Le rapport de la mission conjointe de l’OMS sur le Coronavirus en Chine 1 publié cette semaine a ouvert une nouvelle séquence pour le Parti communiste chinois et son soft power. L’une des plus importantes revues scientifiques au monde, le commentant, tire en effet ces conclusions :
La Chine semble avoir évité un grand nombre de cas et de décès liés au coronavirus, malgré de lourdes conséquences sur l’économie du pays. Dans son rapport sur la mission conjointe, l’OMS recommande aux pays d’activer leurs protocoles de gestion de crise sanitaire au stade le plus élevé, afin de s’assurer de réponses gouvernementales coordonnées et ainsi à même de contenir la propagation du virus. Le succès de la Chine repose en grande partie sur un système administratif efficace qu’elle peut mobiliser en cas de menace, couplé au consentement du peuple chinois à se soumettre à des procédures de santé publique contraignantes. Bien que de nombreux autres États ne disposent pas d’un tel pouvoir de contrôle sur l’économie de leurs pays, les gouvernements peuvent tirer des leçons importantes de l’expérience chinoise. Or, il apparaît que ces leçons n’ont toujours pas été tirées.
The Lancet, « COVID-19 : too litle, too late ? »
À leur retour de Chine, les émissaires de l’OMS avaient déjà parlé d’hôpitaux de pointe et de machines ultra-modernes, déclarant que nous devrions tous être reconnaissants envers la Chine de la façon dont elle a ralenti et limité la contagion. Bruce Aylward, le chef de la délégation de l’OMS qui s’est rendue en Chine, affirmait encore récemment dans le New York Times : « la riposte chinoise peut être reproduite, mais il faudra de la rapidité, de l’argent, de l’imagination et du courage politique » 2.
Dans ce contexte, Pékin joue à fond la carte du soft power. La propagande intérieure se montre hostile aux États-Unis, sans manquer de souligner la « supériorité du système chinois » et la « sagesse » de Xi Jinping. Les arguments ne manquent pas : l’échec des tests mis à disposition par les autorités sanitaires américaines, ainsi que la suspicion que le gouvernement de Donald Trump dissimule les chiffres réels de la contagion au virus afin de calmer la réaction des marchés dans une année électorale, ont par contrecoup conduit à une réévaluation du bilan des actions entreprises par le gouvernement chinois. Plusieurs médias, ainsi que plusieurs commentateurs ont depuis souligné comment « la Chine a gagné et devient désormais un modèle » 3.
Comment comprendre cela ?
On dit souvent que les Chinois ont une âme taoïste (presque toujours sous-estimée en Occident) et des habits confucéens. Comme toutes les catégories de sens commun, il s’agit là de deux simplifications qu’il faudrait nuancer, car elles risquent de renvoyer à un imaginaire exotisant ou même réifiant : le confucianisme et le taoïsme ont immensément changé et évolué au fil du temps, finissant par désigner des éléments hétérogènes.
Pourtant, d’une manière opératoire, on peut prendre ces deux catégories de manière très plate, comme une typologie ou un schéma. L’âme taoïste se manifesterait alors dans une détermination à ne pas obéir, dans la légitime aspiration à la rébellion, dans la « révocation du mandat » 革命 4 (l’histoire chinoise est plutôt pleine de révoltes). Les habits en revanche seraient la reconnaissance d’un système hiérarchique (de la famille à l’État) capable de gouverner non seulement les hommes, mais la nature elle-même — d’un côté, un scepticisme vis-à-vis de l’autorité et de l’autre, une acceptation de la hiérarchie au quotidien.
Ces deux pôles ne s’opposent pas, mais ils interagissent. Au lieu de se nier mutuellement, ils créent du nouveau, en fournissant le cadre aux expériences chinoises du gouvernement. En particulier ces deux mouvements de rébellion et d’obéissance s’articulent dans la possibilité de juger ou de révoquer le mandat de ceux qui gouvernent et finissent par jouer un rôle important dans la création d’un sens collectif de responsabilité pour l’ensemble de la population. Le règne de Xi Jinping donne un bon indicateur de cette tendance : le rêve chinois théorisé par le Président de la république populaire de Chine est un rêve collectif alors que l’American dream est essentiellement individualiste. La gestion de la crise épidémique présente un développement intéressant de cette double tendance et de la capacité du Parti communiste chinois à l’interpréter.
