« L’arme de destruction massive de la fin du XXe siècle a été la machette », une conversation avec Frédéric Encel
Florian Louis a rencontré Frédéric Encel, lauréat du Prix du Livre géopolitique pour ses Voies de la puissance.
Votre dernier ouvrage propose une réflexion sur l’ordre du monde axé autour de la notion de puissance. Comment définir celle-ci ?
La puissance, c’est d’abord la souveraineté. La capacité d’agir de manière souveraine, que ce soit par la coercition ou par la diplomatie, sans être contrecarré par une autre puissance plus importante. Autrement dit, la puissance est un moyen, pas une fin en soi. En Europe, la puissance a été à tort considérée pendant plusieurs décennies comme intrinsèquement négative. Or la puissance, comme n’importe quelle autre chose, peut être utilisée à des fins positives comme à des fins négatives sur le plan moral. C’est le syndrome du couteau : on peut l’utiliser de plusieurs façons. Il est donc nécessaire de sortir de cette ineptie illustrée par un Fukuyama et d’autres dans les années 1990 consistant à penser que l’histoire était terminée, qu’il y avait un dernier homme et que cet homme ne ferait pas la guerre parce qu’il ne serait plus un idéologue. C’est un irénisme dangereux qui n’a jamais pour effet que d’aiguiser l’appétit de ceux pour qui la puissance est un moyen d’imposer leur volonté, y compris par la violence.
Vous vous intéressez non seulement à la puissance des États, mais aussi à celle de nombreux autres acteurs comme les entreprises, les groupes militants ou les religions. Ces différents acteurs sont-ils détenteurs d’un même type de puissance ? Ou bien la puissance étatique demeure-t-elle incommensurable ?
J’aime à citer le poète Pierre Reverdy selon qui il n’y a pas d’amour mais seulement des preuves d’amour. Il en va de même pour la puissance : il n’y a pas de puissance, seulement des preuves de puissance, des critères, des paramètres, des traductions précises. C’est précisément ce que j’essaie d’établir dans cet ouvrage. S’agissant de la question que vous soulevez, je tente une hiérarchie dans la nature de la puissance. J’essaie de comprendre quelle nature de puissance est la plus considérable et la plus efficace entre celle des États et celle des autres acteurs que peuvent d’ailleurs incarner aussi des acteurs politiques comme les villes, les régions ou les États fédérés, des « infra »-États en quelque sorte. Je pense qu’on peut constater que depuis au moins les traités de Westphalie de 1648, l’État a le plus souvent été, reste aujourd’hui et, je le crois, demeurera le plus puissant des acteurs. La nature de la puissance des États est plus considérable que celle des autres acteurs. L’État faible est faible d’être faible et non d’être étatique. Considérer des États comme faibles en mettant en regard leur PIB et la valorisation boursière des GAFA n’a pas de ce sens car on compare alors ce qui n’est pas comparable.
Votre livre est consacré aux « voies de la puissance » et aurait pu être sous-titré : « la puissance, mode d’emploi ». Est-ce à dire qu’il suffirait aux dirigeants de n’importe quel pays d’appliquer vos conseils à la lettre pour accéder à la puissance ? La puissance est-elle à la portée de tous les États ou certains y sont-ils plus prédisposés que d’autres ?
Je n’aurai évidemment pas la prétention de faire de mon livre un mode d’emploi à l’égard des chefs d’État. J’essaye d’établir les conditions sine qua non de la montée en puissance si tant est qu’il y ait la volonté de l’exprimer. Dans mon introduction, j’évoque cette ambivalence sonore entre les « voies » et les « voix » de la puissance. Lorsqu’on décide en amont d’obtenir de la puissance, alors en aval on déploie des stratégies pour y parvenir. Avant d’emprunter les voies de la puissance, on commence par donner de la voix. Le seul contre-exemple récent est celui des États-Unis d’Amérique entre 1920 et 1941 : tous les paramètres de la puissance qu’elle soit géographique – cette fameuse insularité stratégique –, démographique, sociétale, ingéniériale, financière, énergétique, agricole et industrielle sont au vert, et pourtant on décide de ne pas assumer cette puissance. Il faut tout ce que je décris dans mon ouvrage pour prétendre à la puissance. S’il manque une géographie ou une démographie présentant un seuil ou une masse critiques permettant de jouer un rôle d’acteur au moins au niveau régional, s’il n’y pas de valorisation du savoir, il manquera toujours l’un des éléments constitutifs de la puissance. Certains acteurs sont donc plus que d’autres susceptibles d’incarner de grandes puissances globales et j’essaie de présenter les critères qui permettent de l’affirmer.
