Londres. À une dizaine de jours de l’échéance du 29 mars, date à laquelle le délai de deux ans stipulé par l’Article 50 du traité européen arrive à échéance, nul ne sait encore ce qu’il adviendra du Royaume-Uni. Theresa May compte soumettre pour une troisième fois au vote du Parlement le texte de l’accord de retrait tel qu’il a été négocié avec l’Union européenne (UE). Les votes de la semaine passée n’ont pas permis d’éclaircir la situation, mais deux signaux ont néanmoins été envoyés. Une majorité de 43 députés s’est exprimée contre l’hypothèse d’une sortie sans accord, et une majorité en faveur d’un report de la date du 29 mars.

Plusieurs scénarios sont encore possibles. Le report pourrait être de courte durée, moins de trois mois, et fixer au 30 juin la nouvelle date butoir. Le choix de cette date dépend des termes juridiques de la fin de la législature du parlement européen, fixée au 2 juillet. Au-delà de cette date, en vertu du traité de Lisbonne qui confère aux citoyens des pays membres de l’UE le droit fondamental d’être électeurs et éligibles, les Britanniques devraient être démocratiquement représentés et ainsi participer aux élections européennes1.

L’an passé, la perspective du départ annoncé du Royaume-Uni avait amené le Parlement européen à redistribuer une partie des sièges actuellement occupés par les eurodéputés britanniques. Sur les 73 sièges, 27 ont été redistribués entre quatorze États membres, les 46 restants étant supprimés de manière à constituer une réserve potentielle de sièges en cas de nouvel élargissement. Mais cette nouvelle répartition n’est censée entrer en vigueur que le jour où le Royaume-Uni aura quitté l’UE, pas avant.

Si un report de plus de trois mois devait être décidé, ce qui exige l’unanimité des Vingt-sept au Conseil européen, le droit fondamental de l’UE imposerait donc d’organiser des élections européennes au Royaume-Uni, entre le 23 et le 26 mai. Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, a rédigé un courrier à Donald Tusk, président du Conseil, affirmant que Londres serait juridiquement tenu à le faire2.

Dans son édition de samedi, The Guardian annonçait que le parti Conservateur a alerté ses eurodéputés en leur demandant de se préparer à cette éventualité si aucun accord n’est trouvé à Westminster3.

Pour Claude Moraes, député européen du Labour, il s’agit d’une diversion pour alimenter une discussion sans réel base juridique. « Ils savent que les Brexiters, les eurosceptiques et les Tories pensent que le Parlement européen est juste un fardeau, du gaspillage d’argent et à chaque fois qu’ils évoquent cette possibilité c’est comme un électrochoc sur un nerf découvert. Comme une décharge d’électricité à Frankenstein ».

Le très europhobe Nigel Farage, l’un des pères fondateurs du Brexit, est déjà en train d’organiser son nouveau parti et sa participation à d’éventuelles élections, « presque inévitables » selon lui.

Perspectives :

  • 19-20 mars : nouveau débat parlementaire à Westminster où un troisième vote sur l’Accord de retrait est en préparation.
  • 21-22 mars : Conseil européen à Bruxelles et position des Vingt-Sept sur une éventuelle demande de report
  • 29 mars : Date butoir pour la négociation d’un accord de retrait
  • 30 juin : Date butoir au-delà de laquelle la participation britannique aux élections européennes serait nécessaire.

Vera Marchand