Le changement climatique ressemble-t-il davantage à un astéroïde ou au diabète ? Le mois dernier, l’un d’entre nous a soutenu dans les colonnes de Slate que les défenseurs du climat devraient résister aux appels à l’urgence climatique nationale, parce que le changement climatique était assimilable davantage à un « diabète pour la planète » qu’à un astéroïde. La métaphore du diabète a suscité une controverse étonnante. Beaucoup ont fait valoir que le changement climatique ne pouvait être géré ni toléré ; c’est une menace existentielle pour les sociétés humaines, qui exige un traitement immédiat.

L’objection est édifiante, tant par sa méconnaissance de la nature du problème que par les contradictions qu’elle révèle. Le diabète n’est pas bénin. Ce n’est pas un phénomène « naturel » et on ne peut pas le guérir. C’est une maladie qui, si elle n’est pas traitée, peut vous tuer. Et même pour ceux qui la traitent efficacement, la vie demeure ensuite différente de ce qu’elle était avant le diabète.

Cela nous semble être une description raisonnablement pertinente du problème climatique. Il n’y a pas de retour en arrière possible à l’ère d’avant le changement climatique. Quel que soit le succès que nous ayons dans l’atténuation des changements climatiques, nous ne reviendrons certainement pas aux taux atmosphériques préindustriels de gaz à effet de serre, du moins pas avant plusieurs siècles. Même à 1 ou 1,5 °C de réchauffement sur Terre, le climat et la planète seront très différents, ce qui aura des conséquences inévitables pour les sociétés humaines. Nous vivrons dans une planète plus chaude et dans un climat plus volatil et moins prévisible.

La gravité de notre diabète planétaire dépendra de la quantité d’émissions que nous continuerons d’émettre et de la capacité d’adaptation des sociétés humaines au changement climatique. Avec le réchauffement actuel d’un degré, il semble que les sociétés humaines se soient relativement bien adaptées. Plusieurs affirmations attribuant les catastrophes naturelles actuelles au changement climatique sont controversées. Mais les statistiques globales suggèrent que les décès dus aux catastrophes naturelles liées au climat dans le monde sont en baisse, et non en hausse, et que les pertes économiques associées à ces catastrophes, compte tenu de la croissance démographique et de la richesse, sont restées stables depuis plusieurs décennies.

La gravité de notre diabète planétaire dépendra de la quantité d’émissions que nous continuerons d’émettre et de la capacité d’adaptation des sociétés humaines au changement climatique.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Mais avec un réchauffement de trois ou quatre degrés, les paris sont ouverts. Et il semble qu’en l’absence de prise en main, c’est là que les tendances actuelles en matière d’émissions sont susceptibles de nous mener. De plus, même avec une action radicale, stabiliser les émissions à 1,5 °C, comme l’exigent aujourd’hui de nombreux défenseurs du climat, n’est pas possible sans la géo-ingénierie solaire ou l’extraction massive du carbone émis dans l’atmosphère. Dans la pratique, compte tenu des émissions héritées du passé et des infrastructures prévues, l’objectif international de longue date de limiter l’augmentation de la température à deux degrés Celsius est également extrêmement peu probable.

Il est donc inévitable que le traitement du changement climatique nécessitera non seulement une réduction des émissions, mais aussi une adaptation importante aux risques climatiques connus et inconnus qui font déjà partie de notre avenir du fait de deux siècles de consommation de combustibles fossiles. C’est en ce sens que nous soutenons depuis longtemps que le changement climatique doit être compris comme une condition chronique de la modernité mondiale, un problème qui sera géré mais non résolu.

Le changement climatique doit être compris comme une condition chronique de la modernité mondiale, un problème qui sera géré mais non résolu.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

La maladie chronique du climat

Pour gérer cette situation, il faudra à la fois réduire les émissions pour limiter le réchauffement et s’adapter au réchauffement que nous ne saurons pas éviter. L’atténuation des émissions et l’adaptation au changement climatique sont bien souvent considérées comme deux tâches distinctes et, dans certains milieux, pensées tant par les défenseurs de l’environnement que par les sceptiques, en opposition et en compétition. Or la décarbonisation et l’adaptation sont deux entreprises profondément enchevêtrées qui sont indissociables des processus de modernisation à long terme.

