Aujourd’hui s’ouvre à Tirana le sixième sommet de la Communauté politique européenne.
Lancée en 2022 par Emmanuel Macron à l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, elle avait été pensée en réaction à l’invasion de l’Ukraine par la Russie de Poutine. Aujourd’hui, les Européens font face à une autre menace — la prise de pouvoir à Washington d’un groupe d’hommes qui veulent renverser la démocratie et prendre le contrôle de la mondialisation.
Pour accompagner cette séquence diplomatique intense, nous publierons aujourd’hui et dans les prochains jours un dossier sur le bilan de vingt années de politiques d’élargissement et de voisinage coordonné par René Leray et Stefano Manservisi. Au moment où le continent doit sortir de sa torpeur stratégique et réussir sa transition géopolitique, les onze textes qui le constituent sont une boussole essentielle.
Au cours des années récentes, la politique de voisinage de l’Union européenne a pu donner l’impression de se chercher une nouvelle raison d’être. Ce flottement a été souvent imputé à l’ouverture des négociations d’élargissement avec les pays candidats à l’Est ou aux bouleversements politiques intervenus chez les partenaires de l’Europe en Méditerranée ou au Proche-Orient. Il faut néanmoins se demander si, sous l’effet des profondes transformations en cours dans les relations internationales, les pays du voisinage ne sont pas en train de basculer dans une nouvelle logique géopolitique et d’affronter des problématiques n’ayant plus grand chose à voir avec celles qui ont inspiré au départ l’action de l’Union.
La politique de voisinage serait ainsi parvenue au stade où elle doit s’interroger sur ses finalités. Plus précisément, la question de sa spécificité par rapport à la politique étrangère de l’Union peut se poser alors que le phénomène de globalisation paraît désormais influencer l’ensemble des rapports entre nations. Est-il possible de concevoir et de gérer la politique de voisinage comme un ensemble qui aurait sa logique propre à l’abri des désordres du monde ? Ou faut-il désormais envisager l’action de l’Union dans son voisinage comme une partie intégrante de la politique étrangère commune et comme l’une des réponses parmi d’autres aux défis globaux que doivent affronter les Européens ?
Pour répondre à cette question, il faut analyser les raisons de fond à l’origine de cette évolution et en tirer les conséquences pour la conception d’une politique du voisinage rénovée et plus en phase avec la diplomatie européenne dans son ensemble. Cette réflexion doit aussi permettre de préciser la méthode propre à mieux intégrer le voisinage dans la pensée stratégique qui devra nourrir à l’avenir la politique étrangère de l’Europe.
Le voisinage dans le nouveau monde de la puissance
Il serait erroné de prétendre que la politique de voisinage, telle qu’elle s’est développée au cours des vingt dernières années, n’avait pas de dimension géopolitique. Son objectif était éminemment politique et s’insérait dans un contexte géographique précisément délimité.
Une vision idéale des relations internationales
Il s’agissait en effet de mettre en place aux frontières méridionales et orientales de l’Union une zone de paix et de prospérité, capable de garantir la stabilité dans le voisinage de l’Europe. L’objectif visait à instaurer des relations politiques et économiques mutuellement bénéfiques avec les pays situés dans le pourtour de l’Union. « Un cercle d’amis » comme l’avait alors caractérisé Romano Prodi, le Président de la Commission européenne, à propos d’une action européenne qui s’inscrivait dans le temps long en prévoyant à terme de possibles extensions vers l’adhésion à l’Union ou vers des partenariats renforcés.
Pierre Vimont
Il serait erroné de prétendre que la politique de voisinage, telle qu’elle s’est développée au cours des vingt dernières années, n’avait pas de dimension géopolitique.
L’aspect important derrière ce projet d’inspiration très politique était l’esprit dans lequel il était conçu.
Pour reprendre la métaphore de l’ancien ministre allemand Sigmund Gabriel, l’Union agissait alors en mode « herbivore » dans un monde qui n’était pas encore celui des « carnivores ». Elle se prévalait d’une vision irénique des relations internationales pour promouvoir son influence et sa présence à ses frontières. Cependant, il y avait là un risque d’idéalisation, certains pays membres de l’Union ne cachant pas que, dans leur esprit, le Partenariat oriental constituait un moyen de repousser l’emprise de la Russie sur ses propres voisins.
