricht les stratégies « réformatrices », portées en particulier par les membres du Parlement européen et par certaines bureaucraties nationales et aboutissant régulièrement à des « conventions » et autres réécritures des Traités, la crise de la zone euro a largement acté la mise à l’écart de ces stratégies au profit de négociations menées dans des arènes diplomatiques restreintes entre les représentants des chefs d’État et de gouvernement. Cette fermeture du jeu européen, dont témoigne par exemple la montée en puissance de groupes de négociations informels comme l’Eurogroupe, a eu pour effet de rendre d’autant plus vital, pour les acteurs qui prétendent s’y maintenir, la possession de ressources expertes voire, comme dans le cas du TCF, l’acquisition d’une « expertise sur l’expertise ».

Les arguments développés par la décision à l’encontre de la CJUE et de la BCE – y compris l’injonction adressée à cette dernière de rendre publics dans un délai de six mois les éléments qui ont servi de base à la décision de lancer le programme de rachat de dette22 – portent sur les critères procéduraux – discussion contradictoire, évaluation de la proportionnalité des moyens aux objectifs poursuivis – auxquels devrait se conformer la prise de décision au sein de ces deux assemblés. Tout en reconnaissant que l’indépendance d’une institution comme la BCE entraîne un « abaissement du niveau de légitimation démocratique », les juges en fixent les conditions d’exercice. À travers cet ensemble de critères, le jugement reconnaît une certaine spécificité aux institutions indépendantes, soumises à une logique de justification a posteriori – selon le modèle de l’accountability – plutôt qu’à une légitimation démocratique.

Le recours inhabituel à des sources non-juridiques comme des rapports d’analyse économique dans le jugement traduit en outre, de la part des juges, la nécessité d’investir le terrain de l’expertise économique. À bien des égards, en organisant au cours d’audiences publiques la confrontation les différents points de vue de la science économique sur les effets possibles de la politique de rachat de dette publique menée par celle-ci, le Tribunal s’est positionné comme un forum de substitution au directoire de la BCE. Il permet, en outre, d’adresser à la BCE une injonction à la mise en transparence de ses décisions, en lui reprochant, ainsi qu’à la CJUE, de ne pas avoir suffisamment pris en compte les études portant sur les effets probables sur le marché de la décision de rachat des dettes publiques23.

Le recours aux experts tant dans le texte du jugement que lors des audiences publiques organisées en juillet 2019 participe ainsi d’une « mise en transparence » du fonctionnement de la BCE et du Système européen des banques centrales. On peut néanmoins se demander dans quelle mesure cette mise en scènes des « batailles d’experts » autour des politiques économiques et monétaires contribue à ouvrir le jeu européen, dans le sens par exemple où elle permettrait la confrontation souhaitable entre plusieurs options politiques opposées. En effet, même si le Tribunal ne se prononce pas sur les finalités politiques que pourraient poursuivre les politiques monétaires, il reconnaît que la prise de décision doit avant tout ressortir du champ de la confrontation de points de vue d’experts. C’est bien là tout le paradoxe, déjà largement décrit par la science politique, des injonctions à la « transparence »24. En servant de principe de substitution à la mise en concurrence de différentes options politiques, la transparence permet de légitimer un processus de décision d’où sont exclus les « citoyens ordinaires » au profit d’experts ou de représentants de groupes d’intérêts. En s’appuyant extensivement sur les « études » et les analyses objectives, le Tribunal ne fait rien d’autre que qu’entretenir la croyance dans la neutralité possible d’une science économique qui devrait constituer le fondement de l’action de la BCE, et renforce par-là la frontière établie entre politique et expertise.

Même si le Tribunal ne se prononce pas sur les finalités politiques que pourraient poursuivre les politiques monétaires, il reconnaît que la prise de décision doit avant tout ressortir du champ de la confrontation de points de vue d’experts.

La décision du 5 mai n’entraîne donc pas de reconfiguration des rapports entre savoir(s) et pouvoir dans l’espace des institutions européennes : elle aboutit davantage à un renforcement – renforcement paradoxal si l’on se place du point de vue d’une mise en discussion souhaitable des politiques monétaires et économiques – du pouvoir des experts de fixer en dehors d’un cadre démocratique les décisions concernant les citoyens européens. Les conclusions du Tribunal, d’un autre côté, accréditent dans une certaine mesure la stratégie de politisation des politiques monétaires poursuivis par les plaignants. Les juges concluent en particulier que le PSPP, en l’absence de justifications produites par la BCE, pourrait avoir des effets asymétriques sur les différents acteurs du marché et en particulier défavoriser les épargnants. Il s’agit donc bien, selon les mots du Tribunal, d’empêcher que les effets politiques des mesures de la BCE soient occultés par un manque de transparence ou de mise en délibération de son processus de décision. Mais la mise en procès des politiques de la BCE n’a pas des effets équivalents sur les positions défendues de part et d’autre du spectre politique. Au contraire : alors que les coalitions de plaignants de gauche, comme celle des partis Die Linke ou de l’association Mehr Demokratie n’ont été que peu visible dans les principaux journaux allemands, les positions défendues par les experts issus la droite allemande – dans une constellation qui s’étend de la CDU à l’AFD – en expertise visant à montrer que les politiques de la BCE présentaient des effets négatifs pour les épargnants allemands ont été au cœur des débats. Le fait que ces positions aient été portées, au cours des audiences publics, par des universitaires – qu’il s’agisse de professeurs de droit comme Dietrich Murswiek ou d’économie comme Markus Kerber – ont permis de les faire valoir comme une forme d’expertise hybride, jouant à la fois sur le registre de l’objectivité et de la défense des citoyens allemands face aux décisions de l’UE et du gouvernement allemand.

