Cette note de travail est disponible en français et en anglais sur le site du Groupe d’études géopolitiques.
Alors que les théâtres d’opérations européen (la guerre en Ukraine) et asiatique (le risque de guerre autour de Taïwan) apparaissent éloignés l’un de l’autre, ils sont interdépendants et tout porte à croire qu’ils le seront de plus en plus à l’avenir. Pour l’Europe, aucune stratégie durable ne peut faire l’impasse sur cette réalité.
Le rôle de premier plan joué par les États-Unis dans la réponse à l’agression russe, illustré par une aide militaire de 35 milliards de dollars 1 à l’Ukraine et par l’envoi de 20 000 soldats américains supplémentaires en Europe 2, a conduit de nombreux analystes à proclamer un nouveau « pivot vers l’Europe » et la mort prématurée du projet d' »autonomie stratégique européenne » 3 qui visait à réduire la dépendance militaire des Européens à l’égard des des États-Unis. Aujourd’hui, les Européens ne sont pas prêts 4 à défendre leur continent sans une forte implication américaine, et la guerre en Ukraine les a conduits à devenir plus, et non moins dépendants des États-Unis 5.
Pourtant, en conclure que l’objectif d’une Europe plus autonome sur le plan stratégique n’est plus d’actualité relève d’une analyse à courte vue, à la fois dans le temps et dans l’espace. Depuis 2018, le Pentagone considère que les forces américaines ne sont pas en mesure de l’emporter dans deux guerres simultanées contres des grandes puissances. Cette situation engendre un dilemme géostratégique entre les théâtres d’opérations européen et asiatique, l’investissement de ressources et de capacités dans un théâtre se faisant largement au détriment de l’autre. Si l’administration Biden a donné la priorité au soutien à l’Ukraine contre la Russie au cours des derniers mois, il est néanmoins clair que le défi chinois demeure la priorité stratégique des États-Unis pour les décennies à venir. Plutôt que de considérer le soutien américain comme acquis, les Européens devraient anticiper que ce soutien pourrait varier considérablement en fonction de l’évolution de la situation en Asie de l’Est.
Les Européens doivent d’urgence intégrer le risque d’un double front dans leurs calculs stratégiques. La Russie ayant ouvert un premier front en Europe, le facteur taïwanais tend à devenir une variable essentielle de la sécurité européenne. Si la Chine est incapable d’envahir Taïwan à court terme, de nombreux observateurs estiment qu’elle sera en mesure de le faire dès 2027, étape cruciale dans le processus de modernisation de l’Armée populaire de libération (APL). Du point de vue de la sécurité européenne, deux conclusions s’imposent. Premièrement, les Américains et les Européens devraient considérer leur soutien militaire à l’Ukraine non seulement comme un soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, mais aussi comme un moyen d’affaiblir les capacités offensives russes à long terme. L’objectif devrait être que, d’ici 2027, lorsque la Chine sera en mesure d’ouvrir un second front en Asie de l’Est, la Russie ne soit plus une menace majeure en Europe. Deuxièmement, les Européens devraient investir dans leur autonomie stratégique afin de s’assurer que, lorsque la Chine sera en mesure d’envahir Taïwan, le redéploiement potentiel des efforts américains entre les différents théâtres ne laisse pas l’Europe dans une position trop vulnérable.
Le problème du double front
Depuis la National Defense Strategy de 2018, les États-Unis cherchent à préparer leurs forces à une confrontation avec une grande puissance militaire 6 — la Chine ou la Russie. Selon cette approche, les États-Unis ne seraient pas en mesure de s’imposer sur deux théâtres d’opérations à la fois, mais resteraient néanmoins capables de vaincre une grande puissance tout en dissuadant les tentatives opportunistes d’un autre adversaire. Bien que les partisans de cette doctrine soient conscients du risque que les États-Unis se trouvent confrontés à deux conflits simultanés, ils affirment que le meilleur moyen d’éviter une deuxième guerre majeure est de faire une démonstration de force dissuasive sur le premier front 7. Le président Biden a semblé suivre cette logique lorsque, en mai 2022, il a souligné qu’une réponse forte à la Russie en Ukraine contribuerait à dissuader la Chine 8 de tenter une action similaire à Taïwan.
