Europe

Friedrich Merz : l’Allemagne et la fin de la Pax Americana (texte intégral)

Près de huit mois après son entrée en fonctions en mai 2025, Friedrich Merz a proclamé la fin de la Pax Americana en Europe et comparé explicitement l’attitude de la Russie de Poutine à celle de l’Allemagne nazie.

Nous traduisons et commentons le discours de Munich du chancelier allemand.

Auteur
Pierre Mennerat
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À l’occasion du congrès de l’Union chrétienne sociale (CSU), le frère bavarois de sa propre Union chrétienne démocrate (CDU), Friedrich Merz est revenu dans la ville où, en février dernier, le vice-président américain J. D. Vance faisait la leçon à l’Europe en s’immisçant dans le processus électoral allemand. Face aux militants bavarois, le chancelier invoque à plusieurs reprises sa responsabilité historique.

Dans un premier temps du discours, le chancelier défend son programme économique résolument orienté vers l’offre pour relancer la croissance industrielle et sortir de « dix ans de stagnation ». Le programme des  « Merzonomics » repose sur quatre piliers : la baisse des impôts de production, la baisse des coûts de l’énergie, la débureaucratisation et la baisse des coûts du travail par le dialogue entre partenaires sociaux.

Toute la doctrine Merz repose sur ce retour à la puissance économique : « Il s’agit de rétablir la compétitivité de notre économie, ce qui prime en effet sur tout le reste, au-delà même de la défense de la liberté et de la paix. »

On retrouve cette volonté de dérégulation transposée également au niveau européen.

Pour le chancelier, l’Allemagne est sans équivoque le pays leader de l’Union, qui donne le ton et inspire ses voisins — que ce soit sur la dérégulation ou la remise en cause de la sortie du moteur à explosion. Sur le plan écologique aussi, Merz conditionne l’approfondissement des efforts contre le réchauffement climatique à la reprise économique, sans laquelle, selon lui, l’Allemagne ne peut rien.

Pourtant, lui qui n’a pas manqué par le passé de ferrailler contre la gauche ménage rhétoriquement son partenaire de coalition, le Parti social-démocrate (SPD), saluant son aggiornamento sur la réforme des retraites qui instaure une part de capitalisation, et estimant que le parti est à l’heure actuelle le seul partenaire avec lequel il est possible d’appliquer son programme de réforme.

Selon le plus récent baromètre politique du Forschungsgruppe Wahlen, la CDU/CSU obtiendrait en cas d’élections 26 % des suffrages, talonnée par l’AfD à 24 %.

Le SPD serait à 14 % des votes, suivi par les Verts à 12 % et Die Linke à 11 %

Atlantiste déçu, Friedrich Merz prend acte dans un second temps de la nouvelle stratégie de défense et de sécurité américaine.

Son programme international tient à nouveau en quatre points très succincts : « Aider l’Ukraine tant qu’elle en a besoin, maintenir la cohésion au sein de l’Union européenne, préserver l’alliance de l’OTAN aussi longtemps que possible et, enfin, investir massivement dans notre propre capacité de défense. »

L’admission que l’OTAN est désormais en sursis et pas nécessairement appelée à durer représente en soi une évolution — y compris face au discours sur les questions internationales de Merz de début janvier à la Körber-Stiftung de Berlin.

Autre élément de la Zeitenwende : le rétablissement d’un service militaire, initialement sur la base du volontariat avec une transformation potentielle en service obligatoire.

Néanmoins plusieurs sujets cruciaux restent absents du discours : la question de la dissuasion nucléaire — une prudence qui peut s’expliquer par l’attente de la prise de parole du chef de l’État français Emmanuel Macron sur le sujet, prévue début 2026 — et la participation éventuelle de la Bundeswehr à une solution pour garantir un cessez-le-feu en Ukraine. 

Enfin, Friedrich Merz, qui cite Max Weber et Christopher Clark, a conscience que son gouvernement a besoin « de récits et de stratégies » pour conduire l’Allemagne dans cette période de turbulences.

La réponse du chef du gouvernement allemand tient en deux points : « le rétablissement de la compétitivité de notre économie et la mise en place d’une capacité de défense pour notre pays sont les deux tâches centrales qui attendent le gouvernement fédéral que je dirige au cours des prochaines années. »

Cher Markus Söder, cher Edmund Stoiber, cher Theo Waigel, cher Alexander Hoffmann, chers collègues du gouvernement fédéral, du gouvernement de Bavière, du Parlement européen, du Bundestag, du Landtag de Bavière, chers amis de la CSU,

Merci beaucoup de votre accueil amical : je me sens ici chez moi.

La relation d’amitié affichée entre le chef de la CDU et la CSU est certes chaleureuse, mais le ministre-président bavarois Markus Söder représente à la fois le plus grand soutien et le plus grand concurrent potentiel de Friedrich Merz pour la tête de l’Union CDU/CSU et la chancellerie.

Je me réjouis de pouvoir être ici en tant que chancelier de la République fédérale d’Allemagne avec un gouvernement qui compte trois ministres forts issus de la CSU. 

Mais chers amis, le plus important est qu’après trois ans et demi dans l’opposition, l’Union de la CDU et de la CSU est à nouveau au gouvernement. Nous y sommes arrivés ensemble en février. Nous sommes aux responsabilités et nous savons ce que cela signifie. Nous avons pris nos fonctions dans des temps exceptionnellement difficiles, et nous savons que nous devons travailler sur beaucoup de sujets, résoudre beaucoup de problèmes, qui longtemps, trop longtemps, ont été ignorés en Allemagne. 

Mais chers amis, il n’y a pas que les élections fédérales, les élections européennes précédentes, les dernières élections régionales en Bavière et dans d’autres Länder de la République fédérale d’Allemagne, les élections municipales sont également importantes. Et comme ce congrès de la CSU a lieu quelques semaines avant les élections municipales en Bavière, je tiens à le dire d’emblée. Chers amis, et je le dis avec la plus profonde conviction, les élections municipales sont peut-être les élections les plus importantes pour la stabilité de notre démocratie, pour l’expérience des citoyens de notre pays avec et vis-à-vis de la politique, lorsqu’il s’agit de transmettre un sentiment aux citoyens. Les politiciens qui se sont vu confier cette responsabilité savent de quoi il s’agit. Ils résolvent les problèmes. C’est pourquoi je tiens à vous souhaiter dès aujourd’hui bonne chance et beaucoup de succès pour les élections municipales en Bavière le 8 mars prochain. C’est au niveau municipal que se révèlent le visage des partis politiques et les capacités des maires, des présidents de district, des députés dans les assemblées municipales. 

