Alors qu’Emmanuel Macron a reçu lundi 17 février sept de ses homologues européens pour une réunion d’urgence sur l’Ukraine, des ministres ou dirigeants de 11 pays (y compris le Royaume-Uni) ont fait savoir au cours des derniers mois être ouverts à un potentiel envoi de leurs troupes en Ukraine dans le cadre d’une mission de maintien de la paix.
- Le président français avait lancé l’idée d’une participation européenne à un contingent présent sur le sol ukrainien après la conclusion d’un accord de cessez-le-feu en février 2024, à l’occasion d’un sommet sur l’aide à l’Ukraine.
- Dans les heures ayant suivi cette annonce, la grande majorité des États européens (y compris le Royaume-Uni) avaient publiquement rejeté cette option. L’opposition la plus directe était venue de Berlin, Olaf Scholz ayant déclaré qu’il « n’y aurait pas de troupes terrestres, ni de soldats sur le sol ukrainien qui y seraient envoyés par les États européens ou par les États de l’OTAN ».
- Un mois après la proposition initiale de Macron, quatre États membres de l’Union (à l’exclusion de la France) avaient signalé être ouverts à la possibilité d’un envoi de troupes en Ukraine (République tchèque, Finlande, Lituanie et Pays-Bas).
Un an plus tard, le nombre de pays potentiellement favorables à une participation directe en Ukraine a augmenté de manière significative, mais ils restent minoritaires parmi les États membres. Cette évolution intervient alors que les États-Unis ont déjà demandé à chaque pays européen combien de soldats et quel niveau de ressources ils étaient prêts à fournir pour faire respecter un éventuel accord de paix 1.
- L’Italie, la France et le Royaume-Uni, qui comptent parmi les forces armées les plus importantes d’Europe en termes de militaires actifs, sont ouverts à cette possibilité. L’Allemagne, la Grèce, la Pologne et l’Espagne, qui disposent eux aussi d’une armée de plus de 100 000 hommes, y sont néanmoins opposés.
- La Première ministre danoise, Mette Frederiksen, a signalé un changement de position lundi 17 février en déclarant être « ouverte à la discussion sur de nombreux sujets », dont le déploiement de troupes danoises en Ukraine 2.
- Copenhague devrait par ailleurs présenter dans les prochains jours un « plan de réarmement rapide » financé par un nouveau « fonds d’accélération » doté de 50 milliards de couronnes, soit environ 6,7 milliards d’euros 3. Cet effort supplémentaire devrait porter à 3 % du PIB les dépenses de défense du pays en 2025 et 2026.
- La Pologne et l’Allemagne, qui n’ont pas encore publiquement manifesté leur soutien à l’envoi de leurs troupes sur le sol ukrainien pour garantir un accord de paix, pourraient changer de position si les États-Unis fournissaient des garanties de sécurité, une sorte de « backstop ».
- L’Italie entretient une position plus floue, marquée par une ambivalence entre les prises de position de la présidente du Conseil Giorgia Meloni, officiellement opposée à l’envoi de soldats italiens, et de deux de ses ministres, Crosetto (Défense) et Tajani (Affaires étrangères), qui ont publiquement signalé que Rome prendrait part à une mission internationale en Ukraine.
Au-delà d’une volonté politique exprimée par les dirigeants, un certain nombre de pays européens devraient obtenir l’accord de leur parlement pour envoyer leurs militaires en Ukraine.
- L’Italie et les Pays-Bas, qui figurent parmi les puissances militaires les plus importantes du bloc en termes de dépenses de défense (32 et 16 milliards de dollars respectivement en 2023), feraient notamment face à des freins législatifs et constitutionnels.
- D’autres régimes politiques, c’est notamment le cas de la France, n’ont quant à eux pas besoin d’obtenir d’autorisation du parlement, mais doivent cependant tenir le pouvoir législatif informé des objectifs ainsi que des modalités du déploiement de militaires dans le cadre d’une mission à l’étranger.
Sources
- Andrew Gray, Lili Bayer et John Irish, « Europe will not be part of Ukraine peace talks, US envoy says », Reuters, 17 février 2025
- « European countries clash over sending troops to Ukraine », Financial Times, 18 février 2025.
- Thomas Prakash, « Forsvarskorrespondent : Ny milliardfond skal sætte tempo på Danmarks våbenindkøb », DR, 17 février 2025.