Les pires scénarios climatiques, qui se fondent sur les pires scénarios d’émissions, sont à l’origine de la plupart des terribles études sur les potentiels impacts climatiques à venir. On les décrit souvent comme « business as usual  » – ce qui se produira si l’économie continue de croître et si la population mondiale devient plus riche et donc plus consommatrice, notamment d’énergie. Mais ce n’est pas en utilisant cette variable que le GIEC, qui produit ces scénarios, parvient à des scénarios d’émissions très élevés. Bien au contraire, les pires scénarios sont ceux dans lesquels le monde reste pauvre, très peuplé, inégal et faiblement technologique. Un avenir avec beaucoup de pauvres sans accès à des technologies propres.

Dans ces scénarios, le changement climatique a des conséquences désastreuses parce qu’il interagit avec la pauvreté endémique, des institutions défaillantes, des infrastructures en ruine et surimposées, et une myriade d’autres problèmes. C’est un monde dans lequel la plupart des gens n’ont pas de climatisation, de maisons résistantes aux ouragans et aux inondations, de cultures avancées et de systèmes d’irrigation efficaces, un accès aux produits agricoles échangés au niveau mondial lorsque les cultures locales sont mauvaises, des ressources pour faire face aux aléas climatiques et se reloger sous des climats plus cléments.

En revanche, un avenir dans lequel le monde résiste à un climat plus chaud est probablement aussi un avenir dans lequel le monde a mieux réussi à atténuer les changements climatiques. Un monde plus riche sera un monde à haute technologie, avec beaucoup plus d’options technologiques moins polluantes et plus de ressources à investir à la fois dans l’atténuation et l’adaptation.

Un monde plus riche sera un monde à haute technologie, avec beaucoup plus d’options technologiques moins polluantes et plus de ressources à investir à la fois dans l’atténuation et l’adaptation.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Il sera moins peuplé – les taux de fécondité chuteront à mesure que les revenus augmenteront –, moins inégalitaire – parce que beaucoup moins de personnes vivront dans l’extrême pauvreté – et plus urbanisé – c’est-à-dire, beaucoup plus de personnes vivant dans des villes avec des infrastructures lourdes, la climatisation et des services d’urgence pour les protéger.
Il s’agira très certainement d’un monde où les températures moyennes mondiales auront dépassé de 2 °C les niveaux préindustriels. La dernière vague d’échéances climatiques alarmistes – douze ans pour prévenir les catastrophes climatiques selon The Guardian – n’y changera rien. Mais comme le reconnaît même David Wallace Wells, dont le livre The Uninhabitable Earth a contribué à revitaliser le catastrophisme climatique, «  2 °C, ce serait terrible mais bien mieux que 3… et 3 °C, bien mieux que 4  ».

Compte tenu de la trajectoire actuelle des émissions, un monde qui parviendrait à stabiliser les émissions sous les 2,5 ou 3 °C, ce qui impliquerait en soi des efforts très importants et continus pour réduire ces émissions, serait vraisemblablement aussi bien adapté au climat, car il serait, nécessairement, beaucoup plus riche, moins inégal et plus avancé sur le plan technologique que celui dans lequel nous vivons actuellement.

L’astéroïde climatique

Cependant, décrire le changement climatique comme un problème chronique, sérieux et potentiellement catastrophique que nous pourrions gérer sans toutefois pouvoir le résoudre ne traduit pour certains pas suffisamment l’urgence de la situation. Le changement climatique est une urgence, plus proche d’un astéroïde que d’une maladie chronique. « C’est la civilisation qui est en jeu », déclarait Eric Holthaus dans Grist l’automne dernier. Le changement climatique, comme l’a suggéré récemment David Roberts dans Vox, est « une urgence de premier ordre, menaçant le progrès dans tous les autres domaines ». Il rendra « tout ce que nous pourrions reconnaître comme civilisation humaine physiquement impossible », comme le soutient Kate Aronoff dans The Intercept.

Si le changement climatique est en réalité un astéroïde filant droit vers la Terre, ce n’est toutefois pas grâce aux actions et avis de ceux qui propagent cette idée que vous vous en rendrez compte. Le Green New Deal reste en effet davantage un slogan qu’un agenda politique. Mais si l’on se fie au peu de détails avancés par ses partisans, il semble improbable que quiconque propose sérieusement, à l’avenir, les mesures draconiennes qu’une véritable urgence climatique exigerait manifestement.

Les partisans du Green New Deal semblent dépourvus de projet pour interdire la viande ou le voyage aérien, comme certains critiques de droite l’ont suggéré. Nombre d’entre eux rejettent l’énergie nucléaire et les technologies de séquestration du carbone, en dépit des preuves solides que les deux seront nécessaires pour réduire drastiquement les émissions mondiales.

