Début octobre, un mème s’est mis à circuler sur les réseaux sociaux iraniens, vite relayé par un site international de partage de vidéos. On y voyait, entre autres, un sous-officier de l’Armée de terre, dans son uniforme distinctif mais anonymisé et à visage couvert, interpeler les Gardiens de la révolution et leur corps dit des « Mobilisés » (Bassidjis), en charge de la surveillance locale des populations. « Stop, stop, stop ! » (ist, ist, ist !), criait presque le sous-off. « Gare à vous si vous massacrez les Iraniens1 ! » (Khak bar saret, nakosh mellat-e Iranra !) En poursuivant : « Nous, on consigne tout, tout est enregistré. Et on va venir vous chercher ! Alors, pas de coups, et pas d’assassinat ! L’Armée ne tire que trois coups de semonce : stop, stop et stop. Au quatrième, nous, on tire. Vive l’Iran ! »

Si difficile que fût l’identification voire la datation de la source, comme souvent sur ce type de support, l’appel traduisait de manière explicite la lassitude d’une partie de la base des forces armées conventionnelles, voire des forces de l’ordre, face au choix du tout-répressif fait par le Guide suprême Ali Khameneï et son président Esmaïl Raïssi, un religieux ultraconservateur issu du pouvoir judiciaire. Ces derniers avaient d’abord pensé pouvoir venir à bout rapidement, par la terreur, des mouvements de protestation de masse qui ont suivi dans tout le pays le meurtre de la jeune Zhina (Mahsa) Amini, morte dans un commissariat de Téhéran le 16 septembre, d’un coup reçu à la tête au moment de son interpellation par la police des mœurs pour un foulard prétendument mal ajusté2.

Cette fatigue d’une partie de la troupe, face à l’explosion de contestations à laquelle la mort de Zhina–Mahsa Amini a donné le signal, se voyait confirmée par les appels à l’unité d’Abd al-Rahim Moussavi, commandant-en-chef de l’Armée conventionnelle (en persan : artesh, par opposition au sepah, la « Légion » des Gardiens de la révolution et, notamment, son corps des Bassidjis)3. La question désormais posée de la loyauté de l’Armée alimentait, dès la semaine du 10 octobre, un début de panique dans les instances du pouvoir militaro-religieux. Certains reprochaient à la police sa « passivité », un responsable allant jusqu’à évoquer l’envoi de drones kamikazes (les Shahed 136, utilisés le 28 septembre contre des organisations kurdes en Iraq, et en Ukraine par l’armée russe).

D’un combat féministe à l’avant-garde féminine d’une protestation globale

Outre la jeunesse, la résolution et le courage des manifestantes et manifestants de septembre–octobre 2022, trois éléments de nouveauté au moins, intimement liés, sont apparus dans les mouvements sociaux, désormais politiques, de cet automne par rapport à ceux qui les ont précédés (depuis la révolte étudiante de 1999, le mouvement Vert dix ans plus tard, et les manifestations endémiques de l’hiver 2017–18 puis du printemps et de l’automne 2019). Le premier, bien sûr, est la dimension symbolique particulière revêtue par le «  martyre  » (shahâdat) de Zhina–Mahsa Amini  : les réseaux sociaux qui le dénoncent ont adopté, pour en inverser le sens, le vocabulaire de l’autosacrifice qui est au cœur de la culture des valeurs masculines particulière aux Gardiens de la révolution.

Jusqu’alors, les grèves et manifestations des années précédentes, endémiques dans tout l’Iran, avaient gardé, malgré la radicalité de leurs slogans, un caractère social (contre le non-paiement des salaires du public ou des retraites  ; les problèmes économiques créés par la mauvaise gestion de l’eau  ; ou, en décembre 2017, le renchérissement attendu mais brutal du prix de l’essence à la pompe, dans un pays où la voiture individuelle est, entre autres, un rare dérivatif). En 2022, une contestation féministe ancienne de la République islamique, libérée par la mort de Zhina–Mahsa Amini, a pu prendre une dimension massive, portée par une jeune génération d’activistes souvent adolescentes, virtuoses d’Instagram et qui se découvraient, à la faveur des événements, une vocation d’influenceuses.

