Élue mardi dernier à la présidence de la future Commission européenne par 383 voix contre 3271, Ursula von der Leyen2 a été portée à la tête de l’exécutif par une majorité aux contours mal définis. Si son groupe, celui du Parti populaire européen (PPE), ainsi que le groupe libéral Renew Europe lui ont très largement accordé leur confiance, sa relation avec les Socialistes et démocrates (S&D) demeure ambiguë. Les écologistes, la gauche et les nationalistes se sont opposés à sa candidature. Au-delà des questions programmatiques, l’élection de Mme von der Leyen, qui signe l’enterrement du principe des Spitzenkandidaten au profit d’un arrangement négocié par le Conseil, pose la question du rôle du Parlement et des équilibres politiques qui structureront la prochaine législature. Pour comprendre ces équilibres, il importe d’abord de répondre à quelques questions fondamentales. Qui a soutenu Mme von der Leyen ? Bénéficie-t-elle de l’appui d’une coalition de fait ? Si non, quels sont les ressorts de son élection ?

Selon l’article 17, alinéa 7 du Traité sur l’Union européenne, le président de la Commission européenne est élu par le Parlement européen à la majorité de ses membres, sur proposition du Conseil. Dans les termes de cette réforme introduite par le traité de Lisbonne, la référence à la majorité des membres du Parlement est essentielle. Pour accéder à la tête de l’exécutif européen, le candidat du Conseil doit en effet réunir la majorité absolue des 751 (actuellement 7473) députés en fonction. Une abstention ou un vote blanc équivaut donc, dans la pratique, à un vote de défiance. Il est toutefois notable que l’abstention ait pu être utilisée, dans le passé, aussi bien comme un moyen de signifier une position de désaccord « ouverte » que pour préserver un accord partisan en place. Lors de la reconduite de José Manuel Barroso (PPE) à son poste en 2009, le groupe des sociaux-démocrates (S&D) s’était ainsi massivement abstenu.

Mais cette fois, les postures d’opposition claire semblent avoir remplacé la valeur de signal constructif de l’abstention. Sur 747 députés, 14 n’ont pas participé au vote, 22 ont voté blanc, et un unique bulletin nul a été décompté : les 37 abstentionnistes « au sens large » représentent donc seulement 5 % des députés. Alors que les critiques formulées par certains députés du bloc central se concentraient sur la procédure de désignation de la candidate par le Conseil, il est probable que le caractère de légitimité démocratique de ces critiques ait largement contribué à libérer les voix dissidentes, rendant la demi-mesure abstentionniste inutile.

Le scrutin ayant eu lieu à bulletins secrets, il n’est naturellement pas possible de donner un compte-rendu complet et exact des comportements de vote des différents groupes. L’écart entre les intentions de vote déclarées et le résultat final permet cependant de proposer quelques pistes d’analyse.

Nous avons tenté de collecter avec le plus de précision possible les intentions de vote au sein de chaque groupe. Pour cela, nous sommes partis de la liste des eurodéputés classés par parti national, en portant une attention particulière aux chefs de délégation. En examinant leurs profils Twitter lorsqu’ils étaient disponibles et suffisamment complets, nous avons obtenu un certain nombre d’informations sur les intentions de vote du parti national en question. Dans la plupart des cas, il a été relativement aisé de déterminer si les membres du parti avaient l’intention ou non de voter pour Mme von der Leyen. Au vu du mode du scrutin employé, nous ne nous sommes pas préoccupés de la différence entre une abstention et un vote défavorable, et nous sommes contentés d’estimer le taux d’approbation.

Nous avons ensuite compilé ces informations pour en déduire les intentions de vote des différents groupes européens dont le comportement n’était pas totalement uniforme (S&D, Renew, CRE, ainsi que les non-inscrits). Dans certains cas, nous avons aussi pu obtenir ou confirmer ces informations à partir d’articles de presse.

Qui a voté pour Ursula von der Leyen  ?

Trois groupes ont adopté jusque là une posture d’opposition claire, suggérant qu’aucun de leurs membres (ou bien seulement un nombre très réduit) n’a voté en faveur d’Ursula von der Leyen. Il s’agit du groupe de la gauche radicale GUE/NGL, de celui des Verts, et enfin des nationalistes d’Identité et Démocratie (ID).

