La Corée du Nord n’a jamais fait défiler autant de missiles balistiques intercontinentaux (IBCM) que la nuit dernière. La présence de 11 missiles Hwasong-17 correspond au triple de ceux ayant défilé lors des précédentes parades militaires d’octobre 2020 et d’avril 20221.

  • Ces missiles semblent être dotés de propulseurs à propergol solide, une technique permettant de les déplacer plus facilement et de les lancer plus rapidement, ceux-ci étant déjà préchargés — contrairement aux missiles à ergols liquides.
  • Les missiles Hwasong-17, dévoilés en 2020 mais ayant connu des difficultés lors de précédents tests, disposent d’une portée de 15 000 kilomètres. Ils sont ainsi capables d’atteindre le territoire américain.

Le développement des capacités nucléaires nord-coréennes semble se faire à un rythme beaucoup plus rapide qu’anticipé. Ces missiles à propergol solide ont toutefois, pour le moment, été testés uniquement au sol en décembre dernier2. Il n’existe aucune certitude à ce stade qu’ils sont pleinement opérationnels.

Leur présence à la parade militaire d’hier soir fait toutefois craindre que la Corée du Nord se dirigerait vers de nouveaux essais nucléaires.

  • Si Pyongyang a lancé 69 missiles l’an dernier — soit sept fois plus qu’en 2021 –, aucun essai nucléaire n’a eu lieu depuis 2017.
  • Le nombre de 11 missiles constitue un palier pour les États-Unis, qui ne disposent que de 44 intercepteurs basés au sol (ground-based interceptors, ou GBI), déployés en Alaska et en Californie.
  • À supposer que les armes nord-coréennes puissent contenir chacune quatre ogives, une attaque nucléaire venant de Corée du Nord aurait le potentiel de saturer le système de défense anti-missiles américain3.

Le développement de l’arsenal nucléaire nord-coréen constitue également une menace pour la région, et particulièrement pour la Corée du Sud. La semaine dernière, Pyongyang déclarait que les exercices militaires conjoints entre Washington et Séoul avait atteint une « ligne rouge extrême », en réaction à l’annonce la semaine précédente d’une intensification de la coopération et de la dissuasion nucléaire dans la région entre les États-Unis et la Corée du Sud4.

  • Le 11 janvier dernier, le président sud-coréen Yoon Seok-youl déclarait, que Séoul pourrait « déployer des armes nucléaires tactiques ou développer son propre arsenal nucléaire », en réaction à l’intensification de la menace nord-coréenne5.
  • Selon un sondage réalisé en janvier par le journal Hankook Ilbo, 66,8 % de la population sud-coréenne serait désormais favorable au développement d’un arsenal nucléaire.

Il existe globalement un glissement des capacités nucléaires de l’Ouest vers l’Est. Le 7 février, l’armée américaine informait le Congrès du développement du programme de lanceurs terrestres chinois, dont le nombre est désormais plus important que ceux possédés par les États-Unis. Si l’arsenal nucléaire américain demeure largement supérieur, la Chine souhaite tripler ses capacités pour atteindre un arsenal composé de 1 500 ogives en 2035, selon le Pentagone.