Vous opérez ici une distinction entre puissance et volonté de puissance. Les États-Unis de l’entre-deux-guerres mondiales sont une puissance en puissance, un pays qui a les moyens d’être puissant mais qui refuse d’exercer cette puissance. Et inversement, des États peuvent se rêver en puissance mais n’ont pas les moyens de leurs ambitions.
Absolument. Prenons le cas fameux de la prétendue « quatrième armée du monde » assise sur la troisième réserve de pétrole mondiale, je pense bien évidemment à l’Irak de Saddam Hussein, dictateur ubuesque qui allait à lui seul écraser toute possibilité de montée en puissance de son pays. La cohésion interne défaillante de l’Irak ne lui permettait pas d’incarner ce qu’on prétendait à l’époque qu’il fut, à savoir la puissance.
Lorsqu’on évoque la question de la puissance dans les relations internationales, il est un certain nombre d’ouvrages classiques qui reviennent systématiquement. Commençons par celui de Paul Kennedy sur la naissance et le déclin des grandes puissances qui développait une vision spenglerienne de la puissance censée s’accroître, atteindre un apogée et nécessairement décliner. On pourrait lui opposer que sur la longue durée, on voit plutôt une grande continuité dans les pôles de puissance qui restent souvent les mêmes d’un siècle à l’autre, même si c’est sous un nom différent (empire ottoman/Turquie ; URSS/Russie). Certes, bien des puissances semblent faire preuve d’une forme de cycle de vie, mais aussi d’une grande résilience. Comment vous positionnez-vous relativement à la thèse de Kennedy et plus largement à cette question de la pérennité de la puissance sur la longue durée ?
Kennedy a inventé l’absence d’éternité ! Tout organisme nait, se développe et périclite. Et il en est de même pour les institutions, donc pour les États. Soit. Mais pour aller plus loin, et je vous rejoins sur ce point d’avantage que M. Kennedy, on peut jeter un œil sur le siècle passé. L’une des cartes de mon ouvrage présente les grandes puissances d’il y a 150 ans et celles d’aujourd’hui : on est frappé par un continuum fondé sur une masse critique, une valorisation du savoir. La Russie tsariste, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne d’après Bismarck et le Japon d’après Meiji, sont demeurés aux premiers rangs des puissances malgré bien des soubresauts dans l’histoire de chacun de ces pays. Il n’y a que l’Inde, à l’époque colonie britannique, qui fait exception. Il y a donc bien une continuité,
mais ce n’est pas non plus une règle absolue. Si l’on essaie de penser la puissance sur la très longue durée braudélienne, on se casse les dents sur le Moyen-Âge et sur Rome.
Un deuxième auteur auquel on pense, notamment en France, lorsqu’il est question de la puissance, n’est autre que Bertrand Badie pointant la paradoxale « impuissance de la puissance » qu’il pensait pouvoir diagnostiquer notamment à partir de l’observation des difficultés rencontrées par des États-Unis présumés « hyperpuissants » depuis les années 1990 et pourtant souvent incapables d’arriver à leurs fins. Partagez-vous ce constat ?