À l’inverse, au sein du Parti populaire européen (PPE, centre-droit) et de Renew Europe (ex-ALDE, libéral), peu de voix discordantes se sont fait entendre. Une dizaine de députés du groupe libéral ont certes exprimé sur Twitter leur scepticisme, voire annoncé qu’ils voteraient contre cette nomination pourtant massivement appuyée par leur groupe. C’est le cas du parti danois Venstre, des Électeurs libres allemands, de la formation lettone Attīstībai/Par !, du D66 néerlandais (notamment Sophie in ‘t Veld) et des NEOS autrichiens. Il paraît toutefois peu probable, et peu compatible avec l’issue du vote, que la défiance vis-à-vis de Mme von der Leyen ait pris des proportions importantes dans le camp libéral.

Du côté du PPE, dont est issue la candidate, aucune voix discordante ne s’élève. Même Tamás Deutsch, député du Fidesz, a félicité de manière démonstrative l’ex-ministre de la Défense. De même, le cabinet de Viktor Orbán a insisté sur le poids déterminant des 13 voix du Fidesz dans ce scrutin remporté avec seulement 9 voix d’avance4.

L’issue du vote fournit un argument inattendu et puissant au parti d’Orbán pour consolider son influence au sein d’un PPE qui hier encore était parvenu à le marginaliser5. Pour autant, tous les députés du Fidesz ont-il effectivement joué le jeu de leur groupe ? S’il semble permis d’en douter, il est impossible, à ce stade, de connaître le nombre exact de voix du parti national-conservateur hongrois dont a bénéficié Mme von der Leyen.

La candidate a profité de deux soutiens importants en dehors des trois groupes centraux : d’abord celui du parti national-conservateur Droit et Justice (PiS), au pouvoir en Pologne, fort de 25 députés ; ensuite celui des 14 représentants non-inscrits du Mouvement Cinq-Étoiles (M5S) italien, membre pendant la dernière législature du groupe eurosceptique EFDD dirigé par Nigel Farage. Les M5S avaient tenté un temps un rapprochement avec l’ALDE6. Dans les deux cas, de même que pour le Fidesz, on pourrait être tenté de justifier le soutien de ces formations controversées par un certain opportunisme. En appuyant un exécutif européen faible, les partis polonais, hongrois et italien travailleraient à renforcer leur propre influence politique et géopolitique. En sauvant une majorité qui n’eût pas existé sans eux, ils se rendraient indispensables. Mais cette explication ne saurait suffire. Car il n’est pas anodin que les trois partis concernés siègent au gouvernement de leurs États respectifs. Leur soutien à la candidature de Mme von der Leyen peut donc aussi se lire comme un prolongement de l’accord du Conseil.

Au sein du groupe social-démocrate (S&D), la question du soutien à Mme von der Leyen s’est posée de manière particulièrement intense. Selon la même méthodologie que précédemment, nous avons pu estimer que sur les 26 délégations nationales des S&D, 15 (soit 90 députés) ont déclaré voter en faveur de la candidate et 8 (soit 44 députés) contre elle. Pour les 3 délégations restantes (Croatie, Roumanie, Chypre, soit un total de 19 députés), il n’était pas possible de conclure. Les partis socialistes et sociaux-démocrates qui se sont explicitement opposés à la candidate du Conseil sont le PS et le spa belges, le parti socialiste bulgare, le SPD allemand, le PS français et ses alliés, le PvdA néerlandais, le SPÖ autrichien et les sociaux-démocrates slovènes. Aucun de ces partis n’était représenté au Conseil par un chef d’État ou de gouvernement. Deux d’entre eux seulement (le SPD et les sociaux-démocrates slovènes) ont par ailleurs des responsabilités gouvernementales. À l’inverse, les partis danois, finlandais, maltais, portugais, suédois, slovaque et espagnol, dont font partie les Premiers ministres de chacun de ces États, ont annoncé voter en faveur de la candidature de Mme von der Leyen. En cohérence avec les lignes de pouvoir qui traversent la social-démocratie européenne, les partis défavorables à son investiture se concentrent à l’Ouest et au Sud-Est du continent, alors que le Nord et l’espace méditerranéen l’ont accueillie plus favorablement.

