Activiste et féministe, vous vous êtes engagée pour la défense des droits humains. Y a-t-il des événements en particulier qui ont motivé chez vous ce désir d’agir ? Comment la répression que vous subissez a-t-elle influencé votre engagement ?
Je militais déjà avant la tentative de coup d’État en Turquie en juillet 2016, en travaillant dans le domaine des droits de l’homme et dans un syndicat éducatif et civil 1. Après la tentative de coup d’État, le gouvernement a commencé à licencier des gens. Suite à mon propre licenciement en février 2017, j’ai décidé d’orienter mon activisme vers la défense des droits des opposants et victimes du régime. Environ 250 000 personnes se sont vues retirer leur passeport. Parce qu’elles étaient catégorisées comme des opposants au régime, il leur était impossible de retrouver un emploi. Je n’ai moi-même pas pu trouver un autre poste de professeur de philosophie. À cette époque, des milliers de personnes ont été emprisonnées en raison de leurs opinions politiques, même s’il ne s’agissait pas de militantisme. Penser différemment était un motif suffisant d’emprisonnement.
Les femmes ont été les premières victimes de cette situation. Les femmes célibataires qui travaillaient ont perdu leur indépendance économique et ont dû retourner vivre avec leur famille. Si elles étaient mariées, elles devenaient dépendantes de leur mari. Cette situation a été décrite comme de la discrimination sociale. Plus de 100 personnes se sont suicidées au cours de cette période. Le gouvernement a publié les noms des opposants sur Internet, nous désignant comme des terroristes.
Environ 100 000 personnes ont été condamnées et la plupart sont toujours emprisonnées. Après cette vague de licenciements, une commission d’urgence a été mise en place. Nous avons fait une demande auprès de cette commission pour que nous puissions retrouver nos emplois. J’ai déposé une demande auprès de cette commission il y a cinq ans et j’attends toujours une réponse. Il est impossible d’appeler cela de la justice. Certaines personnes ont essayé de s’adresser à la Cour européenne des droits de l’homme, mais cette cour ne peut agir que lorsque toutes les voies légales à l’échelle nationale ont été utilisées. Or, nous ne pouvons pas recourir à la justice turque. Nous sommes donc dans une situation paradoxale où nous ne pouvons pas demander d’aide.
Je travaille également en tant que militante dans une association de défense des droits de l’homme à Istanbul et au sein de la Commission contre le racisme et les discriminations. En Turquie, le racisme et les discriminations constituent des problématiques majeures, surtout pour les personnes non turques et non musulmanes. Je pense qu’il y a environ 20 millions de Kurdes qui sont exclus de la société. Suite à la guerre menée par Bachar al-Assad en Syrie, 5 millions de réfugiés syriens sont officiellement entrés en Turquie, mais officieusement ce chiffre peut être doublé. Dans un contexte économique désastreux avec une inflation proche des 79 % en juin 2022, les réfugiés syriens sont pointés du doigt et subissent des violences racistes.
Quelles sont les expériences qui vous ont poussé à vous engager ?
Les violations des droits de l’homme étaient fréquentes et nombreuses, avant même le coup d’État, en particulier contre les femmes. Selon les chiffres officiels, une femme est tuée chaque jour en Turquie, mais les chiffres réels sont bien plus élevés. Depuis que je suis entrée à l’université, je me bats pour les droits civils, les droits politiques et les droits des femmes. La répression croissante n’a fait qu’accroître ma volonté de m’engager.
Également membre de l’association des droits de l’homme et participante au sein de la Commission contre le racisme et la discrimination, comment définissez-vous votre identité ?
Beaucoup d’éléments façonnent mon identité. Mon mode de vie, ma façon de m’habiller, mes croyances, mes positions politiques etc. représentent une forme de lutte contre le régime qui cherche à régir nos comportements. Nous nous battons contre cela. Depuis presque neuf ans, chaque 8 mars, les femmes sont attaquées. En Turquie, il existe pourtant de nombreuses organisations féministes qui se battent pour les droits des femmes. Prenez l’exemple des mariages d’enfants. Le terme de mariage ne convient pas car il s’agit en réalité de viol. C’est encore courant en Turquie. Les petites filles ne sont pas envoyées à l’école car leurs parents considèrent qu’il est plus important de leur trouver un mari. Même si ce n’est pas le cas dans les grandes villes, comme Istanbul ou Ankara, c’est encore fréquent dans les zones rurales. Être une femme en Turquie est très difficile. Nous devons nous soumettre à de nombreuses règles tacites. Les femmes ne peuvent pas sortir seules la nuit car si elles se font agressées, elles pourraient être tenues responsables pour être sorties durant la nuit. Bien qu’il existe un slogan affirmant que nous pouvons nous habiller comme nous le voulons, la réalité est très différente. Il n’existe pas de ministère pour les droits des femmes en Turquie. Il existe un ministère de la famille et un ministère de la sécurité sociale, mais la femme est définie comme un membre de la famille. Il est donc très difficile de devenir une femme indépendante en Turquie.
