L’administration Trump a-t-elle fait plier l’Agence internationale de l’énergie ?

Le rapport 2024 de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) sur les perspectives énergétiques mondiales annonçait le début d’une nouvelle « ère de l’électricité », marquée par un pic de la demande d’hydrocarbures et une électrification massive des usages.

L’actualisation de 2025, publiée aujourd’hui, mercredi 12 novembre, semble beaucoup plus pessimiste.

• Dans son scénario basé sur les politiques actuelles (CPS) mises en place par les États, réintroduit pour la première fois cette année depuis 2020, l’AIE anticipe une hausse de la demande de pétrole de 13 % d’ici 2050 — qui atteindrait ainsi 113 millions de barils par jour ¹.
• La demande de gaz naturel atteindrait quant à elle 5 600 milliards de mètres cubes d’ici la moitié du siècle, marquant une augmentation de 30 % par rapport aux niveaux de 2024 (4 300 milliards).
• Si la consommation mondiale de charbon devrait bien diminuer d’ici 2050 comme anticipé l’an dernier, la consommation en 2030 devrait être 6 % plus élevée par rapport aux dernières projections de l’agence.

Le rapport, dont la publication coïncide avec la COP de Belém qui s’est ouverte lundi 10 novembre, souligne toutefois des améliorations, notamment en matière d’énergies renouvelables, qui devraient dépasser le pétrole pour devenir la première source d’énergie d’ici le début des années 2040. Le prix moyen des panneaux solaires et des batteries électriques pour voitures a quant à lui chuté de plus de 80 % au cours de la dernière décennie, et la part des voitures électriques devrait atteindre 50 % des ventes dans le monde d’ici 2035.

L’AIE se défend d’avoir réintroduit son scénario CPS en réponse à la pression exercée par l’administration Trump ².

• Durant l’été, le tsar fossile de Donald Trump et secrétaire à l’Énergie, Chris Wright, avait menacé de quitter l’agence — dont le budget est financé à 14 % par les États-Unis — si celle-ci ne « réformait pas son fonctionnement » ³.
• Wright a notamment qualifié « d’absurde » les scénarios de l’AIE anticipant un pic de la demande mondiale de pétrole au cours de la décennie et déclaré être en contact avec le directeur de l’agence, Fatih Birol.
• Au-delà d’accuser l’agence d’être devenue trop « idéologique » dans ses prévisions, l’administration Trump craint également que des prévisions trop pessimistes pour le futur de l’industrie fossile ne dissuadent de nouveaux investissements dans l’exploitation de pétrole et le gaz ⁴.

Dans un article publié en juillet, Wright déclarait considérer le changement climatique « non pas une crise existentielle, mais un phénomène physique réel, conséquence du progrès ». Il ajoutait : « Oui, le CO2 atmosphérique a augmenté au fil du temps, mais l’espérance de vie aussi […] Je suis prêt à accepter cette contrepartie légèrement négative en échange de cet héritage du progrès humain ».

• Depuis le retour au pouvoir de Trump en janvier, la Maison-Blanche a nommé une quarantaine de responsables ayant travaillé dans l’industrie fossile à des postes supervisant l’élaboration des politiques énergétiques et environnementales ⁵.
• Le département de l’Intérieur a quant à lui approuvé la vente de plusieurs dizaines de concessions pétrolières offshore dans le Golfe du Mexique et au large des côtes de l’Alaska.
• Tandis que la production américaine de pétrole est déjà à son niveau le plus élevé de l’histoire, des responsables républicains étudient également l’ouverture de la côte californienne à la vente de concessions pétrolières ⁶.