Un voisinage confronté à de profondes transformations
De fait, la situation aux frontières orientales de l’Union est révélatrice de l’évolution du contexte géopolitique dans lequel la politique de voisinage s’est développée. Avec des dirigeants russes de plus en plus méfiants à l’égard des intentions européennes, les négociations menées par l’Union pour des accords d’association avec des partenaires comme l’Ukraine, l’Arménie ou la Géorgie ont été rapidement considérées par les autorités de Moscou comme des menaces directes contre leurs intérêts. On a ainsi vu l’Arménie à l’été 2013 mettre un terme à ses discussions avec Bruxelles sous la pression de Moscou avant que l’Ukraine elle-même ne soit violemment déstabilisée, durant l’hiver de la même année, par les divisions autour de son propre projet d’accord d’association. Cette tension devait conduire à la Révolution de Maïdan, au renversement du Président ukrainien en place et à l’enchaînement des interventions militaires de la Russie en territoire ukrainien.
Le raidissement de la Russie a placé l’action de l’Union dans un environnement géopolitique profondément transformé, suscitant l’impression, encore vivace aujourd’hui, que le Partenariat oriental est désormais dépassé. Les actions de déstabilisation menées par la Russie en Moldavie, sa reprise en main en Géorgie, les tensions persistantes entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et jusqu’à la guerre de haute intensité en Ukraine ont fait table rase des coopérations élaborées par le passé. Elles exigent désormais de repenser les objectifs de l’Union à l’aune de nouvelles priorités liées en particulier aux impératifs de sécurité devenus prioritaires pour les Européens.
Mais ce n’est pas qu’à l’Est que la politique de voisinage a été malmenée.
Dans la zone méditerranéenne comme au Proche-Orient, les protestations massives, parties de Tunisie à la fin de 2010, se sont rapidement étendues à une grande partie du monde arabe pour constituer le vaste mouvement du « printemps arabe ». Les violentes guerres civiles qui s’en sont suivies en Égypte, en Libye, en Syrie et jusqu’au Yémen ont profondément affecté le cadre de la politique européenne de voisinage. L’Union a tenté de diverses manières de trouver un nouvel équilibre en adaptant son action aux circonstances mais ces réformes ne sont pas parvenues en fin de compte à créer un nouvel élan.
À ces changements nés des révolutions arabes, s’ajoute aujourd’hui la conflagration sécuritaire liée à la crise de Gaza survenue à la fin de 2023 et qui s’étend désormais au Liban et même à la Syrie sous l’effet de l’offensive généralisée de l’armée israélienne.
Les dirigeants d’Israël ne cachent plus leur intention de remodeler à leur avantage l’ensemble de l’ordre régional au Proche-Orient et d’en finir avec l’influence de l’Iran dans cette zone. Pour l’Union, il s’agit là encore d’une transformation fondamentale des données géopolitiques sur lesquelles les Européens avaient bâti leurs relations dans cette région. Les accords conclus dans le passé par l’Union avec des pays qui doivent désormais repenser leurs propres équilibres internes (Liban, Syrie) ou encore sa coopération ancienne avec l’Autorité palestinienne dont l’avenir demeure incertain face au silence des actuels responsables israéliens constituent désormais autant d’inconnues pour la future politique de voisinage dans cette région.
En vérité, l’action européenne s’est mise à patiner parce que le contexte dans lequel sa politique de voisinage avait été pensée s’est profondément transformé. L’esprit pacifique et même généreux qui l’inspirait s’est progressivement trouvé en décalage avec la nouvelle logique géopolitique, fondée sur la politique de la puissance et le recours au rapport de forces permanent.
Les dirigeants d’Israël ne cachent plus leur intention de remodeler à leur avantage l’ensemble de l’ordre régional au Proche-Orient et d’en finir avec l’influence de l’Iran dans cette zone.
Pierre Vimont
Un nouveau voisinage
Cette nouvelle réalité de la politique internationale a des conséquences directes sur ce qui faisait la spécificité de la politique européenne de voisinage — à savoir sa zone d’action, ses priorités et jusqu’à la mission qui lui a été dévolue.
Un nouveau périmètre géographique
Où situer aujourd’hui le voisinage de l’Union, ses limites territoriales et les pays qui en font partie ?