En partie. Je rends grâce à ce grand penseur des relations internationales qu’est Bertrand Badie de nous avoir ouvert les yeux sur la puissance montante de nouveaux acteurs pas nécessairement institutionnels. Je pense notamment à ces « inter-socialités », pour reprendre le titre d’un de ses derniers ouvrages en date dans lequel il montre que les opinions publiques, et en leur sein ce qu’il appelle les « entrepreneurs de violence », jouent un rôle beaucoup plus important qu’autrefois. Un rôle dédoublé par la force des nouveaux médias et des réseaux sociaux. Cela dit, l’idée d’impuissance de la puissance étatique ne me convainc qu’à moitié car à la fin des fins, en 2020, ce sont bel et bien les fusils et surtout les drones azerbaïdjanais qui ont écrasé les forces arméniennes alors même que les relais d’opinion arméniens dans le monde, y compris aux États-Unis et en Europe, étaient infiniment plus considérables que les relais d’opinion azéris. Voyez également l’exemple de l’intervention militaire brutale de la Russie en Ukraine : le fait est qu’en toute souveraineté, Poutine a pu mener à bien cette intervention, qui donnera ce qu’elle donnera, mais sans risquer sur le plan militaire d’être repoussé, sans se soucier de la réaction des opinions publiques. La montée en puissance d’autres acteurs que les États, notamment les acteurs sociaux, ne constitue qu’une variable explicative des relations internationales. Une variable, mais pas la constante, qui pour moi demeure la puissance militaire des États.
L’un de vos chapitres est consacré à ce que vous appelez les « illusions de la puissance » dont vous expliquez qu’elles peuvent se traduire par le fait de présumer de ses forces d’une part et de sous-estimer celles de l’adversaire de l’autre. Lisant ces lignes à l’heure de l’invasion de l’Ukraine par la Russie qui s’avère plus compliquée que ne l’avait sans doute imaginé Vladimir Poutine, on est tenté de voir dans cette guerre un exemple de ces illusions de la puissance.
C’en est même un exemple chimiquement pur. Sur cette question centrale des illusions de la puissance, j’ai l’habitude de prendre pour exemple la guerre du Kippour de 1973 dont les premiers jours de grande difficulté israélienne ont démontré que depuis la guerre des Six Jours, les Israéliens avaient fini par négliger la menace arabe. Cela a failli leur coûter extrêmement cher. Je prends également souvent l’exemple arménien ; on a également assisté à une mésestimation qui s’est avérée irresponsable de la détermination revanchiste et de la modernisation de la force militaire de l’Azerbaïdjan. S’agissant de l’Ukraine, manifestement, Vladimir Poutine a mésestimé la profondeur de la conscience nationale ukrainienne et donc la résistance de la population, y compris russophone. Il a pris les Ukrainiens non pour des imbéciles, mais, de manière infantilisante, pour des petits frères censés être au pire passifs et au mieux tout à fait attendris par le « retour » du grand frère face à l’Occident décadent. Par ailleurs, il a pris les Européens et les Occidentaux en général pour incapables de réagir, même par des sanctions économiques et financières. Il a aussi mésestimé la gêne de la Chine qui a toujours défendu mordicus le principe du respect de la sacro-sainte souveraineté des États, et l’Ukraine en est un. Sur le plan économique, la Chine est également atteinte car l’aventurisme militaire de Poutine en Ukraine fait monter le baril de brut à des niveaux qui grèveront très rapidement sa croissance déjà molle.
Vous consacrez un chapitre à des pays, comme le Japon et l’Allemagne, dont vous dites qu’ils s’interdisent la puissance globale. N’assiste-t-on pas, côté allemand, à un revirement sur ce point à la faveur de la crise ukrainienne ? Sommes-nous face à un tournant qui verrait l’Allemagne renouer avec la puissance ?
Nous assistons à la possibilité d’un tournant. Pour l’instant, l’Allemagne ne va faire que rattraper un retard conséquent dénoncé de longue date par les autres membres de l’OTAN, États-Unis en tête, qui respectaient l’engagement de consacrer 2 % de leur PIB aux dépenses de Défense. Berlin va donc d’abord rattraper le temps perdu. Par ailleurs, cette coalition rose-verte, donc pacifiste dans un État pacifiste, réagit sous le coup de l’émotion et sans doute du sentiment de danger. Mais est-ce que ces investissements militaires s’inscriront dans une volonté de projection de puissance ? Rien n’est moins sûr. Pour l’heure, on semble s’acheminer vers un simple rattrapage et rien ne dit qu’on va modifier la Constitution, comme au Japon, en faveur d’une projection de puissance. Enfin, on achète américain, ce qui veut dire qu’on reste à Berlin, au grand dam de Paris, hors de la pensée d’une autonomie stratégique européenne.
