Stockholm. Le ministre de la Défense suédois, Peter Hulltqvist, a déclaré le lundi 19 novembre que les forces armées suédoises se joindront à la France pour des tests de lancement de missiles à Vidsel, en Laponie. Loin d’être un événement ponctuel, cet entraînement conjoint doit déboucher sur la création d’un centre européen pour tester des drones et d’autres systèmes militaires avancés. La Slovaquie, l’Espagne et la Finlande devraient elles aussi y participer. La création de ce centre intégrera la politique plus ambitieuse des projets dits “Pesco” (1). Ce terme, qui désigne la coopération structurée permanente de l’Union pour la défense, consiste en 34 projets que les pays de l’Union peuvent rejoindre librement. Pesco a été en partie initiée à la suite du retrait annoncé de la Grande-Bretagne, qui a incité l’Allemagne et la France à faire pression pour une coopération militaire accrue. La Suède a intégré trois des projets initiaux lancés : la gestion des efforts en matière de santé, l’entraînement des forces armées et la mobilité militaire transfrontalière. Cependant, le ministère de la Défense a décliné sa participation à une formation européenne sur les services de renseignement militaires, dirigée par la Grèce en coopération avec l’OTAN (2). Ce refus d’une intégration militaire accrue au sein des forces européennes fait écho à l’opposition quasi-unanime de la classe politique suédois sur les déclarations de Macron soutenant l’idée d’une « armée européenne » (3).

Suite aux déclarations de Macron lors de son « itinérance mémorielle » pour célébrer les 100 ans de l’armistice de 1918, la Suède a de suite indiqué son refus de faire partie d’une éventuelle armée européenne. Les opposants à cette proposition, qui ont abondamment publié des tribunes dans la presse, pointent du doigt la paralysie d’une telle armée en cas de conflit, le fait que la défense relève de la compétence exclusive des États membres de l’Union et enfin le double emploi avec l’OTAN. Une position partagée par le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg, qui salue la volonté d’une coopération plus étroite entre les deux organisations, mais craint qu’il y ait double emploi. Une position qui pourrait être amenée à évoluer car la Suède souhaite négocier pour que des pays non membres de l’Union aient accès aux projets de la nouvelle coopération Pesco et au nouveau fonds de défense de l’Union. Le pays souhaite notamment que la Grande-Bretagne, qui a des intérêts dans l’industrie de l’armement suédoise, et la Norvège puissent bénéficier de cette politique (4). Par ailleurs, le ministère de la Défense suédois doit faire face à la hausse croissante des revendications des forces armées suédoises qui réclament une hausse de leur budget pour faire face aux nouveaux défis dans la zone nordique (5). La coopération européenne permettrait à la Suède de bénéficier d’équipements mis à disposition par les autres armées européennes.

*Errata corrige : l’introduction (‘En bref’) de cet article a été modifié dans quelques parties par rapport à la version précédente, qui nécessitait des clarifications sur la pensée de l’auteur. En particulier, ‘un signal d’une intention… prudence’ substitue ‘un signal contradictoire’, et ‘un pays… vocale’ substitue ‘majoritairement opposé’.

Sources :

  1. EU-projekt för vapentester i Lappland, Aftonbladet, 19 novembre 2018.
  2. KLEJA Monica, EU satsar på 17 nya försvarsprojekt – ska testa vapen i Sverige, 20 novembre 2018.
  3. ELFSTRÖM Dag, Dålig idé med EU-försvar, Smålandsposten, 14 novembre 2018.
  4. Svensk kamp för öppen försvarsfond i EU, Göteborgs-Posten, 20 novembre 2018.
  5. FRESKER Lars, Budgeten – katastrof för Sveriges försvar, Aftonbladet, 15 novembre 2018.

Thomas Gauchet