Tôkyô. Premier invité d’État de l’ère Reiwa, premier leader étranger à s’entretenir avec l’empereur Naruhito, Donald Trump vient d’achever sa visite de quatre jours au Japon, à un mois du G20 qui se tiendra à Osaka en juin.

Le dimanche 26 mai a débuté par une partie de golf suivie d’un combat du sumo, qui illustrent l’effort stratégique de Shinzô Abe d’entretenir une bonne relation personnelle avec le leader américain. Côté commerce, Donald Trump a cependant donné le ton dès son premier discours le 25 mai au cours d’une cérémonie à l’ambassade américaine rassemblant des acteurs économiques japonais et américains. Le président a déclaré la nécessité d’un commerce bilatéral plus équitable entre les deux puissances, en appelant à investir aux États-Unis – « there’s never been a better time »1. En effet, le déficit commercial – marqueur de la politique commerciale de Trump – entre les deux puissances se situe autour de 68 milliards de dollars depuis 20142, essentiellement dû à l’exportation de voitures japonaises vers les États-Unis.

Lors de cette visite, Shinzô Abe a déclaré que les négociations commerciales entamées en septembre dernier se dirigeaient vers une coopération « gagnante-gagnante »3. Ces négociations, menées par le Représentant au Commerce américain Robert Lighthizer et son homologue japonais Toshimitsu Motegi en vue d’un accord commercial bilatéral, avaient été annoncées le 26 septembre 2018 à New-York.

« L’axe choisi par M. Trump a été une négociation bilatérale avec le Japon, alors que ce dernier était axé sur des négociations multilatérales et avait privilégié le TPP – Traité de Partenariat Transpacifique – qui était aussi la ligne retenue par Obama et avec laquelle Donald Trump a complètement rompu », analyse Guibourg Delamotte, de l’INALCO4. N’ayant pas réellement le choix, Tôkyô s’est engagé dans cet accord bilatéral qui permet de freiner les risques d’une augmentation des droits de douane dans le secteur automobile.

En effet, les deux parties s’étaient également engagées en septembre à « [s’abstenir] de prendre des mesures contraires à l’esprit de cette déclaration commune au cours de ces consultations »5. Les États-Unis représentent un marché clé pour l’archipel. Une augmentation des droits de douane impacterait le prix pour le consommateur et aurait ainsi des conséquences néfastes pour les exportations japonaises. L’augmentation des tarifs douaniers constitue une préoccupation commune entre le Japon et l’Union européenne, qui elle se montre plus ferme envers Washington et avec qui les négociations sont plus ardues.

Perspectives :

  • Le communiqué commun à l’issue de la rencontre de septembre 2018 indiquait que concernant l’accès au marché automobile, l’accord serait conçu afin de favoriser les emplois américains dans ce secteur.
  • En parallèle, il était également déclaré que le Japon n’irait pas au-delà des avantages consentis au sein du TPP et du JEFTA sur les produits agricoles – le second secteur clé dans les relations commerciales nippo-américaines. Ce dernier point explique en partie pourquoi Shinzô Abe s’est attelé à conclure les deux importants accords commerciaux que sont le TPP et le JEFTA avant d’entamer ces négociations avec Washington.
  • Durant la visite de Donald Trump, les questions de sécurité ont été également abordées. Les deux pays leaders ont affiché une ligne commune renouvelée sur le dossier nord-coréen, tandis que Shinzô Abe envisage de se rendre en Iran en juin, Iran avec lequel le Japon a conservé des intérêts importants, afin de se poser en médiateur.
Sources
  1. The White House, President Trump Attends a Reception with Japanese Business Leaders, 25 mai 2019.
  2. United States Census Bureau, Foreign Trade, Trade in goods with Japan.
  3. The White House, Remarks by President Trump and Prime Minister Abe of Japan in Joint Press Conference, 27 mai 2019.
  4. Intervention de Guibourg Delamotte sur RFI, 26 mai 2019.
  5. Japan-U.S. Summit meeting, Joint statement of the United States and Japan, Ministry of Foreign Affairs of Japan, 26 septembre 2018.