En 2022, une contestation féministe ancienne de la République islamique, libérée par la mort de Zhina–Mahsa Amini, a pu prendre une dimension massive, portée par une jeune génération d’activistes souvent adolescentes, virtuoses d’Instagram et qui se découvraient, à la faveur des événements, une vocation d’influenceuses.

StÉphane dudoignon

Les observateurs n’ont pu qu’être frappés par l’audace des jeunes Iraniennes rejetant leur voile à visage découvert, en ligne ou sur la place publique, et se coupant les cheveux par rejet radical d’une domination patriarcale, près de quarante ans après une révolution qui devait en affranchir… leurs grands-mères. Ils ont noté, aussi, que cette protestation féministe a placé les femmes et filles d’Iran à l’avant-garde d’un mouvement qui, se nourrissant d’elle, l’a sublimée pour déboucher sur une exigence de changement politique global, emmenée par la part féminine de la population4. Certes, quantité d’Iraniennes nées bien après 1979 s’accrochent au tchador – par conviction, clientélisme, peur de l’inconnu… – dans des contremanifestations abondamment relayées par les médias d’État.

Force est de constater, cependant, le rejet dont font l’objet les « Rondes de l’observance » (gasht-e ershâd) de la Police des mœurs, accusées de vouloir « faire du chiffre » par quantité de jeunes femmes arrêtées depuis l’élection d’Esmaïl Raïssi en 20215. Rebaptisées « Rondes de l’obéissance » (gasht-e ejbâr), elles focalisent aujourd’hui la critique… de nombreux officiels. Ainsi le 13 octobre, Ali Larijani, ancien président du parlement et conseiller de Khameneï, suggérait la place secondaire du hijab dans le dogme islamique — et que ce n’était pas aux forces de l’ordre d’en répondre, alors qu’elles font face à un boom de la délinquance6. Tout en qualifiant les manifestations de « séditieuses », il estimait que le rejet du voile par la moitié (sic) des Iraniennes ne constituait peut-être pas en soi un problème…

Comment interpréter pareil changement de paradigme ? En tenant ce discours, Ali Larijani semblait anticiper l’échec à venir de la répression. Et en reconnaissant l’importance prise par les luttes féministes dans les protestations actuelles, il suggérait une piste de sortie de crise. Son mouvement d’humeur, du reste, ne resta pas complètement sans effet : quatre jours plus tard Esmaïl Raïssi, qui jusque-là se limitait à dénoncer l’« ennemi » extérieur, évoqua la possibilité d’une « révision » (bâznegari) de la législation dite « culturelle », prenant en compte l’avis de l’« élite » intellectuelle du pays7. Filandreux à souhait, le discours présidentiel semblait toutefois fait pour gagner du temps, pour occulter aussi d’autres composantes, jugées plus menaçantes, des protestations actuelles.

La dimension ethnique : nouveau piège du pouvoir ?

Manifestantes et militantes avaient prévenu, pourtant  : elles continueront le combat féministe mais sans s’y laisser enfermer. En insistant sur l’unité des luttes dont l’Iran est le théâtre  : «  De Kermanshah à Zahedan, du Guilan à Bandar-Abbas  !  », a-t-on pu entendre la semaine du 10 octobre sur les avenues et les réseaux sociaux. Zhina–Mahsa était femme, kurde et sunnite. Or, fait rare en Iran, les réactions à sa mort ont débordé les champs d’habitude plus cloisonnés des luttes féministes, nationales et confessionnelles. C’est de Téhéran d’ailleurs que les protestations sont parties pour gagner sa ville natale de Saqqez au Kurdistan — où la fermeture du bazar local a été imitée jusqu’à Machhad, ville sainte du chiisme persan située à l’autre bout de l’Iran, et dans nombre de villes éloignées du monde kurde.

Intéressant, le voisinage dans ce slogan de Kermanshah et Zahedan. La première, dans l’extrême ouest du pays, au sud de l’aire kurde d’Iran, avait été touchée par un violent tremblement de terre en novembre 2017, qui avait suscité une mobilisation d’aide humanitaire dans tout le pays. La société civile iranienne y avait trouvé une occasion de s’organiser à l’échelle nationale, à la veille de la vague massive de mouvements de protestations de l’hiver 2017–18. Zahedan, de son côté, chef-lieu du Sistan–Baloutchistan au sud-est de l’Iran, est le siège d’un pouvoir religieux sunnite coiffé par l’imam Mowlavi Abd ol-Hamid. Or ce dernier, attrape-voix régional pour Raïssi lors de son élection en 2021, a depuis pris ses distances avec le régime, appelant au jugement de Khameneï pour son rôle dans les répressions8.