C’est pourquoi, cher Markus, la direction de la CSU s’est précisément fixée cette tâche. Je te félicite, ainsi que tous ceux qui ont été réélus au Comité directeur de la CSU, et je te souhaite, ainsi qu’à tous les autres, une bonne continuation dans la collaboration entre la CDU et la CSU. Nous avons fait nos preuves dans cette collaboration. Nous l’avons vécue tous les deux ces dernières années et je souhaite qu’elle s’applique aux deux parties de l’Union, en particulier au sein du groupe parlementaire au Bundestag. C’est pourquoi je tiens également à te remercier chaleureusement, cher Alexander Hoffmann, pour ta direction du groupe régional de la CSU au Bundestag allemand. Je vous souhaite une bonne continuation, chers amis, dans la grande Union formée par la CDU et la CSU. Markus Söder et moi-même nous y engageons. C’est pourquoi je souhaite que nous continuions à travailler ensemble à l’avenir comme nous l’avons fait ces dernières semaines et ces derniers mois. C’est notre atout majeur. Personne ne peut nous enlever cette communauté parlementaire, cette communauté formée par la CDU et la CSU, personne ne nous l’enlèvera et c’est elle qui fait notre succès commun. Cher Markus, je nous souhaite une bonne continuation dans notre collaboration.

Chers amis, je l’ai dit au début, nous faisons face à de grands défis, non seulement en politique intérieure mais aussi en politique internationale. Et nous sommes prêts à leur faire face. Nous avons une structure de valeurs, une image de l’Homme, une politique fermement ancrée dans l’image chrétienne de l’Homme, que nous envisageons et vivons depuis 80 ans ensemble. Et peut-être puis-je citer ici à Munich quelqu’un qui compte parmi les grandes références de la politique du siècle dernier et dont les mots ont encore en ce siècle une grande importance.

Vous le savez probablement tous, le grand sociologue Max Weber a passé ses dernières années à Munich, dans le quartier de Schwabing. Il a donné son dernier cours à l’Université de Munich, et il est mort à Munich il y a plus de cent ans.

Il a dit quelque chose de très important : il a dit qu’un homme politique se caractérise avant tout par le sentiment d’avoir entre les mains un « fil nerveux » [Nervenstrang] d’événements historiques importants.

Chers amis, ce fil nerveux d’événements historiques importants, c’est ce que nous avons aujourd’hui entre les mains dans le cadre de nos responsabilités gouvernementales à Berlin, et il s’agit d’un événement historique important. Je l’ai également dit lors du dernier congrès de la CSU et je tiens à le répéter ici. Ce n’est probablement qu’après de nombreuses années que nous comprendrons pleinement ce que nous vivons actuellement dans le monde.

Dans la conférence Politik als Beruf prononcée en 1919, et souvent regroupée dans les éditions françaises avec la conférence Wissenschaft als Beruf, Weber décrit le « sentiment de puissance » (Machtgefühl) comme « la conscience d’exercer une influence sur les autres humains, le sentiment de participer au pouvoir et surtout la conscience d’être du nombre de ceux qui tiennent en main un nerf important de l’histoire en train de se faire » (Max Weber, Le savant et le politique, Plon, 10/18, trad. Julien Freund, 1963).

Ce ne sont pas des fluctuations normales, les hauts et les bas de relations tantôt bonnes tantôt mauvaises. Ce n’est pas la variation d’une conjoncture — c’est un déplacement tectonique des centres de pouvoir politiques et économiques dans le monde. Et nous, Allemands, Européens, sommes en plein milieu de ce processus et on ne nous demandera pas un jour, chers amis, je le dis franchement, si nous avons tenu notre ligne sur l’assurance retraite allemande un an de plus ou de moins. On nous demandera plutôt si nous avons contribué au maximum de nos capacités au maintien de la liberté et de la paix, d’une société ouverte, de notre économie de marché au centre de l’Europe.

Car ce qui est en jeu n’est rien de moins que la liberté, la paix, l’État de droit, la démocratie, le libéralisme et l’ouverture de nos sociétés. Et nous devons nous battre pour cela, chers amis, c’est notre devoir comme aucun autre parti plus que pour l’Union CDU/CSU. 

Et oui, chers amis, nous avons gouverné pendant des années et des décennies en Allemagne et nous n’avons été que trois ans et demi dans l’opposition. Mais soyons honnêtes entre nous. Énormément de choses ont été négligées.

Il n’y a pas besoin de reconstruire la maison Allemagne — les fondations sont stables — mais elle doit être modernisée et rénovée de fond en comble.

Et cette mission, on ne peut pas l’accomplir en quelques jours ou semaines.

J’entends parfois des industriels me dire que quand on a un problème, on fait un programme en cent jours, on met en place des groupes de projets et que, si cela ne fonctionne pas, on les vire. On ne peut pas diriger un pays ainsi, chers collègues, chers amis, on ne peut pas gouverner ainsi en démocratie. Il nous faut convaincre la majorité des gens, les accompagner sur ce chemin. Mais nous devons aussi dire la vérité. La vérité, c’est précisément que nous devons faire une rénovation et une modernisation fondamentale. Nous devons équiper cette maison Allemagne à neuf.

Nous faisons face à cette mission ensemble et nous ne nous défilerons pas.

Le programme de rénovation de la « maison Allemagne » est incarné par le fonds spécial dédié à l’infrastructure.

Chers amis, nous avons fixé cet objectif avec les sociaux-démocrates.

Ce n’est pas toujours facile. Si nous étions seuls au gouvernement, certaines choses seraient plus faciles et rapides — et les sociaux-démocrates diraient probablement les mêmes choses de nous. 

Mais, chers amis, il n’y a pas de meilleur gouvernement que cette coalition.

Nous allons le faire avec ces sociaux-démocrates, et je suis convaincu que nous allons y arriver. Nous avons en effet la ferme intention de montrer que l’on peut non seulement décrire mais aussi résoudre les problèmes avec les partis du centre dans ce pays.

Nous avons commencé ce travail de rénovation — permettez-moi à nouveau ce mot — nous avons pris, avant les vacances parlementaires estivales, quelques décisions importantes et la première d’entre elles, nous l’avons prise le premier jour, comme promis, et mise en œuvre le deuxième.

Dès le deuxième jour, le gouvernement — plus précisément notre ministre de l’Intérieur Alexander Dobrindt — a instauré le contrôle aux frontières. 

Mesdames et Messieurs, nous avons tenu parole, nous avons fait ce que nous avions promis, et pour cela cher Alexander, merci pour tout ce que tu fais comme ministre de l’Intérieur, et ce que tu as déjà réussi.

