Washington. Les États-Unis et la Russie ont entamé des pourparlers pour discuter de deux traités clés régissant les relations bilatérales dans le domaine nucléaire. Le premier est le traité sur les Forces Nucléaires Intermédiaires (Inf), signé en 1987 par Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev, qui vise à interdire le déploiement en Europe de missiles à moyenne portée afin de maintenir paradoxalement l’équilibre stratégique et nucléaire sur le Vieux Continent. Le deuxième est le soi-disant New Start, le traité sur la réduction des armes nucléaires intercontinentales signé par Barack Obama et Dmitri Medvedev en 2010.

Le traité Inf est, à l’heure actuelle, la question la plus épineuse. Washington accuse en effet ouvertement Moscou de violer à la fois l’esprit et le contenu de l’accord signé lors de la phase finale de la guerre froide. Des accusations que Kremlin non seulement rejette mais renverse, affirmant que ce sont les États-Unis qui violent effectivement le traité (1). L’enjeu, bien sûr, est la double diatribe du déploiement du bouclier antimissile de l’Otan, à son tour contrasté par l’installation de missiles à moyenne portée dans l’enclave russe de Kaliningrad. La question a également été soulevée récemment par la délégation américaine lors des travaux de la première commission de l’Assemblée générale chargée de promouvoir la sécurité dans le désarmement (4).

Quant au New Start, qui expirera en 2021, les deux parties ont jusqu’à présent la possibilité de discuter d’une prorogation, quelle que soit la résolution du nœud de l’Inf. Du côté russe, un intérêt à prolonger l’accord a déjà été suggéré, tandis que du côté américain, malgré un certain scepticisme de la part de l’administration actuelle et malgré les tensions dictées par le Russiagate, le Congrès lui-même – en particulier le Sénat en attente d’un renouvellement partiel – semble vouloir parvenir à un compromis (3).

Perspectives :

  • Les difficultés bilatérales entre Washington et Moscou sont désormais généralisées, bien que les dirigeants réciproques, Donald Trump et Vladimir Poutine, tentent de faire converger les priorités nationales uniques vers un intérêt commun, comme l’a démontré le sommet d’Helsinki en juillet dernier (2). La réglementation des armes nucléaires a toujours été au cœur des relations russo-américaines. Les deux pays sont conscients de la nécessité de parvenir à un compromis et, par conséquent, d’éviter tout incident trop nuisible à long terme.
  • Le débat sur les relations nucléaires entre les États-Unis et la Russie se réfère historiquement à l’époque du conflit bipolaire. Cependant, la confrontation entre les deux anciennes superpuissances a aujourd’hui perdu sa dimension idéologique ainsi que sa dimension universelle. Bien que la puissance américaine conserve un rôle mondial, jusqu’à présent, la puissance russe peut tout au plus être qualifiée de multirégionale. Bien qu’il semble donc anachronique de parler de “nouvelle” guerre froide, l’Europe continue certainement de considérer le maintien d’une relation détendue entre Moscou et Washington comme l’une de ses principales priorités stratégiques, pour éviter que le vieux continent soit considéré comme un champ de bataille, plus ou moins réel.

Sources :

  1. COOK Lorne, US NATO envoy warns Russia to halt new missile development, Defense News, 2 octobre 2018.
  2. FOY Henry, HALL Ben, MANSON Katrina, US-Russia tensions threaten nuclear arms curbs, says Moscow, 10 octobre 2018.
  3. REIF Kingston, Republican Senators Back New START, Arms Control Association, octobre 2018.
  4. WOOD Robert, Ambassadeur américain à la conférence sur le désarmement, Tweet du 9 octobre 2018.

Davide Borsani