Rome. Le 23 juin dernier, Qu Dongyu, vice-ministre de l’Agriculture et des Affaires rurales en Chine (depuis 2015) a été élu à la tête de la FAO, institution majeure de l’ONU, traitant de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de l’aquaculture, de l’alimentation et de la foresterie. C’est la première fois qu’un représentant de la RPC venant de Chine continentale et cadre du Parti dirige une organisation onusienne. Précédemment, la hongkongaise Margaret Chan a dirigé l’OMS au nom de la République populaire de Chine pendant une décennie, et Meng Hongwei (aujourd’hui « convoqué » en Chine et mis au secret, après avoir été accusé de corruption) a dirigé Interpol qui ne relève pas du système onusien1.

Originaire du Hunan, ayant suivi des études d’agronomie et diplômé d’un doctorat aux Pays-Bas, Qu Dongyu est un pur produit de l’élite politique du Parti dans la lignée des administrateurs-techniciens des questions agricoles et rurales en Chine. Il a ainsi occupé plusieurs postes à hautes responsabilités : directeur puis vice-président de l’Académie des sciences agricoles de Chine, vice-président de la région autonome du Ningxia2.

Élu avec 108 voix, à la majorité absolue dès le premier tour, Qu Dongyu remporte loin devant les autres favoris la direction de la FAO et fait figure de voix représentant les pays en développement en devançant la candidate française Catherine Geslain-Lanéelle (ancienne responsable de l’Autorité européenne de sécurité des aliments) avec 71 voix et le candidat géorgien Davit Kirvalidze (soutenu par les États-Unis) avec 12 voix. Le candidat chinois a bénéficié de nombreuses voix du continent africain3. La question de l’influence notable de Pékin dans le choix du candidat et de pressions, en plus d’un rééquilibrage de la domination de l’Occident à l’ONU se pose. De plus, Pékin finance à plus de 12 % le budget de la FAO, derrière les États-Unis (22 %). Cette élection est un signal très fort du rapport de force entre les deux poids lourds de la géopolitique mondiale des questions alimentaires et agricoles.

Perspectives :

  • Qu succède au brésilien, José Graziano da Silva (ayant conduit deux mandats) et entamera son mandat de quatre ans au mois d’août. Fort d’une expérience dans l’agriculture et la gouvernance rurale, Qu Dongyu aura la difficile tâche à mener de lutte contre l’insécurité alimentaire et la précarisation des populations rurales.
  • Ce sera l’occasion pour Pékin de montrer l’étendue de ses modernisations rurales et agricoles à l’ensemble des pays en développement et étendre son aura dans les institutions internationales et la gouvernance mondiale4, en faisant se rencontrer : politique étrangère de Pékin, question de développement et affaires stratégiques (accès aux ressources, poids dans les organisations internationales et influence).
Sources
  1. AFP, Qu Dongyu becomes first Chinese national to head UN food and agriculture agency, South China Morning Post, 24 juin 2019.
  2. Biography of Qu Dongyu, China Vitae.
  3. Qu Dongyu of China elected FAO Director-General, FAO, 23 juin 2019.
  4. MEYER Claude, “L’Occident face à la renaissance de la Chine, défis économiques, géopolitiques et culturels”, Odile Jacob, 2018.