L’Allemagne est donc encore loin de pouvoir prétendre rejoindre le Royaume-Uni et la France au rang de grande puissance européenne ? La France est-elle condamnée à la solitude dans ses ambitions de puissance globale au sein de l’UE ?
Au sein de l’Union européenne, la représentation de la France comme devant continuer d’incarner une puissance globale n’est pas partagée par les autres États membres. Elle était partagée par le Royaume-Uni mais depuis le Brexit, la France se retrouve seule. Soit l’Allemagne accepte de payer le prix budgétaire et idéologique consistant à se réinvestir dans le stratégique et par conséquent à assumer l’emploi de la force létale et massive, en un mot la guerre, soit ce n’est pas le cas et par conséquent la seule possibilité de montée en puissance européenne est cet attelage qui paraît aujourd’hui incongru après le Brexit et l’affaire AUKUS : une alliance entre Londres et Paris, les deux seules vraies puissances du continent européen. Je fonde des espoirs de cette hypothèse sur la base du processus de Lancaster House, cette coopération voire mutualisation des armées française et britannique, qui fonctionne aujourd’hui très bien.
Peut-on parler aujourd’hui d’une puissance européenne et de l’Union européenne comme d’une puissance ?
Non, l’Union européenne est une puissance imparfaite qui se refuse à devenir une puissance globale, un peu à la manière des États-Unis de 1920 à 1941. Poutine le sait tellement bien qu’il a crânement décidé d’envahir l’Ukraine sans craindre quoi que ce soit d’une Europe qui n’a que des carottes mais pas de bâtons. Il faut que l’Europe se dote de bâtons.
Beaucoup prédisent que le XXIe siècle sera celui de l’accession de la Chine au rang de première puissance mondiale. Considérez-vous qu’il y a une inéluctabilité à la montée en puissance chinoise et celle-ci doit-elle nécessairement conduire à un choc thucydidéen avec les États-Unis tel que le craint un Graham Allison ?
La thèse de Graham Allison me semble trop pessimiste. D’abord parce qu’on a déjà vu dans l’histoire, en particulier au XIXe siècle, une puissance primordiale – en l’espèce le Royaume-Uni –, renoncer finalement à faire la guerre à une puissance qui commençait à la challenger sérieusement – les États-Unis. Londres a pragmatiquement fait contre mauvaise fortune bon cœur, comprenant qu’il valait mieux s’allier avec Washington que chercher à le contrer, et l’histoire lui a donné raison. L’affrontement n’est donc pas inéluctable dans ce genre de situation. Par ailleurs, Graham Allison néglige le fait que ni Sparte ni Athènes ne disposaient de l’arme atomique contrairement à Pékin et Washington ; or jusqu’à présent, nous n’avons pas eu à faire à des régimes apocalyptiques ! Pour l’essentiel, on est en présence de régimes pragmatiques pour lesquels l’option apocalyptique n’est pas sur la table. De ce point de vue, on peut imaginer certes une montée des tensions voire une escalade militaire, mais exclusivement conventionnelle. J’en veux pour preuve ce qui s’est produit il y a deux ans entre l’Inde et la Chine : des affrontements très durs entre des soldats au Cachemire, mais sans ouverture du feu pour éviter d’en arriver à une escalade atomique.