Cette interrogation n’est pas tant liée aux changements intervenus dans le statut de certains des bénéficiaires de la politique de voisinage comme l’Ukraine ou la Moldavie (voire la Géorgie), lesquels sont devenus candidats officiels à l’adhésion et engagés dans le processus d’élargissement. Elle est bien davantage la conséquence des nouvelles réalités politiques, économiques et sociales observées sur le terrain et qui dessinent une carte géopolitique différente de celle qui prévalait au début de la politique de voisinage.
Le voisinage méditerranéen, limité dans le passé aux seuls pays de l’Afrique du Nord, doit aujourd’hui se concevoir en prenant en compte les pays africains situés au sud du Maghreb. Il n’est plus possible en effet de comprendre les relations complexes des partenaires de l’Europe dans cette région de l’Afrique sans intégrer la dimension politique, sécuritaire et économique des rapports qui se développent entre les pays maghrébins, leurs voisins du Sahel et même les nations situées autour du Golfe de Guinée. Cet ensemble géographique représente à l’heure actuelle l’entité pertinente pour qui veut comprendre les rapports de force en présence. Une réflexion sur l’avenir économique de cette région doit inclure les liens commerciaux et les relations d’affaires qui se tissent désormais entre des pays comme le Maroc, le Bénin ou le Ghana. Il en va de même pour toute lecture géopolitique de la situation dans le Sahel qui ne peut faire l’économie d’une analyse approfondie de l’influence politique et sécuritaire exercée par l’Algérie, le Maroc ou la Libye sur les pays de la zone.
La même réflexion s’applique au voisinage oriental. En parallèle au processus d’élargissement en cours, les intérêts de l’Union lui commandent de porter le regard plus à l’est du continent et de commencer à considérer certains pays d’Asie centrale comme des partenaires possibles dans un effort de projection au-delà des limites actuelles du Partenariat oriental. La Russie a fait sienne cette approche depuis longtemps et l’Europe ne peut s’en dispenser sans prendre le risque de nourrir une vision trop étroite de ses intérêts dans son voisinage.
De nouveaux types de défis
Cette nouvelle approche doit également prendre en compte des défis de plus en plus nombreux qui n’existaient pas aux origines de la politique de voisinage.
L’immigration, telle qu’elle est apparue depuis une dizaine d’années aux frontières du sud de l’Union ou qui est instrumentalisée par la Russie et la Biélorussie à l’Est de l’Europe, constitue l’exemple le plus prégnant des nouveaux problèmes apparus sur les pourtours de l’Union. Mais d’autres problématiques se développent de manière plus diffuse qui exigent des actions plus diversifiées. Celles-ci peuvent concerner le domaine de la sécurité comme, par exemple, les ingérences extérieures dans la vie politique de pays partenaires (Moldavie, Géorgie), les attaques hybrides, les actes de groupes terroristes ou les actions de sabotage contre les infrastructures et les réseaux européens. La coopération économique, souvent placée au cœur de la politique de voisinage dès son origine, doit aussi s’adapter aux demandes nouvelles des pays voisins du Sud, soucieux de diversifier leurs modes de développement et de faire jouer la concurrence internationale. Le champ d’action ouvert par le défi grandissant des dérèglements climatiques oblige également à inventer de nouveaux types de partenariats pour faire partager par les voisins de l’Europe des préoccupations trop souvent imposées dans le passé par les Européens sans vraie concertation.
De manière plus générale, les Européens doivent prendre conscience que leur voisinage est devenu, au fil des ans, le terrain de nombreuses influences venues de pays tiers qui n’hésitent pas à concurrencer la présence européenne. Pour les voisins de l’Union, celle-ci n’est plus le partenaire exclusif ; il lui faut convaincre face à des rivaux comme la Chine, la Russie, l’Inde, la Turquie ou certains pays arabes du Golfe qui sont devenus des acteurs très actifs, principalement dans le voisinage du Sud, mais aussi à l’Est. En soi, ces considérations ne sont que l’illustration du monde global dans lequel l’Europe doit naviguer. La nouveauté pour la politique de voisinage est que celle-ci doit désormais prendre à bord ces réalités qui sont devenues la matière même de toute action diplomatique. Là où l’action en direction des voisins pouvait se concentrer dans le passé sur des champs limités, le nouvel environnement international contraint la politique du voisinage à s’inscrire dans le cours général de la diplomatie européenne et à en épouser toutes les priorités.