Les manifestations des femmes lors de la journée du 8 mars reflètent ce refus de céder au gouvernement. Comment percevez-vous l’organisation pour la défense des droits de l’homme et les dynamiques en son sein ? Que pensez-vous de l’efficacité de cette mobilisation ? Comment lier l’ensemble de ces singularités et de ces engagements individuels qui résistent ?
Je pense que la journée du 8 mars touche les gens, même si c’est à petite échelle, car chaque année, de plus en plus de femmes manifestent. L’année dernière, la Turquie a retiré sa signature de la Convention d’Istanbul. Cette décision a provoqué la colère de milliers de femmes qui sont descendues dans la rue pour protester contre cette décision illégale. En effet, dans la loi turque, le retrait d’une convention internationale doit être approuvé par le Parlement. Or, Erdogan a pris cette décision de façon unilatérale. Les organisations des droits des femmes essaient encore aujourd’hui de faire annuler cette décision. Parce que la Convention d’Istanbul protège les droits des femmes et ceux des personnes LGBTQ, elle a été décrite par le régime comme un produit de la culture européenne et non turque. L’homosexualité n’est toujours pas acceptée en Turquie.
Les droits des femmes et des minorités sont des droits fondamentaux. Nous devons donc les protéger. Nous devons assurer qu’ils soient respectés en les protégeant par la mise en place de lois.
Comment considérez-vous votre action dans ce domaine, en Turquie, comme à l’échelle mondiale ?
En Turquie, il est très difficile de lutter pour les droits de l’homme car les autorités nous traquent en permanence. Récemment, plus de 22 défenseurs des droits de l’homme ont été arrêtés et 16 d’entre eux sont maintenant en prison. En outre, la liberté de la presse n’est pas respectée. 21 journalistes ont été arrêtés sans motif. Cela montre bien à quel point il s’agit de décisions politiques qui visent à faire taire les voix de l’opposition. Toute ma vie, j’ai défendu le recours à des actions non violentes. Mais j’ai quand même été détenue à de nombreuses reprises. J’ai été maintenue en garde à vue suite à la publication d’un communiqué de presse que nous avions rédigé sur la journée de la paix en Turquie. Chaque parole, chaque comportement peut être qualifié par le régime d’atteinte à la sécurité de l’État. Je me bats dans différents domaines parce que travailler pour les droits des prisonniers, des immigrés ou des travailleurs c’est aussi œuvrer pour les droits des femmes. Les femmes sont toujours des doubles victimes.
Votre engagement se traduit notamment par des actions publiques. Comment comprenez-vous la résistance dans son aspect technique ? Quels sont pour vous les outils, les moyens d’expressions de cette lutte qui vous permettent de vous opposer ? Quelles sont les structures sur lesquelles cette lutte repose ?
Pour dénoncer les pratiques du régime turc, nous intervenons dans des médias, nous manifestons, nous publions des communiqués de presse, des vidéos, des articles, et nous maintenons un dialogue avec la société civile. Nous avons organisé à Istanbul des sit-in avec mon syndicat. Il est également important de parler aux civils pour leur expliquer les raisons de notre mobilisation. Je pense que c’est le plus important car la plupart des Turcs essaient de se tenir à l’écart des manifestations. Ils craignent qu’elles soient le lieu de violences et qu’ils se fassent arrêtés.
Avez-vous des un cadre théorique et/ou des figures ou moments emblématiques qui définissent et inspirent cette lutte ?
La directrice de notre association, Eren Keskin, est une source d’inspiration. Elle est avocate et dirige l’Association des droits de l’homme en Turquie. Elle est un modèle très important pour moi, car elle s’est battue toute sa vie pour les droits de l’homme, de manière légale et non violente. Des dizaines de procès lui sont intentés.
Il y a également un événement survenu pendant mes années d’études qui a marqué un tournant dans mon engagement. La police est entrée dans mon logement et certains de mes amis qui étaient présents ont été arrêtés. Cela a été un moment décisif dans ma vie. Même si ce n’est pas ce seul moment qui a inspiré ma lutte, c’était le moment où j’ai pris conscience que les autorités turques étaient prêtes à faire usage de la violence pour nous faire taire.
Comment la tentative manquée de coup d’État de juillet 2016 et la répression qui a suivi ont-ils impacté votre façon de résister ?
