Aujourd’hui, jeudi 6 mars, la Banque centrale européenne (BCE) a baissé ses taux d’intérêt pour la sixième fois consécutive depuis juin 2024. L’institution met également en garde contre une instabilité géopolitique croissante et un risque accru de tensions commerciales.
- Le Conseil des gouverneurs a baissé les trois taux d’intérêt directeurs de 25 points de base, ramenant les taux d’intérêts de la facilité de dépôt à 2,5 %.
- La BCE anticipe désormais une inflation globale moyenne de 2,3 % en 2025, 1,9 % en 2026 et 2,0 % en 2027.
Si la décision était largement attendue par les investisseurs, les prochains pas de la BCE sont moins prévisibles et l’institution a modifié son langage sur la direction à venir de sa politique monétaire.
- Dans son communiqué, la Banque précise que « la politique monétaire devient nettement moins restrictive, car la baisse des taux d’intérêt réduit le coût des nouveaux emprunts pour les entreprises et les ménages, favorisant ainsi l’accélération du crédit ».
- Le président de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré qu’elle ne s’engagerait pas à l’avance sur l’orientation des futures décisions. Elle a aussi admis que le contexte géopolitique, la guerre en Ukraine, l’introduction possible de tarifs douaniers par les États-Unis et les changements dans la politique fiscale de la défense européenne constituent un scénario très volatile.
- Mark Wall, économiste en chef pour l’Europe chez Deutsche Bank, a déclaré que « la BCE se trouve dans une position délicate ».
Les services de la BCE ont révisé leurs prévisions économiques à la baisse.
- La croissance du PIB de la zone euro est désormais estimée à 0,9 % en 2025, 1,2 % en 2026 et 1,3 % en 2027, contre 1,1 % pour 2025 et 1,4 % pour 2026 dans les prévisions de décembre : « Les perspectives plus faibles s’expliquent principalement par la révision à la baisse des exportations et, dans une moindre mesure, des investissements. Cela reflète un impact plus fort de l’incertitude que prévu, ainsi que les attentes selon lesquelles les défis de compétitivité persisteront probablement plus longtemps qu’anticipé ».
Ces prévisions ne prennent pas en compte les dernières annonces en Allemagne et au niveau européen.
- La BCE reconnaît la politique des États-Unis comme un risque pouvant influencer sa politique monétaire, la situation macroéconomique de la zone euro et le taux de change de l’euro face au dollar.
- L’évolution de la politique fiscale et budgétaire européenne pourrait également avoir un impact sur les décisions à venir. Cette semaine, la Commission a annoncé un plan d’investissement dans la défense qui vise à mobiliser jusqu’à 800 milliards d’euros. Une partie de ce paquet implique l’émission de 150 milliards d’euros de dette, soutenue par le budget européen.
- L’Allemagne a annoncé un effort budgétaire de près de 500 milliards d’euros d’investissements dans les infrastructures et une exclusion des dépenses de défense au-delà de 1 % du PIB dans le calcul du frein à l’endettement. La Deutsche Bank a décrit ces mesures comme le plus grand effort budgétaire depuis la réunification en 1990.
- Si ces nouvelles mesures de relance économique sont susceptibles d’avoir un impact sur l’inflation, elles pourraient également être positives pour la croissance à moyen terme.
La prochaine réunion de politique monétaire de la BCE aura lieu les 16 et 17 avril. Le 19 février, Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE, avait déclaré que la banque centrale devrait commencer à discuter d’une « pause ou d’un arrêt » des baisses de taux 1. La BCE situe son taux d’intérêt neutre indicatif pour la période la plus récente entre 1,75 et 2,25 %, ce qui laisse de la place pour de nouvelles baisses de taux — mais aussi pour des pauses 2.
Sources
- Olaf Storbeck, ECB’s Schnabel calls for debate on ‘halt’ to rate cuts, Financial Times, 19 février 2025.
- Claus Brand, Noëmie Lisack, Falk Mazelis, Natural rate estimates for the euro area : insights, uncertainties and shortcomings, ECB Economic Bulletin, Issue 1/2025.