Bucarest. Bien que la Roumanie préside actuellement le Conseil de l’Union, la relation entre Bruxelles et Bucarest s’est rapidement détérioré. Le 16 avril, la Commission a envoyé un dernier avertissement avant des sanctions pour cause de violation des principes de l’Etat de droit. La commissaire européenne à la justice Vera Jourova a déclaré aux parlementaires européens : « La Roumanie doit rapidement accomplir des actes concrets »1.

La colère de la Commission est due à la tentative du gouvernement roumain de bloquer la nomination de la juge Laura Codruta Kovesi, ancienne présidente de la délégation anticorruption (2013-2018), qui avait notamment enquêté sur les abus présumés de fonds européens dans le pays. Kovesi, candidate favorite de la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen, est l’objet d’une campagne des députés européens de la majorité au pouvoir en Roumanie, qui l’accusent d’abus de pouvoir, de corruption et de faux témoignage2. Fin mars, la justice roumaine a même inculpé Mme Codruta Kovesi, entraînant le regain de tension qui se manifeste maintenant au niveau des 27. Le comportement récent du gouvernement de Bucarest explique ainsi une décision qui s’inscrit aussi dans un contexte de violations répétées des principes de l’Union (indépendance de la justice, lutte contre le clientélisme et la corruption) depuis la victoire des sociaux-démocrates aux législatives de 2016.

En outre, le Parti Socialiste Européen (PSE) a suspendu ses relations avec le Parti Social Démocrate (PSD) au pouvoir en Roumanie, a annoncé son président, l’ex-premier ministre bulgare Serguei Stanichev3. Les sociaux-démocrates roumains n’ont pas manqué de dénoncer la mesure, injuste à leurs yeux, et de demander à pouvoir s’expliquer. Les conditions de cette suspension, « pas de réunions, pas d’événements et pas d’activité » avec le PSD roumain, rappellent les mesures d’exclusion prises par le PPE à l’encontre d’Orban. La décision, à un mois des élections du Parlement européen, est cependant relativement plus succincte et par là plus clémente. Elle n’a pas non plus été soumise à un vote interne dans le parti, le débat étant reporté à juin prochain lors de la prochaine réunion formelle du parti.

Perspectives :

  • Le PSD est actuellement le premier parti roumain au Parlement européen, avec 10 députés, devant le parti National-Libéral de Ludovic Orban (8 sièges), affilié au PPE. Selon des sondages compilés par l’agrégateur Europe Elects, les deux partis seraient au coude à coude pour l’élection de mai4.
Sources
  1. RETTMANN Andrew, EU president Romania gets last warning on rule of law, EUObserver, 16 avril 2019.
  2. GURZU Anca et BAYER Lily, Parliament, governments deadlocked over EU prosecutor, Politico EU, 04 avril 2019.
  3. PAUN Carme et GURZU Anca, Romanian ruling party hits back at Socialists for freezing relations, Politico EU, 11 avril 2019.
  4. Europe Elects : Romania, consulté le 30 avril 2019.