Chers amis, parfois ce chiffre est dilué dans celui des demandeurs d’asile, mais ce que nous appelons la migration irrégulière, nous l’avons plus que divisée par deux durant ces quelques semaines et mois de travail. Et c’est en particulier dû au travail de notre ministre de l’intérieur Alexander Dobrindt, qui a agi et s’est imposé sans se laisser détourner. 

Cela n’a pas été facile pour nous, Européens convaincus, de contrôler les frontières.

Nous nous sommes engagés pour un espace ouvert de liberté et de droit, un marché intérieur de la libre circulation. Mais si cette Union n’arrive pas à contrôler efficacement ses frontières extérieures, si ce que nous avons décidé ensemble, les directives de Dublin, ne sont pas efficaces, alors l’État, le gouvernement a avant tout le devoir de protéger son propre territoire, son propre peuple et de s’assurer que le problème ne devienne pas insoutenable afin que l’on puisse encore le résoudre.

C’est notre mission et c’est ainsi que le voit chaque autre gouvernement d’Europe.

La deuxième priorité que nous nous sommes fixés avant même la pause estivale était de prendre les premières mesures contre la faiblesse persistante de notre économie — et, chers amis, là encore, aucune illusion.

Notre économie stagne depuis plus de dix ans.

Depuis plus de dix ans, nous décrochons dans diverses technologies par rapport au reste du monde et, depuis dix ans, les dépenses sociales dans toutes leurs facettes augmentent de manière disproportionnée. Pour que cela soit encore plus clair : nous voulons conserver notre système social. Nous voulons que les gens se sentent en sécurité dans notre pays, qu’en cas de maladie, de grand âge, de dépendance, ils puissent se reposer sur notre système social.

Mais, Mesdames et Messieurs, cela suppose que notre système social reste financé, et que nous ayons les performances économiques qui le rendent possible.

Sans croissance, sans emploi, sans perspective d’avenir pour notre économie, nous n’arriverons à rien dans le domaine de la politique sociale. Et les premiers qui en subiront les conséquences, ce ne seront pas ceux qui peuvent se permettre tout cela par leurs propres moyens, mais ceux qui en ont le plus besoin. Et c’est pour cela que la CDU et la CSU se tiennent du côté des plus faibles, qui ont besoin de cet État et de ce système social. Mais quand nous voyons le marché de l’emploi, où malgré un besoin de main d’œuvre qualifiée, malgré un taux d’emploi imparfait, beaucoup de gens décident de rester malgré tout dans le système de transfert, de toucher le revenu citoyen plutôt que d’aller travailler, alors nous devons corriger cela.

Ce n’est pas une correction, ni un rabotage du système social mais la concentration de notre système social sur son cœur de mission. Son cœur, c’est que ceux qui peuvent travailler travaillent en Allemagne et ne se reposent pas sur les prestations sociales. C’est notre conception d’un État social qui fonctionne vraiment. 

Chers amis, il faut rétablir la compétitivité de notre économie, que nous avons perdue dans de nombreux domaines.

Oui, il y a des signes encourageants : de jeunes entrepreneurs et entreprises, tel ou tel modèle prometteur de nouvelles entreprises — mais la somme est insuffisante.

En bref, nous décrochons, et ce processus s’est accéléré ces dernières années, en particulier à cause d’événements qui ne dépendent pas de nous — par exemple la politique douanière des États-Unis — dont nous aimerions qu’elle soit différente.

Mais en politique, on n’a pas toujours ce que l’on veut.

Le gouvernement américain le fait — et que personne ne pense qu’il s’agit d’un phénomène passager.

Trump n’est pas arrivé du jour au lendemain, et cette politique américaine ne disparaîtra pas du jour au lendemain.

Il se peut que cela soit encore plus difficile avec son successeur.

Nous devons nous mettre dans la tête que nous observons un changement fondamental de la relation transatlantique.

J’en reparlerai dans un instant dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité mais chers amis, les décennies de la Pax Americana sont de fait achevées, et pour nous en Europe et en Allemagne, elle n’existe plus telle que nous l’avons connue.

Ici la nostalgie ne sert à rien, et je serais l’un des premiers à m’abandonner à cette nostalgie. 

Mais c’est inutile, c’est ainsi : les Américains défendent de manière très dure leurs intérêts et il ne peut y avoir d’autre réponse de notre part que de défendre aussi nos intérêts. 

Or nous ne sommes pas si faibles ; nous ne sommes pas si petits. Nous sommes un marché intérieur européen de 450 millions d’habitants. Ajoutons encore les Britanniques, qui sont malheureusement sortis de l’Union mais qui s’efforcent maintenant de s’appuyer sur l’Europe en matière de politique étrangère et de sécurité. Avec eux, cela représente 500 millions : c’est le plus grand espace économique commun du monde. Et c’est pourquoi il faut porter notre voix haut et fort dans l’Union.

D’ailleurs, les choses avancent plutôt bien.

Il y a un an, je n’aurais jamais cru qu’on pourrait un jour dire à l’Union qu’elle était allée trop loin en matière de réglementation.

Je l’ai d’ailleurs dit ici même lors du précédent congrès de votre parti. Je remercie les collègues du Parlement européen qui nous accompagnent dans cette voie et qui partagent notre opinion selon laquelle l’Union européenne réglemente trop.

Nous organiserons le 12 février un Conseil extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement européens, où nous nous pencherons uniquement sur ces questions.

Comment rétablir la compétitivité dans l’Union européenne afin que celle-ci redevienne le marché unique fort et prospère tel qu’imaginé initialement ? Nous sommes sur la bonne voie, mais cela ne se passe pas seulement en Europe, cela doit également se passer en Allemagne — et nos partenaires européens ne regardent aucun autre pays autant que l’Allemagne.

Que nous le voulions ou non, c’est nous qui avons une influence déterminante sur ce qui se passe dans cette Union.

C’est pourquoi nous nous sommes penchés de manière si intensive, sur la question de la future politique automobile et des technologies de propulsion dans l’Union. Cela n’a pas été facile. Les ministres-présidents ont même fait un pas en avant et ouvert la voie.

Mais, heureusement, nous avons désormais une position sur le thème des technologies de propulsion dans l’Union et, si je ne me trompe pas, la Commission suivra la semaine prochaine assez fidèlement ce que nous avons proposé avec d’autres — à savoir que nous ouvrions cette technologie et saisissions toutes les opportunités futures, au lieu de nous concentrer comme auparavant sur une seule technologie avec une vision étroite.