Entretemps était survenu le Vendredi noir de Zahedan, le 30 septembre. Ce jour-là, la répression d’une manifestation contre le meurtre d’une adolescente baloutche dans un commissariat de Tchabahar, ville portuaire sur l’océan Indien, se soldait par plus de 90 morts. Elle suivait de deux jours une attaque de drones contre les installations de réfugiés kurdes iraniens à l’est d’Erbil, au Kurdistan d’Iraq, qui faisait 13 morts et 58 blessés. Deux choses ont frappé ici protagonistes et observateurs  : d’une part, une certaine analogie de scénario avec les événements autour de la mort à Téhéran de Zhina–Mahsa (au Baloutchistan  : le meurtre initial d’une jeune fille dans un commissariat, après son viol9)  ; d’autre part, la dimension militaire des répressions (accréditant chaque fois la thèse d’un état de guerre).

À cette violence d’État particulière, plusieurs explications possibles. La première est le régime policier spécial, hérité en partie de la monarchie, en vigueur dans les anciennes marches impériales de l’Iran. Vécu localement comme « colonial » (pers. este‘mâri), ce régime explique la surreprésentation des Kurdes et des Baloutches dans les statistiques pénales du pays10. La seconde est le parti pris de la République islamique, fin septembre 2022, de jouer la provocation dans ses périphéries, pour justifier une répression massive au nom d’une lutte contre des « guérillas soutenues par l’étranger ». Côté baloutche, après le Vendredi noir l’info tombait d’ailleurs d’une attaque du Jaysh al-‘Adl (« Armée de la justice », un groupuscule armé actif depuis 2013 sur la frontière pakistanaise11).

À cette violence d’État particulière, plusieurs explications possibles. La première est le régime policier spécial, hérité en partie de la monarchie. La seconde est le parti pris de la République islamique, fin septembre 2022, de jouer la provocation dans ses périphéries, pour justifier une répression massive au nom d’une lutte contre des «  guérillas soutenues par l’étranger  ».

STéphane dudoignon

Comme pour le féminisme, le régime semble ici s’efforcer d’isoler une cible, afin de mieux fragmenter en causes diverses, mutuellement incompatibles, les protestations qui ont gagné toutes les régions et tous les groupes de la société iranienne. En incriminant des guérillas «  ethniques  » ou «  sunnites  » — en fait, peu présentes sur le terrain depuis plus d’une décennie —, il se donne par ailleurs un argument, sinon les moyens, de militariser la répression. Il lui suffit pour cela, en terre baloutche ou kurde, de maintenir actif l’abcès de fixation que la République islamique y entretient toute seule, comme une grande, en confisquant, dans une région de frontière déshéritée, le bénéfice de la contrebande au seul profit des rares protégés de ses unités locales des Gardiens de la révolution12.

Dans l’appareil sécuritaire  : des raisons de douter  ?

Pour autant, le succès de cette combinaison de manœuvres dilatoires et de déchainement de violence, bien dans le goût de la République islamique, est-il cette fois garanti  ? Pas sûr, si l’on veut bien se pencher sur la sociologie de la Légion des Gardiens et la manière dont cette grande bavarde (au contraire de la grande muette que reste l’Armée conventionnelle, malgré l’idéologisation de son état-major) étale ses désaccords sur la place publique. Des désaccords articulés sur trois clivages, en particulier  : régional  ; générationnel  ; et sectoriel (on utilisera ici un terme d’économie, par égard pour l’implication massive de la Légion dans la vie politico-économique régionale depuis au moins les élections municipales de 2003, avec ce que cela implique d’esprit de corps mais aussi de compétitions internes).

Le succès de cette combinaison de manœuvres dilatoires et de déchainement de violence est-il cette fois garanti  ? Pas sûr, si l’on veut bien se pencher sur la sociologie de la Légion des Gardiens et la manière dont elle étale ses désaccords sur trois clivages : régional  ; générationnel  ; et sectoriel.

