Aujourd’hui, mardi 2 septembre, suite à une réunion trilatérale entre Poutine, Xi et le président mongol Ukhnaagiin Khürelsükh, le dirigeant de Gazprom Alexeï Miller a annoncé qu’un accord avait été conclu avec Pékin pour relancer le projet de construction du gazoduc Power of Siberia 2.

  • Selon l’historien Sergey Radchenko, la situation aurait été débloquée par une intervention personnelle de Vladimir Poutine — « comme avec PoS-1 » 1.
  • Le gazoduc pourrait à terme transporter jusqu’à 50 milliards de mètres cubes de gaz par an vers la Chine, dans le cadre d’un contrat conclu sur 30 ans 2.
  • Selon l’agence de presse chinoise Xinhua, une vingtaine d’accords de coopérations sino-russes auraient été signés lors de la rencontre, notamment dans le secteur de l’énergie.
  • La réunion trilatérale fait suite au sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai, qui s’est tenu à Tianjin du 31 août au 1er septembre. Demain, mercredi 3, Poutine assistera au défilé militaire organisé à Pékin par Xi Jinping.

Le gigantesque projet (long de 6 700 kilomètres) est au point mort depuis qu’un mémorandum a été signé en 2019 entre la Russie et la Mongolie — dont le territoire serait partiellement traversé par le gazoduc. Si Moscou est impatient de pouvoir livrer à la Chine le gaz autrefois destiné à l’Europe, Pékin ne semblait pas pressé et insistait pour obtenir des prix plus avantageux.

Malgré l’annonce, qui constitue une victoire majeure pour Poutine, plusieurs détails restent toutefois à préciser.

  • Premièrement, aucun détail n’a été donné concernant le prix du mètre cube de gaz russe qui sera livré à la Chine via Power of Siberia 2.
  • L’agence de presse russe TASS mentionne seulement « un prix des livraisons inférieur à celui vers l’Europe » 3. Les paiements seraient quant à eux effectués à 50 % en yuans et 50 % en roubles, selon Miller.
  • Aussi, la Mongolie n’avait pas inclu de budget pour la construction du gazoduc — qui traverserait son territoire sur plus de 4 000 kilomètres — dans son plan d’action jusqu’en 2028 voté l’an dernier 4.
  • Toute reprise du projet devrait ainsi vraisemblablement nécessiter le déblocage de fonds supplémentaires par Oulan-Bator.
  • Enfin, l’intensification des attaques de drones ukrainiens sur les infrastructures énergétiques russes ainsi que le développement de missiles longue distance par Kiev pourraient constituer un risque pour toute reprise du projet.

La signature d’un mémorandum constitue toutefois une aubaine pour le géant énergétique russe Gazprom, dont les pertes l’an dernier se sont élevées à 12 milliards d’euros — soit le double de l’année précédente — en raison de l’interruption d’une part importante de ses flux gaziers vers l’Europe suite au lancement de l’invasion de l’Ukraine en février 2022.

Depuis 2022, la situation financière de Gazprom, qui a perdu presque toutes ses parts de marché en Europe, s’est considérablement dégradée.

  • Le seul gazoduc acheminant encore du gaz vers l’Europe, TurkStream, n’assure l’approvisionnement que de la Hongrie et de la Serbie.
  • En janvier, l’agence TASS révélait que le groupe envisageait de réduire d’environ 40 % le personnel de son siège social, soit une suppression de plus de 1 500 postes.
  • La division du groupe exploitant du pétrole, Gazprom neft, a quant à elle vu ses bénéfices être divisés par deux au premier semestre, passant de 328 milliards de roubles l’an dernier à 150 cette année 5.

L’accord conclu aujourd’hui entre Gazprom et la China National Petroleum Corporation prévoit également une augmentation des livraisons de gaz via Power of Siberia 1, qui passeront de 38 à 44 milliards de mètres cubes par an. Celle-ci pourrait rapporter 1,5 milliard de dollars de plus par an à l’entreprise russe, sur la base d’un prix du gaz de 250 dollars pour 1 000 m³ 6.