Faire face à deux guerres majeures simultanées constitue un défi redoutable, et la capacité des États-Unis à répondre fermement à un adversaire ne nous dit pas forcément grand-chose de leur capacité à faire de même sur deux théâtres à la fois. Par conséquent, cette stratégie dissuasive ne l’est que partiellement, et le risque de l’ouverture opportuniste d’un second front demeure. Ce dilemme des deux théâtres est encore plus marqué du fait du retour de la guerre de haute intensité, qui consomme des quantités massives d’équipements et de munitions. Même si les États-Unis ne sont pas directement impliqués dans la guerre en Ukraine, leur soutien militaire à Kiev révèle déjà les insuffisances de la base industrielle de défense américaine 9 ; un double front risquerait donc de submerger rapidement ses capacités de production.
Certes, le dilemme des deux théâtres doit être relativisé, car les besoins capacitaires en Europe sont essentiellement terrestres, alors qu’une confrontation avec la Chine impliquerait principalement des capacités aériennes et maritimes. Toutefois, la présence terrestre des États-Unis en Europe a des répercussions sur le soutien logistique et financier qui pourrait également être utile en Asie. En outre, tout renforcement substantiel de la présence de l’armée américaine en Europe impliquerait aussi des moyens de transport maritime et de soutien aérien. À l’inverse, les capacités terrestres américaines jouent un rôle important dans la dissuasion conventionnelle en Asie 10 et pourraient être nécessaires pour mieux préparer les forces terrestres taïwanaises à faire face à une invasion chinoise. Le soutien militaire à l’Ukraine a déjà entraîné des retards dans les livraisons d’armes à Taïwan 11, ce qui montre qu’un double front imposerait des choix douloureux aux États-Unis.
Priorité à l’Asie
Les Européens devraient considérer le risque d’un double front comme un facteur essentiel dans leurs calculs stratégiques, d’autant plus que la menace chinoise est clairement la priorité des États-Unis. L’engagement de l’administration Biden en faveur de la défense de l’Europe a déjà suscité de vives critiques de la part du camp « Asia First » 12, pour qui l’Ukraine serait une « distraction » détournant l’attention de Taïwan et des efforts nécessaires de dissuasion vis-à-vis de la Chine. L’élection d’une Chambre des représentants républicaine, plus réticente à soutenir l’Ukraine 13, a renforcé cet argument. Si de nombreuses options ont été proposées pour permettre aux États-Unis de résoudre le dilemme des deux théâtres– entre autres, chercher à diviser la Chine et la Russie, se concentrer sur l’Asie de l’Est 14, renforcer la coordination et le partage du fardeau entre les alliés 15, ou adopter une stratégie d’intervention indirecte 16 — il existe un large consensus sur le caractère prioritaire de la Chine et du théâtre est-asiatique.
La politique ukrainienne de l’administration Biden peut d’ailleurs être interprétée au prisme de ce postulat. En déclarant le 25 avril 2022 que l’objectif des États-Unis était de voir la Russie « affaiblie au point qu’elle ne puisse pas faire le genre de choses qu’elle a faites en envahissant l’Ukraine » 17, le Secrétaire à la Défense Lloyd Austin a exprimé le désir de voir la menace russe diminuer au point de permettre à la puissance américaine de se recentrer pleinement sur le défi chinois. Une victoire de la Russie en Ukraine risquerait en effet de fixer davantage de ressources américaines en Europe 18 sur le long terme et d’entraver gravement la capacité du Pentagone à équilibrer les capacités croissantes de la Chine en Asie de l’Est. Le fort investissement américain actuel en Europe ne doit donc pas être interprété comme un « pivot inversé » structurel vers l’Europe, mais plutôt comme une forme d’investissement indirect dans la capacité à moyen terme des États-Unis à se concentrer sur la menace chinoise 19, suivant une stratégie en deux temps 20. La National Defense Strategy américaine de 2022 21 tend à valider cette hypothèse. Elle distingue explicitement le défi chinois structurant à long terme et une menace russe « aiguë » (c’est-à-dire élevée mais à plus court terme), ce qui implique que le soutien à l’Ukraine ne doit pas se faire au détriment de la capacité à plus long terme des États-Unis à répondre à la menace chinoise.
