Saint-Pétersbourg. C’était une première rencontre attendue par les médias suédois. Les 9 et 10 avril derniers, le premier ministre suédois Stefan Löfven a participé à la conférence du Forum international de l’Arctique à Saint-Pétersbourg, consacrée au développement durable dans la région arctique 1. Il en a profité pour rencontrer son homologue russe, le président Vladimir Poutine. Depuis son élection en 2014, la même année que l’annexion de la péninsule de Crimée par la Russie, les deux pays entretiennent des relations houleuses. Depuis près de cinq ans, les relations diplomatiques entre les deux États ont été réduites à leur strict minimum et les politiques de coopération qui étaient jusqu’alors en vigueur ont été gelées. La Suède soutient très largement les sanctions européennes imposées sur le grand voisin russe. Cette situation a été récemment déplorée par l’ambassadeur de Russie en Suède, Viktor Tatarintsev, pour qui la Suède conserve une « ligne dure » 2.

Le royaume scandinave fait figure d’exception dans la région. Ses voisins nordiques comme la Finlande, la Norvège ou encore le Danemark ont déjà repris un dialogue approfondi.

Le sommet arctique de la semaine dernière aura au moins permis d’initier un nouveau dialogue. Toutefois, le contenu de l’entretien est resté relativement classique. Les deux hommes ont abordé les problèmes environnementaux et climatiques et les problèmes commerciaux, mais également les actions de politique étrangère russe. Plusieurs ONG suédoises avaient demandé à M Löfven de défendre fermement la position suédoise sur les droits de l’homme en Russie en notamment les droits des LGBT, de dénoncer la violation du droit international en Ukraine, et l’annexion de la Crimée 3. Suite à cet entretien, les deux dirigeants ont indiqué vouloir reprendre leur coopération, notamment dans le domaine du commerce et des investissements.

Rien de nouveau en réalité dans cette rencontre, qui respecte toujours le principe diplomatique suédois dite des « deux voies » vis à vis de la Russie. Cette doctrine de la diplomatie suédoise mise en place en 2014 veut que la Suède maintienne sa condamnation des agissements russes, tout en discutant de questions essentielles pour la région baltique comme la zone arctique, la qualité de l’eau ou l’environnement. Une politique parfois critiquée en Suède comme à l’extérieur du pays, où l’on attaque souvent le comportement jugé agressif de l’armée russe en Scandinavie 4. Dans la région de la mer Baltique, entre autres, les avions de combat russes sont régulièrement interceptés par des chasseurs nationaux, et leurs transpondeurs sont désactivés.

Durant l’entretien, M Löfven est pourtant resté mesuré, soulignant face à son homologue un comportement inadéquat en matière de sécurité et de politique étrangère, mais insistant sur le besoin de développer des partenariats. Une phrase en forme de réponse au récent débat en Suède suite à la parution d’une tribune de l’ancien président géorgien Mikhail Saakachvili, dans laquelle il défend l’idée que la Scandinavie connaîtrait bientôt le sort de la Crimée. Une déclaration qualifiée de fantaisiste par la plupart des observateurs militaires de la zone 5. Rappelons qu’aux yeux de la Russie, la Suède reste un acteur mineur, même si elle compte toujours de nombreuses entreprises russes et une coopération en matière d’aide au développement.

Sources
  1. Statsministern deltar vid Internationellt Arktiskt Forum i S:t Petersburg, Regeringskansliet, 26 mars 2019.
  2. HULDSCHINER Henrik, Putins soldat : ”Alla som gett sig på oss har fått på truten”, Dagens Industri, 5 avril 2019.
  3. BENGTSSON Thomas, Inga upplösta knutar när Löfven mötte Putin, Kkuriren, 9 avril 2019.
  4. GUMMESSON Jonas., Bryr sig Vladimir Putin ens om vad Stefan Löfven säger ?, Svenska Dagbladet, 9 avril 2019.
  5. RAITASALO Jyri, Scandinavia Won’t Be Russia’s Next Target, Foreign Policy, 27 mars 2019.