• Une coalition semble introuvable. Il s’agit du troisième scrutin législatif cette année, faute de formation d’une coalition lors des deux précédents en avril et en juillet. Les élections présidentielles auront d’ailleurs, elles aussi, lieu aujourd’hui : le président Roumen Radev, qui s’était placé dans l’opposition du Premier ministre Boïka Borissov durant les contestations de l’été 2020, fera face au candidat du parti de ce dernier, le Gerb : le recteur de l’université de Sofia, Anastas Gerdjikov. 
  • Le parti Il y a un tel peuple (ITN) du chanteur et présentateur de télévision Slavi Trifonov fondé en février 2020 avait déjà créé la surprise générale en arrivant en deuxième place aux élections d’avril – juste derrière le Gerb du Premier ministre sortant Boïko Borissov. Le parti de Trifonov est finalement arrivé en tête lors des dernières législatives en juillet, avec 24 % des voix, mais n’avait pas réussi à former une coalition au Parlement. 
  • Le parti anti-système était né de manifestations contre le parti au pouvoir à la suite de la révélation de scandales impliquant le Premier ministre Boïko Borissov et son bras droit Tsvetan Tsvetanov. Un premier scandale avait éclaté en 2019, l’“Apartmentgate”, qui avait révélé des détournements de fonds européens au profit d’élus du Gerb, ce qui avait entraîné la démission de quatre ministres, dont la ministre de la Justice1. Deux événements ont, un an plus tard, exacerbé les tensions : l’expulsion d’un ancien ministre de la Justice et figure de l’anti-corruption d’une plage publique privatisée par un leader politique de la minorité turque par des gardes armés ainsi que la perquisition des bureaux de conseillers du président ordonné par le procureur général2.
  • Pour ce troisième scrutin en huit mois, les sondages ne donnent plus le jeune parti ITN favori. Le parti de l’ancien Premier ministre Borissov pourrait revenir au pouvoir, mais reste très contesté. Il est actuellement crédité de 24 % des voix selon les sondages, alors qu’un autre parti a récemment fait surface : Continuons le changement, fondé par deux ministres du gouvernement populaire, diplômés d’Harvard et anciens entrepreneurs, ayant pour devise « zéro corruption » :  Kiril Petkov et Assen Vassilev. Ils sont crédités de 16 % des voix par les sondages.  
  • L’instabilité politique semble être en miroir de l’instabilité sanitaire dans le pays : la situation épidémique et la saturation des hôpitaux restent préoccupantes en Bulgarie où le taux de vaccination demeure le plus faible de l’Union européenne (22 % de la population est entièrement vaccinée), tandis que la barre des 1000 cas pour 100 000 habitants sera bientôt atteinte. Le pass sanitaire, instauré dans le pays le 21 octobre, a été vivement critiqué, de l’extrême droite aux socialistes, alors que le virus a déjà fait, dans un pays qui compte 7 millions d’habitants, plus de 25 000 victimes3
  • Le vote des retraités, qui représentent un tiers de la population bulgare, sera aujourd’hui primordial4. De plus, la coalition d’extrême droite Patriotes bulgares n’a pas atteint le seuil des 4 % en avril et a atteint 5,93 % en juillet, sans obtenir de sièges. Les presque 30 sièges gagnés aux législatives de 2017 ne seront très probablement pas récupérés à l’issue du scrutin d’aujourd’hui. Les sondages, pour l’heure, semblent en tout cas pointer vers une potentielle nouvelle impasse5
Sources
  1. Le Monde, En Bulgarie, un scandale de détournements de fonds européens secoue le gouvernement, Jean-Baptiste Chastand, 2 mai 2019
  2. La Croix, En Bulgarie, la colère gronde contre “l’État mafieux”, Marie Verdier, 5 août 2020
  3. Le Monde, Covid-19 : en Bulgarie, un scrutin sur fond d’hécatombe sanitaire, Jean-Baptiste Chastand, 12 novembre 2021
  4. La Croix, Bulgarie : un troisième scrutin pour sortir de la crise,, Nadia Blétry, 14 novembre 2021
  5. Reuters, Bulgarians vote in third election this year in bid to break deadlock, Tsvetelia Tsolova, 14 novembre 2021