Varsovie. « La présence constante des troupes américaines en Pologne constitue l’essentiel de la sécurité polonaise », selon Mariusz Błaszczak, le ministre polonais de la Défense. En effet, le renforcement du flanc Est de l’OTAN serait un facteur d’augmentation de la capacité de dissuasion de la région centre-européenne. Et ceci, à son tour, est étroitement lié à l’amélioration de la mobilité des troupes qui sera mise en œuvre dans le cadre de l’initiative européenne de défense PESCO (Permanent Structured Cooperation).

Comme le secrétaire général Jens Stoltenberg l’a souligné lors de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN à Varsovie (25-28.05.2018), « une Union européenne plus forte est une OTAN plus forte ». À la fin du mois de mai 2018, le Sénat américain a inscrit dans le rapport sur les dépenses pour la défense en 2019 une obligation de préparer un rapport sur la possibilité de présence permanente de la brigade des États-Unis en Pologne. Comme l’a rappelé à plusieurs reprises le général Ben Hodges, ancien commandant de l’armée américaine en Europe, l’isthme de Suwałki peut être considéré comme le talon d’Achille de l’Alliance et tout doit être fait pour renforcer cette position. À son avis, la menace de la Russie reste réelle (1).

Cependant, Bailey Hutchison Kay, la représentante américaine auprès de l’OTAN, a déclaré lors d’une réunion des ministres de la Défense de l’OTAN à Bruxelles (7-8.06.2018) qu’« actuellement il n’y a pas de plans pour une nouvelle base permanente en Pologne. » À son tour, Stoltenberg a souligné que les troupes de l’OTAN et des États-Unis sont déjà présentes en Pologne et que les États-Unis souhaitent accroître leur présence en Europe (2). En même temps, les ministres de la Défense des États membres de l’OTAN ont approuvé l’initiative « 4 fois 30 », qui consiste à augmenter la disponibilité des forces alliées en Europe. Le ministère polonais de la Défense n’a pas dit pour l’instant quelle sera la contribution polonaise à ce programme, mais la décision de l’Alliance est très bien vue par les autorités polonaises (4).

Du point de vue polonais, cette solution est avantageuse. Pourtant, la Pologne ne peut pas négliger de construire sa propre capacité de défense. Elle continue cependant à oeuvrer pour que la présence américaine de rotation évolue en une présence permanente, qui pourrait appuyer durablement la sécurité des pays du flanc Est et des pays d’Europe occidentale.

La pression des Américains sur la Pologne est énorme. C’est pourquoi les Polonais veulent être un intermédiaire entre Bruxelles et Washington. Ainsi, l’affaire se complique. Les garanties américaines de sécurité ne peuvent pas dépendre de l’accord total de la Pologne avec les États-Unis. Le différend transatlantique est d’ailleurs plus large puisque, le 10 juin, Trump a retiré sa signature sur la déclaration à la fin du sommet du G7 au Canada.

Le leadership américain sera-t-il, selon l’interrogation d’Henry Kissinger, irremplaçable (3) ?

Perspectives :

  • 11-12 juillet 2018 : Sommet de l’OTAN à Bruxelles. L’Alliance réfléchira sur le temps nécessaire  pour déplacer le plus rapidement et le plus efficacement possible des forces dans la zone menacée, dont la tâche sera de soutenir ceux qui sont déjà en place. L’initiative « 4 fois 30” en fait partie.
  • Ce sera également l’occasion de décider de renforcer la disponibilité de l’ensemble de l’Alliance.

Sources :

  1. Interview avec Ben Hodges, Dziennik Gazeta Prawna, 06/11/2018.
  2. HUTCHISON Kay Bailey, U.S. Permanent Representative to NATO, NATO Press Briefing, 06/06/2018.
  3. KISSINGER Henry, Porządek światowy, Wołowiec, Wydawnictwo Czarne, 2016, p 347.
  4. Les ministres de la Défense s’apprêtent à approuver une initiative pour la disponibilité opérationnelle de l’OTAN, OTAN, 06/07/2018.