En additionnant les effectifs de l’ensemble des délégations nationales ayant annoncé soutenir Mme von der Leyen, on totalise 27 voix de plus que le score effectivement obtenu

François Hublet, Aurore Sallard

Toutefois, les intentions de vote énumérées ci-dessous posent un problème de taille : en additionnant les effectifs de l’ensemble des délégations nationales ayant annoncé soutenir Mme von der Leyen, on totaliserait 410 voix en sa faveur, soit 27 de plus que le score effectivement obtenu mardi.

Il est possible d’avancer plusieurs scenarii pour expliquer ce décalage. Nous proposons ci-dessous trois hypothèses de travail dont les conséquences pour la législature à venir seraient en partie divergentes. Un constat commun à ces trois approches s’impose cependant : dans la mesure où l’incertitude semble se concentrer autour du comportement du groupe S&D et des trois grands partis « périphériques » ayant déclaré soutenir Mme von der Leyen (Fidesz, PiS, M5S), il est hautement improbable que tous les députés des partis sociaux-démocrates « loyalistes » ainsi que des trois partis « périphériques » aient respecté à la fois la ligne fixée par leurs chefs de délégation.

Première hypothèse : des S&D en réalité majoritairement défavorables à Mme von der Leyen

Tout d’abord, on peut supposer que les trois partis aux tendances incertaines — le M5S italien, le PiS polonais et le Fidesz hongrois — s’en sont tenus aux intentions de votes qu’ils avaient communiquées, et que ce sont donc les sociaux-démocrates qui sont responsables de l’écart de 26 voix entre les résultats réels et les intentions de vote. Avec cette hypothèse, qui ne semble cependant pas la plus probable, le nombre de députés des S&D ayant voté en faveur de la candidate tombe à 63 (41 %). Elle signifierait un désaccord de fond entre l’attitude de la direction du groupe et celle de la base, mais également au sein même des délégations nationales « loyalistes » les plus importantes (PSOE et PD en tête). Cela risquerait d’entraîner une véritable incertitude quant à la cohérence et à la capacité d’influence du groupe dans les années à venir. Tiraillés entre des partis de gouvernement nationaux favorables à l’accord intergouvernemental et une base majoritairement hostile à cet accord, les S&D deviendraient otages des trois partis « périphériques », avec lesquels les points de désaccord (notamment sur la question de l’État de droit) restent extrêmement nombreux.

Deuxième hypothèse : des députés des partis « périphériques » inégalement acquis à la cause

Dans un second temps, on peut s’intéresser à l’hypothèse selon laquelle les députés du Fidesz, du PiS et du M5S se seraient montrés collectivement assez peu fiables par rapport à leurs annonces, en supposant que plus d’un tiers de leurs députés n’aurait pas voté pour Ursula von der Leyen. Le nombre de députés des S&D ayant voté pour Ursula von der Leyen serait alors de l’ordre de 80 à 85 (55 % environ), c’est-à-dire une courte majorité (quoique toujours inférieure aux annonces du groupe). Il s’agit de l’hypothèse la plus vraisemblable, dans la mesure où elle permet d’envisager que c’est un nombre limité de voix dissidentes supplémentaires chez les S&D (moins d’une dizaine), combinée au tiraillement des trois partis « périphériques » entre intérêt partisan et cohérence idéologique, qui a conduit à ce résultat très serré. Si elle décrit adéquatement la réalité, cette hypothèse signale une situation extrêmement complexe, dans laquelle la pression des gouvernements nationaux sur les parlementaires européens a été le principal catalyseur de la victoire de Mme van der Leyen, et ce malgré les pressions extrêmement vives qu’ont subies les députés situés aux deux bords opposés de la « majorité » de ce mardi, et auxquels certains ont tenté de résister en s’opposant à la ligne de leur parti et de leur groupe.

