Edimbourg. Lundi 23 septembre, le gouvernement écossais par l’intermédiaire de sa secrétaire aux Affaires extérieures, Fiona Hyslop, a présenté le premier document officiel sur la politique arctique de l’Écosse. Intitulé Arctic Connections. Scotland’s Arctic Policy Framework, ce document se présente comme une boîte à outils permettant de positionner « l’Écosse non seulement comme une passerelle vers l’Arctique, mais également comme un acteur de son futur »1.

Ces dernières années, le gouvernement écossais s’est progressivement inséré dans la communauté arctique. Le premier coup d’éclat fût le déplacement de Nicola Sturgeon à Reykjavik lors de la conférence annuelle Arctic Circle en octobre 2016. Son discours tonitruant où elle affirma que « les limites septentrionales de l’Écosse étaient plus proches de l’Arctique que de Londres »2 résonne à présent comme un point de départ de cette nouvelle orientation stratégique.

En effet, l’Écosse veut démontrer que sa situation géographique peut être un avantage. Loin d’être un espace périphérique et isolé, la publication de ce document entend le replacer dans « une position stratégique et centrale, proche de l’Arctique et bien relié à l’Amérique du Nord et au reste de l’Europe »3. Au-delà des déclarations d’intention, l’objectif politique et économique du gouvernement écossais est un arrimage au système Nord Atlantique.

Réancrer l’Écosse dans un continuum historique

Les premiers mots de ce document stratégique sont explicites : « Pendant des siècles, l’Écosse et l’Arctique ont profité des liens étroits qui ont eu une influence durable sur notre fibre culturelle, économique et sociale »4. Le ton est donné, l’ancrage de l’Écosse dans l’espace arctique n’est pas à prouver. Contrairement à la Chine qui s’est positionné comme un « État proche de l’Arctique », ce document du gouvernement écossais construit sa légitimité sur la genèse des nombreux liens qui existent avec l’espace arctique.

Tout d’abord, le document met en lumière les liens culturels profonds entre l’Écosse et le monde scandinave. À ce titre, le choix de présenter ce premier document dans les îles Orcades n’est pas anodin. Dès la fin du VIIIe siècle, cet archipel est colonisé par les Vikings venus de Norvège. L’utilisation du vieux norrois se diffuse et se maintient jusqu’au XIXe siècle. L’œuvre littéraire Orkneyinga saga (Saga des Orcadiens), narrant l’histoire des Orcades au moment de sa conquête par le roi de Norvège (IVe-XIIe siècles), en constitue un leg important.

Sur le plan du développement économique et social, l’Écosse est intégré dans les programmes de financements européens interrégionaux (Interreg). Ainsi, le programme Northern Periphery and Arctic Programme inclut aux côtés de l’Écosse : la Finlande, l’Irlande, la Suède, l’Irlande du Nord (Union) en coopération avec les îles Féroé, le Groenland, l’Islande et la Norvège. Cet ensemble géographique éparse est caractérisé par une faible densité démographique, une faible diversité économique, une accessibilité difficile et d’importantes ressources naturelles5. Dès lors, l’Écosse s’inscrit pleinement dans ce continuum.

Au final, ce premier document stratégique sur l’Arctique intervient dans un contexte politique incertain. Pour le gouvernement écossais, cette orientation vers les contrées septentrionales sert de paravent politique si le Brexit, avec ou sans accord, devait finalement aboutir. Mais, en tout état de cause, il tient à prouver les moyens de son émancipation envers Londres.

Sources
  1. Discours de Fiona Hyslop, Arctic connections : Scotland’s arctic policy framework, Scottish Government, 24 septembre 2019.
  2. Discours de Nicola Sturgeon, “Nicola Sturgeon’s Keynote at the 2016 Arctic Circle Assembly”, Reykjavik, Octobre 2016.
  3. Discours de Fiona Hyslop, Arctic connections : Scotland’s arctic policy framework, op. cit
  4. Arctic Connections. Scotland’s Arctic Policy Framework, Edimbourg, Scottish Government, 23 septembre 2019, p.3.
  5. Programme Manual. Northern Periphery and Arctic Programme 2014-2020, Copenhague, European Union, Juillet 2019, p.5.