Les habits neufs du Parti à l’ère du COVID-19
Comme semble l’indiquer l’OMS dans son rapport sur le Coronavirus 5 et comme le revendiquent les autorités chinoises, le PCC a su gérer la crise du coronavirus en s’appuyant sur les ressorts d’un État paternaliste, capable d’ouvrir une brèche dans une population prête à se mobiliser en masse, à exécuter des ordres si elle les considère justes, corrects, visant à l’harmonie, à une forme de stabilité économique et sociale. D’autant plus en période de crise qui présente une menace vitale.
À condition de dépasser le moment des critiques, très nombreuses au début comme l’a montré la vague de contestations sur les réseaux sociaux et la mobilisation de professeurs universitaires à Tsinghua contre la gestion de la crise par le Parti, une crise comme celle du Coronavirus qui débouche sur un état d’urgence peut créer l’espace politique pour des mécanismes venus d’en haut en mesure de replacer le PCC au centre de la scène sociale en Chine, comme moteur et rééquilibreur de situations compliquées, jusqu’à faire oublier les carences initiales de la machine politico-administrative.
En effet, la mobilisation (动员 6) est un concept fondamental dans la politique chinoise. Comme le rappelle Li Zhiyu dans Afterlives of Chinese Communism 7, le terme « indique l’utilisation d’un système idéologique par un parti ou un système politique pour encourager ou forcer les membres de la société à participer à certains objectifs politiques, économiques ou sociaux afin d’obtenir des résultats et un déploiement correct des ressources et des personnes à grande échelle ».
C’est ce qui se passe avec le coronavirus : prise de température partout, en particulier dans les entrées de métro ; nettoyage permanent des transports publics, là où la circulation n’a pas été bloquée. Chaque lieu contribue, à son échelle : dans certains endroits, les heures de travail des supermarchés ou des centres commerciaux ont été réduites afin d’éviter les risques de contagion, dans d’autres — les villages, surtout — tout le monde essaie d’aider autant que possible les médecins chargés de se rendre de maison en maison pour détecter la fièvre et signaler une éventuelle contagion. Avec le blocage des moyens, de nombreux particuliers se sont mis à la disposition des hôpitaux pour transporter du matériel d’un endroit à l’autre, y consacrant toute leurs journées.
Dans ce contexte, comme le souligne le sinologue Nathan Sperber interrogé par le Grand Continent, un rôle important à été joué par les juwei 居委, les comités résidentiels qui concentrent la majorité des acteurs de terrain (hors système médical) pour la détection, les contrôles d’identité, l’application des quarantaines à domicile.
La participation à la « mobilisation » des milliardaires et des entreprises les plus importantes du secteur de la haute technologie ou de l’État est aussi à noter. Jack Ma, fondateur d’Alibaba, a annoncé qu’il ferait don de 100 millions de yuans (13 millions d’euros) pour soutenir la recherche sur un nouveau vaccin. D’autres ont déclaré qu’ils avaient peur de la contagion, mais qu’ils ressentaient aussi le besoin d’aider. Armée, médecins envoyés sur place mais aussi quarantaine dans quinze villes : on assiste à la plus grande mobilisation de ce type de l’histoire.
Comme l’a souligné He Qinghua, un haut fonctionnaire chinois responsable de la Commission nationale de la santé : « Nous devons faire tout notre possible pour mobiliser les communautés, en particulier les communautés rurales, afin que tous les efforts soient concentrés sur l’arrêt de la propagation du virus. »
Malgré le retard — sérieux — avec lequel la Chine a commencé à s’attaquer au coronavirus et à sa propagation, la population chinoise semble pour l’instant disposée à soutenir les décisions qui viennent de la dernière instance d’en haut. Le PCC est confirmé dans sa position de point d’ancrage de l’équilibre social en Chine, en pouvant revendiquer d’être la seule institution capable jusqu’à présent de maintenir la stabilité.