Merz évoque ici le retour sur la sortie du moteur thermique à explosion prévue initialement pour 2035 par l’Union européenne.

C’est un succès commun que nous avons pu obtenir parce que nous avons fait preuve de persévérance et parce que nous avons essayé de l’imposer ensemble. Mais encore une fois, la plus belle Union européenne ne sert pas à grand-chose si le plus grand pays membre de cette Union n’est pas à nouveau fort. 

C’est pourquoi nous avons clairement identifié les grands thèmes sur lesquels nous devons maintenant travailler pour trouver des solutions.

J’en citerai quatre.

Premièrement, les impôts sont toujours trop élevés en Allemagne.

Deuxièmement, les prix de l’énergie sont toujours trop élevés en Allemagne.

Troisièmement, les coûts bureaucratiques sont toujours trop élevés en Allemagne.

Enfin, les coûts de main-d’œuvre dans notre pays sont également trop élevés.

Si nous voulons redevenir compétitifs, nous devons donc nous pencher sur ces quatre facteurs de coûts. 

Nous avons pris des mesures décisives en matière fiscale. Avant la pause estivale du Parlement, nous avons lancé cette offensive d’investissement — qui a été approuvée par le Bundesrat — et l’impôt sur les sociétés va désormais être progressivement ramené à 10 %. 

Chers amis, c’est le taux d’imposition des sociétés le plus bas que l’Allemagne ait jamais connu. Nous avons décidé d’un coup de pouce à l’investissement pour les années 2025, 2026 et 2027 avec un amortissement dégressif de trois fois 30 %. De tels taux d’amortissement n’ont jamais existé auparavant. Désormais, l’industrie peut amortir les biens d’investissement à hauteur des deux tiers en trois ans, ce qui est fiscalement déductible. Oui, cela implique que les amortissements doivent être mérités. Tout le monde ici le sait — mais pas à Berlin. C’est pourquoi il faut faire comprendre à certains que les entreprises ont besoin de revenus et qu’elles ne peuvent en générer que si les autres coûts sont maîtrisés.

Nous avons commencé par la politique énergétique.

Nous avons pris trois décisions qui entreront en vigueur et dont les effets sont déjà visibles : la taxe sur le stockage du gaz, les redevances d’utilisation du réseau et la taxe sur l’électricité. Au total, cela représente un allègement de 10 milliards d’euros pour l’année prochaine. Dès à présent, les avis de paiement anticipé des services municipaux sont revus à la baisse — en moyenne de 9 % pour chaque foyer.

C’est déjà quelque chose, mais ce n’est pas encore suffisant.

C’est pourquoi nous avons décidé qu’il nous fallait une stratégie pour les centrales électriques et un prix de l’électricité pour l’industrie.

La stratégie de baisse des coûts de l’énergie était un des points forts du discours politique de Merz, y compris contre le gouvernement sortant d’Olaf Scholz pendant la campagne électorale.

Et parmi ceux qui étaient présents, dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, lors de notre dernière réunion de la coalition, les entreprises, la ministre fédérale de l’Économie a joué un rôle important.

L’autorisation à Bruxelles pour ce que nous prévoyons de faire avec la limitation du prix de l’électricité pour les industries et la stratégie en matière de centrales électriques, est sur le point d’être approuvée. Et nous allons également construire à nouveau des centrales électriques en Allemagne — des centrales à gaz qui ne seront pas immédiatement prêtes pour l’hydrogène dès le premier jour. Ces centrales n’existent pas et cet hydrogène n’existe pas encore non plus. Mais contrairement au gouvernement précédent, nous n’allons pas attendre. Nous le faisons maintenant car nous avons besoin d’une production d’électricité de base en Allemagne, et nous en avons besoin maintenant — pas seulement lorsque la technologie de l’hydrogène sera suffisamment disponible.

Et puis, il y a cette sempiternelle question de la bureaucratie.

Nous ne prononçons même plus le mot « réduction de la bureaucratie » [Bürokratieabbau].

Les gens en ont assez, ils ne veulent plus en entendre parler.

Ces dernières années, chaque fois qu’un responsable politique évoquait la réduction de la bureaucratie, un murmure parcourait l’assemblée, car l’expérience de la population était exactement contraire. Ceux qui parlaient de réduction décidaient en fait le lendemain d’alourdir encore la bureaucratie.

Nous allons changer cela — et de manière radicale.

Nous avons créé un nouveau ministère au sein du gouvernement fédéral. Beaucoup étaient sceptiques, et ce scepticisme était justifié. Nous avions déjà associé par le passé la numérisation à un ministère, qui ne pouvait pas être très efficace. 

Pourquoi ?

Parce que toutes les compétences relevaient d’autres ministères — mais pas de celui auquel elles auraient dû appartenir. Nous avons désormais un ministère de la Numérisation et de la Modernisation de l’État qui dispose de toutes les compétences nécessaires pour numériser véritablement ce pays et moderniser en profondeur l’État. Et j’ai choisi la personne qui occupe ce poste non pas parmi les politiciens, mais délibérément dans le secteur privé. Quelqu’un qui a de l’expérience en matière de transformation, qui sait comment numériser, qui sait comment gérer de tels processus. 

Il s’agit de l’ancien directeur général du groupe de magasins d’électronique Saturn/Media Markt, Karsten Wildberger.

Et chers amis, nous avons commencé à travailler en ce sens.

Le cabinet fédéral a décidé de lancer une campagne de modernisation et les ministres-présidents des seize Länder ont adopté, il y a deux semaines, un programme de modernisation et de numérisation comprenant près de 200 projets différents qui seront mis en œuvre dans les semaines, les mois et les années à venir.

Je peux vous dire qu’à la fin de cette législature, l’Allemagne sera plus numérique et plus moderne qu’elle ne l’a jamais été.

Nous avons commencé et nous verrons déjà dans les semaines et les mois à venir les progrès pour que l’Allemagne devienne numérique et vraiment moderne, car le gouvernement fédéral, les Länder et les communes sont désormais d’accord pour la première fois sur ce que nous voulons faire ensemble dans ces domaines.

Enfin, et cela n’a pas été facile à réaliser, dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, nous avons discuté pendant plusieurs heures avec les sociaux-démocrates de la question suivante : que faire des projets d’infrastructure ?

Le plan initial était de restreindre la modernisation et l’accélération des procédures d’autorisation aux projets financés par le fonds spécial. 

Le « Sondervermögen Infrastruktur » a été rendu possible par la réforme constitutionnelle de mars 2025.

Et, mes chers amis, ce n’est un secret pour personne, cela a été écrit.

