Kinshasa. Selon certains journalistes et observateurs, la nouvelle de la culpabilité de Bosco Ntaganda a été accueillie avec un mélange d’indifférence et d’optimisme de la part du peuple congolais. La Cour pénale internationale a reconnu Bosco Ntaganda coupable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité pour des faits commis dans les provinces de l’Est congolais en 20091. Ntaganda et Laurent Nkunda étaient au centre du rapprochement historique entre Kagame et Kabila et des programmes de médiation entre l’armée de Kinshasa et les milices travaillant sur le terrain2. Sa figure, à l’instar de celle de Nkunda, dont il était lieutenant, fait partie d’un passé récent dont la République démocratique du Congo a tendance à se souvenir avec la crainte que cela ne se reproduise. Un exemple frappant est le mandat d’arrêt du tribunal du Nord-Kivu contre Guidon Shimiray Mwissa, seigneur de guerre de Nduma Defence of Congo (NDC)3.

Les crimes de guerre de Ntaganda ont principalement eu lieu dans les provinces de l’est de la RDC en 2009. Le rapprochement spectaculaire et historique entre Kagame et Kabila cette année-là a favorisé la définition d’opérations militaires conjointes contre les FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda), connue sous le nom de milice rwandaise hutu. Le premier, appelé « Umoja Wetu », prévoyait une coopération directe entre les deux pays, tandis que le second, « Kimia II », était mené avec la collaboration des forces de la MONUC. La raison la plus intéressante est le soutien ouvert au CNDP, qui a conduit à la destitution de Laurent Nkunda et à la montée en puissance de Ntaganda. La parabole de ces années est particulière, compte tenu du soutien que deux puissances régionales ont ouvertement assuré à une milice qui exerçait une violence gratuite contre des civils (avec la mort de 1400 personnes et au moins 7000 cas d’abus sexuels en 2009-2010). Ce qui devait être un processus de renforcement des forces armées de l’État, avec l’intégration du CNDP dans l’armée congolaise, s’est révélé être une source de fragilité institutionnelle dans les provinces orientales, aggravant la situation critique de la souveraineté congolaise depuis la fin de la deuxième guerre du Congo ( 1998-2003)4.

La condamnation définitive de Ntaganda n’a pas encore été annoncée, mais c’est déjà une source d’embarras pour Kinshasa. La saison diplomatique innovante et prometteuse inaugurée en 2009 n’a pas atténué les problèmes cycliques de la RDC en définissant un schéma clair de médiation et d’union des différentes milices présentes sur le terrain. Felix Tshisekedi considère cette question comme un dossier central, mais les politiques en la matière sont encore très stériles5. En effet, les signaux politiques les plus importants proviennent encore des petites réalités régionales. C’est le cas de Guidon Shimiray Mwissa, chef de guerre local, qui a reçu un mandat d’arrêt par la petite cour du Nord-Kivu. Guidon, chef du groupe armé de la défense Nduma du Congo, est accusé de crimes contre l’humanité et de participation à un mouvement d’insurrection6. Ce personnage, qui a mérité les honneurs de l’actualité locale au cours des derniers mois, est issu d’une série de réseaux de favoritisme qui s’apparentent davantage à la privatisation de la violence qu’à des motivations claires d’origine ethnique. Selon le procureur du Nord-Kivu, l’augmentation des affaires de violence à l’encontre des civils et de la population féminine dans certaines régions de l’est du pays (Nord-Kivu, Ituri) est due à l’action de la petite milice. Sur le plan politique, cette initiative est très importante, compte tenu de la proximité du Nord-Kivu avec l’Ituri, véritable pivot de la sécurité pour Kinshasa en raison des Alliances des forces démocratiques (ADF).

Perspectives :

  • La défense Nduma du Congo a été touchée par les programmes de cooptation en faveur des forces armées, en fonction d’un soutien futur aux opérations contre les ADF. L’action de cette milice est le symbole de la fragilité des opérations d’inclusion militaire et sociale des militants dans les structures de l’État.