J.D. Vance est un sénateur républicain de l’Ohio élu lors des élections de mi-mandat de novembre 2022. Né en 1984 à Middletown, Ohio, dans une famille populaire, il a grandi dans les Appalaches entre son État natal et le Kentucky. À 18 ans, quelques mois après l’attaque du 11 septembre, il s’engage dans le corps des Marines avant d’être déployé en Irak lors de la guerre de 2003, dans laquelle il sert en tant que correspondant de combat au sein de la 2nd Marine Aircraft Wing.

À son retour aux États-Unis, il entame des études supérieures et sort diplômé en science politique et philosophie de l’université d’État de l’Ohio. Il intègre par la suite l’école de droit de Yale, où il obtient un diplôme de Juris Doctor en 2013. Après avoir travaillé dans un cabinet juridique, il rejoint en 2016 Mithril Capital Management, la société de capital-risque co-fondée par Peter Thiel, un milliardaire américain qui a soutenu financièrement les campagnes de Donald Trump et d’autres candidats républicains.

Il rejoint par la suite la société d’investissement Revolution, co-fondée par Steve Case, puis crée en 2019 sa propre société de capital risque, Narya Capita, aux côtés de Colin Greenspon et Falon Donohue. Ce n’est qu’en 2021 que Vance prend la décision de se lancer en politique et de briguer le siège laissé vacant par l’ex-sénateur républicain Rob Portman. Il est élu avec 53,04 % des voix contre le candidat démocrate Tim Ryan, dans un État autrefois violet devenu fermement républicain ces dernières années.

Bien qu’ayant eu une carrière fulgurante et couronnée de succès, c’est l’ouvrage retraçant sa vie, Hillbilly Elegy : A Memoir of a Family and Culture in Crisis, publié en 2016, qui a propulsé la carrière de Vance et fait de lui l’une des personnalités politiques les plus en vue au sein du Parti républicain. Dans Hillbilly Elegy, le sénateur et colistier de Donald Trump dresse le portrait d’une Amérique en perte de vitesse, caractérisée par la pauvreté, les drogues, la violence et la misère chronique des petites villes de la rust belt.

Son récit fait également l’éloge des valeurs propres aux Appalaches transmises par sa famille. Bien que largement désoeuvrés, parfois dépendants de la sécurité sociale pour survivre, Vance renvoie à de multiples reprises à la fierté, à la solidarité, au sens du travail et de la famille des habitants de Middletown et des Appalaches. Le propos de Vance ne vise pas à dénoncer simplement les ravages de la désindustrialisation, mais pointe également le doigt sur ce qu’il décrit comme les causes de la misère dans laquelle il a grandi : le désintérêt de la classe politique américaine pour l’Amérique d’en bas, la white working class délaissée par les administrations successives — démocrates comme républicaines.

Lors de l’élection présidentielle de 2016, Vance a fait partie des 730 000 Américains ayant voté pour le candidat indépendant Evan McMullin, plutôt que de choisir entre Donald Trump et Hillary Clinton. En 2016, Vance méprise Clinton et Obama pour leur condescendance vis-à-vis de la white working class et rejette Trump pour son populisme et la vacuité de son programme. Dans un entretien donné à Charlie Rose suite à la publication de ses mémoires, Vance revendique être un « never Trump guy »1. Il se distance également vis-à-vis de l’utilisation par Trump de la peur pour attirer les électeurs et s’inquiète de son influence négative sur le débat politique dans The American Conservative2.

Pendant des années, Vance a rejeté la nouvelle figure messianique du Parti républicain. Les médias américains aiment aujourd’hui rappeler les nombreuses insultes proférées publiquement contre Trump : « inapte » à gouverner, « escroc », « idiot », un potentiel « Hitler américain »… Un tel historique aurait pu mettre fin à la carrière de Vance au sein du Parti républicain si Trump n’avait pas un goût pour la repentance et le pardon. En 2021, alors que l’ex-président ne bénéficiait pas de son aura actuelle au sein du GOP, Vance déclarait publiquement s’être « trompé sur Trump » et multipliait ses expressions de remords sur les plateaux télévisés. Il obtient finalement le soutien de Donald Trump lors de la primaire du GOP pour l’élection sénatoriale en Ohio au printemps 2022.

Depuis son arrivée au Capitole en janvier 2023, Vance, alors âgé de seulement 38 ans (dans une chambre où la moyenne d’âge dépasse alors les 65 ans), a su émerger comme l’une des principales figures de la « nouvelle droite » républicaine qui est amenée à supplanter l’arrière garde du Sénat, incarnée par des figures comme le chef de la minorité républicaine Mitch McConnell. Il fait partie de ces républicains qui contribuent à transformer la diatribe trumpiste en doctrine : sur l’Ukraine notamment, comme à l’occasion de son discours au moment du vote du paquet d’assistance supplémentaire en avril, mais également sur l’immigration, l’économie, le commerce.

En-dehors du Congrès, Vance a également su se faire coopter par les grandes figures du mouvement MAGA : Steve Bannon, Tucker Carlson et même le fils aîné de Trump, Donald Trump, Jr. ont œuvré dans l’ombre pour plaider en sa faveur. Le choix de Trump témoigne d’un rejet de cette arrière garde dont Mike Pence fut le produit en 2016, et consacre dans le même temps un tournant désormais assumé vers une droite plus nationaliste, populiste, résolument tournée vers des valeurs traditionalistes.