Dans ce cas, tous les projets de construction routière en Allemagne financés par le budget ordinaire auraient été exclus. Cette nuit-là, j’ai dit aux sociaux-démocrates : « Croyez-vous sérieusement que nous pouvons nous présenter devant la population allemande et lui dire que nous allons dépenser 500 milliards d’euros pour les infrastructures et que nous allons continuer dans le domaine de la construction routière, des nouvelles constructions, des autoroutes et des routes nationales exactement comme nous l’avons fait ces dernières années et décennies ? »

Je vous donne un exemple.

Je n’ai pas fait de politique pendant douze ans, je n’ai pas siégé au Bundestag pendant douze ans.

Lorsque je suis revenu dans mon ancienne circonscription électorale, j’ai repris un dossier concernant l’extension d’une autoroute fédérale qui, pendant ces douze années, n’avait pas avancé d’un seul mètre aux endroits où cela était vraiment critique.

J’ai demandé aux sociaux-démocrates si je devais vraiment rentrer chez moi et dire à ma circonscription que nous allions continuer exactement comme les années précédentes. 

Cette réponse m’était inconcevable.

C’est pourquoi nous avons convenu que l’intérêt public supérieur dans la planification de ces projets ne s’appliquerait plus seulement à des exceptions individuelles pour des rénovations ou des remplacements nécessaires, mais qu’il s’appliquerait de manière systématique à tous les projets que nous lançons dans le domaine des autoroutes fédérales, des routes nationales, des voies ferrées et des voies navigables.

C’est ainsi que l’on accélère les choses et que l’on débureaucratise le pays.

Chers amis, nous allons prendre une décision à ce sujet la semaine prochaine au sein du cabinet, avec une loi correspondante sur l’avenir des infrastructures.

Nous n’avons pas limité ce thème à la construction routière et aux infrastructures, mais nous modernisons également notre État avec les technologies les plus modernes. 

Chers amis, vous le savez tous, Doro [Dorothee] Bär a pris la tête du ministère de la Recherche, de la Technologie et de l’Aérospatial.

Nous avons également retiré la politique éducative de ce ministère, car elle n’y a pas sa place. Elle relève d’un autre ministère, où elle est d’ailleurs très bien placée.

Mais ce ministère se consacre désormais à nouveau à la recherche et à la technologie sous leur forme la plus moderne. Le tout est associé à un programme high-tech dans le cadre duquel nous avons développé six stratégies essentielles pour aller de l’avant : la biotechnologie, la technologie des contenus, l’intelligence artificielle, la microélectronique, la technologie de fusion avec pour objectif de mettre en service le premier réacteur à fusion au monde en Allemagne, les technologies de mobilité et d’approvisionnement énergétique neutres sur le plan climatique.

Chers amis, ce que Doro Bär a mis en place au cours des premiers mois sur ces thèmes est déterminant pour la modernisation de notre pays, déterminant pour la recherche, la technologie et jusqu’à l’application.

Nous avons des exigences envers nous-mêmes et nous voulons les satisfaire. Ce n’est pas comme si nous n’en étions pas capables d’être et de redevenir l’un des sites les plus modernes pour les technologies modernes, comme nous l’avons déjà été par le passé. Nous l’avons déjà fait et nous voulons renouer avec ce que nous avons déjà accompli, et c’est ce que représente Doro Bär. Doro, merci beaucoup pour l’excellent travail que tu accomplis.

Et voyez-vous, nous ne l’associons pas seulement à une stratégie industrielle, ou à un programme de modernisation, mais également à un regard sur les zones rurales de notre pays.

Et je dis cela ici, en Bavière, comme dans presque aucun autre Land. Une technologie de pointe et, en même temps, la vie dans les zones rurales, non pas avec condescendance et paternalisme, mais avec respect pour le travail accompli par les habitants des zones rurales. 

C’est pourquoi je tiens à adresser un message chaleureux à Alois Rainer, qui a remis la politique agricole sur les rails et qui, surtout, associe cette reprise au respect de ceux qui accomplissent ce travail dans les exploitations, dans l’agriculture, dans les entreprises de transformation.

Cher Alois, merci beaucoup pour l’excellent travail que tu accomplis au sein du cabinet fédéral.

Ces exemples, qui sont loin d’être isolés, vous montrent bien la situation.

Cela découle d’une stratégie, d’une conviction.

Dans notre pays, nous cessons définitivement de nous retirer de tout.

Nous nous réengageons et nous avons l’ambition d’être véritablement l’un des pays les plus modernes au monde en matière de nouvelles technologies, de nouveaux emplois, de sortie du nucléaire, de fin des moteurs à combustion, de diabolisation des biotechnologies.

Toute cette idéologie, mes chers amis, est derrière nous et il n’y aura donc pas de deuxième chance de causer à nouveau un tel préjudice à notre pays, comme nous l’avons vu ces dernières années avec une sortie permanente. Nous nous engageons à nouveau et nous montrons ce dont nous sommes capables et ce que nous voulons réaliser ensemble. C’est la différence décisive entre nous et notre politique et ce que nous avons vu ces dernières années, en particulier de la part des Verts. Même au sein de notre propre parti, cela vaut pour la CDU et la CSU, nous ne nous contentons plus de parler uniquement des dangers et des menaces.

Parlons maintenant des opportunités, des défis et des bonnes idées qui existent dans notre pays et qui doivent être mises en œuvre afin que nous redevenions enfin un pays d’opportunités, un pays pour la jeune génération et son avenir, et que nous ne suivions pas ceux qui restent prisonniers de leurs vieux clichés, qui pensent qu’il faut interdire le plus rapidement possible tout ce qui n’est pas autorisé et tout réglementer. Non, nous ouvrons les fenêtres.

Il y a de l’air frais dans ce pays et nous veillons à ce que ceux qui inventent, ceux qui savent faire quelque chose, ceux qui veulent réaliser quelque chose, n’aient pas à partir en Amérique, n’aient pas à partir ailleurs, mais aient ici, en Allemagne, la possibilité de réaliser ce qu’ils veulent accomplir dans leur vie.

Merz développe ici une vision technophile opposée à l’idéologie de Bündnis 90/Die Grünen, mais aussi en creux une attaque contre l’ère Merkel, caractérisée en 2011 par la décision de fermer définitivement les centrales nucléaires du pays après l’accident de Fukushima au Japon.

Et puis, nous avons le quatrième grand thème, notre marché du travail.

Le coût du travail en Allemagne est trop élevé et nous devons le réduire. Cette tâche n’incombe pas seulement aux responsables politiques mais aussi aux parties signataires des conventions collectives et aux partenaires sociaux.

