Aix-la-Chapelle. Le 22 janvier 2019, le Traité sur la coopération et l’intégration franco-allemandes (2) scellait un nouvel accord bilatéral entre la République fédérale d’Allemagne et la République française.

Un des sept chapitres présents dans ce Traité concerne tout particulièrement la sphère économique. Dans ce dernier, ‘‘Harmonisation’’ et ‘‘coordination des politiques économiques’’ sont des leitmotivs.

Concrètement, il s’agit de créer une ‘‘zone économique franco-allemande dotée de règles communes’’ dont les ambitions et mécanismes d’harmonisation seraient favorisées par le ‘‘Conseil économique et financier franco-allemand’’, dans le domaine du droit des affaires comme dans la coordination des politiques économiques. Un espace économique, doté de règles fiscales, juridiques ou douanières communes et incitatives, couvrirait alors les deux pays. Par la suite, le ‘‘Conseil franco-allemand d’experts économiques’’, composé de 17 experts autonomes, sera chargé d’élaborer des recommandations sur les actions économiques à mener par les deux États.

Le volet économique prévoit également un accroissement de la ‘‘coopération dans le domaine de la recherche et de la transformation numérique’’, en particulier concernant l’intelligence artificielle et les technologies prometteuses. La création d’une trajectoire et d’un financement commun, envers des projets ou entreprises, va en effet dans ce sens.

Dans la plupart des économies développés du XXIe siècle, la prise de conscience des enjeux environnementaux a poussé les acteurs à mieux concilier croissance économique et respect écologique. Dès lors, la coopération franco-allemande 2.0 prolonge et renforce cette vision par la mise en commun de politiques de transformation de leurs économies, considérant ainsi la protection du climat et la lutte contre les changements climatiques comme incontournables. Cette détermination pourrait émerger dans le secteur privé comme public, dans le domaine ‘‘des infrastructures, des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétiques’’.

L’harmonisation économique voulu par ce Traité a en réalité des fondements profondément européens. Jouant le rôle de modèle à échelle réduite, l’accord vise en effet à être reproduit, à long terme, par l’ensemble des pays de l’Union afin de consolider la ‘‘convergence sociale et économique’’. La genèse des points clés de cette nouvelle Europe remonte bien plus loin que le discours prononcé par Emmanuel Macron à la Sorbonne. Valéry Giscard d’Estaing, dans son essai Europa – La dernière chance de l’Europe (1), montrait déjà une réelle volonté de convergence économique, diplomatique et militaire. L’accent y était en effet mis sur une harmonisation fiscale européenne, afin de propulser l’Europe à un stade supérieur. On remarque toutefois dans ce Traité l’absence de cette idée, bien que le refrain ‘‘convergence entre les deux États’’ laisse espérer une symétrie fiscale, tant pour les ménages que pour les entreprises.

Face à l’inconnue du Brexit, les œillères de la politique budgétaire italienne, la politique unilatérale de Donald Trump envers l’Iran, vis-à-vis de l’Europe ou encore face à la Chine, les enjeux du Traité n’ont jamais été aussi ambitieux, nécessaires et incertains à la fois. Dans cet océan trouble, émerge ainsi un navire franco-allemand qui tente de substituer l’union à l’instabilité.

Perspectives :

  • Mise en place de politiques économiques, juridiques, environnementales, diplomatiques et militaires communes entre l’Allemagne et la France.
  • En plus du premier examen sur l’avancé des mesures de convergences et d’harmonisation, fixé six mois après l’entrée en vigueur du Traité, les secrétaires généraux pour la coopération franco-allemande estimeront continuellement les progrès.
  • Symétrie des économies allemande et française et adoption de la même politique de convergence par d’autres pays membres de l’Union Européenne.

Sources :

  1. GISCARD D’ESTAING Valéry, Europa : La dernière chance de l’Europe, 2014.
  2. Ministère français des affaires étrangères, Traité de coopération franco-allemand d’Aix-la-Chapelle, 22 janvier 2019.

Pierre Rousseaux