En conséquence, et j’en reviens à la première de vos deux questions, je ne crois pas à l’inéluctabilité de l’accession de la Chine au rang de première puissance mondiale. Quels sont les critères à partir desquels on pourra un jour couronner la Chine ? Je note d’ailleurs que Xi Jinping ne mentionne jamais lesdits critères qui permettront d’établir en 2049 que la Chine sera devenue la première puissance mondiale comme il le souhaite. Si ce sont des critères exclusivement économiques et financiers, il n’y a quasiment plus aucun doute là-dessus. Mais je suis de ceux qui considèrent que la puissance économique et financière, in fine, en cas de rivalité absolue, n’est pas déterminante si l’on ne dispose pas de quoi imposer sa volonté à l’autre en termes de hard power. Or l’Autre américain a de quoi, à la fois géographiquement et techniquement, conserver une supériorité majeure pour de longues décennies. On compte le nombre de navires chinois mis chaque trimestre à la mer, mais que valent les commandants de ces bateaux ? Et les navires eux-mêmes ? Que sait-on de la puissance chinoise et qu’est-ce que le pouvoir chinois lui-même en sait ? La Chine, depuis au moins la fin des royaumes combattants, n’a de toute façon jamais accordé la priorité à l’usage de la violence militaire pour parvenir à ses fins. Certes il y a un impérialisme chinois de plus en plus agressif mais il rechigne à faire usage de la violence militaire tant que tous les autres leviers n’ont pas été activés.
L’Inde peut-elle être un rival pour la Chine dans cette course à la puissance ?
L’Inde peut être un frein comme d’autres États dans l’environnement stratégique chinois le sont déjà. L’un des grands oublis des observateurs de la rivalité sino-américaine, c’est la géographie : la Chine ne dispose pas de cette bonne fée s’étant penchée sur le berceau américain et lui ayant procuré l’insularité stratégique. La Chine dispose d’une façade maritime « infestée » de zones insulaires et archipélagiques qui ne lui appartiennent pas, qui peuvent assez facilement surveiller voire bloquer ses navires et qui appartiennent pour beaucoup à des alliés des États-Unis. Sur terre, la Chine est entourée par l’Inde, puissance nucléaire hostile, la Russie, partenaire mais pas alliée, la Corée du nord, un allié qui ne dispose que d’un atout : la bombe.
Terminons par des régions qui semblent être caractérisées par un vide de puissance : l’Afrique, l’Amérique latine voire l’Océanie. Sont-elles condamnées à être le terrain d’affrontement des puissances globales ou bien peuvent-elles voire émerger en leur sein des puissances de cette envergure ?
Je consacre un long chapitre à l’Afrique qui incarne l’absence de puissance possible frappée qu’elle est par un certain nombre de fléaux structurels : des politiques rentières, un clanisme
et un tribalisme qui sapent l’État-nation et sa capacité à créer de la cohésion intérieure pour projeter de la puissance à l’extérieur, une corruption endémique liée d’ailleurs aux deux points précédents…. Enfin, et j’aurai dû commencer par-là, il y a une absence de représentation panafricaine ou au moins régionale qui pourrait créer des alliances susceptibles de jouer le rôle d’acteur puissant dans les relations internationales. Il n’y a aucune base africaine en dehors de l’Afrique : cela nous paraît normal mais il n’y a aucune raison évidente à cela !
L’Amérique latine est dans un cas de figure un peu différent : le clanisme joue beaucoup moins, mais on y trouve des problématiques sociales très fortes. L’Afrique subsaharienne, l’Amérique latine et l’Océanie ne s’inscrivent pas dans les principales rivalités du XXe siècle et du début du XXIe siècle qui concernent plutôt l’Europe, la Russie, une partie du Moyen-Orient et de plus en plus aujourd’hui l’Asie de l’est. C’est là que se trouvent les titans, pas en Afrique, en Amérique latine ou en Océanie. Cela les place en marge des grands affrontements de puissance, mais pas toujours pour le meilleur : ainsi, jamais depuis la fin de la guerre froide l’Afrique subsaharienne n’avait connu de tels cataclysmes humains. Comme si l’absence de régulateurs/prédateurs extérieurs permettait aux seigneurs de la guerre d’exercer leurs méfaits de manière parfaitement libre. Se rend-on bien compte que l’arme de destruction massive de la fin du XXe siècle a été la machette ?