Le Digital Services Act (DSA) entre aujourd’hui concrètement en vigueur pour 19 grandes plateformes — considérées « systémiques » en raison de leur nombre d’utilisateurs mensuel dans l’Union européenne supérieur à 45 millions — désignées par la Commission le 25 avril. En ce qui concerne les plateformes revendiquant moins d’utilisateurs, le règlement s’appliquera à partir du 17 février 2024.

Au total, 17 « très grandes plateformes en ligne » (VLOPs) et 2 « très grands moteurs de recherche en ligne » (VLOSEs) sont concernés par cette première application1.

  • Sur les 13 entreprises détenant ces plateformes, dix sont basées aux États-Unis (Amazon, Apple, Booking.com, Meta, Google, Microsoft, Pinterest, Snapchat, Wikipedia et X (Twitter), deux en Chine (ByteDance et Alibaba) et une en Allemagne (Zalando).
  • YouTube est, avec une moyenne de 401,7 millions d’utilisateurs par mois dans l’Union européenne, de loin la plateforme la plus utilisée en Europe.
  • À l’échelle globale, les utilisateurs actifs résidant dans les 27 États-membres ne représentent toutefois que 15,9 % du total des utilisateurs.

Le DSA vise à mettre en place des règles claires pour les plateformes numériques de manière à les contraindre à être plus réactives face aux contenus illicites et plus transparentes vis-à-vis de leurs utilisations des données personnelles. À partir d’aujourd’hui, plusieurs changements majeurs prennent effet, dont :

  • la mise en place de « mesures de transparence de large portée », notamment en ce qui concerne les algorithmes de recommandation de contenus aux utilisateurs ;
  • l’interdiction de la publicité ciblée à destination des mineurs ;
  • l’obligation de réagir « promptement » face aux contenus illicites signalés par les utilisateurs ainsi que la mise en place de « mesures d’atténuation pour empêcher la propagation de la désinformation » ;
  • tout retrait de contenu devra être accompagné d’une explication envoyée à l’utilisateur que ce dernier pourra contester « y compris lorsque ces décisions sont fondées sur les conditions générales des plateformes »2.

En cas de non-respect de ces nouvelles règles, les plateformes pourront se voir infliger une amende dont le montant peut aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise3. Pour Meta (qui possède le réseau social Facebook), dont le chiffre d’affaires pour l’année 2022 s’élève à 116,609 milliards de dollars, le montant maximal de l’amende serait de 7 milliards4. En dernier recours, la Commission pourra « demander à un tribunal une suspension temporaire de leurs services ».

Si certaines entreprises — comme Meta, qui dispose de plus de 1 000 personnes travaillant actuellement sur le DSA5 — ont annoncé avoir renforcé leurs équipes pour être en mesure de répondre à ces nouvelles responsabilités, le propriétaire de X (Twitter), Elon Musk, a déclaré aujourd’hui « travailler dur » sur les changements liés à l’entrée en vigueur de la réglementation6.

  • Depuis son rachat du réseau social, Musk a licencié plus de 5 000 employés sur 7 500. Afin de réduire les coûts, Twitter favorise désormais « une combinaison de modération humaine et de technologie d’intelligence artificielle pour détecter et examiner les contenus préjudiciables » et n’emploie pas de vérificateurs de faits, contrairement à Meta7.
  • À la place, un système de modérateurs bénévoles a été mis en place pour contribuer à la fonction « notes de la communauté », qui vise à lutter contre la désinformation — mais pas contre les contenus illégaux.

Le réseau social, qui entend favoriser une forme de « liberté d’expression » totale, pourrait faire l’objet d’une attention particulière de la part de la Commission européenne. 

Après avoir permis le retour de Donald Trump sur la plateforme en novembre dernier suite à un sondage — remporté par les partisans du « oui » avec une faible marge de 1,8 % —, ce dernier a posté pour la première fois depuis plus de deux ans son mugshot, pris alors qu’il s’est rendu jeudi aux autorités de l’État de Géorgie. Cette publication pourrait annoncer le retour de l’ex-président visé par quatre inculpations pénales dans le cadre de sa campagne en vue de l’élection présidentielle de 2024, tandis qu’il dispose de 87 millions d’abonnés sur X contre seulement 6 millions sur son propre réseau Truth Social.