C’est pourquoi je voudrais faire une remarque préliminaire avant d’aborder certains détails. 

Ce partenariat social en Allemagne entre les employeurs et leurs associations d’une part, et les salariés et leurs syndicats d’autre part, est l’un des grands modèles de réussite de la République fédérale d’Allemagne depuis plus de 75 ans.

Et nous ne devrions pas commencer, d’un côté comme de l’autre, à critiquer les uns ou les autres en les accusant de ne pas être prêts ou disposés à participer à ce processus. Nous ne critiquons pas les syndicats sur le fond et, inversement, je demande que l’on ne ressorte pas les discours de lutte des classes à l’encontre des employeurs en Allemagne, que l’on ne ressorte pas ces vieux clichés.

Nous voulons emprunter cette voie, qui sera suffisamment difficile, avec les deux parties, les associations patronales et les syndicats.

Mais qui d’autre qu’une coalition entre l’Union et le SPD pourrait le faire ?

Je souhaite que les sociaux-démocrates nous accompagnent dans cette voie. Le SPD n’a pas besoin de recommandations ni de leçons, mais je peux tout à fait imaginer qu’il existe en Allemagne un électorat — qui dépasse les 13 % — qui souhaiterait volontiers que les sociaux-démocrates allemands remettent les intérêts des travailleurs au centre de leur politique et s’associent à nous pour faire en sorte que nous parvenions à résoudre le problème des coûts élevés de la main-d’œuvre dans ce domaine également.

Chers amis, nous avons fait le premier pas de notre côté. Cela a été suffisamment difficile, et je le dis aussi à l’adresse des responsables politiques régionaux et locaux présents dans cette salle. 

Nous devrons également faire des économies dans les hôpitaux, et nous voulons le faire au 1er janvier 2026 afin de ne pas avoir à augmenter les cotisations. Le maintien de cotisations d’assurance maladie stables l’année prochaine serait un objectif louable afin d’éviter une nouvelle augmentation des coûts salariaux en Allemagne, sachant que cela implique bien sûr des restrictions et des efforts d’économie. Chers amis, nous ne pouvons pas dire aux partenaires sociaux que nous voulons travailler avec eux pour rendre ce pays à nouveau compétitif sur le marché du travail et, en même temps, éviter toute décision désagréable lorsqu’il s’agit de maintenir au moins la stabilité des cotisations au 1er janvier 2026. C’est pourquoi je demande instamment aux Länder, à l’exception de la Bavière qui a déjà clairement indiqué qu’elle nous suivrait dans cette voie, de nous suivre vendredi prochain afin qu’une décision puisse être prise pour que les cotisations d’assurance maladie n’augmentent pas au 1er janvier 2026.

Mais ce n’est que le début de ce que nous devons faire. Nous sommes confrontés à des défis majeurs dans tous les domaines de la sécurité sociale, de l’assurance retraite, de l’assurance maladie et de l’assurance dépendance. Compte tenu de l’évolution démographique de notre pays, ces défis ne se sont pas amenuisés, mais ont plutôt pris de l’ampleur, et ils ne diminueront pas, mais augmenteront encore. C’est pourquoi nous devons nous y attaquer dès maintenant, et nous avons convenu, non seulement avec le groupe des jeunes députés au Bundestag, mais aussi avec l’ensemble du groupe parlementaire et les deux partis, que nous allons, dans les prochains jours, très rapidement, avant la fin de l’année, une commission sur les retraites qui aura pour mission de présenter des propositions concrètes d’ici la pause parlementaire estivale de l’année prochaine. Nous nous attaquerons ensuite très concrètement à la réforme au cours du second semestre 2026, et je tiens à le dire aux jeunes ici présents dans cette salle. Nous sommes conscients de la responsabilité que nous avons envers toutes les générations. Et je souhaite que nous fassions exactement ce que nous avons convenu ensemble dans l’accord de coalition, à savoir créer un nouveau niveau de couverture global, éventuellement même avec un nouvel indicateur qui ne soit plus uniquement basé sur le niveau des retraites. 

La transition démographique et le vieillissement de la population représentent pour le gouvernement un défi important. Les semaines passées ont été marquées par une forte confrontation autour du thème des retraites entre le gouvernement et la « Junge Union », organisation de jeunesse du parti, qui peut compter sur 18 députés. Ces derniers ont un temps menacé de mettre leur veto à une loi de programmation qui vise à maintenir au-delà de 2030 le niveau actuel des retraites de base, faisant peser sur les actifs une charge qu’ils estiment trop élevée.

Un niveau de couverture global reposant sur trois piliers, à savoir la prévoyance vieillesse privée, la prévoyance vieillesse d’entreprise et l’assurance vieillesse légale.

Chers amis, même si certains d’entre vous ne l’ont peut-être pas remarqué mais que nous ayons pu nous mettre d’accord avec le SPD dans l’accord de coalition sur le fait que les systèmes de retraite par capitalisation, tels que la prévoyance vieillesse privée et professionnelle, comblent les lacunes qui existent inévitablement dans l’assurance retraite légale en raison de l’évolution démographique, constitue un grand progrès.

Il y a cinq ou dix ans, les sociaux-démocrates n’auraient pas signé un tel accord, à savoir la volonté d’intégrer des systèmes complémentaires par capitalisation dans un niveau de couverture global qui s’appliquera à l’avenir, avec un allègement nécessaire pour les cotisants. Je suis en tout cas très confiant que nous y parviendrons et que nous mettrons en œuvre des réformes concrètes dans ce domaine l’année prochaine.

Le chemin sera difficile, il sera semé d’embûches. Mais je le répète, nous ne pouvons plus éluder cette solution au problème. 

Il s’agit de rétablir la compétitivité de notre économie, ce qui prime en effet sur tout le reste, au-delà même de la défense de la liberté et de la paix.

Mais sans une économie compétitive, sans une économie performante, sans un revenu national beaucoup plus élevé, sans un produit national brut plus élevé, tous les autres problèmes resteront insolubles.

Le retour à la croissance industrielle est au cœur du programme économique et de l’offre politique de Merz.

Nous ne pouvons pas discuter de politique sociale, de politique de défense ou de politique environnementale si nous ne créons pas les conditions nécessaires à une croissance économique plus forte en Allemagne.

C’est pourquoi, d’un point de vue stratégique, au-delà de la politique étrangère et de sécurité, dont je parlerai plus tard, mais pour la politique intérieure allemande, le rétablissement de la compétitivité de notre économie est pour moi une priorité absolue. 