Par conséquent, les Européens doivent s’attendre à ce que l’ouverture potentielle d’un second front en Asie de l’Est ait des conséquences dramatiques pour la sécurité européenne. Le principal effet ricochet que les Européens devraient anticiper est une réévaluation de l’engagement des États-Unis en l’Europe. Si l’équilibre militaire régional en Asie de l’Est semble de plus en plus favorable à la Chine 22, les États-Unis peuvent espérer s’appuyer sur leur supériorité mondiale pour inverser cette tendance, ce qui les amènerait à déléguer davantage de responsabilités à leurs alliés européens 23. Comme l’a déclaré en 2018 un ancien commandant de l’armée américaine en Europe 24, « les États-Unis ont besoin d’un pilier européen très fort […] Les États-Unis n’ont pas la capacité de faire tout ce qu’ils doivent faire en Europe et dans le Pacifique pour faire face à la menace chinoise. » Selon cette logique, les Européens devraient investir dans leur autonomie stratégique pour être mieux préparés à assumer la responsabilité de l’effort contre la Russie en cas de crise en Asie. À l’inverse, si la faiblesse des Européens obligeait les États-Unis à maintenir un engagement trop important en Europe, entravant ainsi leur capacité d’action en Asie de l’Est, cela pourrait conduire Washington à envisager l’Europe comme un fardeau insupportable et menacer gravement la relation transatlantique.
Le tournant de 2027
À quel moment le risque d’un second front en Asie devrait-il conduire les Européens à faire preuve d’une plus grande autonomie stratégique en Europe ? La manifestation la plus évidente du dilemme des deux théâtres serait une tentative chinoise d’envahir Taïwan. Une action militaire plus limitée dans le détroit de Taïwan, comme des raids aériens ou un embargo naval, ne nécessiterait pas la même mobilisation des forces américaines et poserait un dilemme moins grave. Or, une invasion à grande échelle de Taïwan ne deviendra une perspective réaliste que lorsque la Chine sera en mesure de disposer d’une nette supériorité aérienne et maritime ; et l’APL devra pourvoir transporter ses troupes à l’aide d’une importante flotte amphibie 25, qu’elle ne possède pas en effectifs suffisants à ce jour.
Selon certains analystes 26 et certaines sources de renseignements 27, la Chine a également été surprise par la résilience et la résistance des forces armées ukrainiennes, malgré la supériorité–au moins numérique–de l’armée russe. Le parallèle est vite fait avec un potentiel affrontement Chine-Taïwan et fait apparaître le scénario d’une invasion de Taïwan encore plus risqué pour l’APL, compte tenu des difficultés spécifiques liées à l’invasion d’une île. Étant donné que le coût politique d’une invasion ratée serait probablement très élevé pour le régime communiste, les dirigeants chinois hésiteront probablement à lancer une invasion s’ils ne sont pas sûrs que l’APL pourra la mettre en œuvre avec succès 28. Selon un rapport du département de la Défense américain 29 de 2022, l’invasion de Taïwan constituerait « un risque politique et militaire important » pour la Chine, « même dans l’hypothèse d’un débarquement et d’une percée réussis ».
Cependant, il est clair que ces obstacles matériels n’ont aucun impact sur le désir fondamental de Pékin de ramener l’île dans le giron chinois à plus ou moins long terme. C’est selon Xi Jinping une « mission historique du parti » 30. L’échéance précise fixée par Xi n’est pas claire ; la date de 2049, souvent citée par les prédécesseurs du président, ne figure plus dans ses discours 31 ni dans les livres blancs de la Chine sur la défense. Sur les moyens d’une telle réunification, un récent livre blanc sur la défense n’exclut pas le recours à la force 32. Ceci témoigne d’un changement du paradigme développement-sécurité en Chine ces dernières années. Des analyses récentes ont montré que le Parti communiste chinois (PCC) de Xi a placé les enjeux de sécurité au même niveau que les objectifs de développement 33. Cela signifie que, même si le maintien de la croissance économique reste une priorité absolue pour le PCC, ce n’est plus la seule priorité du pays. La Chine est désormais prête à subir d’importantes pertes économiques si elle estime que sa sécurité est compromise.
