Avec la démission des ministres d’Italia Viva (le parti de Matteo Renzi), la crise gouvernementale en Italie s’ouvre officiellement. Il est difficile de déchiffrer un scénario qui, il y a encore quelques jours, semblait gérable dans la dialectique gouvernementale et qui a rapidement dégénéré.
L’élément clé pour comprendre l’issue de la crise réside dans l’esprit de Matteo Renzi. Que veut vraiment l’ancien Premier ministre ? Une plus grande influence dans la gestion du Fonds de relance et un plus grand poids politique au sein de la même majorité, peut-être avec un président moins lourd et centralisateur que Conte ? Ou bien veut-il réellement se placer dans l’opposition au pouvoir, conscient qu’à l’horizon actuel, il est trop difficile de satisfaire ses propres préférences politiques, et que le moment est politiquement trop risqué à long terme, davantage à cause de la faiblesse d’une alliance née dans l’urgence contre quelqu’un (la probable victoire de Salvini aux élections), que pour un véritable projet de gouvernement ? Dans quelle mesure le changement que vit la scène internationale est-il une clef d’interprétation pertinente, notamment avec le déclin de Trump – auquel la figure de Conte est liée – et le retour des démocrates au pouvoir dans l’action du leader d’Italia Viva ? Les limites des réponses possibles restent encore floues, comme pour toute stratégie. Celle de Renzi envisage probablement une multiplicité d’options. Mais ces questions sont le véritable déclencheur de tension. La volonté de l’ancien maire de Florence va se heurter à celle des autres acteurs politiques, dans un mécanisme variable qui peut nous conduire de la simple reprise du gouvernement Conte 2, transformé en Conte ter, au scénario le plus improbable et le plus déstabilisant, celui des élections.
Quatre principaux dénouements éventuels de la crise sont annoncés à ce jour :
- Conte reste avec la même majorité : Italia Viva, Mouvement 5 étoiles (M5S) et Parti Démocrate (PD) trouvent un équilibre, règlent leurs différends et parviennent à reprendre l’action gouvernementale, peut-être avec un petit « remaniement » ministériel. Probabilité : 35 %.
- Conte reste, mais avec une nouvelle majorité : Italia Viva quitte définitivement le gouvernement, les M5 et le PD cherchent des « responsables » dans le groupe mixte ou dans d’autres formations politiques au Parlement. Probabilité : 20 %.
- Un nouveau Premier ministre avec la même majorité : bien que Renzi lui-même ait déclaré n’avoir aucun préjugé contre Giuseppe Conte, la crise pourrait également conduire à la fin du séjour de ce dernier au Palazzo Chigi. Dans ce cas, la crise pourrait s’allonger, il faudrait trouver une personnalité qui mettrait en accord les M5S, PD et Italia Viva. Ce qui n’est pas facile. Probabilité : 30 %.
- Gouvernement de transition et nouvelles élections. Probabilité : 15 %.
Si la crise doit être parlementarisée – c’est-à-dire s’il faut trouver une nouvelle majorité avec un vote de confiance au Parlement –, une éventuelle action du centre-droit pour sortir de l’impasse en proposant un gouvernement d’union nationale n’est pas à exclure, bien qu’elle soit peu probable. Même si cela reste aujourd’hui un scénario résiduel, il est indéniable qu’il existe des mouvements clandestins dans cette direction, tant de la part de Forza Italia (le parti de l’immortel Silvio Berlusconi) que de la Ligue.
Enfin, le Quirinal. Le Président de la République Sergio Mattarella a toujours été en faveur de la durée complète de la législature (5 ans, jusqu’à 2023) et a toujours essayé d’éviter les élections anticipées. En conséquence, un vote et un gouvernement d’unité nationale sont perçus comme des extrema ratio. Les autres options, même avec une majorité parlementaire effective, restent préférables pour le chef de l’État.