Washington. Comme l’a immédiatement rappelé Donald Trump en introduisant la conférence de presse inaugurale de la rencontre entre les deux dirigeants lundi le 22 juillet, Imran Khan est un ancien champion de cricket, président du parti Pakistan Tehreek-é Insaf (پاکستان تحريک انصاف‎), « Mouvement du Pakistan pour la justice », qu’il a fondé en 1996, et Premier ministre depuis les élections du 25 juillet 2018, qu’il a gagnées devant la Ligue musulmane du Pakistan et le Parti du peuple pakistanais.

La principale question abordée au cours de cette rencontre était la situation en Afghanistan, comme le suggérait la venue de Qamar Bajwa, chef de l’armée du Pakistan, et le laissaient supposer les déclarations de Mike Pompeo à Kaboul le 25 juin, annonçant qu’il pensait arriver à un accord avec les Taliban d’ici au premier septembre, avant l’élection présidentielle afghane. Les États-Unis espèrent qu’Islamabad puisse faire pression sur les Taliban pour obtenir un cessez-le-feu rapidement, et faire revenir les 5000 militaires américains encore présents en Afghanistan.

La visite est aussi une tentative pour Imran Khan de rendre les relations entre les États-Unis et le Pakistan plus chaleureuses. En effet, Donald Trump a coupé, en 2018, les aides que Washington donnait au Pakistan (1,3 milliards de dollars par an), dont 300 millions d’aide militaire, au motif que le Pakistan ne luttait pas assez contre l’extrémisme. Par ailleurs, les États-Unis pourraient aider le Pakistan à sortir de la liste noire du GAFI, qui coûterait selon certains experts environ 10 milliards par an à l’économie du pays.

L’annonce de la capture de Hafiz Saeed, cerveau des attentats de Mumbai de 2011, la semaine dernière, a mis le président américain dans des dispositions favorables1, même si des officiels américains ont rappelé que Hafiz Saeed avait déjà été arrêté et libéré à sept reprises depuis 2001. De manière moins superficielle, les États-Unis ne se sont pas opposés au bailout que le FMI a fait pour le Pakistan, le 3 juillet, à hauteur de 6 milliards de dollars, accompagné d’un plan d’augmentation des taxes par ailleurs critiqué par une partie de la population2.

Et cependant, une image semble dissiper quelque peu la sensation de relations renouées que devrait incarner la complicité (d’ailleurs difficile à discerner) entre les deux dirigeants : Imran Khan n’a été accueilli par aucun officiel américain lors de son arrivée pour une visite de trois jours, et a été transporté dans une simple navette.

Le Pakistan semble donc, derrière les apparences, toujours négligé par l’administration américaine, qui ne s’y intéresse que pour limiter un tant soit peu les dégâts liés au départ d’Afghanistan sans aucun plan pour la suite, endetté vis-à-vis de la Chine en raison du Corridor économique Chine-Pakistan, et vis-à-vis du FMI à cause du récent bailout. Dans ces conditions, le rapprochement entre l’Union européenne et le Pakistan, incarné par la signature récente du Plan d’engagement stratégique signé en juin3, et par le fait que l’Union européenne est désormais le principal partenaire commercial du Pakistan4, semble particulièrement judicieux.

Perspectives :

  • 28 septembre 2019 : élection présidentielle en Afghanistan
Sources
  1. Tweet de Donald Trump du 17 juillet 2019
  2. SHAHID Kulwan Khuldune, The IMF Takeover of Pakistan, The Diplomat, 18 juillet 2019
  3. EEAS, EU-Pakistan Strategic Engagement Plan (SEP)
  4. European Commission, DG Trade, Page sur le Pakistan