Pourtant si afin d’éviter le chaos, 亂/乱 (luan) la population suit les directives du parti et se mobilise, face aux abus et à l’injustice, elle se rebelle, aussi : en Chine, il y a chaque année des milliers d’« incidents de masse » (leur nombre est un secret d’État), allant de la protestation de quelques pétitionnaires à de véritables révoltes urbaines. Une fois de plus, nous sommes confrontés à deux éléments, l’obéissance et la rébellion au pouvoir, qui ne s’annulent pas mais créent un nouveau champ de confrontation, en évolution continue. La prétendue rigidité du système politique chinois est une illusion qui nous est propre.
La « créativité » politique avec laquelle la Chine — pour nous limiter aux 50 dernières années — a traité les questions politiques internes est toujours vivante, active, changeante et est garantie par la possibilité de concevoir des pirouettes politiques qui nous semblent contradictoires. Pour prendre un exemple on peut penser à l’invention de la théorie « un pays, deux systèmes », alors qu’en 2010, le PCC avait « conseillé » à Google de déménager à Hong Kong.
En Chine, en effet, les caractéristiques du Parti communiste, dispositif sophistiqué de gestion du pouvoir qui montre de facettes subtiles, grande capacité d’adaptation, d’expérimentation et de « vision » sont particulièrement pertinentes : avant l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping — pour nous rattacher à la rivalité entre la Chine et les États-Unis et au coronavirus — en Chine, nous avions assisté à l’ascension sociale, politique et administrative de la figure du scientifique, qui s’est ensuite traduite par des cycles politiques gérés par des « technocrates ». Hu Jintao, président et secrétaire général du PCC de 2002 à 2012, est le promoteur du développement scientifique du socialisme dans sa version chinoise. Ce moment, qui a duré une décennie, a promis bien plus de changements que nous n’en avons réellement connus. Le moteur technologique perturbateur actuel de la Chine a été propulsé au cours de cette décennie. Xi Jinping l’a repris et l’a adapté à ses besoins, tant internes qu’externes.
Comme l’ont récemment démontré Jonathan Gruber et Simon Johnson 8 aux États-Unis, après l’impulsion des années 1940 en faveur de la recherche (qui allait conduire l’Amérique à façonner les rêves consuméristes et culturels de la quasi-totalité du monde et à faire passer l’« innovation » technologique, d’Internet à l’iPhone), on a assisté au début des années 1980 à un lent déclin des investissements publics dans la science : les dépenses publiques en recherche et développement sont tombées à 0,6 % du PIB en 2017. Aujourd’hui, neuf pays dépassent les États-Unis 9. D’ici 2025, selon le Journal of the American Medical Association, la Chine remplacera les États-Unis en tant que leader mondial de la recherche et du développement pharmaceutiques 10.
Donner de l’importance aux intellectuels, garantir la croissance et la possibilité de faire de la recherche avec des fonds et dans des lieux ad hoc a permis au Parti communiste chinois de fixer deux enjeux, fondamentaux pour sa force économique actuelle. D’une part, en réservant un rôle central à la science, il a fini par porter au pouvoir les soi-disant technocrates dans la première décennie des années 2000, provoquant un changement d’époque (le passage d’un modèle économique chinois axé sur l’exportation, à celui d’un marché intérieur prospère, compétitif quant à l’exportation d’innovations et de produits de grande valeur). D’autre part, il a placé toute une génération d’intellectuels, de scientifiques, de professeurs d’université sous le contrôle idéologique du parti. On peut aujourd’hui constater les résultats de ce revirement politique, notamment en étudiant le rôle de plus en plus central joué par les nouvelles technologies, révélé par la riposte à l’épidémie.
À l’ombre du Coronavirus, la croissance de l’empire technologique chinois
Depuis quelques semaines la principale préoccupation de nombreux Chinois est de savoir s’ils ont été en contact ou à proximité d’une personne infectée par le virus.
Dans la Chine de la révolution numérique, l’accès à ce savoir est devenu très facile : les compagnies de téléphone chinoises et certaines applications (par exemple celles des chemins de fer d’État) ont mis en place des systèmes grâce auxquels les gens peuvent vérifier si, lors de leurs déplacements en train ou en avion, ils ont été proches ou en contact avec une personne infectée ou, pire encore, malade et hospitalisée.
