Djouba. Le président du Soudan du Sud Salva Kiir Mayardit et son principal rival sur le plan militaire Riek Machar se sont rendus en Italie les 10 et 11 avril. La rencontre avec le Premier ministre italien Giuseppe Conte a été suivie par celle, symboliquement plus importante, avec le pape François, qui a affirmé la nécessité d’une reconstruction effective de l’État grâce à un processus d’intégration des factions les plus impliquées dans le conflit. Les médias internationaux ont diffusé les images de Bergoglio baisant les pieds des deux rivaux1. La guerre au Sud-Soudan, qui traverse une impasse, rejoint le débat sur le changement de régime à Khartoum, ce qui pose la question de savoir si le Soudan changera son approche à l’égard de Juba2.

Le conflit au Soudan du Sud, qui a éclaté en 2013, a entraîné la fragmentation des structures et de la souveraineté des États et la mort d’au moins 400 000 personnes, principalement des civils. En septembre 2018, un accord de paix a été signé à Khartoum, qui a cristallisé les fronts de la guerre, mettant l’accent sur la gestion de la crise humanitaire et la reconstruction des institutions nationales. La troïka formée par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Norvège, garants de l’accord de paix, s’est déclarée vivement préoccupée par la recrudescence de la violence dans certaines régions séparant le Soudan et le Soudan du Sud en février 2019, dénonçant la libération de milliers de réfugiés en République démocratique du Congo3. En effet, la situation ne semble pas normalisée : les processus de désarmement et de pacification s’ajoutent à un cadre dans lequel la privatisation de la violence, l’impossibilité de réintégrer les militants dans la société civile et un système de sécurité encore trop faible ne permettent pas une conciliation efficace de l’opposition avec le gouvernement de Djouba afin d’aller vers la constitution d’un gouvernement d’union nationale, objectif ultime des accords de Khartoum4.

Le changement de régime en cours au Soudan est l’une des principales préoccupations de Djouba et de la communauté internationale. La chute d’Omar el-Béchir et son incarcération ont laissé place à une situation de grande incertitude. Le Conseil militaire soudanais a clairement affirmé sa volonté de poursuivre ses efforts en faveur de la paix au Soudan du Sud5. Au-delà des déclarations, le moment d’impasse diplomatique, dû à la transition, engendre des incertitudes dans les relations futures avec les autres acteurs régionaux (notamment l’Ouganda, principal promoteur de l’indépendance du Soudan) et dans la gestion de la militarisation et de la circulation des armes, et ce malgré l’embargo des Nations unies. Parallèlement, le Soudan pourrait être limité dans ses relations avec les voisins de la Corne d’Afrique qui, grâce au Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, ont démontré leur proximité avec le Sud-Soudan en oeuvrant pour le retour des réfugiés à Djouba.

Perspectives :

  • Mai 2019 : expiration de l’embargo ONU / UE sur les armes imposé au Soudan du Sud.