En bref — L’inauguration de la China International Import Expo (CIIE) à Shanghai lundi 5 novembre a été l’occasion pour Xi Jinping de réaffirmer dans un discours de 35 minutes son soutien à la mondialisation et au libre-échange. La création de cette Expo témoigne d’une volonté de la Chine de donner des gages de son ouverture. La déclaration du président chinois annonçant que les importations du pays s’élèveraient à près de 40 billions de dollars au cours des quinze prochaines années va dans le même sens.

Shanghai. C’est avec un discours dans lequel le mot “ouverture” est revenu pas moins de 52 fois que le président chinois a inauguré la première CIIE (5). Cet événement, rassemblant près de 3000 compagnies étrangères, est un moyen pour Pékin de montrer sa volonté d’ouvrir son économie. Promettant d’abaisser les droits de douane et de faire monter ses importations de manière significative, la Chine tente de prouver qu’elle n’est pas uniquement un grand exportateur (3).

À travers son discours, Xi Jinping s’est efforcé de rassurer vis-à-vis de l’état de santé de l’économie chinoise dans le contexte d’une guerre commerciale de plus en plus douloureuse avec les États-Unis, sans pour autant faire référence une seule fois à cette confrontation. Face aux incertitudes grandissantes, le président a comparé la Chine à un océan capable d’affronter les vents et d’endurer les tempêtes. Si cette allocution peut être interprétée comme une réaffirmation de la fermeté de Pékin vis-à-vis des États-Unis, elle peut également être comprise comme une tentative de calmer les inquiétudes provenant de l’intérieur du pays. En effet, le pessimisme semble gagner les Chinois tandis que les entreprises et les consommateurs subissent de plus en plus les effets des tarifs douaniers imposés par Washington (4).

Ensuite, il s’agit également de rassurer le monde à propos des dispositions de la Chine à garantir un meilleur accès à son marché pour les compagnies étrangères. En effet, face aux critiques récurrentes portant sur ses pratiques commerciales abusives et son manque de protection de la propriété intellectuelle des firmes étrangères, la mise en place de la CIIE constitue ainsi une occasion d’envoyer un signal fort au reste du monde. Ce discours, chantant la mondialisation et l’ouverture, se place ainsi dans la continuité de celui que Xi Jinping avait prononcé à Davos en janvier 2017 et brille par son contraste avec le mantra protectionniste et les attaques répétées au multilatéralisme du président américain.

Pourtant, certains pays commencent à montrer des signes d’impatience, en tête desquels les pays de l’Union. La Chambre de Commerce Européenne, a ainsi souligné que “la plupart du contenu du discours du président Xi Jinping […] faisait écho à ce qui avait été annoncé précédemment à Boao [forum économique tenu à Hainan] en avril 2018” (2). Les pays de l’Union ont envoyé quelque 500 entreprises pour l’événement, pourtant, face à des paroles qu’ils ont entendu à plusieurs reprises sans pour autant en ressentir les effets, leur confiance dans les promesses d’ouverture faites par la Chine s’érode. Au delà des contrats signés, qui revêtent plutôt une valeur symbolique, les pays européens espèrent surtout de cette Expo qu’elle conduise à une réforme réelle des conditions d’accès au marché chinois (1). Leurs attentes portent sur le fait d’obtenir des règles du jeu équitables plutôt que sur la réduction de l’excédent commercial. Ils semblent aujourd’hui déplorer aussi bien le manque de nouvelles idées que l’absence d’agenda pour faire respecter les engagement précédemment pris.

Perspectives :

  • Il est possible de se demander quels effets auront les déclarations de Xi Jinping sur la guerre commerciale en cours avec les États-Unis. Même si les propos du président chinois semblent aller dans le sens de la désescalade, il n’est pas sûr que les engagements annoncés suffisent à convaincre les Washington de la bonne volonté de Pékin. En effet, au delà d’un concurrent déloyal dans le jeu de la mondialisation, la Chine tend de plus en plus à représenter une menace stratégique globale pour les États-Unis. Il reste à voir si ces effets se feront ressentir lors de la rencontre entre les deux présidents prévue à l’occasion du G20 en Argentine à la fin du mois.
  • Il faudra également surveiller les impacts que pourraient avoir ces déclarations sur l’issue de la guerre économique du point de vue de l’Union, qui a fait les frais de la confrontation entre les deux plus grandes puissances économiques.
  • Si les droits de douanes imposés par Pékin baissent effectivement, on peut cependant se demander ce qu’il en sera des autres barrières non-douanières — des taxes anti-dumping aux retards dans les procédures douanières, en passant par des systèmes complexes de certification et d’étiquetage des produits.
  • Enfin, il apparaît que les engagements pris cette semaine par le président Xi pour les 15 prochaines années ne pourront être tenus que si la croissance chinoise reste forte.
Sources :

  1. Site de l’Ambassade de France à Pékin, EU expectations for the China International Import Expo (CIIE), 2 novembre 2018.
  2. Site de la Chambre de Commerce Européenne en Chine, European Chamber’s statement on President Xi’s speech at the CIIE, 5 novembre 2018.
  3. Site de la China International Import Expo, consulté le 5 novembre 2018.
  4. LENG Sydney, China’s import goal at risk if economy does not maintain strong growth, South China Morning Post, 6 novembre 2018.
  5. LO Kinling, Xi Jinping promises greater opening up at China International Import Expo, warns against winner-takes-all mentality, South China Morning Post,  5 novembre 2018.
Pénélope Bendrimia