L’accord annoncé par le FMI intervient à la suite d’une série de discussions avec les autorités ukrainiennes à Varsovie ce mois-ci. Il doit encore être approuvé par le conseil d’administration du Fonds, ce qui devrait se faire dans les semaines à venir.

Selon le ministère ukrainien des Finances, le déficit budgétaire avait atteint 911,1 milliards de hryvnia en 2022, soit 23,24 milliards d’euros. Il est estimé à 38 milliards de dollars pour l’année 2023.

  • Pour financer son budget, en 2022, le gouvernement s’était appuyé en premier lieu sur les obligations de guerre émises par le ministère des Finances et sur l’action de la banque centrale qui, depuis le début de l’invasion, a acheté des titres d’une valeur totale de 30 milliards de hryvnia (767 millions d’euros).
  • Le ministère ukrainien des Finances prévoit de recevoir en 2023 28 milliards de dollars sous forme de dons et de prêts des États-Unis et de l’Union européenne, le reste provenant de prêts bilatéraux d’autres États et du FMI. Les entrées permettront de combler le fossé budgétaire, avec un déficit s’élevant à quelque 3 milliards de dollars par mois. 
  • La banque centrale ukrainienne table pour 2023 sur une croissance du PIB de 0,3 %, bien que les attaques russes sur les infrastructures critiques pourraient affaiblir ces prévisions. Une reprise économique est attendue pour 2024.

L’accord du FMI témoigne d’un virage dans sa politique de financement, les fonds précédents ayant été distribués par le biais d’instruments de financement rapide et sans conditions.

  • Le FMI a approuvé le 17 mars des modifications de ses règles de prêt, lui permettant d’aider les pays confrontés à une incertitude exceptionnellement élevée ; en effet, traditionnellement, le Fonds ne prête qu’aux pays qui ont des perspectives claires de remboursement, afin de garantir sa capacité à continuer à prêter à d’autres pays.
  • Kyiv a commencé à négocier un programme de prêt complet avec le FMI en juin dernier, et a conclu un accord non monétaire de quatre mois lors d’une étape intermédiaire en décembre.
  • En tout, l’Ukraine a reçu plus de 38 milliards de dollars de soutien budgétaire (promis ou versés) de la part de pays étrangers et d’institutions financières internationales depuis le début de la guerre ; l’Union européenne et les États-Unis sont de loin les principaux contributeurs, avec 25 milliards de dollars.

Le plan de quatre ans devrait permettre à l’Ukraine de combler son déficit à court terme. 

  • La première phase du plan, s’étendant sur les 12 à 18 premiers mois du programme, consolidera la stabilité des prix et l’équilibre financier et budgétaire en  renforçant la mobilisation des recettes, éliminant le financement monétaire et en visant un financement net positif des marchés de la dette intérieure.
  • Au cours de la deuxième phase, l’Ukraine devrait revenir aux cadres politiques d’avant-guerre, en disposant un taux de change flexible et d’un régime de ciblage de l’inflation. En outre, des réformes budgétaires structurelles seraient menées pour ancrer les recettes à moyen terme, et  des réformes des investissements publics seraient conduites pour soutenir la reconstruction d’après-guerre.

Outre les modifications de la politique financière du FMI, nécessaires pour l’accord, celui-ci témoigne aussi d’un autre changement : depuis sa création en 1945, c’est la première fois que le Fonds finance un pays en guerre.  

  • Au cours de l’année 2022, la production industrielle ukrainienne a chuté de plus de 35 %. Pour la production manufacturière, le chiffre se situe à 40 % (la production de produits pétroliers raffinés, de produits chimiques, de caoutchouc et de produits en plastique a chuté de 60 %).
  • L’Ukraine produit aujourd’hui 20 000 tonnes de fonte, d’acier et d’acier laminé par jour, contre plus de 50 000 tonnes par jour avant la guerre. Dans le secteur de l’agriculture, selon la Kyiv School of Economics, en 2022 la récolte de blé a baissé à 20,2 millions de tonnes, contre 32,2 millions de tonnes en 2021 et la production totale de céréales à 54 millions de tonnes, contre 86 millions de tonnes en 2021. Le ministère de l’économie urkainien table sur diminution supplémentaire de la production de céréales, qui pourrait s’établir à 49,5 millions de tonnes en 2023.
  • La majorité des entreprises ukrainiennes identifient les coupures de courant, d’eau ou de chauffage, dus aux attaques russes sur les infrastructures du pays, comme les problèmes les plus fréquents qui affectent leurs activités.

La perception des perspectives de croissance des entreprises s’est également détériorée depuis septembre 2022, après un léger rebond pendant l’été.