Le sommet pour le climat organisé par les États-Unis les 22 et 23 avril dernier a donné lieu à une série d’annonces des principales puissances de la planète sur leur ambition climatique. Dans un contexte marqué par les tensions internationales, entre la Chine et les Etats-Unis bien sûr, mais aussi avec la Turquie et la Russie, et alors que les dirigeants de tous ces pays se sont exprimés lors du sommet, celui-ci montre l’importance la dimension géopolitique de la question climatique. De fait, la lutte contre les changements climatiques ne peut être efficace que si elle engage les principaux émetteurs de gaz à effet de serre sur le plan international. Ainsi, les défis que posent les changements climatiques et la transition bas-carbone devraient nous obliger, comme le dit le spécialiste des relations internationales Dominique Moïsi, à « aborder le monde différemment ».

Pourtant, ceux qui animent ce débat en France, et en particulier les mouvements politiques qui souhaitent mettre l’écologie au cœur de leur programme, ne semblent pas mettre cette dimension au cœur de leurs discours. Si les écologistes investissent davantage le champ des relations internationales depuis les négociations avortées de Copenhague et l’Accord de Paris, ils ne se sont pas encore dotés d’une véritable doctrine géopolitique sur le climat. Les programmes politiques qui souhaitent se saisir du sujet et s’engager dans une lutte résolue contre les causes du changement climatique et ses effets doivent donc compléter leur approche par une géopolitique du climat aujourd’hui en grande partie absente. Ils doivent se résoudre à adopter une politique étrangère basée sur l’analyse et l’anticipation des comportements des autres acteurs importants de la planète, notamment étatiques et qui prend en compte ces éléments pour proposer des solutions efficaces à l’atteinte de l’objectif de la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. 

Nous proposons tout d’abord de détailler en quoi les changements climatiques nous obligent à repenser les relations internationales (1), leurs causes, leurs conséquences et les moyens de lutter contre étant tous les trois intrinsèquement de nature globale. La lutte sino-américaine pour la puissance climatique qui semble débuter (2) et le défi pour la France et l’UE de conserver leur place de leader de la lutte contre les changements climatiques (3) soulignent l’importance d’une telle réflexion. Or, si cette dimension mondiale n’est pas ignorée des mouvements écologistes, ceux-ci doivent dépasser leur approche exclusivement moralo-juridique actuelle (4), pour se doter d’une véritable doctrine géopolitique qui dépasse la simple logique « du bas vers le haut » de l’Accord de Paris (5). 

Nous pourrons alors dresser les contours d’une nouvelle doctrine géopolitique des changements climatiques (6), autour de quatre pistes prolongeant les réflexions d’Arthur Mira pour le Groupe d’études géopolitiquesIl faut tout d’abord désenclaver la question climatique pour la diffuser à l’ensemble des instances du multilatéralisme à l’aide d’une approche en 3 « R » : réinvestir toutes les instances du multilatéralisme ; relier leurs puissances normatives ; rassembler les pays affinitaires autour d’un club d’états ambitieux. En parallèle, un groupe de pays affinitaires pourrait être créé  : le « Green 20 ». Il convient en outre d’investir le soft power climatique de la France et de l’Union européenne. Enfin, il faudra pour mettre en œuvre cette dynamique, décloisonner les administrations en charge des enjeux climatiques, internationaux et économiques.

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