Les débats à double fond menés lors des audiences publiques – débat sur les procédures de la BCE d’un côté, débat sur les conséquences économiques de ses politiques de rachat de dettes de l’autre – ont au minimum conduit à brouiller les frontières entre les formes instituées de la controverse scientifique et celles du débat démocratique. Ne répondant ni aux critères d’une discussion scientifique « entre pairs » ni à celle de l’échange d’arguments politiques, la nature hybride du procès n’a pas permis que se produisent des effets de reconfigurations des positions qui s’y affrontent. On peut faire l’hypothèse que, plutôt qu’à exposer le procès de construction de l’expertise, la configuration des débats a plutôt aboutit à flouter la distinction entre les usage légitimes de l’expertise – soumis à la discussion entre pairs – et l’expertise produite par des experts auto-institués qui représentent les plaignants.

III. Rouvrir le jeu européen ? Les perspectives du jugement

La conjonction de la crise du coronavirus et du jugement du TCF sur l’euro a pu laisser entrevoir à certains commentateurs la perspective d’une « refondation » démocratique de l’UE, basée sur la mutualisation des risques financiers et une redistribution horizontale (via l’idée d’une prise en charge d’une partie de l’assurance-chômage par la Commission européenne, en particulier) entre les pays du Nord et du Sud de l’Europe. La proposition portée par Angela Merkel et Emmanuel Macron de création d’un emprunt européen tire d’ailleurs admirablement parti de cette conjoncture : tout en allumant un contre-feu à la décision du TCF, elle incarne déjà pour certains – avant même d’avoir passé l’épreuve de la négociation intergouvernementale – le « moment hamiltonien » qui marquerait le saut tant espéré de l’UE vers une structure fédérale.

S’il n’est pas étonnant que la conjoncture actuelle suscite des réflexions sur l’avenir de l’UE et permette à chacun des acteurs de faire valoir des positions plus ou moins « réformatrices »25 – suivant en cela un schéma bien établi de la politique européenne –, on peut néanmoins douter que la décision du 5 mai contribue de manière décisive à rebattre les cartes entre les institutions indépendantes comme la BCE, la CJUE ou la Commission, d’un côté, et les chefs d’État et de gouvernement, de l’autre. Les réactions mesurées de ces différents acteurs envers le jugement en fournissent d’ailleurs un indice, tout comme les concessions accordées en quelque sorte par avance par le gouvernement allemand, qui conditionne la création d’un emprunt commun aux États-membres à l’approbation du Bundestag.

Il serait illusoire de penser que le jugement du TCF entraîne par lui-même une avancée vers une rénovation démocratique de l’architecture institutionnelle européenne. Le diagnostic posé par le Tribunal entérine en fait largement le statu quo entre institutions indépendantes et institutions issues de manière plus ou moins indirecte du vote des citoyens. Tout porte à croire, en outre, que la marginalisation croissante des institutions législatives – parlements nationaux et européen – dans le jeu européen depuis la crise grecque est un phénomène structurel que l’invocation rituelle par le Tribunal du rôle de contrôle du Bundestag ne suffira pas à enrayer. Les propos du juge Peter M. Huber, qui reconnaît que le Tribunal ne peut se prononcer sur la mise en œuvre de ce contrôle qu’il a lui-même prescrit, peuvent ainsi se lire comme un aveu des limites de ce jugement26.

Il serait illusoire de penser que le jugement du TCF entraîne par lui-même une avancée vers une rénovation démocratique de l’architecture institutionnelle européenne. Le diagnostic posé par le Tribunal entérine en fait largement le statu quo entre institutions indépendantes et institutions issues de manière plus ou moins indirecte du vote des citoyens.

