Depuis son retour au pouvoir le 20 janvier, Trump a principalement concentré son attention en matière de politique intérieure sur les guerres culturelles : contre le « wokisme », les politiques DEI, l’identité de genre (par un décret reconnaissant uniquement « deux sexes : femme et homme ») ainsi que « l’endoctrinement radical » à l’école et dans les universités. 

Alors que le président américain promettait de « libérer le pouvoir de l’innovation américaine », son administration a déréglé le modèle de financement fédéral de la recherche scientifique américaine en place depuis la Seconde Guerre mondiale 1.

  • Les National Institutes of Health (NIH), qui financent le travail de plus de 300 000 chercheurs aux États-Unis, notamment dans le domaine biomédical, ont octroyé environ 400 millions de dollars de subventions — contre plus d’un milliard de dollars l’an dernier à la même période.
  • De nombreux universitaires, incertains vis-à-vis de l’avenir de leurs recherches et de leur laboratoire, ont cessé de recruter des doctorants. Certains ont entrepris des démarches pour poursuivre leurs travaux dans d’autres pays, craignant que la nouvelle politique de Trump en matière de financement de la recherche ne soit durable.

Selon un sondage réalisé en mars par la revue Nature et publié jeudi 27, plus de trois quarts des chercheurs travaillant actuellement aux États-Unis envisagent sérieusement de quitter le pays suite aux « perturbations » provoquées par l’arrivée au pouvoir de l’administration Trump 2. Certains universitaires, comme l’historien Timothy Snyder, ont d’ores et déjà annoncé avoir quitté leur université américaine pour l’étranger. 

  • Snyder, ainsi que deux autres professeurs de la prestigieuse université de Yale, Marci Shore et Jason Stanley, ont déclaré qu’ils avaient pris la décision de quitter les États-Unis dès novembre, à la suite des résultats de l’élection présidentielle. Ils enseigneront ainsi dès l’automne 2025 à l’université de Toronto, au Canada 3.
  • Le Royaume-Uni fait partie des pays, aux côtés de la France et de l’Allemagne notamment, qui ont mis en place ou signalé vouloir développer des procédures spécifiquement destinées à attirer les chercheurs américains souhaitant quitter les États-Unis 4.
  • Dans une sorte de brain drain inversé, l’université française d’Aix-Marseille a lancé le 11 mars un programme intitulé « Safe Place for Science. Welcoming United States Scientists Threatened in Their Research », qui vise à permettre aux scientifiques se sentant « menacés ou entravés dans leurs recherches » de poursuivre leurs travaux en France 5.


Les attaques répétées de Donald Trump contre le milieu universitaire, visant à la fois les chercheurs mais également les étudiants étrangers, sont également utilisées par les Démocrates qui dénoncent une perte de capital humain qui bénéficiera en premier lieu à la Chine. La représentante de Californie Zoe Lofgren, qui siège au sein de la commission de la Chambre sur la Science, a affirmé que Pékin faisait « déjà de la publicité pour que les scientifiques licenciés s’installent et travaillent là-bas » 6.

Sources
  1. Dan Diamond et Dan Keating, « Trump promised scientific breakthroughs. Researchers say he’s breaking science », The Washington Post, 28 mars 2025.
  2. Alexandra Witze, « 75 % of US scientists who answered Nature poll consider leaving », Nature, 27 mars 2025.
  3. Ariela Lopez et Yolanda Wang, « Three prominent Yale professors depart for Canadian university, citing Trump fears », Yale Daily News, 27 mars 2025.
  4. Frances Jones, « UK ministers urged to lure US researchers hit by Trump turmoil », Research Professional News, 26 mars 2025.
  5. Safe Place for Science. Welcoming United States Scientists Threatened in Their Research, Call for applications, Université Aix-Marseille, 11 mars 2025.
  6. Zahra Hirji, Jessica Nix, Lauren Rosenthal et Janet Lorin, « Trump’s Science Cuts Have Thrown the Research World Into Chaos », Bloomberg, 14 mars 2025.