Les services de renseignement américains estiment que la Chine renforce activement ses capacités à envahir Taïwan à court terme 34. En juin 2021, le général Mark Milley a affirmé que la Chine souhaitait avoir la capacité d’envahir l’île au cours des six prochaines années 35, mais qu’elle n’avait peut-être pas l’intention de le faire à court terme. L’année 2027 est souvent la date avancée pour une potentielle invasion, en grande partie en raison de sa valeur symbolique : il s’agira du 100e anniversaire de l’APL — l’un des jalons de sa modernisation 36 — et de l’année de la candidature de Xi à un quatrième mandat. Bien que cela ne signifie pas que le PCC envisage d’envahir Taïwan à cette date, Xi souhaiterait certainement disposer de cette option.
Préparer l’Europe
Les Européens devraient partir du principe qu’à partir de 2027, l’hypothèse d’une invasion chinoise de Taïwan deviendra crédible et que les États-Unis devront recentrer leur attention et leurs ressources sur l’effort de dissuasion à l’égard de la Chine en Asie de l’Est. Cela serait vrai avec une administration démocrate pro-européenne, mais serait encore plus probable si une administration républicaine plus nationaliste arrivait au pouvoir après les élections de 2024. En 2027 au plus tard, les Européens devront être capable d’assurer l’essentiel du soutien militaire occidental à l’Ukraine et de la défense de l’Europe contre la Russie. Et face à une crise majeure au Moyen-Orient ou en Afrique, même si elle impliquait la Russie ou la Chine, les Européens devraient également être en mesure de réagir sans trop dépendre du leadership américain. Cette approche signifie que le projet européen d' »autonomie stratégique » n’est pas mort, mais qu’il doit être relancé et renforcé.
Lors d’une première phase (avant 2027), il est probable que les États-Unis pourront continuer à s’impliquer en Europe tout en se préparant à une offensive chinoise limitée en Asie de l’Est (excluant une invasion à grande échelle de Taïwan). Toutefois, le soutien américain à l’Ukraine pourrait également s’affaiblir pour des raisons de politique intérieure. À ce stade, Européens et Américains devraient se donner pour objectif non seulement de permettre aux Ukrainiens de se défendre mais aussi d’affaiblir considérablement la capacité de la Russie à mener une guerre offensive. Si l’Ukraine, fortement soutenue par l’Occident, parvenait à affaiblir sensiblement la puissance russe pour les années à venir, le pivot que les États-Unis devront tôt ou tard opérer pour faire face à une éventuelle invasion de Taïwan ne laisserait pas l’Europe dans une position trop vulnérable. Les forces russes en Ukraine ont déjà subi des pertes humaines 37 et matérielles 38 bien supérieures aux prévisions initiales, et certains analystes estiment déjà que l’érosion des capacités russes et le renforcement de l’OTAN permettront bientôt aux États-Unis de donner la priorité à l’Asie 39.
L’objectif devrait être que, d’ici 2025, les Européens puissent offrir l’essentiel du soutien militaire à l’Ukraine et que, d’ici 2027 — la phase deux — ils soient en mesure de dissuader une agression russe en ne comptant que sur un soutien limité de la part des États-Unis. Certes, la tâche serait plus facile face à une Russie affaiblie par la défaite, mais il n’est pas exclu que la Russie se réarme rapidement. Dans ce cas, l’Europe devrait pouvoir compter sur l’expérience, le génie militaire et la force morale uniques de l’Ukraine, idéalement en intégrant le pays dans l’OTAN et l’UE. En combinant les nécessaires investissements européens avec un soutien initial fort des États-Unis, l’affaiblissement de la Russie et l’ajout des forces ukrainiennes, l’autonomie stratégique européenne pourrait devenir une perspective réaliste lorsque la menace chinoise aura atteint un stade critique en Asie de l’Est.
L’OTAN devrait accompagner ce mouvement en souscrivant explicitement à l’objectif d’autonomie stratégique européenne 40 comme condition essentielle de sa résilience et de son efficacité. Dans le contexte de la mise en œuvre du nouveau modèle de forces adopté à Madrid en juin 2022, qui prévoit la disponibilité rapide de 300 000 soldats, le débat sur l' »européanisation » progressive de l’OTAN 41 ou sur un « pilier européen » de l’OTAN devrait être relancé. Alors que la présence de troupes américaines sur le sol européen restera importante pour la cohésion de l’Alliance, il sera essentiel d’intégrer dans la planification, les scénarios et les exercices militaires de l’OTAN l’objectif de pouvoir maintenir une première ligne de défense crédible et rapidement disponible, même en cas de restrictions sévères de la disponibilité des capacités américaines. Il sera également essentiel de signaler publiquement la solidité de ce pilier européen afin que, même dans le scénario pessimiste d’une invasion chinoise à grande échelle de Taïwan qui obligerait les États-Unis à concentrer leurs efforts sur le théâtre est-asiatique, la crédibilité de la dissuasion conventionnelle de l’OTAN en Europe ne soit pas affectée, et que Russie ne voie pas dans cette situation une chance à saisir pour attaquer.