Si le changement climatique est en réalité un astéroïde filant droit vers la Terre, ce n’est toutefois pas grâce aux actions et avis de ceux qui propagent cette idée que vous vous en rendrez compte.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Les socialistes et les socio-démocrates qui ont pris au sérieux le New Deal et l’urgence climatique exigeraient la nationalisation du secteur de l’électricité et d’autres industries énergivores ou, à tout le moins, une extension majeure de la puissance publique, comme notre collègue Jameson McBride le soutenait plus tôt cette année. Un mouvement pro-climat qui croirait vraiment que nous n’aurions plus que douze ans pour éviter la fin du monde conclurait probablement que nous ne pourrions faire perdurer l’Obamacare que pour une ou deux décennies tandis que nous nous occuperons de désamorcer le compte à rebours climatique. En effet, face à un Congrès intransigeant et à une politique indifférente à la question, ceux qui croyaient vraiment que l’échec de l’élimination de toutes les émissions mondiales de gaz à effet de serre au cours des douze prochaines années entraînerait l’effondrement probable de la civilisation pourraient envisager sérieusement de suspendre certaines libertés afin de se mobiliser rapidement pour faire face à la crise, comme nous l’avons fait pour la Seconde Guerre mondiale.

Le fait que personne, parmi les pro-climat, les socialistes et les démocrates pro-justice militant en faveur d’un Green New Deal ne semble prêt à accepter les mesures évoquées supra, amène à penser que l’urgence climatique est surtout un effet de manche pour mieux exposer la gravité du problème, mais qui n’appelle en réalité pas des mesures sensiblement différentes de celles proposées par les défenseurs de l’environnement depuis plusieurs décennies – bien avant que la situation ne soit devenue si grave et le besoin d’agir si incontestablement urgent.

L’urgence climatique est surtout un effet de manche pour mieux exposer la gravité du problème, mais qui n’appelle en réalité pas des mesures sensiblement différentes de celles proposées par les défenseurs de l’environnement depuis plusieurs décennies.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

À part Medicare for All et une garantie d’emploi non précisée, rien de ce qui est proposé à ce jour dans le cadre d’un Green New Deal ne semble se projeter au-delà d’une politique climatique et énergétique à la sauce de l’ère Obama – excepté un vaste programme de plafonds et d’échange d’émissions, dont beaucoup de Démocrates ont conclu qu’il serait probablement un échec politique et que le jeu n’en vaudrait peut-être même pas la chandelle de toutes façons.

Ce que les catastrophistes du climat modernes sont en réalité prêts à proposer, c’est ce que vous feriez en réponse à un diabète planétaire, non pas à un astéroïde climatique. Après avoir dit plusieurs milliers de fois pourquoi l’alarmisme au sujet de la catastrophe climatique imminente était justifié dans un article du New York Times Sunday Review intitulé « Time to Panic » , Wallace Wells n’avait à offrir comme voies à suivre que des normes de rendement de carburant plus élevées, des lignes ferroviaires à grande vitesse, et l’obligation de nourrir le bétail avec des algues marines. Pas vraiment du même rayon que les astéroïdes et l’urgence.

Ce que les « Climate Hawks » et les défenseurs du Green New Deal ont en réalité à l’esprit, c’est la politique, et non pas la suspension de la politique face à une catastrophe imminente. On parle d’apocalypse climatique pour mieux servir ses objectifs politiques de longue date, non pas pour apporter une réponse globale à une urgence climatique.

Ce que les catastrophistes du climat modernes sont en réalité prêts à proposer, c’est ce que vous feriez en réponse à un diabète planétaire, non pas à un astéroïde climatique.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Politique ou anti-politique ?

« La peur peut mobiliser », avançait Wallace Wells dans son éditorial. Mais il n’est pas facile de concilier les impératifs liés à la création et la mobilisation d’un mouvement aux exigences dans l’élaboration de politiques pragmatiques. Le mouvement climatique a toujours voulu à la fois s’engager dans la politique et rester au-dessus de celle-ci ; détenir la science et l’expertise, tout en cannibalisant continuellement celles-ci pour mieux nourrir des stratégies de communication et d’organisation.

Le journaliste militant Bill McKibben insiste depuis longtemps sur le fait que la physique et la chimie sont non négociables, bien qu’il ait passé une décennie à essayer de construire un mouvement populaire avec lequel les responsables politiques devraient… négocier. Pareillement, Wallace Wells reproche aux scientifiques d’avoir « ciselé leurs propres observations de manière si consciencieuse que celles-ci ont échoué à communiquer la gravité réelle de la menace », tout en déplorant l’effondrement de la foi du public envers l’expertise.