Les Européens doivent prendre conscience que leur voisinage est devenu, au fil des ans, le terrain de nombreuses influences venues de pays tiers qui n’hésitent pas à concurrencer la présence européenne.
Pierre Vimont
Une mission politique plus complexe
Cette nécessaire adaptation de la politique du voisinage et son insertion dans le cadre plus général de la politique étrangère de l’Union répondent à une logique à la fois géographique — un voisinage qui s’étend sous l’effet de la globalisation — et politique — des défis de plus en plus nombreux et interdépendants. Mais cette évolution se fait à double sens : si le voisinage doit s’inscrire plus résolument dans la politique étrangère commune, cette dernière doit, pour sa part, faire du voisinage sa première priorité. En effet, les défis globaux auxquels l’Europe doit s’attaquer trouvent leurs premières traductions aux frontières mêmes de l’Union. En s’insérant dans l’action diplomatique d’ensemble, la politique du voisinage perd sans doute de sa spécificité passée ; elle y gagne en revanche une prééminence au sein de la politique étrangère, compte tenu de l’urgence pour la diplomatie européenne d’agir en priorité aux portes de l’Europe.
Pour autant, ce qui constituait à l’origine les objectifs principaux de l’Union dans son action de voisinage, à savoir la paix et la prospérité, doit désormais s’adapter aux nouvelles réalités géopolitiques. Dans un monde dominé par la politique de la puissance, le voisinage ne peut échapper à la loi ambiante du rapport de forces. À l’Est, la guerre en Ukraine rebat les cartes et fait de la sécurité une urgence sans partage. Même dans le cas, encore très hypothétique, où un accord de paix serait finalement obtenu pour mettre un terme au conflit ukrainien, il est peu probable que cette sortie de crise ouvre rapidement la voie au retour à un ordre de sécurité européen. L’absence totale de confiance entre l’Union et la Russie rend très prématurée tout espoir d’une renaissance des accords d’Helsinki. Les Européens doivent donc se faire à l’idée qu’ils devront gérer pour longtemps une période d’instabilité et d’insécurité qui constituera l’arrière-plan de la nouvelle politique de voisinage à l’Est de l’Europe.
Au Sud, les difficultés s’annoncent de même nature. Face aux tensions sécuritaires qui perdurent dans le Sahel, les pressions migratoires à venir sur les côtes de l’Europe ou les déséquilibres économiques et climatiques qui ne disparaîtront pas rapidement, l’Union doit se préparer à affronter un voisinage difficile et instable. Il y aura moins de place pour l’idéalisme et le regard devra être plus lucide et rigoureux. Vis à vis des voisins du Sud il faudra donc là aussi définir une politique plus réaliste et soucieuse de privilégier les rapports de confiance et le temps long.
La nécessité d’une pensée et d’une action stratégiques
À sa manière, ce retour du voisinage dans le giron de la politique étrangère de l’Union devra s’inscrire dans une vraie réflexion stratégique pour permettre à l’Europe de devenir un acteur géopolitique.
Une réflexion stratégique pour fixer le cap
L’objectif est bien de doter l’Union d’une pensée stratégique propre à lui permettre d’affronter les nombreux défis portés par le monde globalisé. Il ne s’agit pas pour autant de négliger ce qui fait la valeur et l’intérêt d’une action à destination des voisins de l’Union.
Intégrer le voisinage comme partie prenante de la politique étrangère commune implique de prendre en compte les intérêts de l’Union dans les pays voisins tout en veillant à ce que ceux-ci soient en phase avec les orientations générales de la diplomatie européenne.
Le nouvel environnement international contraint la politique du voisinage à s’inscrire dans le cours général de la diplomatie européenne et à en épouser toutes les priorités.
Pierre Vimont
Cette double démarche doit se fonder sur une analyse de fond des rapports de force en présence dans le monde et dans le voisinage pour permettre à l’Union de comprendre l’environnement géopolitique dans lequel elle évolue. De là doit découler une stratégie capable de définir les intérêts propres d’une politique de voisinage, les buts qu’elle se doit d’atteindre et les moyens qui doivent lui être consacrés. C’est une telle approche qui peut garantir à l’avenir la cohérence de l’action européenne dans son voisinage par rapport au reste de la politique étrangère.
