Tout comme la Russie, l’Ukraine est elle aussi en manque d’hommes à déployer sur le front de 1 000 kilomètres de long où s’affrontent les deux armées depuis plus de deux ans. La semaine dernière, Volodymyr Zelensky a finalement signé une loi abaissant l’âge de la mobilisation de 27 à 25 ans. Malgré cette mesure, les ressources mobilisables sont rares : le nombre d’hommes de moins de 30 ans et en bonne santé fait partie des plus faibles dans l’histoire du pays.

Jeudi 11 avril, la Verkhovna Rada a adopté un nouveau texte encadrant davantage la mobilisation et offrant plus de marge de manœuvre au gouvernement pour la mener à bien1. Parmi les principales disposition du projet de loi figurent :

  • L’obligation pour les hommes âgés de 18 à 60 ans de porter en permanence sur eux un document d’enregistrement militaire et de le présenter à la demande d’un représentant du commissariat militaire ;
  • l’obligation pour les personnes astreintes au service militaire de mettre à jour leurs adresses et coordonnées dans un délai de 60 jours ;
  • l’obligation pour les hommes de 25 à 55 ans ayant été déclarés invalides après le 24 février 2022 (sauf pour les militaires) de passer un nouvel examen médical et social afin de « confirmer les conclusions » ;
  • la mise en place à partir du 1er septembre 2025 d’une formation militaire générale dans les établissements d’enseignement professionnel pré-universitaire et supérieur, les universités militaires et les unités d’enseignement militaire des universités2.

Si ces nouvelles dispositions amélioreront la mise en œuvre et le suivi de la mobilisation en Ukraine, une mesure cruciale pour les combattants et leurs familles a été omise : la démobilisation. L’amendement apporté au texte prévoyant le retour des soldats à la vie civile après une période de 36 mois a été supprimé par la commission sur la sécurité nationale, la défense et le renseignement, à la demande du ministère de la Défense3.

  • Malgré l’impact sur le moral d’un déploiement prolongé — qui, pour certains, dure depuis plus de deux ans et ce avec peu de permissions —, le gouvernement ukrainien considère que l’inclusion d’une disposition sur la démobilisation nuirait davantage à la situation sur le front, déjà jugée critique4.
  • Le porte-parole du ministère de la Défense, Dmytro Lazutkin, a déclaré mercredi 10 avril être favorable à un examen des normes relatives à la démobilisation dans le cadre d’un projet de loi distinct — un processus qui pourrait prendre plusieurs mois5.

Selon un sondage réalisé au début du mois d’avril, 50 % des Ukrainiens ne sont pas satisfaits du déroulement de la mobilisation. Yuriy Gudymenko, un ancien homme politique actuellement dans l’armée, considère que la version actuelle de la loi ne changera pas grand-chose car elle ne contient « ni sanctions sérieuses pour les fraudeurs (le « bâton »), ni d’avantages sérieux pour les personnes nouvellement mobilisées (la « carotte ») »6.

Face à la perspective d’un recul des forces ukrainiennes faute d’hommes et de munitions, des voix se lèvent pour appeler à une diminution supplémentaire de l’âge minimum de mobilisation. Dans un entretien donné à Ukrainska Pravda, le directeur de l’organisation Come Back Alive (qui finance l’achat de matériel à destination de l’armée), Taras Chmut, plaidait en faveur d’une mobilisation à partir de 20 ans, arguant que l’Ukraine aurait déjà « perdu trop de temps »7 — une thèse qui a davantage contribué à jeter de l’huile sur le feu.