Lors de l’appel entre Trump et Poutine qui a eu lieu hier, mardi 18 mars, le président russe a dit accepter un cessez-le-feu de 30 jours portant uniquement sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes. Zelensky, qui n’avait vraisemblablement pas été mis au courant en amont de la proposition américaine, a déclaré « soutenir cette proposition », tout en ajoutant que la partie ukrainienne avait besoin de « plus de détails » afin de garantir sa mise en œuvre. Un appel avec Trump doit avoir lieu aujourd’hui, mercredi 19.

Les deux communiqués comportent effectivement une différence fondamentale : la Maison-Blanche évoque un cessez-le-feu portant sur « l’énergie et les infrastructures », tandis que le Kremlin mentionne spécifiquement les « infrastructures énergétiques ».

  • Dans la nuit du 18 au 19 mars ayant suivi l’appel, l’armée russe a continué ses frappes contre des infrastructures civiles ukrainiennes, notamment contre un hôpital de la région de Soumy et le système ferroviaire de la région de Dnipropetrovsk 1.
  • Dans le même temps, plusieurs rapports indiquent que l’Ukraine a visé des infrastructures énergétiques russes dans le kraï de Krasnodar. Des incendies ont notamment été signalés au niveau d’un réservoir de pétrole à Kavkazskaya 2.
  • Ces attaques suggèrent qu’aucun accord entre l’Ukraine et la Russie n’a pour l’heure été implémenté. Une délégation américaine doit rencontrer les négociateurs russes dimanche 23 mars à Djeddah, en Arabie saoudite.
  • Une délégation ukrainienne composée d’experts militaires, énergétiques, portuaires et en infrastructures civiles devrait également être présente 3.

Depuis octobre 2022, la Russie a entrepris une campagne de ciblage délibérée des infrastructures civiles ukrainiennes, visant notamment la production et la transmission d’électricité (centrales de production, lignes haute tension, transformateurs…) L’Ukraine frappe quant à elle régulièrement des dépôts et raffineries de pétrole en territoire russe depuis mars 2024, dans un effort destiné à affaiblir l’économie russe et ainsi ses capacités à financer sa guerre.

L’implémentation d’un cessez-le-feu portant uniquement sur les infrastructures énergétiques offrirait un répit aux civils ukrainiens et donnerait l’opportunité aux opérateurs de mener des réparations sur le réseau. À une échelle plus stratégique, celui-ci serait en faveur de la Russie.

  • En 2022 et 2023, environ la moitié de la capacité de production d’électricité de l’Ukraine a été soit occupée militairement par les forces russes (c’est notamment le cas de la centrale nucléaire de Zaporijia), détruite ou endommagée, selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie 4.
  • Suite à l’intensification des attaques russes en mars et mai 2024, les deux-tiers de la capacité de production ukrainienne d’électricité étaient hors-service à l’été dernier.
  • La stratégie russe consiste à cibler les civils (chauffage, lumière, possibilité de recharger des appareils…) afin de faire basculer l’opinion publique vers un accord de cessez-le-feu défavorable pour l’Ukraine.

Dans le même temps, la campagne ukrainienne contre les infrastructures pétrolières russes s’est révélée être un succès : 10 % de la capacité totale de raffinage russe a été détruite 5, et l’impact sur la production pose des défis majeurs pour l’armée russe en termes de logistique et d’approvisionnement de ses véhicules blindés en carburant. L’arrêt des frappes ukrainiennes constituerait un soulagement pour l’économie russe et aurait un impact positif sur les capacités de son armée en Ukraine.