Chemnitz. Ils avaient prévu de s’attaquer au Jour de l‘Unité allemande, la fête nationale célébrée le 3 octobre. Six néo-nazis du groupe “Revolution Chemnitz“, tous des hommes âgés de 20 à 30 ans, ont été arrêtés lundi 1er octobre à Chemnitz, la troisième ville de Saxe, et placés en détention provisoire (5). Une enquête a été ouverte par le parquet fédéral de Karlsruhe pour formation d‘une organisation terroriste.

Le cerveau de l’organisation serait un septième homme, en détention depuis deux semaines pour atteinte à l‘ordre public. De plus, certains des membres du groupe auraient participé le 14 septembre à une action violente contre des migrants et à des “contrôles d‘identité“ sauvages au cœur de Chemnitz. Ces agissements, commis au nom d’une “milice“ autoproclamée, et qui ont fait plusieurs blessés, ont été revendiqués comme un “coup d‘essai“. Plusieurs d’entre eux ont également participé à des manifestations radicales pendant l’été, à l‘occasion desquelles le chef du groupe s’est vu confisquer un gilet pare-couteau (2).

Difficile pour l’heure d‘évaluer leur dangerosité effective. Si la police n’a pas découvert d‘arme à feu lors de ses perquisitions, des conversations font état de la constitution d‘une cagnotte visant à en acquérir une. Du reste, le langage employé ne laisse pas la place au doute : pour “changer l’histoire de l‘Allemagne“, les sept hommes s’étaient dit résolus à “faire des victimes“. Leurs cibles : des étrangers, des politiques ou des journalistes (1).

Difficile également de saisir le contexte d’apparition du groupe. Le nom apparaît en 2013 sur Facebook, mais la cellule semble plus récente. Plusieurs de ses membres ont déjà été condamnés, et certains ont fait partie d‘organisations néonazies depuis lors interdites. Alors que le groupe dit “Freital“ a été condamné l‘an passé pour des attaques à l’explosif et que Beate Zschäpe est enfermée à perpétuité depuis juillet pour dix meurtres commis par son “Parti national-socialiste souterrain“ (NSU), les mémoires sont à vif (3), d’autant que “Révolution Chemnitz” qualifiait cette même NSU de “bande d’incapables”.

Si, comme le veulent les circonstances, le personnel politique a salué unanimement l’action des forces de police et appelé à la fermeté contre les terroristes (4), ces révélations apparaissent comme un désavœu pour l‘aile droite de la CDU/CSU, dont certains acteurs avaient minimisé l’acuité de la violence raciste lors des manifestations de ces derniers mois. La volonté désespérée de capitaliser sur ce thème sécuritaire et de faire taire les critiques pourrait expliquer la réaction étonnamment alarmiste du ministre de l’Intérieur Horst Seehofer (CSU), selon lequel “un attentat peut se produire à tout moment”. Les Verts parlent d’un “signal d‘alarme“, alors que certains dans tous les partis font le lien entre la libération de la parole radicale alimentée par l‘AfD (extrême-droite) et la recrudescence des violences. L’image des Länder de l’Est, souvent montrés du doigt comme des terreaux d‘extrémiste, est encore écornée ; une dégradation toujours plus propice aux populismes ?

Sources :

  1. KIEL Viola, Wer sind die Männer der Terrorgruppe « Revolution Chemnitz » ?, Die Zeit, 2 octobre 2018.
  2. MACHOWECZ Martin et al., Zum Umsturz bereit, Die Zeit, 3 octobre 2018.
  3. MOSHEIM Maik, Große Deutschland-Karte zeigt : Hier enttarnten die Behörden Neonazi-Gruppierungen, Focus, 2 octobre 2018.
  4. PUPPE Matthias, „Klares Zeichen“ – Reaktionen auf Festnahme der rechten Terrorzelle in Sachsen, Leipziger Volkszeitung, 1er octobre 2018.
  5. Sechs mutmaßliche Rechtsterroristen festgenommen, Die Zeit, 1er octobre 2018.