China Mobile a informé les citoyens de Pékin que depuis quelques jours, il est possible de vérifier par le biais du service ad hoc leurs déplacements au cours des 30 derniers jours. Cela peut nous paraître une incroyable atteinte à la vie privée — la sienne et celle des passagers des trains et des avions qui ne sont pas au courant des contrôles de leur état de santé — et pourtant, en Chine, cette mesure a reçu un accueil plutôt positif — si l’on en croit les réactions des utilisateurs de ces services, qui ont suffi à rassurer les internautes.
La puissance des applications chinoises, dédiées au contrôle strict des mouvements de population, souvent accusées de n’être rien d’autre qu’un dispositif de sécurité et le point de départ de futures smart cities hyper-surveillées et « sûres », a été présentée par le gouvernement et les opérateurs chinois comme un service de grande importance dans une telle situation d’urgence.
Comme l’a rapporté Reuters, le coronavirus ferait sortir « de l’ombre » le système de surveillance chinois 11. Plus qu’une émergence, on pourrait même dire que le virus a permis une utilisation ponctuelle d’outils que les Chinois ont l’habitude d’utiliser ou de « subir » tous les jours. En fait, nous sommes confrontés à la première urgence sanitaire de l’ère de l’intelligence artificielle — qui plus est, dans une situation dramatique et compliquée. Une fois de plus, la Chine montre une voie originale. Reuters rapporte une autre utilisation de l’intelligence artificielle dans la Chine d’aujourd’hui. Un des nombreux exemples possibles : un homme de Hangzhou — ville du sud du pays — qui décide de rentrer chez lui sur les conseils de la police : mieux vaut rester chez soi, lui avaient-ils dit.
Le fait est qu’il venait de rentrer de Wenzhou, un endroit considéré comme très infecté. La plaque d’immatriculation de sa voiture avait été enregistrée par des caméras vidéo, puis — une fois rentré chez lui — la police de Hangzhou l’avait prévenu : en raison de son lieu de provenance, il devait rester chez lui, mesurer sa fièvre et, le cas échéant, contacter les autorités sanitaires de la ville. Ennuyé, il avait quitté la maison : « Cette fois-ci, il c’est non seulement la police mais aussi son employeur qui l’a contacté. L’homme avait été repéré près du lac de Hangzhou par une caméra de reconnaissance faciale, et les autorités avaient également averti son entreprise. ». Non respect des directives.
En Chine, le coronavirus offre de nouvelles possibilités aux entreprises de haute technologie : à l’heure actuelle, même si elles ne l’admettront jamais, elles se retrouvent face à une opportunité unique de développer l’essence principale de leurs inventions : plus de données, beaucoup plus de données.
Secouée par la peur et l’inquiétude, la résistance déjà faible à l’invasion de leur vie privée a été définitivement enterrée par les Chinois : la société de reconnaissance faciale Megvii a déclaré avoir « développé une nouvelle façon d’identifier et de repérer les personnes fiévreuses, grâce au soutien du ministère de l’Industrie et des Sciences » 12.
Son nouveau « système de mesure de la température » utilise les données du corps et du visage pour identifier les personnes et est déjà testé dans un quartier de Pékin. Il ne s’agit que d’un exemple — Baidu, le principal moteur de recherche chinois, a ainsi lui aussi annoncé que son laboratoire d’intelligence artificielle aurait créé un dispositif similaire — permettant d’analyser les caractéristiques en place depuis un certain temps. Ces entreprises privées, soutenues par l’État, développent de nouveaux produits « intrusifs » (et, dans ce cas, également utiles, dira-t-on). L’entreprise peut alors vendre sa création à l’étranger, perfectionnée grâce à la possibilité d’accéder à toutes les données ; l’État a les mouvements et les données en main, de manière à s’assurer que tout se déroule selon ses propres directives.
En ce qui concerne la reconnaissance faciale, l’histoire ne s’arrête pas là : SenseTime, autre fleuron du système, prétend pouvoir identifier les personnes portant des masques.
C’est un aspect important, surtout en ce moment : en Chine, aujourd’hui, en plus du smartphone, pour faire beaucoup de choses (payer, réserver, faire des affaires à la banque ou dans les bureaux publics), il faut avant tout vérifier son propre visage (les paramètres biométriques de celui-ci servant d’outil de vérification). Seulement, avec l’utilisation massive des masques, la technologie a donné des signes d’imperfection (également soulignés ironiquement sur les réseaux sociaux chinois, par des personnes qui, en raison de l’habitude de porter le masque, n’ont pas été reconnues pour pouvoir rentrer chez elles).