Les membres de notre syndicat social-démocrate étaient au courant de la préparation de la tentative de coup d’État en Turquie. Ils ont perdu leur emploi à la suite de l’échec du coup d’État. Dans un premier temps, nous avons essayé de sensibiliser la population à l’injustice vécue par ces personnes qui avaient perdu leur emploi. Ensuite, nous avons décidé d’organiser des rassemblements à Istanbul, quatre jours par semaine. Nous sommes allés voir les médias, mais la plupart d’entre eux ne souhaitaient pas couvrir notre mobilisation par peur d’être pris pour cible par le gouvernement. Après la tentative de coup d’État, plus de 200 médias ont été fermés. Il existe néanmoins encore des partis politiques, des syndicats, des ONG de différents horizons politiques qui continuent d’agir.
Quelles sont, aujourd’hui, vos priorités, pour vous même et pour votre lutte ?
Ma priorité actuelle est de faire entendre la voix des personnes licenciées illégalement, emprisonnées et privées de leurs droits après la tentative de coup d’État.
Comment appréhender les perspectives de développement sur l’année à venir pour l’opposition, alors que Erdogan tente de conserver sa place aux prochaines élections présidentielles de 2023 ?
Erdogan a effectivement annoncé qu’il serait de nouveau candidat aux prochaines élections. C’est malheureusement assez ironique parce que notre Constitution l’interdit. Mais en Turquie, tout peut arriver. Il peut gagner de nouveau. En 2015, alors qu’il n’avait pas obtenu une majorité absolue aux élections législatives, une série d’attentats a eu lieu à Istanbul et Ankara. Erdogan a nié tout lien avec ces attentats et a affirmé que Daesh en était responsable. Mais la plupart des personnes en Turquie savent qu’Erdogan a soutenu officieusement Daesh. Une réunion politique du parti d’opposition a été bombardée et cinq personnes sont mortes. Après les élections, les attentats à la bombe ont cessé. Beaucoup pensent qu’Erdogan a quelque chose à voir avec cela. Les Turcs craignent que la même chose se reproduise s’il ne gagne pas les prochaines élections. Les gens ont peur, la situation économique et le contexte politique sont catastrophiques, s’y ajoutent aussi le trafic de drogue et la mafia.
Alors que l’AKP a perdu Istanbul en 2019, un changement d’équilibre politique est-il possible ?
Istanbul et Ankara ont représenté de grosses pertes pour le Parti d’Erdogan. Istanbul était resté aux mains de l’AKP pendant plus de 20 ans. L’AKP essaie maintenant de diminuer les prérogatives de la municipalité. L’AKP a notamment retiré au maire sa capacité de gestion des parcs et musées.
Alors que la Turquie s’est retirée de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et les violences domestiques, comment comprendre les conséquences d’un tel retrait pour les droits des femmes en Turquie ?
Cette convention n’était pas suffisante pour garantir qu’aucune femme ne soit victime de violences. Néanmoins, elle apportait une certaine protection aux femmes. Désormais, nos droits peuvent être plus facilement violés. De façon ironique, la Turquie a été le premier pays à signer la Convention d’Istanbul et Erdogan prétend maintenant qu’elle ne convient pas à la culture turque.
Comment comprenez-vous le refus de reconnaître le génocide arménien et les conséquences sur la considération des violations des droits humains ?
En Turquie, parler du génocide arménien est considéré comme un crime. Il y a quelques semaines, un parlementaire arménien du Parti démocratique des peuples, Garo Paylan, a rédigé une pétition adressée au Parlement dans laquelle il demandait que le génocide arménien soit reconnu. Il a également demandé que les noms des rues faisant référence aux auteurs du génocide soient changés. En réponse, il a reçu des menaces d’Erdogan et du gouvernement, qui considéraient sa demande comme une insulte au pays et qu’il devait être jugé pour cela. Nous défendons la cause de Garo Paylan car nous savons que le génocide arménien a malheureusement existé et que la Turquie en est responsable.
Au vu des arrestations arbitraires de parlementaires kurdes ainsi que les menaces turques sur les Kurdes du Nord de Syrie, quelles perspectives pour la question kurde ?
L’ancien président du Parti démocratique des peuples (HDP), d’origine kurde, Selahattin Demirtas, ainsi que certains parlementaires du HDP sont toujours en prison. La question kurde est très sensible en Turquie. Lorsque le peuple kurde demande que ses droits, sa langue, sa culture, soient respectés, c’est considéré comme un crime. Je ne suis évidemment pas d’accord avec le gouvernement turc. La population turque rassemble 85 millions de personnes dont presque 20 millions de Kurdes. Ils ne constituent donc pas une minorité et demandent simplement l’égalité des droits. Je les soutiens, mais je ne peux pas parler en leur nom.
Erdogan a exprimé son intention d’organiser une intervention dans le Nord de la Syrie. Quelles pourraient être les conséquences d’une telle action sur les relations entre la Turquie et l’Occident ?