Troisième hypothèse : la partie de poker d’Orbán, Kaczyński et di Maio

Dans le troisième scénario, on suppose que la majorité des membres du Fidesz, du PiS et/ou du M5S n’ont pas soutenu Ursula von der Leyen. Ceci correspondrait par exemple au cas dans lequel seuls 25 députés, sur les 52 que comportent ces trois partis, ont voté en faveur de la candidate ; dans ce cas, le soutien des S&D serait au niveau annoncé par les intentions de vote, soit environ 90 voix (59 %). De manière contrôlée ou non — un vote volontairement calibré pour dégager une majorité étroite semble difficile à envisager —, les trois partis chercheraient désormais à tirer parti d’un soutien qui n’a été que très partiel, en faisant valoir que la désignation de Mme von der Leyen aurait été impossible sans eux. Notons d’ailleurs qu’au sein de ce scénario, plusieurs combinaisons restent envisageables : deux des trois partis peuvent avoir voté de manière cohérente en faveur de la candidate alors que le troisième adoptait une posture de pur bluff. Si cette hypothèse évacue un peu rapidement la question des dissensions réelles, mais inégalement visibles, qui semblent exister au sein des délégations sociales-démocrates, elle reste cependant envisageable.

L’issue extrêmement serrée du vote, le soutien incertain des S&D à la nouvelle Présidente (entre 41 et 59 % selon nos projections, plus probablement autour de 50-55 %) et la présence au sein d’une « majorité » aux contours flous de trois partis gouvernementaux eurosceptiques, que nous avons appelés jusque-là « périphériques », conduisent à une situation nouvelle et potentiellement instable. Son interprétation pose une série de problèmes méthodologiques fondamentaux.

Les fausses pistes de la grille de lecture parlementaire

L’idée de majorité, comme celle de coalition, doit ici être employée avec prudence. Pour décrire le potentiel accord entre PPE, S&D et Renew, nous avons suggéré l’utilisation du concept de Très grande coalition, empruntée à notre analyse de la situation allemande7. Cette coalition semble pourtant compromise par l’absence de majorité claire en faveur de Mme von der Leyen chez les sociaux-démocrates. Des trois hypothèses précédentes, seule la troisième donnerait une majorité à cette coalition hypothétique ; mais seulement à la condition d’un bluff généralisé, et à vrai dire très improbable dans cette forme extrême, des trois partis « périphériques ». S’il doit y avoir « coalition » dans les mois à venir, elle sera donc placée dans une position de gouvernement minoritaire, tolérée (et non formellement soutenue) par une partie de la majorité qui s’est dessinée cette semaine. Est-il possible d’envisager un ralliement du reste des sociaux-démocrates au moment de l’approbation de l’ensemble du collège ? Rien n’est moins sûr. Dans ce cas, la Commission von der Leyen, déjà en situation d’être un gouvernement minoritaire, se verrait privée de toute véritable coalition ou garantie d’un soutien parlementaire structuré. Un scénario plus surprenant pourrait alors voir un accord tacite au centre-droit (Renew, PPE dont Fidesz, PiS, au total 315 sièges) remplir ce vide, toléré par une partie des S&D et des CRE (Conservateurs et réformistes européens, droite). Il est à noter que l’alliance PPE-Renew-CRE disposerait, au Conseil, d’une majorité absolue qu’il n’a pas au Parlement8.

Dans tous les cas, l’équilibre Commission-Parlement sera probablement caractérisé par une instabilité certaine, et marqué par l’absence d’un engrenage essentiel du parlementarisme : la construction d’une véritable coalition gouvernementale. Si cette situation peut sembler surprenante, voire paradoxale, elle trouve en vérité son origine dans un déséquilibre institutionnel préexistant entre le Conseil et le Parlement, auquel les évolutions de ces derniers mois ont donné une ampleur particulière.

L’offensive intergouvernementale sur le Parlement européen qui s’est manifestée à l’occasion de l’élection de Mme von der Leyen a fourni une solution inattendue, mais démocratiquement incertaine, au problème épineux de la formation d’une coalition centrale dépassant l’habituelle entente PPE-S&D. Les formations d’au moins 24 chefs de gouvernement européens sur 28 ont voté en faveur de la candidate du PPE, soutenue par le président français et la chancelière allemande. Ces 24 partis, répartis dans 4 groupes, ont constitué une courroie de transmission considérable à la fois par leur poids électoral immédiat (190 voix, soit la moitié du total obtenu par la candidate) et par leur capacité d’entraînement au sein de leurs groupes respectifs. On remarquera en effet que les chefs des groupes parlementaires sont en majorité issus d’un parti de gouvernement national influent (S&D, PPE, CRE, ID) ou connus pour être très proches des positions d’un tel parti (Renew).

