Kamala Davi Harris est née le 20 octobre 1964 à Oakland, en Californie. C’est sur la côte ouest, à Berkeley, que ses parents, Shyamala Gopalan et Donald Jasper Harris, se sont rencontrés au début des années 1960. Son père, né en Jamaïque en 1938, est un économiste reconnu ayant appartenu au courant post-keynésianiste. Il fut le premier professeur noir à avoir été titularisé à Stanford dans le département d’économie. La mère de Kamala Harris, née dans le sud de l’Inde en 1938, a émigré aux États-Unis à l’âge de 19 ans pour étudier l’endocrinologie.
La carrière de Kamal Harris est profondément ancrée en Californie, un État très progressiste, démocrate, qui est aujourd’hui le plus riche des États-Unis grâce à l’industrie technologique et particulièrement aux GAFAM.
- Après avoir étudié l’économie et les sciences politiques à Howard, une université historiquement noire à Washington, elle obtient un diplôme de Juris Doctor de l’École de droit Hastings de l’université de Californie.
- Elle débute sa carrière en 1990 au bureau du procureur du comté d’Alameda, qui comprend notamment Oakland, sa ville de naissance, avant de devenir procureur de San Francisco en 2003 — la première femme de couleur à occuper ce poste. Sa spécialité comprend alors les affaires d’agressions sexuelles contre des mineurs.
Les deux parents de Harris ont été très impliqués dans le mouvement des droits civiques entre les années 1950 et 1960. Durant sa jeunesse, la vice-présidente ainsi que sa sœur, Maya, ont baigné dans un climat de revendication politique en faveur de la justice sociale pour les personnes de couleur ainsi que tous ceux dont les droits et libertés étaient menacés. Les « héros » de sa jeunesse furent des personnalités comme Thurgood Marshall, premier homme noir à siéger à la Cour suprême, Constance Baker Motley, importante figure du mouvement des droits civiques ou bien, plus tard, Abram Lincoln Harris Jr., le deuxième afro-américain à avoir obtenu le titre de docteur en économie aux États-Unis. À Howard, Kamal Harris dirigea pendant ses études la Abram Harris Economics Society, une association regroupant des étudiants en économie.
En 2010, Harris fait campagne pour le poste de procureur général de Californie. Elle bat le procureur républicain du comté de Los Angeles, Steve Cooley avec une faible marge. Quelques années plus tard, elle épouse Doug Emhoff, un avocat, rencontré lors d’un blind date organisé par des amis. Ce n’est que quelques années après s’être hissée à ce poste très médiatique qu’elle s’engage en politique, avec le soutien de Joe Biden et de Barack Obama, et se fait élire en 2016 au Sénat en battant la représentante démocrate de l’État Loretta Sanchez.
Dans la chambre haute, Harris se distingue particulièrement au sein de la commission judiciaire, à laquelle elle accède en janvier 2018.
- C’est pendant l’audition de nomination par Trump à la Cour suprême du juge conservateur Brett Kavanaugh qu’elle gagne une exposition médiatique nationale en confrontant Kavanaugh avec une accusation d’agression sexuelle le visant.
- L’année suivante, en 2019, Harris convoque le nouveau procureur général de Donald Trump, William Barr, à témoigner devant la commission. Elle se fait là encore remarquer pour son éloquence ainsi que sa capacité à confronter et mettre dans l’embarras ses interlocuteurs.
Harris annonce en 2019 sa candidature aux primaires du parti démocrate pour l’investiture en vue de l’élection présidentielle de novembre 2020. Au cours du premier débat, elle épingle Joe Biden au sujet de propos que le candidat d’alors avait tenu concernant les « bonnes relations » que ce dernier entretenait avec des hommes politiques ségrégationnistes dans les années 1970.
- En décembre 2019, moins d’un an avant l’élection, Harris annonce abandonner sa campagne en raison d’un manque de capacités financières.
- Au cours de l’été 2020, Joe Biden, qui devait finaliser son choix de colistier en amont de la convention nationale, propose finalement le poste à Harris parmi d’autres figures importantes du parti démocrate : Elizabeth Warren, Gretchen Whitmer et Susan E. Rice, qui figuraient toutes trois dans le carré final aux côtés de Harris.
Selon des proches du président démocrate, Biden aurait choisi Harris en partie parce qu’elle avait été l’une des seules à l’avoir autant déstabilisé durant la campagne, que ses origines et son histoire contribueraient à rallier des voix vers le ticket présidentiel, et enfin qu’elle s’était préalablement engagée à soutenir « sans réserve » le programme de Joe Biden 1. Le soutien apporté par le président à Harris à la suite de son abandon de la campagne, dimanche 21 juillet, accomplit ce à quoi Biden s’était engagé lors de la campagne de 2020 : « servir de pont, rien de plus, vers une nouvelle génération de dirigeants » 2.
L’historien de Princeton David Bell estime que Kamala Harris est perçue comme une personnalité compétente et sérieuse, bien que son bilan comme vice-présidente ne soit pas marquant — ce qui, en soi, n’est pas inhabituel pour un poste sans grandes responsabilités.
- En outre, Kamala Harris va devoir commencer à se positionner sur des questions majeures et clivantes : « dans certains cas, elle perdra inévitablement des soutiens, comme sur le conflit israélo-palestien qui, de toute évidence, ne peut pas être évoqué aux États-Unis aujourd’hui sans s’attirer de nombreuses condamnations. »
On peut également s’attendre à ce que des membres du Parti républicain commencent à faire circuler de fausses allégations sur l’éligibilité de Kamala Harris à la présidence, comme l’a proposé pour la première fois en 2020 l’avocat de Donald Trump, John Eastman — qui a été inculpé et risque la radiation du barreau pour son rôle dans l’assaut du Capitole du 6 janvier 2021. Un parti dont les membres les plus extrémistes attaquent déjà leur propre candidat à la vice-présidence, J.D. Vance, pour avoir épousé une Sikh, n’aura guère de scrupules à faire bien pire à Kamala Harris sur ce point.
Sources
- Alexander Burns, Jonathan Martin et Katie Glueck, « How Biden Chose Harris : A Search That Forged New Stars, Friends and Rivalries », The New York Times, 13 août 2020.
- Eric Bradner et Sarah Mucha, « Biden says he’s a ‘bridge’ to new ‘generation of leaders’ while campaigning with Harris, Booker, Whitmer », CNN, 9 mars 2020.