Et afin qu’il n’y ait aucun malentendu à ce sujet : oui, nous maintenons nos objectifs climatiques.

Oui, nous savons que nous sommes confrontés à un problème majeur, principalement causé par l’homme.

Mais deux constatations fondamentales s’imposent ici.

L’Allemagne ne pourra pas résoudre ce problème seule.

C’est pourquoi nous nous engageons également au niveau international sur cette question. 

Et deuxièmement, l’Allemagne ne pourra apporter aucune contribution si cela se fait au détriment de notre industrie. En tout état de cause, je ne suis pas prêt à accorder une telle importance à la question de l’environnement et de la protection du climat au point de perdre une grande partie du cœur de notre industrie en République fédérale d’Allemagne. 

Mesdames et Messieurs, chers amis, ceux qui ne veulent pas nuire à la démocratie ou la détruire en Allemagne doivent continuer dans cette voie.

Nous voulons protéger l’environnement, nous voulons protéger le climat, nous voulons vraiment que ce problème majeur soit résolu grâce à un effort international commun.

Mais l’Allemagne ne pourra apporter une contribution substantielle que si nous disposons à nouveau d’une industrie forte et performante, une industrie qui permettra d’ailleurs de développer des technologies susceptibles de contribuer à la résolution du problème et non à son aggravation, comme cela a malheureusement été trop souvent le cas par le passé.

Chers amis, j’ai déjà évoqué au début de mon discours le contexte mondial dans lequel nous vivons.

Celui-ci n’a pas seulement des répercussions sur notre économie, il a également des répercussions sur la liberté et la paix en Europe.

Et depuis le 24 février 2022 au plus tard, nous savons que tout ce à quoi nous nous sommes habitués ici ne va plus de soi. La guerre a repris en Europe. Et cette guerre n’est pas loin, elle est à deux heures de vol, en Ukraine.

Il s’agit d’une attaque quotidienne contre toute l’Europe, territorialement contre l’Ukraine, mais aussi à tous égards contre l’Union, contre la cohésion en Europe, contre nos réseaux de données, contre notre liberté, contre notre liberté d’information.

Mesdames et Messieurs, je l’ai déjà dit ailleurs et je dois le répéter ici. 

Nous ne sommes pas en guerre, mais nous ne vivons plus entièrement en paix.

Et nous devons en être conscients lorsque nous abordons les tâches que nous devons accomplir. 

Et d’ailleurs, le 24 février 2022 n’était pas le premier jour.

C’est en mai 2014 que nous aurions dû le savoir. Je me souviens très bien que c’est à peu près à la même époque que Christopher Clark a publié son célèbre livre sur Les Somnambules.

Le livre de Christopher Clark Les Somnambules, publié en 2012, est une analyse des mécanismes qui ont conduit en 1914 à la Première guerre mondiale. L’historien australien spécialiste de l’histoire de la Prusse y défend notamment la thèse que la responsabilité du conflit ne repose pas sur une nation en particulier. Il contredit notamment l’analyse de l’historien allemand Fritz Fischer qui postulait dans Griff nach der Weltmacht (1961) une responsabilité dominante du Reich allemand de Guillaume II dans le déclenchement du premier conflit mondial.

Beaucoup de responsables politiques européens de l’époque se sont référés à cet ouvrage et ont établi une analogie entre 1914 et 2014.

Les analogies historiques doivent toujours être considérées avec prudence.

Mais la conclusion qu’il fallait désormais éviter de sombrer aussi silencieusement dans un conflit, comme en 1914, s’est avérée, avec le recul, être une analogie historique fondamentalement erronée.

Il aurait été plus juste de se référer à 1938 comme analogie historique. C’était en fait le schéma que nous aurions déjà dû voir en 2014 et, depuis 2022 au plus tard, nous savons qu’il s’agit d’une guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, contre l’Europe.

Et si l’Ukraine tombe, il ne s’arrêtera pas.

Tout comme, en 1938, les Sudètes n’ont pas suffi, Poutine ne s’arrêtera pas.

Et ceux qui croient encore aujourd’hui qu’il en a assez devraient analyser de près ses stratégies, ses documents, ses discours et ses apparitions publiques.

Le chancelier invite ses auditeurs à s’intéresser de près aux textes et aux allocutions de Poutine et de son premier cercle pour se défaire de toute illusion concernant ses intentions.

Par ailleurs, Friedrich Merz compare ici les gouvernements européens de 2014, en particulier sa prédécesseure à la chancellerie Angela Merkel, aux puissances occidentales signataires des accords de Munich, en leur reprochant un aveuglement coupable. 

L’analogie historique avec le nazisme développée ici est une première pour un chancelier allemand en exercice, le récit développé autour de la Zeitenwende d’Olaf Scholz ne comprenait pas de parallèle explicite avec la situation des années 1930.

Non, chers amis, il s’agit ici d’un changement fondamental des frontières en Europe. Il s’agit de la restauration de l’ancienne Union soviétique dans les frontières de l’ancienne Union soviétique, avec une menace massive, y compris militaire, pour les pays qui appartenaient autrefois à cet empire.

C’est pourquoi, à mon avis, la priorité absolue que nous devons maintenant nous fixer dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité est la suivante.

Premièrement, veiller à ce que nous en prenions conscience.

Deuxièmement, veiller à continuer d’apporter notre aide à l’Ukraine, à ne pas la remettre en question, à associer tout cela à l’unité de l’Europe — et j’inclus à nouveau le Royaume-Uni dans ces orientations stratégiques — et à essayer de préserver l’OTAN et l’alliance occidentale aussi longtemps que possible, mais aussi à investir dans notre propre capacité de défense afin que la dissuasion fonctionne à nouveau, et que personne ne vienne me dire qu’il s’agit là d’un concept dépassé et obsolète.

Nous venons de célébrer les 75 ans de l’OTAN et les 70 ans d’adhésion de la République fédérale d’Allemagne à cette organisation. 

Avec son concept de préparation à la défense et de dissuasion crédible, l’OTAN a assuré la plus longue période de paix et de liberté dans cette partie de l’Europe où nous avons la grande chance de vivre.

Et, mes chers amis, nous ne devons pas mettre cela en péril. C’est pourquoi ces quatre réponses sont pour moi vraiment déterminantes. Aider l’Ukraine tant qu’elle en a besoin, maintenir la cohésion au sein de l’Union, préserver l’alliance de l’OTAN aussi longtemps que possible et, enfin, investir massivement dans notre propre capacité de défense.

