Copenhague. Les représentants de 94 villes se sont rencontrés à Copenhague à l’occasion du Sommet du C40 – ou Cities Climate Leadership Group – du 9 au 11 octobre dernier pour parler adaptation au changement climatique. Le sommet a été pour les édiles l’occasion d’échanger sur les bonnes pratiques en matière d’environnement et de prendre de nouveaux engagements. Ces villes représentent en effet aujourd’hui près de 700 millions de personnes et un quart de l’économie mondiale, ce qui les place dans la situation d’être « les premiers intervenants dans le monde face à l’urgence climatique », selon les propres mots du Secrétaire général de l’ONU1.

Les maires de plus de 80 grandes agglomérations représentées se sont engagés à mettre en œuvre au niveau local l’Accord de Paris sur le climat à travers l’initiative « Date limite 2020 » qui vise à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. C’est dans cette optique que se place l’adoption du « Global Green New Deal » qui se propose d’agir sur les secteurs des transports, des bâtiments et des déchets pour limiter les émissions, et qui engage les maires à placer le climat au cœur de leur prise de décision2

Le C40 a par ailleurs lancé une initiative sur la pureté de l’air qui devrait respecter les directives de l’Organisation mondiale de la santé sur la qualité de l’air. Quatorze villes du C40 se sont également engagées, au travers de la déclaration « Good Food Cities » à adopter un régime alimentaire moins coûteux d’un point de vue écologique. Il s’agit de limiter la consommation de viande, de favoriser les circuits courts et de réduire les déchets alimentaires. Ce dernier point pourrait permettre de baisser de plus de 60 % les émissions de gaz à effet de serre liées à l’alimentation dans les villes. Ces 14 villes représentent environ 500 millions de repas servis tous les ans dans les bâtiments publics, les écoles et les hôpitaux3

Les villes ont un rôle central dans le changement climatique. D’ici 2050, plus des deux tiers de la population mondiale devrait vivre dans les villes, lesquelles consomment plus de deux tiers de l’énergie mondiale et contribuent à 70 % des émissions de CO2.4 À cela s’ajoute la vulnérabilité accrue des villes au réchauffement climatique avec les îlots de chaleur urbains – c’est-à-dire la concentration localisée et anormale de chaleur dans les villes5. L’adaptation des villes est donc absolument nécessaire, d’autant qu’en ce qui concerne le changement climatique, les villes ont trois fois plus de chances que les États de prendre des initiatives dès lors qu’un objectif précis est déterminé6. Dans un communiqué le Sommet du C40 présente ainsi son action comme « une réponse au blocage de l’action intergouvernementale par une minorité de gouvernements très puissants, niant la science, et servant les intérêts de l’industrie du pétrole ».

Des actions ont déjà été entreprises par les métropoles du C40. Une analyse parue en amont du Sommet montre que 30 grandes villes, parmi lesquelles New York, Paris, Sydney, Londres et Berlin, avaient déjà réussi à baisser de 22 % en moyenne leurs émissions de CO2 depuis dix ans7. Sur ce point, les villes ne sont pas également matures. Copenhague est sans conteste la ville qui a le mieux réussi à mener une politique de réduction des émissions de carbone, lesquelles ont diminué de 61 % depuis 1990. Cette évolution est notamment due aux efforts entrepris dans le secteur des transports ; à un investissement dans les mobilités douces comme le vélo ou les transports électriques ; à la baisse de l’utilisation des énergies fossiles pour la production d’électricité ou de chaleur ; ou encore à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments. D’autres villes se sont distinguées, parmi lesquelles la ville chinoise de Guangzhou (aussi nommée Canton, plus de 13 millions d’habitants), qui s’est vu décerner un prix lors du Sommet pour la réforme de ses transports urbains – la ville est désormais dotée d’une flotte de plus de 11 000 bus électriques. 

Les blocages politiques et le manque d’actions concrètes des gouvernements ont poussé Ken Livingstone, ancien maire travailliste de Londres, à créer en 2005 le Réseau C40, afin à la fois de reconnaître l’impact important que le changement climatique peut avoir sur les villes, et de soutenir les initiatives qui peuvent être prises à cette échelle. L’échange des bonnes pratiques urbaines en matière d’environnement ainsi que les engagements pris par les maires des villes apportent une réponse effective aux enjeux du changement climatique.

Les territoires urbains sont particulièrement sensibles aux enjeux liés au changement climatique, notamment avec les problèmes de pollution de l’air ou d’îlots de chaleur urbains. Ils se trouvent dans le même temps être les plus à même de prendre des décisions concrètes et rapides – en termes d’aménagement du territoire et de choix politiques locaux. Cette réactivité doit pourtant intégrer les autres acteurs et s’insérer dans des programmes plus larges, avec les intercommunalités, les régions et le territoire national. L’adaptation au changement climatique ne peut donc se faire qu’avec une participation de tous les acteurs, dans un emboîtement des échelles pertinentes8. Lors du Sommet C40, les maires ont ainsi enjoint les dirigeants politiques, directeurs généraux, syndicats, entreprises et représentant de la société civile à se joindre à leur action. 

Perspectives :

  • Afin de se conformer à leurs engagements, notamment de réduction des émissions de CO2 d’ici 2020, les villes vont devoir accroître leurs efforts. Des décisions politiques devraient être prises par les maires d’ici là.
  • À l’occasion de ce Sommet, la présidence du réseau C40 est passée d’Anne Hidalgo à Eric Garcetti, maire de Los Angeles, pour les trois années à venir. Le prochain Sommet en 2021 sera l’occasion de voir si les engagements des villes ont été tenus.
  • Malgré les initiatives mises en place, les émissions mondiales de gaz à effet de serre continuent à augmenter et le rapport du GIEC concernant le réchauffement climatique estime que l’accord de Paris est un scénario optimiste9. Les enjeux pour les villes risquent donc d’aller croissant, ce qui ne fait qu’augmenter l’importance d’une action et d’une adaptation locales.