Certes, les équilibres partisans traditionnels n’ont pas été totalement balayés. Les libéraux, proches des positions d’une candidate pro-européenne issue de la frange modérée de la CDU, ont vu en elle une alliée naturelle. Le PPE, lui, a logiquement plébiscité celle que son Spitzenkandidat malheureux, Manfred Weber, s’était finalement résigné à soutenir. À gauche et à l’extrême-droite, la situation est également assez claire. Les Verts, la gauche radicale et les néo-nationalistes ne représentent, pris ensemble, qu’un seul Premier ministre européen sur 28 (en Lituanie) ; malgré la volonté d’ouverture affichée par la candidate, leurs positions sont apparues comme peu compatibles, sur le fond, avec celles du futur exécutif. Ils constitueront donc une opposition qui, pour sa part, peut probablement se considérer pleinement comme telle.

Au besoin apparent d’une coalition large, le consensus intergouvernemental a substitué une logique de coopération parlementaire entre délégations nationales

François Hublet, Aurore Sallard

Au besoin apparent d’une coalition large permettant à la Commission d’être désignée, le consensus intergouvernemental a ainsi substitué une logique de coopération parlementaire entre délégations nationales, rendant les dynamiques partisanes traditionnelles partiellement inopérantes. Ceci pourrait expliquer comment, malgré les dissensions significatives qui continuent de parcourir les différents groupes, aucune scission ne semble à l’ordre du jour. Viktor Orbán, une fois encore et par des voies inattendues, reprend sa place au sein du PPE. Les S&D, en dépit de la crise manifeste qu’ils traversent, ne paraissent nullement sur le point de se dissoudre. Les principales tensions nées de cette élection sont, en réalité, nationales : les coalitions allemande (CDU/CSU-SPD) et italienne (M5S-Lega) se déchirent autour des votes divergents des partis qui les composent. Dans les deux cas, le parti du Premier ministre a voté pour, le partenaire minoritaire contre. Dans les deux cas, la dispute a été dépeinte comme porteuse de lourdes conséquences. C’est au sein des gouvernements nationaux, semble-t-il, que le résultat de l’élection de ce mardi crée les oppositions les plus frontales, et leur nature politique ne fait aucun doute. Fait guère surprenant, quand on constate à quel point le vote du Parlement a été avant tout l’œuvre d’une conjonction de majorités nationales, plutôt que d’une nouvelle majorité européenne.

Pour la première fois dans l’histoire récente, la législature qui commence pourrait bien voir un recul de l’influence du Parlement au profit du Conseil. La référence fréquente à l’accord PPE-S&D comme une « Grande coalition européenne » a pu porter l’analyse sur une fausse piste, au lendemain de l’élection, en concentrant l’attention des observateurs sur la recherche d’une nouvelle majorité structurée à Strasbourg. À la lumière des éléments que nous avons évoqués, il est pourtant clair que là où un authentique régime parlementaire ne peut faire l’économie de discussions approfondies à la Chambre basse, là encore ou ce même régime peut trouver un certain équilibre dans un gouvernement minoritaire toléré, la mécanique européenne conduit irrémédiablement au contournement de l’Assemblée en l’absence de majorité claire. C’est cet effet-là qu’il conviendra désormais de mettre en lumière.

Sources
  1. HUBLET François, von der Leyen sur le fil, Le Grand Continent, 17 juillet 2019.
  2. ROUSSEAUX Pierre et HUBLET François, Ursula von der Leyen : un portrait, 9 juillet 2019.
  3. En raison de la vacance de quatre mandats, dont trois remportés par des indépendantistes catalans.
  4. Hungarian parties reactions about EC President Von der Leyen, Daily News Hungary, 16 juillet 2019.
  5. KÁLNOKY Boris, Schleichende Rehabilitierung Viktor Orbáns, Welt, 13 juillet 2019.
  6. Liberale lehnen Beitritt der Fünf-Sterne-Bewegung ab, Zeit, 9 janvier 2017.
  7. HUBLET François et SCHLEYER Johanna, L’ère des Très Grandes Coalitions et l’Allemagne ingouvernable, Le Grand Continent, 29 avril 2019.
  8. Plus d’informations (y compris sur la genèse du graphique présenté) sur ce fil Twitter.