Le fait que tout cela ne va pas de soi, que tout cela doit être obtenu de haute lutte, fait partie de la courte histoire du nouveau gouvernement fédéral — et ce avant même notre arrivée au pouvoir.

Nous ne nous sommes pas facilité la tâche, chers amis, en février et en mars, avant la formation du gouvernement entre deux parlements, en modifiant la Loi fondamentale avec l’ancienne majorité de la vingtième législature du Bundestag et en prenant ces deux décisions : beaucoup d’argent pour la défense, 500 milliards d’euros pour les infrastructures, et je sais que cela pèse aussi lourdement sur la crédibilité de l’Union — ainsi que sur ma propre crédibilité — mais j’étais au sommet de l’OTAN à La Haye début juin et nous avons pu, en tant que République fédérale d’Allemagne, promettre que nous allions enfin nous mettre vraiment en marche.

Non pas 2 %, mais 3,5 % de notre PIB pour la défense — et beaucoup d’autres Européens nous ont suivis.

Si nous n’avions pas pris les devants, beaucoup d’autres Européens ne nous auraient jamais suivis. Et le sommet de l’OTAN à La Haye aurait été différent de celui que nous avons eu en juin.

Avec le recul, beaucoup disent que cela aurait probablement été le dernier sommet de l’OTAN dans cette composition et que la décision était donc la bonne — tout comme la décision de modifier la loi sur le service militaire et d’essayer dans un premier temps, sur la base du volontariat, de reconstituer les effectifs nécessaires à nos forces armées.

Ce n’est pas non plus une décision facile à prendre et certains d’entre nous — y compris moi-même —, auraient peut-être souhaité des décisions plus ambitieuses, mais c’est précisément ce que nous nous réservons. Si nous ne parvenons pas à augmenter le nombre de soldats aussi rapidement que nous le souhaitons, nous devrons alors discuter, avant la fin de cette législature, des éléments obligatoires d’un service militaire, du moins pour les jeunes hommes. Nous ne pouvons pas encore inclure les femmes, car la Constitution ne le permet pas. J’aimerais que cela change. Je voudrais mettre en place une année de service civique obligatoire dans notre pays.

Friedrich Merz fait ici allusion à la loi récemment adoptée par le Bundestag sur le rétablissement d’un service militaire, initialement basé sur le volontariat.

Chers amis, je suis fermement convaincu qu’une grande partie de la jeune génération est prête à servir ce pays.

Et si cela ne peut se faire sur une base obligatoire, nous voulons au moins rendre cette option aussi attrayante que possible sur une base volontaire.

Mais c’est précisément notre réponse à la jeune génération.

Rares sont les pays qui offrent plus de possibilités que l’Allemagne. Mais nous voulons aussi que vous contribuiez à ce que ce pays puisse aller vers un avenir pacifique et libre. Nous le faisons actuellement sur une base volontaire et, si nécessaire, nous le ferons encore pendant cette législature sur une base obligatoire. Nous faisons tout pour atteindre précisément cet objectif, à savoir devenir capables de nous défendre.

On nous demande très souvent des récits et des stratégies.

C’est peut-être un peu trop, mais j’aimerais conclure en rappelant ces deux priorités, chers amis : le rétablissement de la compétitivité de notre économie et la mise en place d’une capacité de défense pour notre pays sont les deux tâches centrales qui attendent le gouvernement fédéral que je dirige au cours des prochaines années.

Et je suis presque certain qu’une majorité de la population finira par le comprendre.

Nous devrons fournir beaucoup d’explications, davantage qu’auparavant.

Nous devrons également procéder à des ajustements.

Mais l’orientation fondamentale de cette coalition, l’orientation fondamentale de ce que nous avons convenu avec les sociaux-démocrates, mes chers amis, est la bonne. Et c’est la voie que nous avons choisie.

Pour conclure, permettez-moi de partager une dernière réflexion avec vous.

Nous sommes aujourd’hui les plus jeunes dans l’histoire de notre parti, mais les plus âgés dans nos fonctions.

Nous avons des bases solides sous nos pieds — un pays qui s’est vraiment développé de manière formidable après les deux guerres mondiales. 

Et cela est lié à des noms : celui de Konrad Adenauer, dont nous célébrerons le 150e anniversaire le 5 janvier. Cela est lié au nom de Franz Josef Strauß pour la CSU ; celui d’Helmut Kohl pour ce que nous avons pu accomplir ensemble en Europe. Et ne voyez pas cela avec nostalgie. Je ne suis que le dixième président de la CDU. Cela ne nous préoccupe qu’au sein du parti. Mais je ne suis également que le dixième chancelier fédéral de toute la République fédérale d’Allemagne. Cela montre également la continuité dont notre pays a fait preuve pendant tant de décennies. Je suis fermement décidé à préserver cet héritage qui nous a été confié à titre temporaire. Cet héritage d’une société libre et ouverte, d’une démocratie, d’un ordre économique fondé sur le marché, d’un pays prêt à se défendre, d’une démocratie prête à se défendre.

On aura bien sûr noté dans la généalogie chrétienne-démocrate des grands ancêtres l’absence de celle qui fut près de vingt ans durant la présidente de la CDU et seize ans chancelière, Angela Merkel.

Je suis fermement convaincu que nous pouvons réussir à développer cet héritage et à le transmettre aux générations futures.

Et j’ajoute également cette phrase : je ne suis pas prêt, je le dis très clairement, à laisser cette mission nous être disputée par des gens qui se situent à l’extrême gauche ou, plus encore, à l’extrême droite et qui se nomment désormais « Alternative pour l’Allemagne » (AfD).

Mes chers amis, nous ne le permettrons pas et ils apprendront à nous connaître, à savoir que nous sommes prêts à nous battre pour ce que nous avons accompli dans notre pays et pour l’héritage que nous détenons aujourd’hui entre nos mains.

Et cher Markus, malgré tout ce qui nous pèse au quotidien et tout ce qui nous pose parfois des problèmes dans les détails, cet objectif majeur, cette responsabilité exceptionnelle que nous portons ensemble, nous l’avons désormais entre les mains et c’est précisément ce qui nous sera demandé un jour : si nous avons été à la hauteur de cette exigence.

Et je suis fermement décidé, avec vous, avec la CDU et la CSU, à remplir cette mission et à montrer à nos enfants et petits-enfants que nous avons compris ce que nous vivons, à montrer que nous sommes capables de prendre des décisions politiques et à montrer qu’il vaut la peine de se battre et de lutter chaque jour, chaque semaine, chaque mois et pendant de nombreuses années encore pour ce pays, afin de préserver le précieux héritage de notre pays.
Merci beaucoup, chers amis. 

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