En dépit de cette relative innocuité, on ne saurait en revanche exclure que le jugement serve à renforcer les positions de certains acteurs au sein de la configuration future qui aura pour objet de décider l’avenir pour l’Union économique et monétaire. Nous avons déjà pointé le rôle joué par le Tribunal dans la qualification d’un consensus à partir des positions partagées par la droite des partis gouvernementaux (CSU-CDU en tête) et l’AFD – consensus qui met en avant les coûts supportés par les épargnants allemands des politiques monétaires de la BCE. De ce point de vue, le double-jeu du Tribunal sur l’expertise et la défense des droits des « citoyens ordinaires » favorise structurellement l’expression des forces politiques qui ont fait de la défense du peuple allemand contre Bruxelles leur principe de positionnement. Mais d’autres usages sont possibles, qui, de manière plus ou moins indépendante de la politique menée par le Tribunal lui-même, pourraient au contraire amener à rouvrir le débat sur les bases politiques de la solidarité européenne. On pense ici en particulier aux nombreuses voix de gauche, à l’instar d’un Wolfgang Streeck, qui pourraient également trouver dans ce jugement matière à alimenter une réflexion critique sur l’architecture actuelle de la zone Euro.

Sources
  1. « L’Europe au défi des juges allemands », Le Monde, 7 mai 2020
  2. Martin Sandbu, « German court has set a bomb under the EU legal order », Financial Times, 5 mai 2020
  3. D. Georgakakis, « La sociologie historique et politique de l’Union européenne : un point de vue d’ensemble et quelques contre points », Politique europeenne, 1 décembre 2008, n° 25, no 2, p. 53‑85
  4. P. Bourdieu, « La force du droit », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1986, vol. 64, no 1, p. 3‑19.
  5. A. Vauchez, Démocratiser l’Europe, Seuil, 2014
  6. P. Gauweiler, « Peter Gauweiler zur Zukunft Europas : Alles so großtuerisch, so herzlos und leer ! », FAZ.NET, 1er août 2012, « Peter Gauweiler : “Das wäre die Atombombe” »
  7. P. Gauweiler, « Wer spart, geht am Ende leer aus », FAZ.NET, 8 décembre 2012.
  8. C. Majastre, « Penser l’État contre l’Europe », Revue française de science politique, 5 mars 2019, Vol. 69, no 1, p. 117‑136.
  9. BVerfG, Urteil des Zweiten Senats vom 05, mai 2020, 2 BvR 859/15 -, 115
  10. Ibid., Leitsätze, 4.
  11. V. par exemple Dieter Grimm, « Der Mangel an europäischer Demokratie », Der Spiegel, 19 octobre 1992, p. 57.
  12. Dieter Grimm, Europa ja – aber welches ? zur Verfassung der europäischen Demokratie, München, C.H. Beck, 2016, p. 287.
  13. Peter L. Lindseth, Power and Legitimacy : Reconciling Europe and the Nation-State, Oxford University Press, 2010, p. 364.
  14. Voir notamment BVerfG, Urteil des Zweiten Senats vom 30. Juli 2019, BVerfGE 151, 202-374, p. 119.
  15. Urteil des Zweiten Senats vom 05, BVerfG, Mai 2020- 2 BvR 859/15 -, p. 156.
  16. B. Davies, Resisting the European Court of Justice : West Germany’s confrontation with European law, 1949-1979, Cambridge University Press, 2012, p. 248
  17. La comparaison entre les différentes acceptions nationales du principe de proportionnalité employée par le jugement du 5 mai témoigne de cette volonté (Ibid., p. 125).
  18. A. Voßkuhle, « Der europäische Verfassungsgerichtsverbund », TranState Working Papers, 2009, p. 106
  19. « EU droht Deutschland mit Verfahren », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 9 mai 2020.
  20. « Keine europäische Wirtschaftsregierung ohne Änderung des Grundgesetzes », Süddeutsche Zeitung, 14 septembre 2011, p. 6-7.
  21. Rappelons que les jugements du Tribunal sont proclamés «  in Namen des Volkes », au nom du peuple.
  22. Depuis la décision, le directoire de la BCE a transmis un ensemble de documents au ministère allemand des finances qui les a à son tour transmis aux députés du Bundestag. Selon le commentaire du ministre, Olaf Scholz, la transmission de ces documents permet de « remplir les exigences du jugement du 5 mai. » (V. Manfred Schäfers et Christian Siedenbiedel « Bundesregierung : EZB hat Urteil aus Karlsruhe erfüllt », FAZ.NET, 29 mai 2020
  23. BVerfG, Urteil des Zweiten Senats vom 05. Mai 2020- 2 BvR 859/15, p.137
  24. [1] H. Michel, « Promesses et usages des dispositifs de transparence : entre approfondissement et redéfinition de la démocratie », Revue française d’administration publique, 30 juillet 2018, N° 165, no 1, p. 5‑15.
  25. Un exemple éloquent de ces « nouvelles » ambitions réformatrices est fourni par la tribune signée par le président du Bundestag et ancien ministre des finances allemands Wolfgang Schäuble qui prône désormais la construction d’une véritable union économique dessinée par la Convention pour le futur de l’Europe (« Aus eigener Stärke », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 6 juillet 2020, p. 6.)
  26. « Genügt die EZB Ihren Anforderungen, Herr Huber ? », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 29 juin 2020, p. 19.