Stéphane dudoignon

Le premier, régional, tient au mode de recrutement et de construction des carrières au sein de ce qui reste une milice révolutionnaire, irrespectueuse de quelque droit que ce soit et soucieuse avant tout, depuis ses débuts, de s’autofinancer. Depuis 1979, un ou une Bassidji, un ou une Pâsdâr (« Gardien », pâsdârân est la forme plurielle) s’engage dans une milice (devenue entretemps régiment, puis brigade, puis division, enfin plus rarement armée) étroitement identifiée, au cours de son histoire, à son lieu d’origine. Ainsi l’armée13actuelle dite Sârollah (« Vengeance divine »), fondée et longtemps dirigée par le charismatique Qasem Soleymani (tué en janvier 2020, à Bagdad, par un drone U.S.), est issue d’une milice révolutionnaire de Kerman dans le sud-est, longtemps en charge du Baloutchistan.

Depuis ses origines en 1979, le Sârollah de Kerman s’est distingué dans la geste Pâsdâr par son niveau de loyauté et d’autosacrifice. Certains de ses généraux, issus des mêmes quartiers de la ville de Kerman, ont longtemps constitué de petits groupes d’affins sur le front iraquien entre 1980 et 1988 puis dans l’état-major avant d’aller se faire tuer en Syrie, en 2015, à la demande de Soleymani venu les remobiliser14. Entretemps, devenus grands notables de leur ville d’origine, ils s’y sont investis dans l’économie et la vie publique régionale, avec un intérêt particulier pour le complexe militaro-industriel, d’une part15, et pour le secteur culturel et sportif de l’autre. À l’origine du ciment collectif de la Légion, la force de cet investissement local pourrait cependant être devenue l’un de ses points faibles.

N’a-t-on pas, en effet, trouvé quantité de sportifs, de sportives aux avant-postes de la protestation de septembre–octobre, malgré le monopole des Gardiens sur nombre de fédérations et de clubs ? On se rappelle la grimpeuse de vitesse Elnaz Rekabi participant, cheveux aux vents, aux championnats d’Asie de sa discipline, en Corée du Sud le 16 octobre (jour anniversaire de la mort de Zhina–Mahsa), avant de rentrer en héroïne à Téhéran coiffée d’une casquette et d’une capuche de survêtement16. De ce camouflet pour l’appareil militaro-religieux, l’exemple avait été donné les semaines précédentes par le football, sport phare pour des Pâsdârân aux yeux desquels les stades sont aussi sacrés que leurs casernes — à commencer par ceux de clubs vedettes et de l’équipe nationale, intimement liés à la Légion17.

Le précédent est évoqué parfois de la révolte des filles et des fils, alliés aux grands-pères, contre les pères dans la révolution de 1979. Et si 2022 nous replaçait dans cette configuration ? Car si activistes et manifestants (même chéris du pouvoir, comme les stars du ballon rond) frappent par leur jeunesse, c’est aussi à un moment où de plus en plus de grands anciens de la Légion, inattaquables du fait de leurs états de service, se sont mis à vitupérer le régime. Organisateur de la Marine des Gardiens puis entrepreneur à succès, un Hosseïn Alayi qualifiait dès le 18 septembre d’antireligieuse la « Ronde ». Invoquant le combat contre la tyrannie de Hosseïn, il identifiait Khameneï avec la figure, honnie des chiites, du calife omeyyade Yazid, responsable de la mort du Troisième Imam à Karbala en 68018.

Nouveau paradigme, aggiornamento ou ravalement de façade  ?

Difficile de pousser plus loin la critique chiite du régime issu de la révolution de 1979. Or cette critique intervient à un moment où Khameneï, vieillissant, paraît sidéré par les défis de la rue tandis que les figures des Gardiens se divisent sur la voie à suivre. L’implication des états-majors dans l’essor régionalisé du secteur militaro-industriel a créé des clivages sectoriels à l’origine de nombreux règlements de compte. Et si la Légion a réussi son OPA sur le parlement au printemps 2020, c’est contre une part de la droite religieuse désormais remontée contre eux. Coupés d’une population qu’ils savent en grande partie hostile, ils ne recrutent plus qu’en interne ou dans les familles de religieux. En outre quantités de leurs garnisons, issues des communautés au sein desquelles elles servent, sont considérées peu fiables.

La stratégie du pouvoir a consisté à isoler deux composantes des protestations  : la question «  culturelle  », comme moyen de noyer le poisson  ; la dimension ethnique, comme moyen de création d’abcès de fixation et de militarisation de la répression.