Quant à l’UE, elle devrait considérablement revoir à la hausse les ambitions de sa Boussole stratégique de 2022 et, d’ici 2025, viser à devenir l’un des principaux moteurs des efforts capacitaires des États membres, que ce soit pour renforcer ses armées nationales ou les forces ukrainiennes. À terme, l’objectif de l’UE devrait être d’équilibrer collectivement la capacité de production de défense de la Russie. Des investissements substantiels 42 devraient être réalisés au niveau européen pour soutenir l’acquisition conjointe du même équipement militaire 43 par plusieurs États membres et l’adaptation rapide des capacités de production de l’industrie de défense européenne. Les acquisitions conjointes, en plus de permettre de dépenser mieux en générant des économies d’échelle, favoriserait l’interopérabilité des armées européennes, faciliterait la livraison d’équipements standardisés à l’Ukraine et stimulerait la convergence des industries de défense européennes. Compte tenu de l’ampleur du défi que représente le risque d’un double front à partir de 2027, l’UE devra également aller au-delà des instruments financiers ciblés ou ad hoc actuellement en place–la Facilité européenne pour la paix pour le soutien militaire à l’Ukraine, le Fonds européen de la défense et l’Instrument destiné à renforcer l’industrie européenne de la défense au moyen d’acquisitions conjointes (EDIRPA) 44 pour soutenir l’industrie de la défense–et établir un véritable budget européen de défense grâce auquel l’UE serait en mesure d’acheter des équipements militaires, de préférence produits par l’industrie européenne, pour l’Ukraine, les États membres, ou l’UE elle-même. Seul un tel bond en avant rendrait crédible la capacité des Européens à assurer la continuité de leur défense en cas de guerre de haute intensité en Asie de l’Est.
Les Européens se concentrent actuellement sur l’Ukraine et ses besoins immédiats. Bien que cela soit compréhensible, une stratégie viable, même à moyen terme, doit être basée sur une vision globale de l’espace (le dilemme des deux théâtres) et du temps (2027 et l’évolution de la menace chinoise). En élargissant la focale, il est clair que l’autonomie stratégique européenne n’est pas morte ; elle est plus vitale que jamais.
Sources
- US Departement of State, U.S. Security Cooperation with Ukraine, Fact Sheet, avril, 2023.
- US Department of Defense, U.S. Defense Contributions to Europe, Fact Sheet, juin, 2022.
- Judy Asks : Is European Strategic Autonomy Over ?, Carnegie Europe, janvier, 2023.
- Hugo Meijer, Stephen G. Brooks ; Illusions of Autonomy : Why Europe Cannot Provide for Its Security If the United States Pulls Back. International Security 2021 ; 45 (4) : 7–43.
- Liana Fix, U.S. Leadership on Ukraine Is Increasing European Dependence, World Politics Review, février, 2023.
- https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/0163660X.2018.1557479
- Brands, Hal Montgomery, Evan Braden, One War is Not Enough : Strategy and Force Planning for Great-Power Competition, Texas National Security Review : Volume 3, Issue 2, Printemps 2020.
- Seung Min Kim, Michelle Ye Hee Lee, Cleve R. Wootson, Jr., Biden takes aggressive posture toward China on Asia trip, Washington Post, mai, 2022.
- Seth G. Jones, Empty bins in a Wartime Environment, the Challenge to the U.S. Defense Industrial Base, Center for Strategic and International Studies, janvier 2023.
- Congressional Research Service, U.S. Ground Forces in the Indo-Pacific : Background and Issues for Congress Updated aout 30, 2022.
- Gordon Lubold, Doug Cameron, Nancy A. Youssef, U.S. Effort to Arm Taiwan Faces New Challenge With Ukraine Conflict, Wall Sreet Journal, novembre 2022.
- Elbridge Colby, Oriana Skylar Mastro, Ukraine Is a Distraction From Taiwan, Wall Street Journal, février 2022.
