En janvier, les dépenses du gouvernement ont atteint 4,400 milliards de milliards de roubles – environ 47 milliards d’euros – avec une hausse de 73,6 % d’une année sur l’autre, tandis que les recettes progressent de 11,4 % pour atteindre 2,670 milliards de roubles, entraînant un déficit record de 1,730 milliards de roubles – environ 28 milliards d’euros –, soit 0,8 % du PIB annuel 1

  • Les autorités russes n’ont pas précisé la typologie des dépenses concernées, mais celles-ci devraient principalement concerner l’achat d’armes, le financement militaire, des contrats d’infrastructure – notamment la construction de routes –, l’approvisionnement en carburant et d’autres produits de base destinés à la population du Grand Nord russe ainsi que la préparation des travaux agricoles, dans un contexte de difficultés pour les exportations de céréales.
  • Comme le notent Alexandra Prokopenko et Alexander Kolyandr, deux spécialistes de la politique économique russe, ce n’est pas la première fois que les dépenses dépassent les revenus durant les deux premiers mois de l’année en Russie. En 2023 et 2024, le déficit avait dépassé 10 % avant de se stabiliser au cours des mois suivants 2.

C’est l’entité de ce différentiel en 2025 qui doit faire l’objet d’une analyse, dans un contexte marqué par une forte inflation.

  • Selon des sources officielles, probablement sous-estimées, la période du 4 au 10 février a vu l’inflation annuelle grimper à 9,99 % 3.

Or ce pic des dépenses, en provoquant essentiellement un assouplissement des politiques fiscales, aboutit à un effet contraire à la tentative des autorités russes de maintenir sous contrôle l’inflation.

  • Lors de sa dernière réunion, la Banque centrale en février a laissé son taux de base inchangé à un niveau historique de 21 %, tout en relevant ses prévisions d’inflation, de 4,5 – 5 % à 7 – 8 %, retardant ainsi tout début d’assouplissement de sa politique monétaire.
  • Dans son Bulletin du mois de janvier 2025, les analystes de la Banque centrale recommandaient : « Pour revenir à une inflation faible, il est nécessaire de maintenir une politique monétaire restrictive pendant une période prolongée et de respecter les paramètres budgétaires approuvés pour 2025-2027 » 4.
  • Pour rester dans le cadre du déficit annuel prévu par le ministère russe des Finances, la dépense mensuelle moyenne devra basculer en territoire négatif dès la première moitié de l’année.

En clair, la fenêtre de tir pour la mise en place du nouveau récit mobilisateur évoqué par Vladimir Poutine lors du dernier Conseil des ministres – pour bien vivre à l’intérieur, il faut faire la guerre à l’extérieur – ne peut pas rester ouverte longtemps.

  • Il est possible que Vladimir Poutine anticipe une sortie de l’économie de la tenaille des sanctions, avec une normalisation qui pourrait suivre les prochains accords entre la Russie et les États-Unis. Le fonds souverain russe s’attend à ce que des entreprises américaines reviennent en Russie dès le deuxième trimestre 2025 5.
Sources
  1. Предварительная оценка исполнения федерального, Ministère des Finances de la Fédération de Russie, 11 février 2025.
  2. Russia has a spending problem, The Bell, 15 février 2025.
  3. О текущей ценовой ситуации. 12 février 2025.
  4. О ЧЕМ ГОВОРЯТ ТРЕНДЫ Макроэкономика и рынки, Banque de Russie [téléchargé sur le site de The Bell], janvier 2025.
  5. Guy Faulconbridge, Gleb Bryanski, Russian wealth fund sees US companies returning in 2025, 19 février 2025.