Stéphane dudoignon

D’où la tentation dans l’état-major de s’appuyer sur des corps et des unités choisies : d’abord, un petit nombre de commandos suréquipés, y compris de l’Artesh, spécialisés dans la répression des mouvements sociaux à Téhéran et dans les grandes villes19 ; en supplétifs : des milices étrangères (des Hashd al-Sha‘bi iraquiens entre autres, transférés en Iran où ils se sont déjà fait connaître par la violence de leurs interventions20). Au-delà, la stratégie du pouvoir a consisté à isoler deux composantes des protestations : la question « culturelle », comme moyen de noyer le poisson ; la dimension ethnique, comme moyen de création d’abcès de fixation et de militarisation de la répression.

Or même l’argument ethnique, cette fois, n’a pas pris. En effet, les causes politiques baloutche ou kurde sont devenues part intégrante des revendications d’une nation qui se veut indivise face au cynisme du pouvoir21. Pire : depuis la mi-octobre, les Azerbaïdjanais du nord-ouest sont entrés dans le mouvement, dans le sillage de provocations locales de la police. Or des soulèvements comme ceux d’Ardebil et désormais de Tabriz exposent à la contagion de la protestation non seulement toute cette importante région, jusqu’alors à l’écart du mouvement, mais aussi tout le bazar et le commerce de détail à Téhéran, en grande majorité turcophones. Un ensemble d’évolutions qui, ajoutées au mouvement ouvrier de la pétrochimie, commence à rappeler certains prodromes de la révolution de 1979.