Une organisation pour mieux coordonner
Dans cette perspective, une politique de voisinage rénovée doit se penser dans une étroite coordination entre tous les services compétents pour les différentes dimensions de l’action extérieure européenne. Pour garantir cette cohérence, il est sans doute difficile d’imaginer de grandes réformes dans l’organisation interne de la Commission européenne visant, par exemple, une refonte ou des regroupements de services. Les réformes de structure ont pour effet en général de paralyser pendant longtemps la marche de l’administration là où la rénovation de la politique de voisinage exige au contraire une adaptation rapide. Au demeurant, l’annonce récente de création d’une nouvelle Direction générale chargée de la Méditerranée montre que les réflexions en cours ne vont pas dans ce sens.
En revanche, davantage de coordination et l’acceptation par tous les services de la Commission d’une direction « chef de file » en charge de la réflexion stratégique doivent figurer parmi les nécessaires améliorations de méthode. Il faut en effet désigner un service centralisateur pour assurer l’analyse stratégique et élaborer une action diplomatique dans laquelle la politique rénovée du voisinage pourra trouver sa place. Ce rôle devra-t-il être confié au SEAE comme le voudrait la logique ou bien au Secrétariat général de la Commission ? C’est là une affaire de choix politique mais l’important est bien qu’un leadership au niveau de l’administration communautaire toute entière s’impose pour mener le travail de réflexion stratégique et fixer des lignes directrices reconnues de tous.
Une action cohérente pour donner au voisinage toute sa place
Il ne faut pas sous-estimer la difficulté de faire avancer d’un même pas toutes les actions ayant trait au voisinage. Celles-ci relèvent d’un nombre d’objectifs et de procédures considérables et sans commune mesure avec les interventions de l’Union dans le reste du monde. La politique de voisinage concentre en effet tous les types d’action traditionnels de l’Union en matière politique (promotion de l’État de droit), économique (développement de coopérations et de partenariats) et commercial (accords de libre-échange).
S’y ajoutent cependant trois priorités propres à la logique de voisinage :
- la sécurité autour de la mise en place d’une Europe de la défense qui devra être centrée naturellement sur les frontières extérieures de l’Union ;
- l’immigration qui emprunte pour l’essentiel les routes des pays situés aux pourtours de l’Union ;
- enfin, les perspectives d’élargissement pour les voisins de l’Est ou de partenariats renforcés pour ceux du Sud, objectifs qui restent l’horizon naturel des relations de voisinage.
L’étendue de ce champ d’action justifie par conséquent le surcroît de rigueur dans la conduite d’une politique de voisinage rénovée.
Les réformes de structure ont pour effet en général de paralyser pendant longtemps la marche de l’administration là où la rénovation de la politique de voisinage exige au contraire une adaptation rapide.
Pierre Vimont
À cet effort de cohérence doit correspondre également une unité de vues et d’actions de la part des États membres. La politique de voisinage ne peut être efficace qu’à la condition d’être partagée par tous. Les divisions actuelles au sein de l’Union sur la sortie de guerre en Ukraine ou la tentation du « chacun pour soi » à propos d’un meilleur contrôle des flux migratoires montrent que ce préalable est loin d’être encore atteint. Pour être efficace, l’action de l’Union dans son voisinage ne peut être exonérée de cette obligation d’unité.
Au final, cette évolution souhaitée de la politique du voisinage ne doit pas être perçue comme une remise en cause mais plutôt comme une adaptation nécessaire à la nouvelle réalité des relations internationales. En se fondant dans la politique étrangère commune, le voisinage ne perd pas sa raison d’être ; il prend en compte les tensions qui se multiplient dans le paysage international et qui se manifestent de manière particulièrement active dans les pays situés aux frontières de l’Union.
La transformation de la politique du voisinage répond ainsi à la mutation progressive de l’Europe en un acteur géopolitique de plein exercice. C’est l’ambition que les responsables européens s’étaient donnée dès la mise en place de la première Commission von der Leyen.
L’adaptation de la politique de voisinage ne fait que concrétiser ce dessein et lui donner un nouvel élan en phase avec son temps.