Wallace Wells n’est que le dernier en date à se plaindre du fait que scientifiques et journalistes, même ceux qui soutiennent fortement la cause, n’ont pas été assez apocalyptiques, même si l’alarmisme est bien le modus operandi des messages climatiques depuis maintenant des décennies. Pourtant, après trente ans de preuves que les discours toujours plus bruyants et apocalyptiques n’ont pas réussi à convaincre le public et les politiciens de se réveiller et de prendre conscience de la situation, la conviction que prophétiser la ruine est la seule voie reste inébranlable.

Cela s’explique par le fait que, si la nature du problème climatique est chronique et si les réponses pratiques et politiques sont de plus en plus importantes, la culture et l’idéologie de l’environnementalisme contemporain sont quant à elles millénaristes. Dans l’esprit des millénaristes, il n’y a que deux choix : la catastrophe ou la réorganisation complète de la société. Soit les Américains verront les signes avant-coureurs et referont le monde ; soit ils périront dans l’apocalypse ardente.

Si la nature du problème climatique est chronique et si les réponses pratiques et politiques sont de plus en plus importantes, la culture et l’idéologie de l’environnementalisme contemporain sont quant à elles millénaristes.

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C’est pourquoi l’adaptation, l’énergie nucléaire, la séquestration du carbone et la géo-ingénierie solaire n’ont pas leur place dans le « récit environnemental de l’apocalypse et du salut ». Alors même que toutes, sauf peut-être la dernière, sont très certainement indispensables à toute réponse efficace aux changements climatiques – et finiront par faire partie intégrante de tout effort politique commun décent contre ces bouleversements. Le rejet de ces options s’explique par leur compatibilité avec le paradigme socio-technique existant. En effet, elles n’exigent pas que nous mettions fin au capitalisme, au consumérisme, ou aux modes de vie énergivores. La société moderne, industrielle, la techno-société continue – seulement, sans les émissions. C’est aussi la raison pour laquelle les efforts déployés par les défenseurs du nucléaire, de la séquestration carbonique et de la géo-ingénierie pour mettre en œuvre un encadrement en faveur de ces approches ont eu un effet limité.

L’enjeu pour le mouvement climatique consiste en ce que les exigences nécessaires pour décarboniser massivement l’économie mondiale entrent en conflit avec le catastrophisme égalitaire que les stratégies de mobilisation du mouvement défendent. McKibben l’a confessé en privé auprès de plusieurs personnes, expliquant qu’il n’a pas reconnu publiquement le besoin d’énergie nucléaire parce qu’il pense que cela « couperait ce mouvement en deux. »

Ce genre de calculs politiques suppose implicitement que, une fois que les partisans auront acquis un réel poids politique, ils réaliseront les concessions rendues nécessaires par les exigences pratiques d’une réduction profonde des émissions de carbone. Mais l’armée que l’on forme conditionne la nature des batailles que l’on mène. Il n’est donc pas certain que l’armée des millénaristes égalitaires que le mouvement climatique mobilise sera prête à signer les compromis nécessaires – sur les plans politique, économique et technologique. Ceux qui en doutent n’ont qu’à porter leur regard de l’autre côté du spectre politique, où les conservateurs et les républicains sont maintenant captifs des forces anti-immigration qu’ils ont promues au cours de la dernière décennie dans leurs batailles contre les progressistes de l’ère Obama.

Il n’est pas certain que l’armée des millénaristes égalitaires que le mouvement climatique mobilise sera prête à signer les compromis nécessaires – sur les plans politique, économique et technologique.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Le problème du millénarisme climatique

En dehors de la bulle environnementale, la logique de mobilisation millénariste n’a aucun sens. Pire, elle sape en fait le scénario d’une catastrophe imminente. Pour ceux qui ne sont pas encore convaincus que la modernité industrielle, laissée à elle-même, finira mal, pour déterminer si les écologistes prennent leurs avertissement au sérieux, il faudrait voir ce qu’ils proposeraient dans un scénario sans catastrophe écologique. Ainsi, la nature globale et ambitieuse du Green New Deal affaiblit le message quant au caractère urgent du changement climatique.

Pour ces raisons, la clé pour accroître l’importance du changement climatique pour ceux qui sont en dehors de la bulle environnementale ne sera pas, comme l’ont supposé Wallace Wells et tant d’autres avant lui, de nous faire enlever nos « cataractes d’aveuglement » afin de voir le problème comme un astéroïde et non une maladie chronique. Il s’agira plutôt de démontrer que ceux qui émettent les avertissements ne sont pas simplement des idéologues faisant la promotion de solutions égoïstes à une crise surestimée.