La société de caméras de surveillance Zhejiang Dahua a récemment déclaré qu’elle « peut détecter la fièvre avec des caméras infrarouges et avec une précision de 0,3 degré ». Un usage spécifique aux lieux très fréquentés, comme les trains par exemple. Dans une interview accordée à Xinhua, Zhu Jiansheng, de l’Académie chinoise des Sciences, a expliqué « comment la technologie peut aider les autorités à trouver des personnes dans un train qui pourraient être exposées à un cas confirmé ou suspecté de coronavirus : nous obtiendrons des informations pertinentes sur le passager, notamment le numéro du train, et des informations sur les passagers qui étaient proches de la personne » 13.
D’autres applications d’IA chinoises sont en cours : la plus célèbre est liée à l’utilisation de drones pour avertir les gens de porter des masques (une vidéo 14 a circulé récemment dans laquelle une vieille dame de Mongolie intérieure a reçu la visite d’un drone).
Mentionnons également les robots, qui s’occupent des activités à l’intérieur des hôpitaux qui mettraient les gens en danger, comme la lutte contre les parasites, la livraison de repas ou le nettoyage des zones des hôpitaux utilisées pour les patients infectés et les coronavirus 15.
Enfin, les assistants vocaux : l’utilisation de l’IA permet de demander des informations aux personnes à domicile, de stocker des données et de suggérer un traitement immédiat ou une hospitalisation.
En cinq minutes, les assistants vocaux chinois passent 200 appels, ce qui représente un soulagement considérable par rapport au travail à l’hôpital. Comme le souligne le portail Yesky, « ce service d’appel robotisé peut aider les médecins en première ligne à contrôler la situation. Grâce à des technologies telles que la reconnaissance vocale, la compréhension sémantique, ou le dialogue homme-machine, les robots sont capables de comprendre avec précision les langues humaines, d’obtenir des informations de base et de donner des réponses. »
Il y a aussi le côté de la recherche médicale. À cet égard, le site web de l’Administration du Cyberespace de la Chine, dans un article intitulé « L’intelligence artificielle et les big data aident à la recherche et au développement de nouveaux médicaments contre le coronavirus », a annoncé le lancement d’un plan de « recherche et de développement de médicaments par l’intelligence artificielle et les grandes plateformes de partage de données », ainsi que de toutes sortes de recherches et de documents bibliographiques sur le coronavirus. Sur cette question cependant, malgré les annonces, la communauté scientifique est assez unanime pour souligner que le temps de la guérison, sans parler des vaccins, n’est pas proche.
Enfin, il y a l’aspect lié aux conférences virtuelles et à l’apprentissage en ligne (e-learning) dans lequel la Chine investit depuis un certain temps et qui, récemment, en raison de la fermeture des écoles et des bureaux, a fait l’objet d’une attention et d’une expérimentation renouvelées. Pour les écoles, un logiciel prêt à l’emploi a été utilisé, permettant de connecter plusieurs élèves en même temps en fournissant à l’enseignant toutes les données nécessaires, y compris les données enregistrées par les caméras sur l’attention portée par l’élève pendant la leçon 16.
Mais tout cela est déjà une réalité en Chine, au-delà de la situation d’urgence actuelle.
Peut-on tirer une leçon de tout cela ? Difficile à dire, compte tenu de la spécificité chinoise. Il y a plutôt un point de vue, une lueur d’observation au-delà de notre « rationalité » occidentale, concernant le concept de pouvoir, tant dans sa déclinaison répressive (le contrôle social en Chine, surtout grâce à l’immense développement technologique, est presque total) que dans sa potentialité à créer de nouvelles dialectiques, de nouvelles formes de gouvernementalité, au sein de systèmes non démocratiques.
C’est un progrès qui pourrait nous affecter — tôt ou tard — nous aussi.
