Samedi 5 juillet, les services de renseignement militaires ukrainiens ont déclaré détenir des informations indiquant que la Russie renforçait sa présence armée en Arménie, dans la base de Gyumri, située dans l’ouest du pays. Suivant un démenti publié par les autorités arméniennes, Kiev a publié lundi 7 un télégramme présenté comme une liste de mesures visant à reconstituer les forces de Moscou à Gyumri 1.
- Le document publié a été perçu comme particulièrement inquiétant car il donne des instructions aux commandants afin de faciliter le processus de sélection des forces militaires. Il énonce ainsi des critères spécifiques relatifs à l’aptitude professionnelle, à la résistance psychologique et à l’aptitude au combat.
- La 102e base militaire russe, située à une dizaine de kilomètres de la frontière turque, est centrale dans le partenariat de sécurité entre Erevan et Moscou depuis le milieu des années 1990.
- Celle-ci joue historiquement un rôle de dissuasion vis-à-vis de la Turquie, principale puissance régionale ayant apporté son soutien à Bakou notamment dans le conflit du Haut-Karabagh.
- À la suite de l’invasion azerbaïdjanaise de 2023, au cours de laquelle la Russie n’a pas apporté son soutien à l’Arménie, Erevan et Bakou sont parvenus à un accord de principe qui nécessitera toutefois la tenue d’un référendum pour conclure une paix durable.
Cet ordre militaire intervient dans un contexte de hausse des tensions entre la Russie et l’Azerbaïdjan suite à l’arrestation fin juin de 50 azerbaïdjanais à Ekaterinbourg ayant provoqué deux morts. Bakou avait vivement condamné les raids menés par les forces de sécurité russes, et le chargé d’affaires de l’ambassade russe en Azerbaïdjan avait été convoqué par le ministère des Affaires étrangères 2.
- Kiev accuse Moscou d’avoir volontairement provoqué cette détérioration des relations bilatérales avec Bakou pour renforcer sa présence militaire dans le Caucase 3.
- De son côté, Erevan cherche à minimiser ces révélations ukrainiennes et affirme que « le territoire de la République d’Arménie ne peut pas être utilisé par des pays tiers pour mener des actions militaires contre l’un des États voisins ».
- Le 20 juin, le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan a rencontré le président turc Recep Tayyip Erdoğan à Istanbul.
- L’Arménie et la Turquie n’ont jamais établi de relations diplomatiques, et leur frontière est fermée depuis les années 1990. Il s’agissait de la première fois depuis 2018 que Pashinyan se rendait en Turquie.
En déployant de nouveaux effectifs dans la région, Moscou signale vouloir conserver son influence dans le Caucase malgré la réorientation d’une part importante de ses moyens vers la guerre en Ukraine depuis 2022.
- Depuis 2022 l’Arménie s’est de plus en plus tournée vers l’Union.
- En mars, le Parlement a adopté une loi relative au lancement du processus d’adhésion à l’Union européenne, et a approuvé la semaine dernière une loi visant à nationaliser les réseaux électriques du pays, détenus par l’homme d’affaires russo-arménien Samvel Karapetyan.
- Si Erevan souhaite diversifier ses partenariats, Pashinyan tient néanmoins à conserver de bonnes relations avec Moscou. Le Premier ministre arménien a ainsi assisté au défilé sur la Place Rouge le 9 mai.
Sources
- ГУР оприлюднює наказ командувача військами південного військового округу зс рф про “доукомплектування” військової бази рф у Вірменії, ГУР МОУ, 7 juillet 2025.
- Rusiya Federasiyasının Azərbaycan Respublikasındakı Səfirliyinin müvəqqəti işlər vəkilinin Xarici İşlər Nazirliyinə çağırılması barədə mətbuat məlumatı, Ministère des Affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, 28 juin 2025.
- Publication sur Telegram de la Direction générale du renseignement du ministère de la Défense de l’Ukraine, 5 juillet 2025.