Sources
  1. https://www.youtube.com/watch?v=eNF_VLrKROA (posté le 3 octobre ; vu le 7). Voir aussi les messages Twitter d’officiers de grade intermédiaire de l’Armée, d’adjudant à capitaine, recueillis le 5 octobre sur https://farsi.alarabiya.net (« Annonce par certains personnels de l’Armée de leur soutien aux protestations dans tout le pays », en persan).
  2. Si cette version des faits a été peu à peu acceptée par une part de l’establishment politique, elle a continué d’être niée par la hiérarchie policière, invoquant une maladie du cerveau de la victime.
  3. Appels malicieusement relayés par « Le Citoyen », le quotidien du Croissant rouge iranien, organe critique d’un pouvoir militaro-religieux qu’il accuse souvent d’incurie : Shahrvand, 10 octobre 2022, p. 2 (en persan).
  4. Robin Wright, « Iran’s protests are the first counter-revolution led by women », The New Yorker (9 octobre).
  5. Voir les témoignages réunis par Pierre-Louis Caron : « “Ils sont là pour nous dominer, gêner nos vies” : quatre Iraniennes racontent les interpellations fréquentes de la police des mœurs », France Info (9 octobre) ; et l’article de Pierre Ramond sur le Grand continent (22 septembre).
  6. « Larijani : il ne s’agirait pas de faire porter la charge du voile aux forces de l’ordre et au Basij », www.khabaronline.ir (12 octobre), en persan.
  7. « Raïssi : les lois structurelles concernant la culture doivent faire l’objet de révision et d’actualisation », www.khabaronline.ir (16 octobre), en persan.
  8. Vidéo « Les critiques de Mowlavi ‘Abd ol-Hamid contre le Guide de la République islamique », postée le 12 octobre par la chaîne d’info offshore Radio Farda (programme persan de Radio Free Europe/Radio Liberty), en persan. Depuis, d’autres voix se sont élevées, parmi les imams régionaux de la majorité chiite notamment, pour exiger plus d’ouverture en direction de la jeunesse (ceux d’Ispahan et de Gorgan en particulier, le second suggérant que par le recours à la violence contre les citoyens, Khameneï trahissait le modèle du prophète Muhammad : www.khabaronline.ir (le 23 et le 24 octobre, respectivement).
  9. Quelques jours plus tard, à Ardebil, ce sont les violences subies par des écolières qui mettent le feu aux poudres d’une région turcophone, l’Azerbaïdjan oriental, demeurée jusque-là à l’écart de la protestation.
  10. Selon Iran Human Rights, les Baloutches, qui ne représentent que quelque 3 % de la population de l’Iran, y comptaient pour 21 % des exécutions capitales en 2021 — cette proportion montant à… 35 % pour les neuf premiers mois de 2022 (voir notamment https://iranhr.net/en/articles/5472/).
  11. Sur les origines du Jaysh al-‘Adl au Baloutchistan d’Iran, voir notamment mon ouvrage The Baluch, Sunnism and the state in Iran : from tribal to global, Londres – New York : Hurst – Oxford University Press, 2017, pp. 7, 28, 261.
  12. Par exemple, sur les systèmes de clientèle mis en œuvre par les Gardiens dans les districts kurdes de la région d’Urmia, dans l’extrême nord-ouest de l’Iran, voir Hawzhin Baghali, «  Urmia  : la tribu à l’interface du politique et du confessionnel  », Archives de sciences sociales des religions, 199 (2022), sous presse.
  13. On distinguera le terme persan artesh, qui désigne l’« Armée » conventionnelle comme composante des forces armées iraniennes (pour la différencier du sepah, la « Légion » des Gardiens), de celui de lashkar, qui renvoie au sens d’« armée » comme unité (soit de l’Artesh, soit du Sepah).
  14. Sur le Sârollah de Kerman, voir mon livre Les Gardiens de la révolution islamique d’Iran  : sociologie politique d’une milice d’État, CNRS Éditions, 2022, notamment pp. 45 et 107.
  15. Un cas modèle d’investissement de la Légion dans le complexe militaro-industriel est celui du Lorestan, carrefour ferroviaire et région d’industrie minière à l’ouest de l’Iran  : ibid. pp. 197–200.
  16. Voir notamment l’Équipe en ligne du 22 octobre (article « L’Iranienne Elnaz Rekabi remercie ses soutiens sur les réseaux sociaux », avec l’AFP).
  17. Voir le récapitulatif d’interventions, y compris par l’entraîneur du FC Persépolis, le club star de la capitale Téhéran, proposé dès le 2 octobre par la chaîne Youtube de commentaire footballistique FootAct (https://www.youtube.com/watch?v=aWG_bt2kolw). Des entraîneurs de club de régions très diverses de l’Iran y protestaient contre l’arrestation d’un ou plusieurs de leurs joueurs, pour avoir participé à des manifestations ou exprimé leur désaccord avec la politiques répressive du régime.
  18. « Une réaction du Général Hosseïn Alayi à la mort de Mahsa Amini : la Ronde de l’obéissance peut-elle se réclamer de l’islam, voire de la religion ? », https://fararu.com (18 septembre, en persan) ; voir aussi « 14 pistes de Hosseïn Alayi pour une solution radicale des protestations », www.tabnak.ir (18 octobre, en persan ; Tabnak est une agence de presse proche des Gardiens, fondée par leur ancien commandant en chef Mohsen Rezayi). Parmi ces pistes : « écouter la voix de la majorité »…
  19. Voir l’analyse d’Ehsân Mehrâbi, « Division du travail dans les bases et les structures de répression : la base Sârollah, l’Unité spéciale et la NOPO », www.bbc.com/persian (25 septembre). Le Sârollah de Téhéran, à ne pas confondre avec celui de Kerman, a été créé en 1995 comme force d’élite des Gardiens pour la répression des mouvements sociaux de la capitale ; l’Unité spéciale et la NOPO sont des commandos d’intervention rapide de la police. Au sein de l’Artesh, ce sont les paras de la 65e brigade aéroportée (plus connus sous le nom de Bérets-verts) qui, contrairement aux années précédentes, ont commencé d’être mobilisés pour la répression en milieu urbain.
  20. Anna Ahronheim, « Hezbollah, Iraqi Hashd al-Shaabi helping Iran quash protests », Jerusalem post (17 octobre). Le terme arabe de Hashd al-Sha‘bi, « Mobilisation populaire », désigne un ensemble de milices autonomes actives en Iraq, parfois sous parapluie iranien mais très divisées depuis la mort de Soleymani en janvier 2020.
  21. Comme l’ont illustré les propos en chaire de Mowlavi Abd ol-Hamid à Zahedan, d’une part, aujourd’hui menacé de représailles par certains chefs des Gardiens, ou d’autre part la jeune militante des droits de l’homme Fariba Baluch lors d’une manifestation sur Under-den-Linden, à Berlin, le 22 octobre (https://www.youtube.com/watch?v=g00lMfXvUT0).