- Max Bergmann, U.S. Security Assistance To Ukraine Is Going To Get Complicated, Texas National Security Review, mars 2023.
- A. Wess Mitchell, A Strategy for Avoiding Two-Front War, The National Interest, aout 2021.
- Luis Simón, Bridging U.S.-Led Alliances in the Euro-Atlantic and Indo-Pacific : An Inter-theater Perspective, CSIS, mai 2022.
- Raphael S. Cohen, Kraine And The New Two War Construct, Texas National Security Review, janvier 2023.
- Secretary Antony J. Blinken and Secretary Lloyd Austin Remarks to Traveling Press, avril 2022.
- Michael J. Green, Even an ‘Asia First’ Strategy Needs to Deter Russia in Ukraine, Foreign Policy, février 2022.
- Luis Simón, America’s Indo-Pacific Strategy Runs Through Ukraine, décembre 2022.
- Hal Brands, Can the US Take on China, Iran, and Russia All at Once ?, Bloomberg, octobre 2022
- Department of Defense Releases its 2022 Strategic Reviews – National Defense Strategy, Nuclear Posture Review, and Missile Defense Review.
- Ashley Townshend and James Crabtree, The U.S. Is Losing Its Military Edge in Asia, and China Knows It, New York Times, juin, 2022.
- Andrew A. Michta, Ukraine Proves ‘Asia Vs. Europe’ Is A False US Foreign Policy Choice, 1945, février 2022.
- Vanessa Gera, Retired US general says war with China likely in 15 years, AP, octobre 2018.
- Blasko, Dennis J., China Maritime Report No. 20 : The PLA Army Amphibious Force, CMSI China Maritime Reports. 20, 2022.
- Jeffrey Goldberg, A Russian Defeat in Ukraine Could Save Taiwan, The Atlantic, juillet 2022.
- Sophia Barkoff, CIA confirms possibility of Chinese lethal aid to Russia, CBS News, février 2023.
- Joel Wuthnow Derek Grossman Phillip C. Saunders Andrew Scobell Andrew N.d. Yang, Crossing The Strait China’s Military Prepares For War With Taiwan, National Defense University Press, 2022.
- 2022 Report on Military and Security Developments Involving the People’s Republic of China.
- Full text of the report to the 20th National Congress of the Communist Party of China, octobre 2022.
- Working Together to Realize Rejuvenation of the Chinese Nation and Advance China’s Peaceful Reunification, janvier 2019.
- The Taiwan Question and China’s Reunification in the New Era The People’s Republic of China The Taiwan Affairs Office of the State Council and The State Council Information Office, aout 2022.
- Howard Wang, ‘Security Is a Prerequisite for Development’ : Consensus-Building toward a New Top Priority in the Chinese Communist Party, Journal of Contemporary China, 2022.
- Katie Bo Lillis, Michael Conte, Jennifer Hansler and Veronica Stracqualursi, US intelligence officials warn China is ‘working hard’ to be able to take over Taiwan militarily, CNN mai 2022.
- Sam LaGrone, Milley : China Wants Capability to Take Taiwan by 2027, Sees No Near-term Intent to Invade, juin 2021.
- Liu Xuanzun, Xi stresses PLA centenary goals, military modernization at 20th CPC National Congress, Global Times, octobre 2022.
- Ann M. SimmonsFollow and Nancy A. Youssef, Russia’s Casualties in Ukraine Near 200,000, Wall street Journal, février 2023.
- Stijn Mitzer and Jakub Janovsky, Attack On Europe : Documenting Russian Equipment Losses During The 2022 Russian Invasion Of Ukraine, février 2022.
- Thomas G. Mahnken, Could America Win a New World War ? What It Would Take to Defeat Both China and Russia, Foreign Affairs, octobre 2022.
- Pierre Haroche & Martin Quencez, NATO Facing China : Responses and Adaptations, Survival, 64:3, 73-86, 2022.
- Sven Biscop, The New Force Model : NATO’s European Army ?, Egmont Policy Brief, septembre 2022.
- Pierre Haroche, Why the EU needs a wartime investment plan, LSE, septembre 2022.
- Max Bergmann and Sophia Besch, Why European Defense Still Depends on America, mars 2023.
- Sebastian Clapp, European defence industry reinforcement through common procurement act (EDIRPA), European Parliamentary Research Service, février 2023.