Gdańsk. Le Grand Orchestre de la Charité de Noël est une fondation établie en Pologne depuis 27 ans et dirigée par son fondateur, Jerzy Owsiak. Son activitée la plus connue consiste en une série de concerts très médiatisés à vocation caritative. Cette fondation, par son activité, soutient la protection de la santé, principalement par l’achat de matériel spécialisé permettant de sauver des vies de nouveau-nés dans les hôpitaux polonais.

La figure de Jerzy Owsiak suscite la controverse depuis quelques années, principalement à droite. Il est devenu la cible d’un discours haineux qui s’est considérablement développé ces dernières années dans l’espace public polonais. Après la mort du maire de Gdańsk – lui aussi la cible de nombreux discours de haine -, Jerzy Owsiak a démissionné de la direction de sa fondation.

Gdańsk, située au nord de la Pologne, au bord de la mer Baltique, est la sixième ville la plus peuplée du pays. Paweł Adamowicz en était le maire depuis 20 ans. Il était avocat, engagé dans la politique locale depuis plusieurs années et l’un des fondateurs des structures régionales de la Plateforme civique (PO), le parti de centre-droite faisant partie des principaux opposants du parti Droit et Justice (PiS) au gouvernement. Il n’avait pas peur de débattre avec ses adversaires et passait beaucoup de temps dans les rues de Gdańsk, où il défendait son programme et ses idées auprès des habitants. En novembre 2018, il a remporté l’élection pour la cinquième fois, malgré sa brouille avec la Coalition Civique de Gdańsk, ce qui lui a valu de se présenter comme indépendant non seulement contre le candidat du PiS, mais également avec le fils du légendaire leader de Solidarność – Jarosław Wałęsa, soutenu par la Coalition civique.

« Gdańsk sera une ville ouverte et tolérante, et nous voulons qu’elle le reste pour toujours. Je vais essayer d’être le président de tous les habitants de Gdańsk, et de protéger la démocratie », a-t-il déclaré après les élections de 2018 (1). M. Adamowicz était en faveur de la diversité : il était à la tête de la Parade pour l’égalité, soutenant les mouvements LGBT, et l’un des initiateurs de la Déclaration de Gdańsk de juin 2017 réunissant les maires de 11 villes de l’Union des métropoles polonaises pour accueillir des immigrés et des réfugiés, ce qui allait clairement à l’encontre du discours gouvernemental anti-immigration. Après sa mort, l’ancien président polonais Lech Wałęsa a déclaré que Adamowicz aurait été le candidat idéal pour la présidence de la Pologne (2). Un succès qui a fait de lui une victime de la haine politique dans un pays très polarisé.

Après sa mort, la police a procédé à de nombreuses arrestations de personnes ayant multiplié les menaces envers des politiciens, principalement sur internet,. Jusqu’à présent, de tels actes avaient toujours été ignorés ou minimisés par les autorités de l’État : par exemple, un acte de décès envoyé à onze maires par la Jeunesse polonaise – une organisation nationaliste – a été jugé par un tribunal qui a conclu au bout d’un an et demi qu’il s’agissait d’un recours à la liberté d’expression et à une démarche acceptable dans le débat public (3).

Selon Michał Bilewicz, professeur à l’Université de Varsovie, il s’agit « d’un meurtre politique commis par un homme dont les émotions étaient déformées par le langage accru du débat politique en Pologne » (4). Il s’agit du deuxième meurtre politique de ces dernières années. En 2010, à Łódź, dans le bureau d’un député PiS, un homme armé a abattu son assistant, Marek Rosiak, en criant qu’il détestait Jarosław Kaczyński.

Beaucoup comparent l’assassinat d’Adamowicz à l’assassinat du premier président polonais, Gabriel Narutowicz, le 16 décembre 1922. les coups de feu avaient alors non seulement mis fin à la vie du premier président de la Deuxième République polonaise, mais avaient également créé une plaie déchirant le lien social, une plaie non cicatrisée qui a marqué les divisions entre Polonais dans l’entre-deux-guerres. Les divisions d’aujourd’hui dans la société polonaise vont-elles guérir ?

Le 18 janvier 2019, le cortège funèbre de Paweł Adamowicz a défilé dans les rues de Gdańsk. Le cercueil contenant le corps du maire a été solennellement transféré du Centre européen de solidarité à la basilique Sainte-Marie. Le cortège funèbre est passé par des lieux importants aux yeux de l’homme politique Les funérailles du maire ont eu lieu le 19 janvier 2019.

Perspectives :

  • Les mots de Paweł Adamowicz résonnent aujourd’hui tristement : « Que nous soyons conservateurs ou libéraux, ou peut-être socialistes, nous devrions nous souvenir du respect d’un autre être humain et du droit d’exprimer ses opinions et ses convictions – même si nous ne sommes pas d’accord avec eux ».

Sources :

  1. CHRZCZONOWICZ Magdalena, Paweł Adamowicz – z konserwatysty liberał. Jego Gdańsk ma być miastem bez nienawiści, Oko, 14 janvier 2019.
  2. DURMAN Natalia, Lech Wałęsa o Pawle Adamowiczu. « Nadawał się na prezydenta Polski », Wiadomosci, 15 janvier 2019.
  3. IKONOWICZ Karol, Bodnar po zabójstwie Adamowicza : Mamy problem z mową nienawiści, Rzeczpospolita, 18 janvier 2019.
  4. SAWKA Natalia, Ekspert od mowy nienawiści : Politycy, którzy szczuli na Owsiaka czy Adamowicza, dziś proszą, by nie mówić o zbrodni politycznej. To hipokryzja, Wyborcza, 15 janvier 2019.

Kinga Torbicka