Nous sommes contre les opérations menées dans le nord de la Syrie. Erdogan justifie ces interventions en affirmant qu’il s’agit de protéger les frontières de la Turquie et de lutter contre le terrorisme, mais c’est plus que cela. La géographie de la Syrie est très complexe et de nombreux pays sont impliqués dans cette guerre. Je pense qu’Erdogan essaie de tirer le meilleur parti du contexte de guerre pour étendre son influence et démontrer la force de l’armée turque.
Comment envisagez-vous le futur pour les militants des droits de l’homme en Turquie ?
J’ai de l’espoir. Les choses changent. Le gouvernement changera peut-être lors des prochaines élections. Même si un certain nombre de fonctionnaires soutiennent toujours Erdogan, beaucoup de personnes perçoivent la dangerosité de ses manœuvres politiques. La dégradation de la situation économique pourrait également inciter plus de personnes à voter pour le camp de l’opposition.
La Cour européenne des droits de l’homme a condamné à de nombreuses reprises la Turquie pour la répression des mouvements populaires tel que celui de mai 2013 ainsi que celle visant l’opposition après le coup d’État manqué de 2016. Comment comprenez-vous l’action européenne pour la défense des droits humains au sein du Conseil de l’Europe, notamment en Turquie ?
La Cour européenne des droits de l’homme a une fonction essentiellement diplomatique. Chaque membre représente son propre gouvernement. Les nombreuses condamnations envers la Turquie n’ont pas souvent permis de grandes avancées. La Constitution turque reconnaît la légitimité du droit international dans certains domaines uniquement. Selon la pyramide des normes, s’il devait y avoir un conflit opposant le droit national turc au droit international, c’est le droit international qui devrait primer. Cependant, en Turquie, nous ne suivons pas cette règle. L’Europe a envoyé de nombreux avertissements au gouvernement turc concernant la situation d’Osman Kavala, homme d’affaires et philanthrope turc, prisonnier politique depuis 2017. Mais Erdogan s’en moque. L’efficacité de l’action européenne en Turquie est donc toute relative.
La Turquie et l’Europe ont conclu un accord migratoire controversé en 2016. Comment percevez-vous la gestion par l’Europe de l’enjeu migratoire ?
Il y a deux ans, Erdogan a menacé l’Europe en envoyant des migrants à la frontière turco-grecque. J’étais présente avec des collègues de notre association de défense des droits de l’homme. Les autorités turques ont poussé les migrants vers la frontière grecque. Les autorités grecques ont utilisé des gaz lacrymogènes. Heureusement, personne n’est mort cette fois-ci. Nous avons parlé à certains des migrants présents. Ils nous ont expliqué que les autorités turques les avaient autorisé à aller en Europe. Je ne sais pas quel est l’agenda secret entre l’Europe et la Turquie, mais il y a un accord. Nous recevons de l’argent de l’Europe pour la gestion migratoire. Néanmoins cet argent n’est jamais redistribué vers les migrants pour l’établissement de programmes de formation ou d’insertion. Par ailleurs, il y a beaucoup de migrants illégaux en Turquie qui viennent de Syrie, mais aussi d’Afghanistan depuis l’année dernière. Leur situation est catastrophique. Ils sont victimes de racisme, occupent des emplois précaires et vivent dans des logements insalubres. Je pense que le gouvernement utilise les migrants pour servir son propre agenda politique. La Turquie représente une porte qui empêche les migrants d’aller en Europe. Je pense que si l’Europe tolère parfois en Turquie des choses qu’elle ne devrait pas, c’est à cause d’un accord migratoire.
Alors que le projet d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne semble ne plus être d’actualité, sous quelles formes et dans quels domaines envisager un rapprochement entre la Turquie et l’Union européenne ?
Il est difficile de comprendre l’action d’Erdogan. Son discours sur l’Europe change constamment. Au cours des deux dernières années, il a adopté quelques lois creuses sur les droits de l’homme et la démocratie. Parfois, il se montre extrêmement critique envers l’Union européenne. La Turquie est influencée par les cultures européennes et Moyen-orientales. Cette diversité de nationalités et de religions en Turquie est une richesse pour nous. Nous pouvons vivre en paix avec cette diversité. Le seul problème, ce sont nos politiciens.
Sources
- Membre du Syndicat des professionnels de l’éducation, Nuray Simsek est licenciée en 2017 à cause de ses opinions politiques. Dans le cadre de la politique de répression des voix d’opposition du gouvernement turque, elle est également privée du droit de voyager, de travailler et d’être élue. En contestation, elle organise avec ses consœurs et ses confrères plusieurs actions publiques. Détenue et poursuivie en justice, elle ne cesse pourtant pas son militantisme. Cette année, elle a été lauréate de la toute nouvelle initiative Marianne pour les défenseurs des droits de l’Homme, lancée par le Président de la République en décembre 2021.