Il n’y a bien sûr aucun mal à défendre les solutions et les technologies en lesquelles vous croyez. Voilà à quoi ressemble la politique du diabète. Les préférences politiques font l’objet de discussions, et les différentes parties prenantes défendent leurs intérêts. En fin de compte, une sorte de compromis émerge, dans lequel chacun obtient une partie de ce qu’il veut et personne n’obtient tout ce qu’il veut.

Le Green New Deal est, implicitement, la manœuvre d’ouverture dans ce genre de négociations, d’abord avec d’autres démocrates progressistes (d’où Medicare for All) et ensuite avec les modérés et les conservateurs. Cependant, le problème pour les défenseurs du climat est qu’il n’est pas du tout clair à ce stade qu’il y ait quelqu’un avec qui négocier.

Dans le meilleur des cas, avec un président et un Congrès démocrates à partir de 2020, les écologistes seront confrontés à une coalition démocrate composée de députés vulnérables représentant des États hésitants ne partageant ni l’enthousiasme des progressistes pour des programmes sociaux redistributifs, ni la peur des environnementalistes face au changement climatique. C’est la raison pour laquelle les principaux membres démocrates du Congrès, telles Nancy Pelosi et Dianne Feinstein, ont été si partagées au sujet du Green New Deal. Elles ont, par deux fois au cours de leur carrière au Congrès, vu les démocrates perdre le contrôle des deux chambres après avoir proposé une importante législation sur le climat et les soins de santé.

Le problème pour les défenseurs du climat est qu’il n’est pas du tout clair à ce stade qu’il y ait quelqu’un avec qui négocier.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Pendant ce temps, le catastrophisme polarisant de la gauche environnementale lié aux exigences de « tout changer » – 100 % d’énergies renouvelables, le végétarisme obligatoire et la fin de l’extractivisme et du capitalisme – a compromis la possibilité d’une politique climatique modérée pour les républicains, un problème qui sera probablement exacerbé si une prochaine vague électorale devait porter les démocrates au pouvoir. Déjà, plusieurs des républicains les plus prompts à reconnaître le changement climatique ont perdu leur siège en 2018. Ceux restant sont susceptibles d’être concurrencés par les démocrates en 2020, pour la simple raison que les circonscriptions visées sont celles où il est possible de défendre l’action contre le changement climatique. Favorables aux démocrates, donc.

Pour ces raisons, il est peu probable qu’une position plus catastrophiste et progressiste au Congrès contribue à renforcer les ambitions de la politique climatique. Obtenir un large consensus afin de mener une politique climatique ambitieuse devrait déboucher, dans le meilleur des cas, sur des actions édulcorées similaires à celles de l’ère Obama. Il est donc nécessaire d’adopter une position différente, en démontrant que le mouvement environnemental représente davantage qu’un intérêt idéologique particulier.

Pour ce faire, les écologistes devront cesser d’implorer les Américains de prendre sur eux et de prendre leur traitement environnemental et, au lieu de cela, d’avaler durement et de prendre eux-mêmes un traitement, en adoptant des choses qu’ils ont souvent refusé par le passé, comme l’adaptation, le gaz naturel, la séquestration du carbone, l’énergie nucléaire.

Pour tirer le meilleur parti de notre maladie chronique, il faudra un mouvement climatique moins catastrophiste sur le problème et plus œcuménique concernant ses solutions.

Ted Nordhaus et Alex Trembath

Cela ne permettra pas aux États-Unis, et encore moins au reste du monde, d’atteindre l’objectif de zéro émission au cours des 12 prochaines années. Mais Wallace Wells a raison de dire que, dans presque tous les cas, un avenir à deux degrés sera meilleur qu’un avenir à trois degrés, et un avenir à trois degrés, meilleur qu’un avenir à quatre degrés. De plus, dans la pratique, rien de ce que les partisans du Green New Deal proposent sérieusement ne réduira les émissions américaines à une échelle ou à un rythme compatible avec une stabilisation des émissions en dessous de deux degrés, et encore moins de 1,5 degrés. Pour tirer le meilleur parti de notre maladie chronique, il faudra un mouvement climatique moins catastrophiste sur le problème et plus œcuménique concernant ses solutions.

Crédits
Cet article est une traduction d'un article publié sur le site du Breakthrough Institute : https://thebreakthrough.org/articles/is-climate-change-like-diabetes