Sources
- Report of the WHO-China Joint Mission on Coronavirus Disease 2019 (COVID-19), téléchargeable ici : https://www.who.int/docs/default-source/coronaviruse/who-china-joint-mission-on-covid-19-final-report.pdf
- « China’s counterattack can be replicated, but it will require speed, money, imagination and political courage ». Source : Donald G. McNeil Jr., « Inside China’s All-Out War on the Coronavirus », The New York Times, March 4, 2020, [disponible sur : https://www.nytimes.com/2020/03/04/health/coronavirus-china-aylward.html]
- Roberto Arditti, La Cina ha vinto la sfida del Virus. Ed è il nuovo padrone del mondo. Huffingtonpost, 10 mars 2020, Url : https://www.huffingtonpost.it/entry/la-cina-ha-vinto-la-sfida-del-virus-ed-e-il-nuovo-padrone-del-mondo_it_5e67b01cc5b6670e72ff4a26
- ge ming, révolution en chinois.
- Report of the WHO-China Joint Missionon Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) [disponible sur : https://www.who.int/docs/default-source/coronaviruse/who-china-joint-mission-on-covid-19-final-report.pdf].
- dongyuan, mobilisation des ressources.
- Li Zhiyu, Afterlives of Chinese Communism, Verso, 2019.
- Jonathan Gruber et Simon Johnson, Jump-Starting America, Public Affairs, 2019
- Toutefois la masse des investissements reste tendanciellement accroché à 2,7 % du PIB en moyenne sur la période (OCDE). À noter également : « la relation entre les dépenses publiques et les dépenses privées en R&D est caractérisée par une complémentarité qui produit des effets d’entraînement. Pour avoir un impact positif sur la croissance de la productivité du pays, les dépenses publiques de R&D doivent être inférieures aux dépenses privées. Les pays ayant un niveau de développement élevé (PIB par habitant élevé) ont une tendance à investir davantage dans la R&D privée (en pourcentage du PIB) par rapport aux investissements publics, tandis que les pays moins développés (faible PIB par habitant), qui ont une structure économique et industrielle faible, ont des dépenses de R&D publiques plus élevées par rapport aux investissements privés. » (Mario Coccia : Public and Private Investment in R&D : Complementary Effects and Interaction with Productivity Growth)
- H. Moses, D. H. M. Matheson, S. Cairns-Smith et alii., « The Anatomy of Medical ResearchUS and International Comparisons », Journal of the American Medical Association, 13 janvier 2015 [disponible sur : https://jamanetwork.com/journals/jama/article-abstract/2089358?resultClick=1].
- Yingzhi Yan et Julie Zhu, « Coronavirus brings China’s surveillance state out of the shadows », Reuters, 7 février 2020 [date de consultation : 10 mars 2020 ; disponible sur : https://www.reuters.com/article/us-china-health-surveillance/coronavirus-brings-chinas-surveillance-state-out-of-the-shadows-idUSKBN2011HO].
- Suzane Loo, « Tech for Good | Megvii implements AI temperature measurement system in Beijing », Technode, 13 février 2020 [date de consultation : 10 mars 2020 ; disponible sur : https://technode.com/2020/02/13/tech-for-good-megvii-implements-ai-temperature-measurement-system-in-beijing/].
- Yingzhi Yan et Julie Zhu, « Coronavirus brings China’s surveillance state out of the shadows », Reuters, 7 février 2020 [date de consultation : 10 mars 2020 ; disponible sur : https://www.reuters.com/article/us-china-health-surveillance/coronavirus-brings-chinas-surveillance-state-out-of-the-shadows-idUSKBN2011HO].
- Source : https://www.dailymail.co.uk/news/article-7952893/Chinas-drone-army-tackles-coronavirus-ordering-people-wear-protection-return-home.html
- Lance Goodall, « China Coronavirus : Robots Roaming Hospitals and Streets to Help Fight Virus », CoercionCode, 11 février 2020 [date de consultation : 10 mars 2020 ; disponible sur : https://coercioncode.com/2020/02/11/china-coronavirus-robots-roaming-hospitals-and-streets-to-help-fight-virus/].
- Daniela Wei et Jinshan Hong, « Parents Grapple With E-Learning as Chinese Schools Stay Shut », Bloomberg, 22 février 2020 [date de consultation : 10 mars 2020 ; disponible sur : https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-02-21/parents-grapple-with-e-learning-as-schools-stay-closed-in-china].